David et Jack, deux touristes américains, s'égarent sur une lande de la campagne anglaise. Ils sont alors attaqués par un loup-garou. Jack est tué, mais David survit à ses blessures. Transporté à Londres, il apprend qu'il pourrait être devenu lui-même un loup-garou...
Bien qu'apparu dans des films d'horreur britanniques (LA NUIT DU LOUP-GAROU en 1961) ou américains (THE WEREWOLF OF WASHINGTON de 1973), le loup-garou n'a pas autant bénéficié du renouveau des mythes fantastiques lancé par la Hammer que le professeur Frankenstein ou le comte Dracula. Néanmoins, en Espagne, l'acteur Paul Naschy (Jacinto Molina de son vrai nom, ancien haltérophile) interprète plus d'une dizaine de fois le personnage du lycanthrope Waldemar Daninsky dans des films dont il est parfois le scénariste, ou même le réalisateur. Cette série, commencée par LES VAMPIRES DU DR DRACULA en 1968, culmine au cours des années soixante-dix.
Cette exception ibérique mise à part, le film de loup-garou est moribond durant cette décennie. Heureusement, deux films remarqués consacrés à ce mythe poilu sont réalisés par des Américains au tout début des années quatre-vingts : HURLEMENTS de Joe Dante et LE LOUP-GAROU DE LONDRES de John Landis.
John Landis commence sa carrière de réalisateur en bricolant SCHLOCK au cours de l'année 1971, dans lequel un monstre simiesque s'éprend d'une jeune fille aveugle. Il s'agit d'un hommage humoristique au KING KONG classique de 1933. Il lui faut attendre HAMBURGER FILM SANDWICH en 1977, écrit par Jim Abrahams, David Zucker et Jerry Zucker (les auteurs de Y A-T-IL UN PILOTE DANS L'AVION ?) pour diriger son second film. Cette œuvre à sketchs délirante devient un film-culte aux USA et lance sa carrière.
Vient ensuite une autre comédie très remarquée : AMERICAN COLLEGE de 1978, coécrite par Harold Ramis et interprétée par John Belushi (alors vedette du show télévisé comique «SATURDAY NIGHT LIVE»). Cette satire de la vie des universités américaines au cours des années soixante se base sur le magazine comique «American Lampoon».
Il s'agit du premier film estampillé par cette revue (sous le titre américain NATIONAL LAMPOON'S ANIMAL HOUSE) et il connaît un énorme succès. John Landis réalise ensuite, avec un très gros budget, LES BLUES BROTHERS de 1981, son film le plus célèbre, racontant une course-poursuite farfelue à travers les USA et rendant hommage à la musique noire américaine.
John Landis retourne ensuite à son goût pour le fantastique en écrivant et réalisant LE LOUP-GAROU DE LONDRES, projet plus modeste. Les rôles principaux y sont tenus par David Naughton et Griffin Dunne.
Les effets spéciaux, révolutionnaires pour leur époque, valent un Oscar à Rick Baker qui est ainsi catapulté comme un grand spécialiste du maquillage. Il sera encore oscarisé pour le Yéti de BIGFOOT ET LES HENDERSON en 1987 ; la transformation de Martin Landau en Bela Lugosi vieilli dans ED WOOD de 1994 ; la spectaculaire prise de poids d'Eddie Murphy dans LE PROFESSEUR FOLDINGUE de 1996 ; les extraterrestres de MEN IN BLACK de 1997 ; le maquillage porté par Jim Carrey dans LE GRINCH en 2000 ; et enfin à nouveau pour un lycanthrope pour THE WOLFMAN de 2010 avec Benicio Del Toro !
LE LOUP-GAROU DE LONDRES est écrit par John Landis dès 1969, avant même de réaliser SCHLOCK. Il se trouve alors en Yougoslavie où il participe au tournage du film de guerre hollywoodien DE L'OR POUR LES BRAVES avec Clint Eastwood et Donald Sutherland. Landis, Américain de Chicago, est alors confronté à des éléments du folklore d'Europe centrale qui lui inspirent l'idée du LOUP-GAROU DE LONDRES : un touriste américain isolé est victime d'une malédiction médiévale en pleine Grande-Bretagne.
Ce qui rappelle l'intrigue du LOUP-GAROU (1941) (auquel LE LOUP-GAROU DE LONDRES fait plusieurs fois références), dans lequel Lon Chaney Jr. jouait un jeune homme vivant aux USA qui retourne sur les terres de ses ancêtres, au pays de Galles, pour l'enterrement de son frère. Il y est mordu par un loup-garou et devient lycanthrope.
Cette opposition entre l'univers rationnel des Américains et les légendes fantastiques de l'Europe ancienne et rurale est encore soulignée dans LE LOUP-GAROU DE LONDRES par l'usage fréquent et inattendu dans la bande-son de chansons folk ou rock faisant référence à la lune (Van Morrisson, Sam Cooke).
