Après qu'Alex Browning a eu la vision d'un accident d'avion, lui et cinq de ses amis ne prennent pas le vol qui aurait du les emmener en France. L'avion décolle sans eux et explose au dessus du tarmac. Il n'y a aucun survivant. Quelques jours après, les six miraculés sont victimes d'accidents mystérieux...
DESTINATION FINALE surfe a priori sur la vague des Slashers pour adolescents balayant le cinéma américain au cours de la seconde moitié des années quatre-vingt-dix, à partir du triomphe de SCREAM.
Il s'agit de la première réalisation de James Wong pour le cinéma. Né à Hong Kong et élevé aux États Unis, il fait ses armes comme scénariste, notamment sur la série TV « AUX FRONTIÈRES DU RÉEL », dont il réalise un épisode. Puis, il participe à la conception de «MILLENNIUM (SERIE)», autre projet de Chris Carter, toujours pour la télévision.
James Wong se voit soumis un court traitement de film qu'il remanie en profondeur avec son complice Glen Morgan. Ils retirent toute trace d'un tueur présent physiquement, ce qui va faire toute l'originalité de DESTINATION FINALE. Le projet bascule dans le domaine du Slasher fantastique, alors que ses contemporains SCREAM, SOUVIENS-TOI... L'ÉTÉ DERNIER et autres URBAN LEGEND restent à l'écart du surnaturel.
Nous reconnaissons de jeunes comédiens habitués à l'horreur : Devon Sawa (LA MAIN QUI TUE), Ali Larter (LA MAISON DE L'HORREUR), Kerr Smith (LES VAMPIRES DU DÉSERT)... A leurs côtés, nous trouvons Seann William Scott, spécialisé dans les rôles d'ahuris depuis le succès de la comédie AMERICAN PIE. Nous notons encore la présence inquiétante de Tony Todd (CANDYMAN).
Dans DESTINATION FINALE, les six personnages principaux échappent à une mort certaine grâce à une prémonition surnaturelle. La Mort les rattrape en les soumettant à de nombreux accidents. Les objets du quotidien et le hasard se changent en armes redoutables au service du destin.
James Wong cultive ainsi l'originalité de son Slasher sans tueur. Si la Mort n'est pas incarnée, elle trouve un messager à travers un inquiétant croque-mort. Celui-ci révèle les règles du jeu aux survivants du "vol 180" (titre originellement prévu pour le film). Chaque être vivant a un destin écrit, voué à s'accomplir, et toute tentative d'ajourner sa dernière heure est vouée à l'échec.
James Wong et Glen Morgan proposent une œuvre fataliste, pessimiste et paranoïaque. A la manière de LA NUIT DES MASQUES de John Carpenter, dans lequel la silhouette anonyme de Michael Myers incarne déjà une faucheuse implacable, DESTINATION FINALE confronte les personnages à leur inéluctable fin. Comme le chevalier du SEPTIÈME SCEAU, Alex tente de repousser autant que possible l'inévitable échéance, l'ultime échec et mat d'une partie à sens unique.
DESTINATION FINALE trouve sa source dans un fameux épisode de «LA QUATRIÈME DIMENSION» : «Sans escale de la vie au trépas», dans lequel une danseuse, alarmée par des signes et des intuitions, renonce à monter dans un avion. Lequel explose en plein décollage. Une situation, et même une image de l'explosion, que nous retrouvons de façon quasi-identique dans DESTINATION FINALE.
Tout cela aurait pu donner lieu à un développement passionnant sur l'angoisse métaphysique et le vertige de la mort. Certaines séquences sont d'ailleurs de belles réussites. Les scènes de l'aéroport et son rêve prémonitoire sont bien amenés et efficaces. D'autres morts "accidentelles" sont solidement réalisées : de petits événements apparemment inoffensifs (des objets tombent, de la vodka se renverse près d'une flamme) se succèdent, jusqu'à former un piège fatal (l'enseignante dans sa cuisine, la tempête finale).
James Wong parsème son métrage de références à l'histoire du cinéma fantastique. Les personnages portent pour la plupart des noms évoquant des célébrités du genre : le réalisateur Tod Browning (DRACULA), le producteur Val Lewton (LA FÉLINE), l'acteur Max Schreck (NOSFERATU LE VAMPIRE)...
Ces références sont discrètes et ne parasitent pas le déroulement du récit. Elles ne sont pas gratuites puisqu'elles s'inscrivent dans un réseau de signes macabres qui se déploie autour d'Alex Browning, indiquant l'aspect sombre et inéluctable de son destin.
Bien qu'étant un Slasher sans tueur, DESTINATION FINALE reste un Slasher. Des adolescents dénués d'épaisseur ne sont présents que pour subir des morts violentes, sans que le spectateur ne s'en émeuve. Certains personnages sont construits à partir d'une psychologie adolescente légère.
Enfin, la conclusion du métrage, complètement abracadabrante et tirée par les cheveux, propose un épilogue ridicule se déroulant dans un Paris de pacotille. Ce dénouement idiot est imposée par la production qui trouve la fin originale trop pessimiste et pas assez spectaculaire (normalement, Alex mourrait en sauvant Claire, puis Claire accouchait peu après du fils d'Alex).
Dans la vague souvent insipide et superficielle des Néo-Slashers, DESTINATION FINALE tire pourtant son épingle du jeu, grâce à son originalité et à des séquence de suspense singulières et réussies.
Alors que la mode du Néo-Slasher s'essouffle, DESTINATION FINALE ramène un beau succès à sa compagnie de production New Line, devenue une filiale de Warner. Ce film donne lieu à cinq suites, s'étalant entre 2003 et 2025. Toutefois, elles vont se concentrer sur des séquences de morts spectaculaires, mêlant gore, suspense et cascades, au détriment des personnages et des intrigues, qui se contentent de décalquer sans créativité le film initial, la fraîcheur en moins.