Splinter : Interview Toby Wilkins

2. Partie 2


Pourquoi avoir choisi de réaliser SPLINTER, oeuvre basée sur un scénario original de Ian Shorr ? La réécriture fut-elle importante ?

Intitulé TOOTH AND NAIL, le script original était effectivement de Ian Shorr. Il évoquait pour moi les films de genre des années 70. Ceux avec lesquels j'ai grandi et que j'avais adoré comme THE THING, ALIEN ou encore ZOMBIE. D'un point de vue basique, ce sont tous des films siége, où les protagonistes sont assiégés. J'aimais beaucoup les personnages et le décor de l'intrigue mais je désirais réinterpréter la menace afin d'y introduire l'idée d'une créature sur laquelle j'avais bossé avec un ami pendant quelques temps. Le script et ladite créature coincidaient parfaitement. Le producteur Kai Barry a repris l'écriture au début de la pré-production. Nous avons alors beaucoup travaillé pour tout concilier et ce jusqu'au premier jour du tournage.

Les trois personnages principaux sont vraiment bien définis en ce qu'ils ne versent pas dans la caricature. Était-ce intentionnel ou naturel ?

C'est vraiment très important pour moi que les personnages soient intéressants, qu'ils ressemblent à de véritables personnes et non aux protagonistes stéréotypés qui hantent traditionnellement les films d'horreur à petit budget. Je savais que j'allais amener mes spectateurs à partager un long moment avec les héros dans un lieu confiné. Il fallait donc qu'on puisse rapidement s'attacher à eux et qu'on les apprécie autant pour leurs défauts que pour leurs qualités.


Fut-il facile de trouver les trois acteurs principaux ? Ces derniers servent très bien leurs rôles respectifs et je me demandais si cela s'était effectué naturellement ou de manière problématique ?

Shea Whigham, qui joue Dennis, fut le premier à nous rejoindre. Il est arrivé très tôt durant la genèse du film et a d'emblée imposé un excellent niveau quant à l'interprétation. . Je pense que cela a tout de suite changé la perception des gens sur ce que l'on essayait de faire avec ce film. Shea a une filmographie composée de pas mal de grands films indépendants et il exprime tout de suite sa passion pour un bon scénario et un rôle digne d'intérêt. A partir du moment où Shea a été impliqué, nous avons commencé à auditionner des comédiens pour les autres personnages. Il s'avère que Paulo Costanzo et Jill Wagner ont passé leur audition le même jour en se donnant la réplique. J'ai tout de suite su que nous avions notre distribution ! Nous avons vraiment été chanceux de bénéficier d'acteurs aussi talentueux pour notre métrage.

Quelles sont les références, s'il y en a dans votre film ? Car lorsque nous l'avons vue, l'oeuvre nous a semblé mêler des éléments inspirés de THE THING, RE-ANIMATOR 2, TREMORS 2… De plus, pour moi, le métrage adopte l'approche sympathique d'un cinéma d'horreur dans la veine des TREMORS

C'est un grand compliment, merci. Nous voulions réaliser une oeuvre qui soit divertissante et intense… Un retour aux films d'horreur qui ont contribué à me faire aimer le genre. Le film brasse une poignée d'influences générales qui vont de ALIEN, THE THING, ZOMBIE… Peut être même TREMORS mais de manière inconsciente car j'ai effectivement beaucoup apprécié ce film lorsque j'étais jeune. Mais il y a d'autres séquences spécifiques qui rendent hommage à des classiques comme LA BETE AUX CINQ DOIGTS ou bien qui s'inspirent de productions plus récentes telle que 28 JOURS PLUS TARD. Mais plus que tout, j'ai essayé de faire un film enthousiasmant et amusant pour embarquer les spectateurs dans ce trip.


Vous avez travaillé sur des effets digitaux auparavant mais vous avez choisi de recourir ici a des effets spéciaux plus réels. Pourquoi ? Était-ce plus simple pour un film indépendant ou était-il plus difficile de ne pas se reposer sur des effets numériques pour la créature ?

