Quelque part, dans les Caraïbes, un généticien inspiré tue l'ennui en fécondant l'ovule d'une guenon avec le sperme d'un rat. Sans surprise aucune, la saine expérience aboutit à la naissance d'une mini-créature humanoïde griffue et vicelarde. Le toubib prévient alors son acolyte-figurant : «Je vais m'absenter deux minutes alors fais bien gaffe à Ratounet, c'est un beau salaud !». Mais malgré cela, la bestiole se fait la malle et entreprend de croquer tous ceux qui croiseront son chemin. Avec toutefois une nette préférence pour les Top-modèles au cuissot ferme et galbé. Après tout, ce n'est pas parce qu'on a vu le jour dans la cave d'un illuminé qu'on ne peut pas faire preuve d'un certain raffinement culinaire...
Jamais à cours d'idées douteuses, le cinéma italien a eu durant des années cette capacité à nous étonner. Dans le cas de QUELLA VILLA IN FONDO AL PARCO, plus connu à l'international sous le nom de RATMAN, nous avons un film finalement porté par la seule présence de sa «Star», Nelson De La Rosa, un dominicain d'une taille de 71 centimètres seulement. Découvert par un journaliste, l'homme débutera sa courte carrière cinématographique avec ce métrage horrifique avant d'apparaître dans MAFIA POWER, une Bisserie post-RAMBO, et enfin L'ILE DU DR. MOREAU où il côtoiera Marlon Brando. Avec le recul et à la vue de la particularité physique du monsieur, il est tout de même assez étonnant qu'il ne soit pas apparu dans davantage de pelloches transalpines !
Il faut dire que s'il décroche le rôle clef de RATMAN, l'homme n'est pas forcément mis en valeur et ses capacités d'acteur (s'il en eut) ne transparaissent absolument pas. Grossièrement maquillé et très limité dans ses mouvements, De La Rosa est bien souvent filmé en plans fixes afin d'exhiber sa petite taille, dans une cage ou à côté d'une personne de dimension normale. Les agressions ont recours à un montage très découpé, alternant quelques plans gores, de petites mains griffues ou des dents factices en action. Pourtant ce qui pourrait sembler ridicule de prime abord finit par provoquer un certain malaise. Est-ce du à ce voyeurisme malsain ? A cette ambiance crasseuse et fauchée ? A cette assimilation homme / animal affichée par RATMAN ? Peut-être un peu de tout cela... Quoiqu'il en soit, le réalisateur Giuliano Carnimeo (LES EXTERMINATEURS DE L'AN 3000) atteint péniblement mais finalement son but à partir du moment où il se décide à aligner les agressions. Avant cela... il faudra être patient !
Le métrage démarre en effet platement en suivant le parcours d'une paire de Top-modèles posant sur une plage, et autres paysages idylliques des caraïbes. On s'expose timidement, on joue de la croupe et on lève la gambette devant l'objectif sans imagination d'un photographe. Bien que le casting constitué d'Eva Grimaldi (LE MASQUE DU DEMON 2) et Janet Agren (LA SECTE DES CANNIBALES) ait pu faire rêver à l'époque, il est ici dévoilé sans la moindre sensualité. Même la fameuse séquence de la Grimaldi prenant sa douche dégouline d'amateurisme. La bimbo bombe le torse tant qu'elle peut, tachant d'offrir l'illusion d'un bonnet plus généreux, et se frotte avec tant de nervosité qu'on ne peut que lui recommander l'usage d'une Gratounett' (côté vert). Il faudra cependant s'en contenter et accepter que RATMAN n'offre pas la dose d'érotisme que le spectateur de 1988 était en droit d'espérer.
De son côté, David Warbeck assure une présence masculine toute en assurance et en poils de torse. Celui qui fut un temps pressenti pour incarner l'agent 007 n'est ici que l'ombre de lui-même, suivant le fil de l'histoire dans le seul but de culbuter Janet Agren. Nous préférerons donc garder en mémoire ses prestations dans les métrages de Lucio Fulci que sont L'AU-DELA et LE CHAT NOIR...
Vous l'aurez compris, RATMAN fait donc parti de ces films dont l'affiche et le concept sont plus dérangeants que les images en elles-mêmes. Photographie fadasse, intrigue mollassonne et acteurs peu concernés peinent à nous plonger dans l'aventure. Pourtant, lorsque Ratounet se décide enfin à sortir du placard et malgré la maladresse de la mise en scène, l'ambiance s'installe. La séquence post-taxi crevé (pour la troisième fois !) marque ainsi un virage vers l'étrange et le glauque qui ne saurait laisser indifférent. Giuliano Carnimeo mène alors sa barque tranquillement mais sûrement, jusqu'à une conclusion amusante, ouvrant la porte à une suite qui ne verra jamais le jour...
Les éditions DVD de ce RATMAN ne courent pas les rues et c'est pourquoi nous nous sommes tournés vers celle de nos voisins britanniques. Sur la jaquette de son disque, le sympathique éditeur Shameless se montre réaliste dans son propos en nous annonçant un bon gros Bis de mauvais goût. Là où le propos est plus discutable, c'est lorsqu'il scande que la copie proposée est la plus complète qui soit («Most complete version anywhere»). L'affirmation est reprise un peu partout grâce à la magie du Web mais qu'en est-il vraiment ? Tempérons donc modestement les ardeurs puisque cette édition s'avère en réalité plus courte que l'édition autrichienne NSM Records d'environ 40 secondes. Nous allons le voir, les différences sont très négligeables et ceux qui disposent encore de la VHS française Delta Vidéo (souvenez-vous, le truc avec une bande magnétique à l'intérieur !) pourront également retrouver les mêmes «écarts». Si l'on se penche donc de manière pointilleuse sur la copie proposée, on se rend compte qu'aucun plan gore ou sexy n'est concerné mais qu'en réalité, notre VHS proposait pas mal de séquences anodines plus longues d'une à deux secondes par rapport au disque Shameless. Deux plans concernés sur la plage, un autre au bar, plus loin dans la séquence du taxi etc. Bref, rien d'important et même rien de visible si l'on ne scrute pas les deux copies en parallèle. Soyez donc rassurés, malgré ces détails pointillistes, la copie DVD offre une version à la Bisserie Trash et fesse parfaitement intacte !
L'image pour sa part est de qualité appréciable. Nous avons un ratio 1.77 d'origine proposé dans un 16/9 plutôt stable. Les défauts de pellicule sont discrets, la colorimétrie est assez naturelle, et la définition très honnête. On notera cependant un effet de crénelage assez désagréable que l'on imputera à une compression un poil violente.
Sur le plan sonore, Shameless a fait le choix de n'offrir que la piste anglaise du film. On pourrait déplorer l'absence de la piste italienne mais il est bon de rappeler que nous avons là une production «internationale» dans laquelle une bonne partie du casting s'exprime en anglais. Moindre mal donc. La piste est claire et propre, même s'il ne faut pas attendre des merveilles de cette stéréo sans relief.
En termes de suppléments, le disque est plutôt léger et n'offre que six bandes-annonces de l'éditeur, à laquelle s'ajoute celle de l'Ovni. Nous saluerons cependant le choix de l'éditeur d'offrir comme à son habitude une jaquette réversible. D'un côté nous avons donc un visuel très inspiré des DENTS DE LA MER alors que de l'autre, nous retrouvons le visuel italien. Curieusement, le titre transalpin évoquant (sans doute intentionnellement) LA MAISON AU FOND DU PARC a cependant été changé en RATMAN. Nous regretterons au final que l'affiche utilisée pour la sortie en France, magnifique et racoleuse, n'ait pas été retenue...