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Critique du film et du DVD Zone 2
LA VAMPIRE NUE 1969

 

Pierre découvre que son père, Georges Radamante, mène des expériences sur une jeune femme vampire dans le but de découvrir le secret de l'immortalité. Il s'éprend de la jeune femme et rejoint la secte des ses adorateurs.

Après le VIOL DU VAMPIRE, Jean Rollin réalise LA VAMPIRE NUE, produit pour ABC films par Jean Lavie. Les recettes éprouvées lors du VIOL DU VAMPIRE sont développées dans LA VAMPIRE NUE : cadrages et lumières psychédéliques, dilettantisme, étrangeté assumée, érotisme latent…

L'équipe reste à peu près la même que pour le précédent film de Jean Rollin réalise LA VAMPIRE NUE : Jean Aron, Ursule Pauly et Olivier Martin (dans le rôle de Pierre Radamante) jouaient déjà dans LE VIOL DU VAMPIRE, Yvon Gérault et François Tusques assurent la composition musicale ; mais elle se renforce de quelques éléments imposants. La présence au générique de Maurice Lemaître (un des fondateurs du mouvement lettriste avec Isidore Isou et Guy Debord, cinéaste expérimental, fondateur du syncinéma) est surprenante : sa diction et l'ampleur de sa personnalité remplissent le film d'une aura supplémentaire. Il joue le père de Pierre, le savant en quête de l'immortalité. De même, on notera le crédit de Jio Berk en tant que directrice artistique : elle était actrice de LA FÉE SANGUINAIRE (court métrage de Roland Lethem en 1968).

Rollin annonce de plus que son propre frère tient le premier rôle masculin, Pierre (voir à ce propos l'interview de Jean Rollin présente sur notre site dans la rubrique Dossier BIFFF 2002).

A noter également la première apparition des sœurs jumelles Cathy et Pony Tricot, première déclinaison du thème du double, du jumeau, du couple féminin, primordial chez Jean Rollin (LES DÉMONIAQUES, REQUIEM POUR UN VAMPIRE, LES DEUX ORPHELINES VAMPIRES, LES DEMOISELLES DE L'ÉTRANGE, un de ses romans).

Avec ce premier véritable long métrage (voir la critique du VIOL DU VAMPIRE), Jean Rollin développe donc des thèmes qui lui sont chers, ainsi qu'une écriture personnelle forte qui vise à installer le trouble chez son spectateur.

La thématique vampirique est de nouveau présente certes, mais elle n'est pas primordiale : la vampire ne se nourrit pas volontairement, elle n'est pas meurtrière, elle est soumise aux expériences machiavéliques des hommes et c'est sur ce point qu'insiste Rollin. A la lisière du film de science-fiction, il propose ainsi une lecture décalée du mythe vampirique : le vampirisme n'est qu'une évolution de la race humaine, et les mutants vampires se sont regroupés en une sorte de secte pour se protéger des agressions des hommes. Ils vivent dans une dimension parallèle à celle des hommes, ce qui permet à Rollin d'utiliser de nouveau des lieux qui lui sont chers. Car le fétichisme des lieux rolliniens s'exprime dans ce film avec une grande puissance. Rollinrevient sur la plage du VIOL DU VAMPIRE pour y situer la dimension des mutants vampires (véritable écho sémantique de son précédent métrage). La scène du théâtre, qui est ici le passage pour la dimension supérieure et bien sûr le château, refuge de Radamante, dans lequel se déroulera l'invasion des vampires, apparaissent de nouveau comme scansion, comme signature même des films de Rollin.

Ce sont aussi des caractéristiques stylistiques propres qui font la marque du réalisateur : dès la première séquence, l 'évocation de Georges Franju (LES YEUX SANS VISAGE), par l'écho du plan sur le visage masqué en oiseau de JUDEX, fonctionne comme une citation révérencieuse à un maître avoué. Le rythme également, si caractéristique du cinéaste, trouve dans ce film une de ses expressions les plus radicales : de longs plans fixes (l'explication finale par les deux acolytes de Radamante), ou travelling le long d'un couloir où l'on découvre des bureaux les uns après les autres, le tout accompagné par une musique expérimentale allongeant le temps, tout un système rythmique neurasthénique est mis en place. Les deux premières séquences du film (près de dix minutes) sont muettes, ce qui renforce cet effet de temps qui s'allonge. L'action ne s'exprime pas de façon classique chez Rollin mais elle est marquée par une filiation lourde : on a parlé de Franju, mais c'est aussi le cinéma muet expressionniste qui est convoqué dans ces premières séquences.