A l'origine, je viens d'une branche d'effets spéciaux dont l'objectif premier consiste à se rendre "invisibles" pour mimer le réel. Je suis d'autant plus affligé par les effets numériques que l'on peut souvent voir dans les films et particulièrement quand il s'agit d'une créature. Déceler l'origine numérique de cette dernière ruine pour moi une oeuvre. Je savais donc dès le départ que nous ne pouvions pas nous contenter de créer la créature de SPLINTER en images de synthèse. En réalité, l'idée de cette créature m'attirait en ce qu'elle se compose juste de… personnes. Je veux dire de morceaux de personnes, d'être humains. De ses victimes précédentes quoi que ce puisse être… C'était assez simple à reproduire en utilisant des effets spéciaux traditionnels. Mon expérience m'a également appris qu'il vaut mieux tourner avec quelque chose de tangible plutôt qu'un concept immatériel, ceci concernant autant l'équipe technique que les acteurs. Et je savais, de plus, qu'il était possible de tout retoucher ou arranger en post-production. Ca, je pouvais le faire moi-même sans grever le budget du film. Le métrage comporte pourtant quelques petits effets visuels numériques, ceux qui consistent essentiellement à effacer des câbles, retirer les mains des techniciens actionnant la créature ou bien des ajouts ici ou là. Il y a peut être trois plans de la créature qui n'ont pas été réalisé directement sur le plateau de tournage.

Avez vous tourné dans une véritable station service ? Principalement de nuit ? Combien de temps a duré le tournage ?

Nous avons trouvé une station service abandonnée uniquement constituée de quatre murs et d'un petit bout de terrain vague sur le devant. L'équipe en charge des décors a effectué un excellent travail en transformant cela en une véritable station service avec les pompes, les présentoirs, les armoires réfrigérées, la nourriture… Tout ce que l'on trouve dans une vraie. Ils ont même construit la grande baie vitrée de la devanture, là où il n'y avait auparavant qu'un mur de béton. Vraiment incroyable, cette transformation est visible dans les suppléments du DVD et du Blu-ray (aux Etats-Unis). Nous avons tourné pendant vingt jour et, oui, quasiment tout a été filmé de nuit. Mais c'était l'été donc les nuits étaient plus courtes. Mon directeur de la photo s'est arrangé pour créer une sorte de nuit artificielle sur toute la partie avant de la station service même lorsque le soleil était levé.


Etant donné que le terme de "Serie B" est généralement vu de manière assez péjorative, est-ce que cela vous gêne si je vous dis que SPLINTER est une astucieuse "Série B" ?

J'imagine qu'il me faudrait au préalable connaître les oeuvres auxquelles vous faites ici référence. (rire). J'ai juste envie de réaliser des films divertissants, de raconter des histoires et faire mon travail du mieux possible. Si le script induit un "film de monstre" ou une "Série B", alors pas de problème ! Tant que l'on fait le meilleur métrage possible et que les gens apprécient le résultat, je suis content !

Quel type de films appréciez-vous et pourquoi ?

J'aime le cinéma, simplement. Je suis autant enthousiasmé par un petit film de vampire suédois comme MORSE que par IRON MAN ou STAR TREK. Et comme je suis originaire d'Europe, j'apprécie aussi énormément le cinéma français tel que 13 TZAMETI que j'ai vraiment beaucoup aimé lorsqu'il est passé à Sundance. Il en va de même du cinéma indépendant espagnol, genre TIME CRIMES. Je n'en ai jamais assez.

Est-ce qu'une suite de SPLINTER est prévue ?

J'aimerais en effet poursuivre l'aventure pour faire davantage découvrir la créature. De plus, cela permettrait d'exposer une contamination à plus grande échelle. Mais pour l'instant, nous devons patienter et on verra…

Avez-vous déjà des projets en vue ?

Avoir réalisé deux longs métrages, l'un à suite de l'autre fut une expérience un peu folle mais cela m'a permis d'avoir un peu de temps pour trouver d'autres projets. Je suis en discussion avec pas mal de personnes en ce moment. Cela va des thriller et films d'horreur dans le cadre de studios jusqu'à des films plus indépendants. Et, comme vous, tout le monde me demande quand SPLINTER 2 va se faire. Dans l'immédiat, il convient de patienter et voir ce qu'il va se produire.

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Dossier réalisé par
Christophe Lemonnier & Cécile Migeon
Remerciements
Toby Wilkins & Tristan Tramoni (CTV)