Pour le cinéma, le britannique Harry Bromley Davenport commence sa carrière de metteur en scène par une toute petite production nommée WHISPERS OF FEAR. Puis il décide de réaliser un film de science-fiction dont l'idée lui est apportée par RENCONTRES DU TROISIEME TYPE, lequel traitait, rappelons-le, d'enlèvements d'êtres humains par des extraterrestres. Il décide d'en donner une version plus horrifique, en cherchant à comprendre ce qui peut bien arriver aux personnes kidnappées par des êtres d'outre-espace. Il s'associe alors avec le producteur anglais Mark Forstater, avec lequel il contacte la compagnie américaine New Line, un tout petit studio indépendant qui se met justement au cinéma fantastique avec le slasher ALONE IN THE DARK (titre vidéo) de Jack Sholder. Cette compagnie n'avait pas encore produit LES GRIFFES DE LA NUIT ou LE SEIGNEUR DES ANNEAUX.
Robert Shaye, directeur de ce studio, finance alors le film et fait venir Davenport aux Etats Unis pour écrire le scénario. Scénario qui connaît de nombreuses retouches et modifications… XTRO se tourne en Grande-Bretagne, avec peu de moyens et des acteurs pour ainsi dire inconnus. Signalons tout de même la présence, dans le rôle de la mère du petit Tony, de Bernice Stegers, actrice qui tint le rôle principal dans BAISER MACABRE, premier long métrage de Lamberto Bava.
Après la disparition de son père, le petit Terry proclame à qui veut bien l'entendre qu'il l'a vu se faire emporter par une lumière dans le ciel. Rachel, sa mère, et son entourage pensent plus pragmatiquement que Sam a simplement abandonné sa famille sans laisser de trace. Pourtant, trois ans plus tard, Sam réapparaît, et il n'a plus aucun souvenir de ce qui lui est arrivé durant tout ce temps. Mais Rachel a refait sa vie avec un photographe et, qui plus est, le comportement de Sam se montre par moment bien inquiétant…
Au vu de ce résumé, XTRO pourrait passer pour un sympathique drame de science-fiction, une histoire fantastique assez inoffensive dans la tradition de RENCONTRES DU TROISIEME TYPE ou de E.T.. Pourtant, il s'en distingue en s'orientant très nettement vers l'horreur. La réapparition de Sam sur Terre donne lieu à des séquences peu ragoûtantes. Un quadrupède extraterrestre arrive sur notre planète, s'introduit dans la maison d'une jeune femme, colle sur la bouche de cette pauvre victime un appendice visqueux se terminant en ventouse, et lui injecte ainsi dans le corps un produit qu'on devine ignoble ! La jeune femme grossit rapidement et démesurément jusqu'à accoucher… d'un adulte, Sam en personne !
Semblant brasser des éléments de la science-fiction des années cinquante, dans la tradition de L'INVASIONS DES PROFANATEURS DE SEPULTURES ou des aventures british du professeur Quatermass, XTRO se voit rehausser d'effets gore très correctement exécutés, lesquels ne sont pas sans rappeler du Cronenberg de la même époque.
Voici pour l'ambiance horrifique de cet XTRO. Malheureusement, quand il s'agit de narrer son histoire, ce long métrage se montre moins constant. Que ce soit du temps de la sortie du film ou aujourd'hui, Harry Bromley Davenport ne s'en est jamais caché : son film a été écrit et réécrit dans la plus parfaite confusion. Des séquences explicatives n'ont pas été tournées, des détails ont été improvisés durant les prises de vue sans souci de cohérence…
XTRO devient alors un fourre-tout, passant d'une science-fiction assez classique à des délires frisant la poésie, comme lorsque le petit Terry, désormais doué de pouvoirs surnaturels, donne vie à ses jouets, lesquels vont l'aider à se venger de ses ennemis. XTRO se disperse fréquemment, part dans tous les sens et se montre parfois longuet. Mais il lui arrive de proposer des séquences inoubliables et inventives : l'accouchement, l'attaque du Big Jim grandeur nature, Sam se nourrissant d'oeufs de serpents, etc.
XTRO s'est vu conçu avec peu de moyens. Sa photographie ingrate et sa musique horripilante sont là pour en témoigner. Pourtant, malgré son caractère bien inégal, il marque le spectateur par son ambiance malsaine, ainsi que par son approche assez particulière d'une histoire de famille définitivement hors du commun. A sa sortie, il connaît en tout cas, un gentil succès, et gagne même le Grand Prix du Festival du Film Fantastique de Paris en 1983. Harry Bromley Davenport lui donnera donc une suite nommée XTRO II, sept ans plus tard, tournée cette fois au Canada.
XTRO s'était fait longtemps attendre en DVD, si l'on oublie un disque allemand médiocre et dénué de version originale anglaise. Il est finalement arrivé chez l'éditeur américain Image Entertainment en 2005, dans une édition zone 1 et NTSC que nous allons chroniquer ici.
Ce disque nous propose XTRO dans une copie au format 1.85, et avec un télécinéma 16/9. Il ne faut pas vous attendre pour autant à des miracles. La photographie est terne, l'image manque souvent de piqué, quand elle ne paraît pas charbonneuse, trop sombre. Mais tout cela est en fait dû aux conditions de création du film, et non à des négligences dans la conception de ce disque. Signalons aussi que quelques petites saletés et points blancs viennent de temps en temps nous rappeler l'âge du film. Une copie somme toute correcte donc, mais il ne faut pas se faire d'illusion : XTRO n'a jamais eu l'apparence d'une superproduction tourné en 70mm, et ce DVD restitue ses travers sans tricher. Pour la bande sonore, il y a seulement une piste mono codée sur deux canaux, de qualité tout à fait satisfaisante.
Ce disque de XTRO se distingue aussi par quelques suppléments sympathiques. Le premier d'entre eux est la "fin alternative" du film, laquelle est en fait la fin originelle de XTRO telle que l'avait prévue Harry Bromley Davenport. Mais Robert Shaye ne l'aimait pas, jugeant qu'il était nécessaire de proposer un dénouement plus choc, plus gore. Après les premières projections du film à New York, il fit donc enlever la fin originale et la remplaça par celles que nous connaissons et qui se trouve sur le montage du film proposé sur le DVD. Cette seconde fin est hélas bien moins logique, et bien mois réussie, que celle prévue initialement par le metteur en scène. A titre de comparaison, le disque nous propose, en bonus séparé, la fin "gore" telle que nous la trouvons dans le film, sous l'intitulé un peu mensonger de "Fin alternative 2"
Nous trouvons aussi une toute petite scène coupée de 37 secondes, sans sa piste son, nous montrant Terry joué dans la cuisine de l'appartement familial. Un supplément pour le moins anecdotique, donc. Beaucoup plus intéressante est la featurette "Xtro exposed" dans laquelle Harry Bromley Davenport, récemment interviewé, revient, durant dix-huit minutes et avec beaucoup d'humour, sur la production des trois volets de la série XTRO. On y apprendra notamment que son préféré est XTRO III !
Enfin, il est possible de consulter la bande-annonce américaine d'époque, ainsi qu'une galerie réunissant des photos d'exploitation venant de pays anglophones et de France, des photographies de tournage et de plateau, des affiches, des pochettes de disques et des jaquettes vidéos dédiées à XTRO.
Bref, l'amateur d'import pourra consulter avec plaisir cette petite édition bien faite de XTRO, pour peu qu'il maîtrise la langue de Shakespeare. A noter que ce disque est disponible individuellement, ou dans un pack incluant, en plus, XTRO II.