Suite à un incident inexpliqué dans le sous-sol de la maison survenu lors de sa petite enfance, Ryan souffre d'une peur aiguë du noir. Arrivé à l'âge de douze ans, son entourage commence à perdre patience avec lui, le psy n'étant d'aucune aide non plus. Mais Ryan sait que les monstres existent, il les combat toutes les nuits. Laissés seuls un soir par leurs parents, Ryan et son grand frère Dale vont devoir les affronter une fois pour toutes.
Le troisième film de K.C. Bascombe (TUEUSE D'ELITE, JEUX DANGEREUX, policiers sortis directement en vidéo en France) prend comme point de départ une idée de base ayant déjà fait ses preuves dans de nombreux métrages. A l'époque de sa sortie, on en trouvait deux autres dans le même registre, l'injustement critiqué NUITS DE TERREUR (2003) et le plutôt moyen LE PEUPLE DES TENEBRES (2002) avec lequel il partage davantage de similitudes. Auparavant, il faut remonter jusqu'aux GRIFFES DE LA NUIT (1984) et son croque-mitaine meurtrier aux griffes d'acier, qui exploite ces terreurs irrationnelles et nocturnes de façon autrement plus efficace.
Le croque-mitaine, nous le connaissons tous, c'est une croyance vieille comme le monde. Quel enfant ne s'est jamais endormi sous la couette parce qu'il ne fallait surtout pas laisser dépasser un seul petit bout de son corps ? Selon les diverses populations, il prend des formes bien différentes. En Asie, par exemple, on le trouve sous l'apparence d'une sorcière aux longs cheveux et aux dents acérées. Dans les pays nordiques, il était le compagnon du Père Noël, faisant figure de versant diabolique du bonhomme généreux aimant les enfants. Mais tout ceci n'a souvent aucune incidence sur les petits dans l'imaginaire desquels il incarne les peurs les plus profondes. Cette idée est bien représentée dans le film par des hommes effrayants, des chiens agressifs ou une invasion d'insectes.
La scène d'introduction nous plonge d'emblée dans le sentiment d'effroi d'un enfant seul dans le noir, et laisse présager un très bon moment pour la suite. Des enfants envoient leur balle de baseball dans une cave par mégarde. Le nouveau du groupe est désigné pour la récupérer et ses amis l'enferment pour lui faire une blague. La claustrophobie s'installe immédiatement dans cet endroit poussiéreux où les ombres prennent vie. Le malheureux se fait engloutir par les ténèbres et on n'en saura pas plus, instaurant une certaine appréhension chez le spectateur. Mais une fois passée, la tension retombe vite et peine à se relever durant le reste du métrage.
En sa défense, le réalisateur n'a pas été gratifié d'un scénario des plus originaux (on se demande d'ailleurs pourquoi il n'est pas crédité à l'écran alors qu'il a participé à son écriture). Les clichés s'empilent jusqu'à nous faire soupirer haut et fort : Ryan a peur et cherche le réconfort chez un père plus préoccupé par sa cravate et les fesses de la copine de Dale. Les parents ne croient pas un seul mot de ce qu'il raconte, sauf la mère qui hésite un peu, sans doute par instinct protecteur maternel. Instinct qui ne l'empêchera pas de passer une soirée à l'extérieur avec son mari, durant un orage qui risque de faire sauter les plombs de la maison ou couper le téléphone. Ryan voit quelque chose dans son placard mais quand son frère vérifie, il n'y a plus rien. La télé passe toute seule des dessins animés à EVIL DEAD (la deuxième référence sera un mouvement de caméra qui débute à l'envers puis revient à l'endroit). Etc.
Ne tombons pas dans la mesquinerie gratuite, le film présente quand même quelques côtés positifs et agréables. Bien que ce soit ses premier pas dans l'horreur, Bascombe s'en sort plutôt bien avec de nombreuses prises de vue subjectives où l'on frissonne en imaginant les deux frères épiés par ce qui vit dans les ombres. Ryan présente une méchante griffure sur l'épaule qui éveillerait l'attention de n'importe quel parent un tant soit peu attentif. L'absence d'explication ne manque pas de titiller nos propres terreurs enfouies. Les objets de la maison prennent des formes menaçantes dans l'obscurité et en deviennent même dangereuses. La mère de Ryan crée des sculptures en ferraille qu'elle expose dans le salon et qui n'en manquent pas de devenir menaçante. Cependant, ces idées ne sont pas exploitées davantage ou alors juste répétées plus loin à l'identique, ce qui diminue fortement leur impact.
