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Critique du film et du DVD Zone 0
LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS 1974

THE CARS THAT ATE PARIS 

De la seconde guerre mondiale à la fin des années 1960, le cinéma australien traverse une période sombre, où sa production nationale est très limitée. Mais, au début des années 1970, des mesures volontaristes sont prises, qui vont largement changer la donne. En 1970, l'Australian Film Development Corporation est créée par l'Etat afin d'aider à financer des productions nationales. De plus, une école de cinéma et de télévision est fondée. Cela va se traduire par l'apparition de nouveaux réalisateurs dans ce pays. Leurs films sont globalement peu rentables, mais ils vont finir par laisser une impression marquante à l'échelle internationale. Le film fantastique PIQUE-NIQUE A HANGING ROCK de Peter Weir, sorti en 1975, est le premier des titres ainsi financés à rapporter de l'argent, et il connaît une carrière internationale. Dès lors, le cinéma australien va montrer un penchant pour l'horreur, la science-fiction et l'insolite. Des auteurs comme Weir, George Miller (MAD MAX...) ou Phillip Noyce (CALME BLANC...) vont finir par se faire une place... sous le soleil hollywoodien, loin de la terre des kangourous !

Né à Sidney, Peter Weir commence à s'intéresser à la réalisation au milieu des années 1960, alors qu'il voyage en Europe. De retour en Australie, il commence par travailler à la télévision, puis oeuvre pour le Commonwealth Film Unit. Parmi les courts-métrages qu'il tourne, MICHAEL, segment du film à sketchs THREE TO GO, reçoit le Grand Prix de l'Australian Film Institute, Grand Prix que Weir récolte à nouveau pour son moyen-métrage suivant HOMESDALE, qui tend de plus en plus vers l'insolite. Logiquement, Peter Weir s'oriente vers la réalisation d'un long-métrage, LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS, titre pour lequel il bénéficie de l'aide de l'Australian Film Development Corporation. Parmi les comédiens, il recrute, pour le rôle du maire, John Meillon, un acteur à la carrière déjà assez fournie (on l'avait vu dans LA RANDONNÉE tourné en Australie par Nicolas Roeg). Arthur Waldo est incarné par Terry Camilleri, alors débutant, qui tiendra, par la suite, des seconds rôles à Hollywood. L'amateur de cinéma fantastique remarque surtout que l'idiot du village est interprété par Bruce Spence, qui joue Jedediah dans MAD MAX 2 et MAD MAX, AU-DELÀ DU DÔME DU TONNERRE.

Suite à un étrange accident de voiture, un jeune homme, Arthur Waldo, est recueilli dans la petite ville australienne de Paris. Mais cette communauté est pour le moins étrange. Tout semble tourner autour de l'automobile, et les pièces détachées de voitures sont même un moyen de troc courant. Enfin, les jeunes de la ville passent leurs journées à bricoler et à conduire des bolides bardés de pointes et de protections. Arthur tente de quitter Paris, mais on l'en empêche. Il comprend que les habitants de cette cité provoquent délibérément des accidents dans la région...

Difficilement classable, LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS emploie le ton d'une satire absurde, jouant sur le contraste démesuré entre ce que Paris prétend être et ce qu'elle est vraiment. Derrière une façade de petite bourgade paisible et respectable se cache une cité de pirates de la route, dont l'économie repose essentiellement sur le pillage et le meurtre. Quant Arthur cherche à quitter la cité, il se rend compte que ses habitants ne le laissent pas faire, et il se retrouve dans une situation de captivité qui ne dit pas son nom, comme le numéro 6 de la série LE PRISONNIER, dont le Village kafkaien a bien des points communs avec le Paris de Peter Weir. Les "citoyens" (dont la plupart ne nous sont désignés que par des intitulés liés à leur fonction "respectable" : le maire, le policier...) forment une communauté complètement délirante, alors qu'ils cherchent à donner d'eux-mêmes une image de normalité à laquelle ils ne correspondent guère.