Par de nombreux aspects, LE LOUP-GAROU DE LONDRES reste fidèle à l'esprit des films d'horreur traditionnels. La mythologie du loup-garou est présentée de manière à la fois sérieuse et innovante.
Ainsi, nous retrouvons la transmission de la lycanthropie par la morsure d'un loup-garou et les métamorphoses durant les nuits de pleine lune. Mais, en plus, les victimes dévorées par les loups-garous deviennent des âmes en peine, errant dans les limbes jusqu'à ce que le dernier porteur de la malédiction soit tué. Les scènes d'agression sont d'une violence impressionnante, voire franchement gore.
Le film est connu pour une fameuse métamorphose en loup-garou, élaborée par Rick Baker à l'aide de maquillages et d'effets mécaniques aujourd'hui encore spectaculaires. Cette séquence est traitée avec sérieux et efficacité. De magnifiques scènes oniriques s'avèrent originales, comme l'attaque de la famille juive de David par des loups-garous habillés en soldats SS. Ou les courses à travers une vaste forêt brumeuse filmées à la Steadicam
Dans la tradition des grands films de loup-garou comme LE LOUP-GAROU et LA NUIT DU LOUP-GAROU, LE LOUP-GAROU DE LONDRES souligne l'aspect tragique de cette malédiction. Elle transforme une personne pacifique et sympathique en une bête sanguinaire. Ainsi, le dénouement de LA NUIT DU LOUP-GAROU évoque celui émouvant de KING KONG.
Par certains aspects, John Landis propose une vision plus moderne du film de loup-garou. Les personnages principaux sont des jeunes gens décontractés qui pourraient sortir d'AMERICAN COLLEGE. L'intrigue se déroule en grande partie dans le Londres urbain des années quatre-vingts. Cette histoire refuse les clichés gothiques et s'inscrit dans un contexte réaliste. Des éléments de comédie sont présents, ce qui ne surprend pas au vu de la filmographie essentiellement comique de John Landis jusqu'alors.
L'humour se situe en grande partie dans les dialogues et rend les personnages plus vivants et attachants. Sa présence ne nuit que rarement à l'atmosphère inquiétante et fantastique du LOUP-GAROU DE LONDRES. Cet humour est même souvent noir et macabre (la rencontre entre David et les spectres sanglants de ses victimes dans un cinéma porno), ce qui participe à la tonalité désespérée caractéristique de cette œuvre
Une scène de carambolage spectaculaire, en plein cœur de Londres, rappelle LES BLUES BROTHERS. Mais si dans ce dernier film, les destructions des voitures de police sont un spectacle délirant et cinématographique, nous voyons dans LE LOUP-GAROU DE LONDRES de nombreux passants et automobilistes se faire écraser ou tuer dans cet accident effroyable et glaçant.
Au milieu du film, des séquences retracent la romance entre David et son infirmière. Si elles rendent les personnages sympathiques, elles ralentissent un peu le récit. De même, le casting manque de personnalité. Heureusement, la réalisation extrêmement dynamique de John Landis est toujours présente et imprime au LOUP-GAROU DE LONDRES un rythme suffisamment efficace pour ne jamais laisser l'ennui s'installer réellement.
LE LOUP-GAROU DE LONDRES est un mélange réussi et unique entre un cinéma d'épouvante tragique et des séquences d'humour souvent macabres et pessimistes. Tout comme HURLEMENTS, LE LOUP-GAROU DE LONDRES connaît un très gros succès, ce qui entraîne la réalisation de plusieurs films de loup-garou dans les années suivantes : LA COMPAGNIE DES LOUPS de Neil Jordan et PEUR BLEUE de Daniel Attias, d'après un livre de Stephen King, par exemple.
John Landis prévoit une suite au LOUP-GAROU DE LONDRES appelée AN AMERICAN WEREWOLF IN PARIS. Mais le projet est jugé trop onéreux par les producteurs. Finalement, cette suite (LE LOUP-GAROU DE PARIS) n'est réalisée que beaucoup plus tard, en 1997, par Anthony Waller, et elle n'aura que peu de rapport avec le projet prévu par John Landis.
Après LE LOUP-GAROU DE LONDRES, John Landis revient à la comédie avec UN FAUTEUIL POUR DEUX, encore un gros succès, qui confirme la renommée d'Eddie Murphy après son rôle dans 48 HEURES. En 1983, John Landis revient au fantastique, d'abord en réalisant le spectaculaire et célébrissime clip/court-métrage de la chanson THRILLER de Michael Jackson. Puis en participant à l'anthologie LA QUATRIÈME DIMENSION produite par Steven Spielberg et inspirée par la série télévisée du même nom.