Les scènes de (petite) frousse sont accompagnées d'une musique d'ambiance assez angoissante pour provoquer des sentiments chez le spectateur. Mais encore une fois, le bruit de la pluie incessante ou l'incroyable précision de l'orage au moments opportuns ferait presque rire. Les éclairs illuminent pendant une fraction de seconde quelque chose dans un placard ou au fond du couloir. Le tonnerre gronde bruyamment de concert avec le grésillement des ampoules. Mais peu importe l'usure de ce cliché, avec une petite dose de bonne volonté, cela fonctionne malgré tout.
L'une des réussites provient des effets spéciaux. Les ombres qui grandissent et avancent comme des tentacules sont très convaincantes, ainsi que les visages qui sortent du mur (à la façon des GRIFFES DE LA NUIT, encore, ou bien d'un FANTOMES CONTRE FANTOMES), sans oublier l'apparition physique des peurs de Ryan. Des êtres zombiesques, grands, minces, vêtus de longues capes noires et d'un chapeau dissimulant un visage effrayant que l'on ne verra malheureusement pas assez. Bien que Bascombe ait gardé la surprise pour ne rien gâcher trop tôt, leur entrée en scène est presque gâchée par une musique rock franchement risible. A l'instar de ce plombage sonore, les cafards en CGI aplatis et aux mouvements trop fluides, ou l'éclat de lumière qui signale la disparition momentanée d'un habitant des ombres sont à ranger dans le même panier.
Le film navigue sans cesse entre des bonnes idées et une platitude exemplaire, tel que l'on finit par ne plus savoir où se placer. Un exemple parfait concerne les acteurs. Aucun n'a de véritable substance, il faut bien le dire. Mais certains s'en sortent quand même pas trop mal, comme le père de Ryan, qui accorde du temps à son fils même s'il essaie de le convaincre du non fondé de ses peurs. Dale, le grand frère, est campé par Kevin Zegers qui jouait le rôle principal dans KOMODO et que l'on verra par la suite dans DETOUR MORTEL ou L'ARMEE DES MORTS. C'est un ado typique, préoccupé par sa vie faite de musique et la nouvelle présence de Heather. Malgré un physique de beau gosse, il fait passer de façon crédible une certaine tendresse et beaucoup de patience envers son petit frère. Son scepticisme sera bien sûr largement secoué au cours de la soirée ce qui donnera également lieu au clin d'oeil final.
Le rôle de Ryan incombe à Jesse James que l'on aura vu auparavant dans l'excellent L'EFFET PAPILLON. Mais ici, il n'est pas convaincant du tout en enfant supposé terrifié par le noir. Ses réactions sonnent faux, on le dirait presque intimidé de devoir exprimer une peur considérée comme n'appartenant qu'aux enfants en bas âge. Les quelques illusions d'optique traduisent son effroi bien mieux que lui-même. Sa présence tiède n'est cependant rien en comparaison avec la jolie jeune fille de service, Heather. C'est son frère que l'on découvre dans la scène d'introduction et il faut voir le passage où elle en parle pour le croire. Elle passe du rire aux larmes et de nouveau au rire en un clin d'oeil, les émotions défilent de façon si peu crédible que cela en devient embarrassant. On revient en arrière en se disant qu'on aurait accéléré sans faire exprès mais non, cela ne dure pas plus longtemps.
Le film est présenté dans un format 16/9 avec un cadrage 1.77 (compatible 4/3). Il bénéficie d'un transfert de bonne facture et l'image ne présente pas de défauts notables. Les couleurs sont toutefois un tantinet fades mais le contraste est très satisfaisant surtout que la majorité du film se déroule dans le noir. A cette fin, un grand travail a été fait au niveau des éclairages qui se résument à la lumière ambiante et feutrée des lampes ou ampoules nues.
Le son est proposé uniquement en stéréo, tant pour le doublage français que pour la version originale où les sous-titres sont imposés. Les détails des bruitages ambiants sont bien rendus et n'étouffent pas les dialogues, comme c'est parfois le cas. Aucun parasitage n'est à déplorer et l'on regrette qu'aucune piste 5.1 ne soit pas disponible !
Les seuls suppléments présents sont une bande annonce sous titrée très prometteuse, et les filmographies de Jesse James et Kevin Zegers dont le nom est mal orthographié sur le menu. Un commentaire audio ou une interview du réalisateur aurait été le bienvenu pour en savoir un peu plus sur les éventuelles difficultés ou ambitions de ce premier métrage horrifique de la part de K.C. Bascombe.
Au final, FEAR OF THE DARK n'atteint jamais le niveau de terreur viscérale qu'il vise clairement dans les ténébres mais reste toutefois un petit film d'horreur très sympathique.