Le professeur Forbes et sa fille se rendent dans un petit village suite à un courrier du docteur Thompson. Ce dernier est confronté à une vague de décès très étranges. Assez vite, ils vont découvrir que les morts suspectes sont le fruit d'une force démoniaque et que les cadavres ne restent pas sagement dans leur cercueil.
Pour réaliser des économies, la Hammer Films décide au millieu des années 60 de produire des métrages deux par deux. L'objectif est alors de profiter d'une équipe technique déjà en place, de réutiliser les décors ou les acteurs de manière à enchaîner les tournages l'un après l'autre. Ainsi, un doublé prestigieux est mis en chantier avec DRACULA PRINCE DES TENEBRES et RASPOUTINE LE MOINE FOU, les deux avec Christopher Lee. Bien plus modeste, John Gilling se voit confier deux projets : L'INVASION DES MORTS-VIVANTS et LA FEMME REPTILE. Au cinéaste britannique de redoubler d'ingéniosité pour narrer ses deux histoires sans que l'on ne sente trop les économies de bouts de chandelles. Et il faut bien reconnaître que John Gilling va relever le défi avec brio, particulièrement sur L'INVASION DES MORTS-VIVANTS. Si le métrage se concrétisera au milieu des années 60, l'idée de départ traîne dans les bureaux de la Hammer depuis 1962. Peter Bryan propose en effet l'intrigue de base sous le titre de THE ZOMBIE. Dans les années qui vont suivre, le scénario sera écrit par Anthony Hinds avant que Peter Bryan n'intervienne pour finaliser le script. Dans le même temps, le projet va changer de titre pour se transformer en HORROR OF THE ZOMBIES puis THE HORROR OF THE ZOMBIE avant d'adopter son titre anglais définitif THE PLAGUE OF THE ZOMBIES. Comme souvent en Grande Bretagne à cette époque, le scénario va être présenté au comité de censure anglais qui fera pas mal d'objections concernant la violence ou l'insistance d'éléments macabres ou gratuits. Le métrage écopera bien évidemment d'un «X», à l'arrivée, comme la plupart des films de la firme à cette époque.
L'INVASION DES MORTS-VIVANTS ne va pas chercher à renouveler la recette du cinéma gothique tel qu'instauré à la Hammer. Les figures imposées se cumulent avec un village isolé frappé par un mal étrange, la jeune fille virginale en proie aux forces du mal, une population superstitieuse regroupée dans une taverne et une aristocratie dépravée. L'intrigue nous présente d'ailleurs des «chatelains» adeptes de la chasse à cour qui n'hésitent pas à s'intéresser à un gibier féminin. Une séquence qui n'est pas sans rappeler LE CHIEN DES BASKERVILLES de Terence Fisher et dont l'adaptation avait été rédigée par Peter Bryan. D'ailleurs, le héros de L'INVASION DES MORTS-VIVANTS est interprété par André Morell qui incarnait le Docteur Watson du CHIEN DES BASKERVILLES ! Ici, il donne corps à un personnage pas si éloigné que cela en devenant un professeur de médecine de la grande ville qui vient enquêter dans une petite bourgade reculée. Le film insuffle quelques idées curieuses mais elles donnent au final beaucoup de charme à ce professeur. Il est ainsi présenté comme un type bougon, mais avec un bon fond. Un trait de caractère qui s'estompera lorsqu'il entamera son voyage et on le retrouvera même en train de faire la vaisselle, entre hommes, ce qui pourra sembler extrêmement progressiste pour une histoire se déroulant au XIXème siècle et même un film réalisé dans les années 60.