C'est surtout par l'insistance sur des situations significatives de son cinéma et de ses œuvres romanesques que Jean Rollin affirme son style : le coffre sur la plage de Pourville lès Dieppe, les deux vieillards passeurs pour le monde des mutants, sont des images fortes, sommets du film, qui ajoutent à l'étrangeté de l'univers rollinien, qui déstabilisent la narration. L'étrange de ces situations est également accentué par l'utilisation des cadrages (moins délirante cependant que dans LE VIOL DU VAMPIRE) : restent un foisonnement des contre-plongées et des plongées radicales, les panoramiques systématiques qui posent le décor du drame.

Le mélange des deux intrigues (les expériences sur les vampires d'un côté, la secte des mutants de l'autre) relève de la même étrangeté et renforce le trouble du spectateur. On pense sans doute à David Lynch, qui utilise également des images fortes, et en fait des instants fondateurs, autour desquels tourne le film, avec le but de perturber la compréhension première de la narration.

Ce disque fait partie de la collection Jean Rollin éditée par L.C.J. et distribuée depuis quelques temps par un magasin de VPC. Les DVD de cette collection sont projetés pour la vente au public dans le courant de la rentrée 2003. Ce sera pourtant la première édition DVD de ce film de Jean Rollin. Redemption, aux Etats-Unis a annoncé une édition de trois films (PERDUES DANS NEW-YORK, LA ROSE DE FER et LA VAMPIRE NUE) mais sans préciser de date de sortie.

La version proposée par le DVD de L.C.J. est une version internationale avec le générique anglais ; elle diffère de la version française éditée par Film Office en VHS dans les années 90 puisque le générique, en français (plus complet de quelques noms), se situait après la séquence de la prise de sang sur la vampire, qui était placée en préambule au film. Le travail sur l'image est sérieux et la copie est d'une qualité très correcte. L'image au format 4/3 est présentée dans un ratio recadré aux environs du 1.60:1. On redécouvre ainsi ce film de Jean Rollin dans des conditions incomparables à celles connues jusqu'à présent.

Les disques de la collection offrent tous les mêmes bonus et utilisent la même présentation. Les bandes-annonces font un rapide tour du meilleur de Jean Rollin (ou du moins du plus marquant) mais on peut regretter qu'elles soient presque identiques sur tous les disques : elles sont enchaînées en un seul programme heureusement chapitré, ce qui permet l'accès direct à une bande annonce. Cependant l'éditeur a ajouté à la fin de ce programme (Chapitre 6) la bande annonce de LA VAMPIRE NUE, qui ne figurait pas sur les autres disques. L'interview, elle, est bien identique ; elle est proposée en ratio 1.77 : elle apporte néanmoins quelques précisions intéressantes sur le travail de Rollin, et sur sa propre perception de son œuvre.

LA VAMPIRE NUE est le premier «classique» de Jean Rollin, dans le sens où le film illustre le style de son auteur, ses thèmes, son langage. Le thème vampirique est bien sûr présent mais décalé, assorti d'une touche de S.F. naïve et amusante. C'est un film devenu rare, avec l'apparition majestueuse de Maurice Lemaître, qui n'avait toujours pas été édité en DVD et qui devrait sortir chez L.C.J. à la rentrée prochaine.

Rédacteur : Jérôme Peyrel
2025 ans
32 critiques Film & Vidéo
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La naïveté du propos
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Les mêmes bonus sur tous les disques de la collection
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L'édition vidéo
LA VAMPIRE NUE DVD Zone 2 (France)
Editeur
LCJ
Support
DVD (Simple couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h30
Image
1.66 (4/3)
Audio
Francais Dolby Digital Mono
Sous-titrage
  • Aucun
  • Supplements
    • Interview de Jean Rollin
      • Bandes-annonces
      • Requiem pour un Vampire
      • Le Frisson des Vampires
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