En effet, toute l'économie de Paris fonctionne grâce à des accidents de voitures, provoqués par des pièges disposés à ses alentours. Les survivants sont pour la plupart lobotomisés, puis envoyés à l'asile local, tandis que leurs biens et les pièces détachées de leurs véhicules sont récupérés et monnayés par les habitants. Les carcasses inutiles sont abandonnées dans la campagne, où les jeunes les récupèrent pour bricoler leurs propres voitures. Cette société est envahie par l'automobile, et la violence routière y est une norme horrible, une folie banalisée et acceptée avec fatalité. Cette violence est alors le symptôme absurde d'un système où l'homme n'a plus aucun contrôle sur les machines et l'usage qu'il en fait. Cette vision pessimiste du phénomène automobile rapproche LES VOITURES QUI ONT TUE PARIS d'ASPHALTE de Denis Amar, qui décrit un grand départ en vacances sur les routes de France comme un carnage brutal. Dans une certaine mesure, il rejoint encore la dénonciation de l'invasion de notre univers par les voitures, déjà stigmatisée par TRAFIC de Jacques Tati ou le film de science-fiction WEEK-END de Godard.

Si LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS séduit par son propos insolite et original, proche de l'esprit de LA QUATRIÈME DIMENSION, il souffre aussi de certains défauts. Techniquement, le cinéma de Peter Weir est ici soigné, mais aussi assez banal, et on ne trouve pas encore la maîtrise dont il a fait preuve ensuite, de PIQUE-NIQUE A HANGING ROCK à MASTER AND COMMANDER. De plus, après avoir exposé le fonctionnement de la société de Paris, le film semble un peu à court d'arguments et donne dans un remplissage anecdotique et répétitif, trahissant un souci de structure.

LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS n'est certainement pas du niveau des meilleurs films de son auteur. Il s'agit pourtant d'un point de départ intéressant qui, malgré ses faiblesses, révèle un créateur à la personnalité affirmée. Même s'il rencontre un certain succès d'estime, LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS n'est pas vraiment une réussite commerciale, et son exploitation ne rembourse pas son budget. Il annonce toutefois, par l'aspect de ces véhicules les plus monstrueux, les bolides tueurs de LA COURSE A LA MORT DE L'AN 2000, et bien sûr de MAD MAX et de ses suites et dérivés. Aux USA, le film est acquis par Roger Corman qui l'y fera distribuer par sa firme New Line, dans une version tronquée.

En DVD, il a déjà été publié en Grande-Bretagne (zone 2, PAL), dans une édition où l'image est hélas recadrée (en 1.77). Aux USA, on trouve un disque plus intéressant (zone 1, NTSC), réunissant LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS et LE PLOMBIER, accompagnés d'interviews de Peter Weir. Par contre, il n'inclut aucune piste ou sous-titrage francophones. LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS sort en France au sein du coffret "Peter Weir", publié par Opening, qui contient, en plus, PIQUE-NIQUE A HANGING ROCK, LA DERNIERE VAGUE et LE PLOMBIER.

Un très beau télécinéma des VOITURES QUI ONT MANGE PARIS est proposé, qui le restitue dans son format 2.35 d'origine (option 16/9 disponible). Tout au plus pourra-t-on reprocher un peu de fourmillement dans des scènes sombres, mais l'ensemble, très propre, n'appelle pas de commentaire particulier.

La bande-son originale (en anglais) est proposée dans un nouveau mixage Dolby Surround convenable, ne se manifestant réellement que dans les scènes les plus violentes et au niveau de la musique. La bande-son française, mono d'origine, sonne, par contre, assez maigre et criarde. On dispose, bien sûr, d'un sous-titrage français amovible.

En bonus, on trouve une bande-annonce d'époque (anglais non sous-titré) et les bio-filmographies de Peter Weir (réalisateur) et des frères McElroy (producteurs), disponibles sur d'autres disques du coffret. En complément, on a encore un court-métrage australien appelé LA BICYCLETTE A REMONTER LE TEMPS. Il est certes réussi, mais il ne compense pas réellement l'absence, sur ce disque, de bonus intéressants liés à LES VOITURES QUI ONT MANGE PARIS.

Cette édition française des VOITURES QUI ONT MANGE PARIS est globalement tout à fait recommandable, et peut notamment se prévaloir d'une qualité technique très satisfaisante.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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L'édition vidéo
THE CARS THAT ATE PARIS DVD Zone 0 (France)
Editeur
Support
4 DVD
Origine
France (Zone 0)
Date de Sortie
Durée
1h24
Image
2.35 (16/9)
Audio
English Dolby Digital Mono
Francais Dolby Digital Mono
Sous-titrage
  • Aucun
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