Si la Hammer Films avait déjà recyclé les grandes figures du cinéma Fantastique avec les vampires, les momies, la créature de Frankenstein ou le loup-garou, les morts-vivants étaient restés inédits dans le bestiaire de la maison de production britannique. L'INVASION DES MORTS-VIVANTS sera d'ailleurs sa seule véritable incursion dans le domaine. Dans les années 60, George Romero et sa NUIT DES MORTS-VIVANTS ne sont pas encore passés par là. Pourtant, L'INVASION DES MORTS-VIVANTS s'impose comme un chaînon manquant entre la représentation des morts-vivants telle qu'on pouvait la décrire jusque là et la vision de George Romero. A l'évidence, le film de John Gilling s'inspire du WHITE ZOMBIE de Victor Halperin. Les morts-vivants sont le fruit d'un sorcier adepte du vaudou qui asservit son entourage en les transformant en zombie. Dans L'INVASION DES MORTS-VIVANTS , le personnage maléfique a la même approche et utilise la pratique du vaudou de manière à faire tourner ses affaires. Mais le film de John Gilling contient des zombies très réussis et surtout une séquence dans un cimetière carrément géniale. Déjà, la construction de la séquence provoque une véritable surprise. Mais surtout, la morte qui sort de son cercueil n'est pas sans rappeler les morts-vivants de George Romero alors que par la suite on verra des zombies s'extirper des tombes. Une grande réussite visuelle dans un film que John Gilling soigne beaucoup avec des cadrages recherchés ou en composant avec grande classe ses plans. Le manque de moyen se montre finalement assez peu visible. Certes, on pourra reprocher quelques petits défauts, à l'image d'un aristocrate maléfique un peu terne et incarné par John Carson. Le comédien Brook Williams n'est pas non plus très convaincant en jeune médecin. Heureusement, la distribution féminine remonte le niveau et l'incontournable Michael Ripper vient égayer quelques séquences réussies. Enfin, on peut aussi supposer que la vitesse du tournage n'a pas toujours laissé le temps d'organiser correctement les arrières plans. Ainsi, lors du combat dans le bureau, à la fin du film, on peut clairement voir un extincteur en arrière plan. Un ustensile anachronique qui s'invite à l'écran certainement parce que le décor ne tardera pas à prendre feu. Mais cela n'a rien de gênant puisque pris dans l'histoire, on peut sans mal louper cette anicroche. L'important, après tout, c'est que L'INVASION DES MORTS-VIVANTS est une belle réussite mêlant le gothique de la Hammer avec le mythe des morts-vivants. Un essai singulier au même titre que LA NUIT DU LOUP-GAROU, toute proportion gardée, de Terence Fisher.
Si L'INVASION DES MORTS-VIVANTS est produit en même temps que LA FEMME REPTILE, il ne sera pas distribué avec ce film dans les salles. Aux Etats-Unis comme en Grande Bretagne, le métrage sera proposé en double programme avec DRACULA PRINCE DES TENEBRES. En Amérique, les distributeurs ont l'idée de donner à l'entrée des salles des canines aux spectateurs masculins alors que les femmes se voient offrir des yeux de zombies. En France, le film sera donc distribué sous le titre L'INVASION DES MORTS-VIVANTS à la fin de l'année 1966 mais connaîtra une petite ressortie dans le courant des années 70, histoire de profiter de l'engouement pour les films de zombies.
Metropolitan a distribué pas mal de métrages de la Hammer dans une collection dédiée à la maison de production britannique. Les suppléments sont quasiment les mêmes sur toute la collection ou presque. Ici, on retrouve donc en bonus la bande-annonce mais aussi un épisode de The World of Hammer. Une Featurette d'environ vingt cinq minutes qui présente surtout des extraits avec une voix-off peu informative narrée par Oliver Reed. Cet épisode se montre d'ailleurs comme un méchant fourre-tout puisque si l'on retrouve les zombies de L'INVASION DES MORTS-VIVANTS, on peut aussi y redécouvrir des métrages aussi divers que LA NUIT DU LOUP-GAROU, LE FASCINANT CAPITAINE CLEGG ou encore LA MOMIE SANGLANTE. Du côté de l'Allemagne, EMS avait fait un peu mieux puisque l'éditeur proposait une interview de James Bernard, le compositeur de la Hammer, des galeries de photos, la bande dessinée ou encore plusieurs bandes-annonces. Consolons nous tout de même avec cette édition française, certes moins complète mais proposant une traduction française du film et un petit prix.
En ce qui concerne l'image du film, elle est présentée dans un format 1.77 en 16/9. A l'écran, le rendu n'est peut être pas ce que l'on a vu de meilleur en terme de définition mais le résultat se montre des plus agréables. L'image prend une pâtine très cinéma que ce soit en terme de couleurs ou bien avec un grain très léger. Pour le son, pas de miracle, les deux pistes proposées sont en mono d'origine. On a alors le choix entre la version originale sous-titrée ou bien un doublage français. Les deux remplissent sans véritable défaut leur office.