Youngman Duran (Nick Mancuso), est le shérif de la réserve indienne Hopi, au Nouveau Mexique. Il enquête sur des cadavres d'animaux aux multiples morsures et vidés de leur sang. Contre l'avis du membre de conseil tribal et promoteur de forages pétroliers dans la réserve (Stephen Macht), il pousse son enquête et rejoint l'avis du professeur Payne (David Warner). Des chauves-souris vampires porteuses du virus de la peste bubonique sont sur leur territoire. Et les premières attaques sur les humains ne se font pas attendre.
Connu en France sous le titre de MORSURES et réalisé par Arthur Hiller, NIGHTWING fait partie d'une salve de films tournés à la fin des années 70 qui ont tous eu comme sujet les attaques animales couplées aux préoccupations écologiques et liées aux tribus indiennes américaines en proie à ces chocs de civilisation. PROPHECY arriva sur les écrans américains 2 semaines avant MORSURES, puis suivi dans la foulée par WOLFEN - tous les trois sortis avec un égal malheur puisque rencontrant un échec plus ou oins cinglant auprès du public (le pire étant le film d'Hiller). Sorti le 4 juin 1980 en France, MORSURES se limita à 78 675 entrées - synonyme d'indifférence polie pour un film d'une major comme Columbia. Les chauves-souris ne furent plus guère à la mode depuis, hormis la tentative semi-ratée de BATS de Louis Morneau - et sa pauvre séquelle DTV.
Adapté du premier roman à succès de Martin Cruz Smith (auteur entre autres de GORKY PARK), on peut questionner à la base les choix curieux que la production effectua. Le réalisateur Arthur Hiller, plus spécialisé dans le drame et la comédie, venait de faire LOVE STORY ou encore TRANSAMERICA EXPRESS, avec aux manettes le même producteur Martin Ransohoff - ceci expliquant cela. Très loin d'un univers fantastico-horrifique. Les deux acteurs principaux : Nick Mancuso et Stephen Macht, très loin d'être indiens de nature... ne sont pas très vendeurs ni charismatiques. Ces effets combinés représentent un début d'explication concernant un film qui échoue à pratiquement tous les étages concernant un film d'horreur.
Avec une histoire qui structurellement marche sur les plates-bandes des DENTS DE LA MER, personne n'est dupe du déroulement. Remplacez un grand requin par des chauves-souris vampires, ajoutez-y un shérif et une chasseur de bestioles pour aider la communauté et substituez une fête locale que personne ne veut interdire malgré le danger par des forages pétroliers que personne veut interdire malgré le danger et l'affaire est dans le sac. En y ajoutant une pincée du très bon CHOSEN SURVIVORS de Sutton Roley pour quelques rebondissements et le final.
Hiller reste positivement incapable de générer une quelconque tension et rate singulièrement les scènes d'attaque. Techniquement compétent, mais d'une platitude désespérante. Il s'agit de Carlo Rambaldi qui généré les effets spéciaux mécaniques des chauves-souris, et quelques éléments fonctionnent assez bien. Très peu de sang, on y note deux ou trois timides morsures, mais des plans efficaces pour 1979. Qu'il s'agisse de rétro projection ou d'utilisation de footage de vraies chauves-souris, l'alliage fonctionne de manière honorable, si l'on est capable de replacer le film dans son contexte de sortie à la fin des années 70.
Mais au rayon horreur et action, le film déraille comme le TRANSAMERICA EXPRESS. La cascade en plein désert est balancée n'importe comment. Les acteurs mal dirigés lors des scènes de panique, comme l'attaque en plein désert. Une absence singulière de suspense, d'émotions, d'enjeux... comme si les auteurs, incapables de saisir la moindre compréhension des mécanismes et codes du film de genre, se reposaient sur les effets. Raté, car il aurait fallu un metteur en scène possédant une inspiration pour le sens du suspense. Il ne récupère ces éléments que sur le dernier quart d'heure du film où on sent véritablement le courant passer, malgré un David Warner débitant des dialogues d'une bêtise confondante et ce de manière sérieuse - tout à son honneur de garder le moral avec de telles âneries en bouche.
En fait, le film fonctionne beaucoup mieux sur le registre dramatique avec l'ensemble des éléments propres à la communauté Hopi. Oscillant entre croyances ancestrales et choc d'une Amérique moderne avec un jeune indien (Stephen Macht) qui a étudié au sein des universités «blanches» (dans le texte) pour y importer les méthodes commerciales. Et s'emparer d'un pouvoir qu'il estime avoir trainé trop longtemps aux mains de rites dépassés. La perception aux yeux du seul représentant de la loi dans la réserve s'exprime dans un registre différent. Le scénario tente de mêler un certain mysticisme des croyances tribales aux révélations du Dr Payne. Duran privilégie le dialogue et le respect des anciens - tout en suspectant l'explication scientifique des attaques animales, aux vues des supposés pouvoirs d'un aïeul craint par tous (George Clutesi)qui aurait déclenché une éventuelle fin du monde. Les antagonismes, les échanges de regards, les velléités des deux hommes transparaissent relativement bien à l'écran. Et donnent des enjeux beaucoup plus palpables que l'action balancée un peu n'importe comment.
Dommage, car l'ambition du livre tombe totalement à plat ici. Le démarquage d'autres films peine à se dissimuler. Mais malgré son ratage, NIGHTWING ne mérite pas la tempête de mauvais avis et ricanements qu'il provoqua à sa sortie. Il reste plaisant à suivre, et tellement mieux emballé que la plupart des produits horrifiques sortis à la même époque. Techniquement, le film est impeccable : un cadre soigné, une photographie superbe et un premier quart d'heure prenant sur les croyances locales et l'impact sur la société de demain. Hélas, une myriade de sous-intrigues alourdissent inutilement le propos. Ajouté à la l'approche maladroite et ridicule des horreurs commises, on obtient un long métrage parfois morne, trop long pour son propos et singulièrement vide de toute tension.
Il s'agit de l'éditeur US bas de gamme Mill Creek qui sous-loue une partie du catalogue Sony et effectue la sortie en HD. Sur un BD 50 contenant un autre film enraciné dans les croyances indiennes (SHADOW OF THE HAWK), il offre une menu simpliste (accès à l'un ou l'autre film), fixe, sans aucune option. Le disque est indiqué codé région A au dos de la jaquette mais s'avère toutes zones au final, au format 1.85:1 et d'une durée complète de 105mn26.
Les premières images se révèlent dramatiques : le générique Columbia est perclus de poussières blanches, limite flou pour le logo... idem pour le générique de début, aux contours d'éléments flous. Cela s'arrange nettement après, même si on dénote une utilisation de réducteur de bruit tenace sur certaines scènes. Mais il faut constater des contrastes efficaces, notamment dans les scènes de nuit (la grotte finale, la séquence d'électrification en plein désert), avec des niveaux de noirs réussis. La définition reste agréable à l'oeil, la copie propre (le master d'origine semble de bonne tenue) mais il ne faut pas espérer trop de détails non plus. Le travail intelligent du directeur de la photographie Charles Rosher (3 FEMMES, UN MARIAGE) éclate de manière splendide à l'écran - même s'il faut constater un débit parfois irrégulier qui n'offre pas la chance d'une stabilité permanente (quelques décalages de débit de 25 à 36 Mbps vers 10mn18, par exemple, donne une idée).
Une piste LPCM 2.0 anglaise stéréo de belle tenue : dialogues qui se détachent de l'action, une belle mise en évidence de la très belle partition ethnico-fantastique d'Henry Mancini (dont les plus perspicaces auront retrouvé les racines de sa composition pour LIFEFORCE!). Peu de souffle, une jolie dynamique sonore lors des scènes d'action.
Aucun bonus relatif au film, comme il s'agit de la majorité des sorties Mill Creek. Ce que les petits prix permettent : une édition dénuée de tout, sauf du film et parfois dans des conditions limites. Cette édition ne fait pas exception à la règle, mais offre néanmoins une qualité de vision supérieure aux DVD à la demande sortis auparavant (et on ne mentionnera à peine la VHS RCA Columbia de notre contrée!). MORSURES, le film comme cette édition, manquent de mordant. Un comble.