Header Critique : MOUCHE, LA (THE FLY)

Critique du film et du Blu-ray Zone B
LA MOUCHE 1986

THE FLY 

Seth Brundle rencontre une journaliste lors d'une soirée. Il décide de l'emmener chez lui pour lui montrer le projet scientifique sur lequel il travaille. L'expérience n'a rien de banal puisque le savant a mis au point un téléporteur de matière qu'il entend améliorer de façon à transporter des êtres vivants instantanément d'un endroit vers un autre…

La collaboration entre David Cronenberg et Dino De Laurentiis s'est déroulée plutôt bien lors de la création de DEAD ZONE. Le producteur propose donc au réalisateur de travailler sur l'adaptation d'un livre de Philip K. Dick dont un scénario est déjà rédigé par Dan O'Bannon et Ronald Shusett. De gros problèmes de mésententes entre les scénaristes et David Cronenberg vont déboucher sur plus d'un an de travail inutile. Durant cette période, Cronenberg réécrit le scénario et propose le rôle principal à des acteurs tel que William Hurt et Richard Dreyfuss. Conscient de l'impasse dans laquelle il se trouve le réalisateur quitte le projet qui ne se concrétisera que plusieurs années plus tard avec TOTAL RECALL réalisé par Paul Verhoeven. Pendant que Cronenberg se débat sur la production de ce film de science-fiction, une autre production connaît de gros soucis. Lancé, le remake de LA MOUCHE NOIRE de Kurt Neumann se voit brutalement interrompu avant le début du tournage par un drame qui touche personnellement le metteur en scène Robert Bierman. Mis à l'écart, LA MOUCHE se retrouve sans réalisateur ! Le poste vacant coïncide avec La disponibilité de David Cronenberg. Pour s'assurer la participation du réalisateur canadien, la production va même jusqu'à offrir beaucoup plus que le salaire normal du cinéaste qui, ironiquement, a de toutes façons besoin d'argent à ce moment là.

LA MOUCHE ressemble donc à un film de commande hollywoodien pour un cinéaste dont la filmographie était jusque là très personnelle. Toutefois, David Cronenberg va s'approprier un projet qui semblait, de toutes façons, lui être destiné. Le cinéaste va tout de même prendre le scénario, écrit par Charles Edward Pogue, qu'on lui propose et le remanier à sa façon. Le cinéaste voit aussi d'un mauvais œil que Mel Brooks, producteur via sa société Brooksfilm, lui propose Pierce Brosnan dans le rôle principal. Ce sera finalement Jeff Goldblum qui emportera l'adhésion. Compagne de l'acteur à ce moment là, Geena Davis reproduit sa relation amoureuse à l'écran. Enfin, pour obtenir un trio amoureux, David Cronenberg pense à John Getz qu'il a remarqué dans SANG POUR SANG. Le réalisateur va aussi apparaître, lui-même, dans le film en incarnant un gynécologue lors d'une séquence cauchemardesque. Les inévitables effets spéciaux du film seront assurés par Chris Walas qui avait déjà travaillé avec le cinéaste sur SCANNERS. Par la suite, Chris Walas retrouvera David Cronenberg pour LE FESTIN NU. Mais en ce qui concerne LA MOUCHE, les effets seront si impressionnants, cette année là, qu'un Oscar sera décerné à Chris Walas et Stephan Dupuis pour leur travail sur le film.

LA MOUCHE est donc une adaptation d'une nouvelle de George Langelaan parue en 1957 dans les pages de l'édition américaine de Playboy. Le film sera adapté très rapidement au cinéma par Kurt Neumann en 1958 et LA MOUCHE NOIRE, son titre français, va générer deux suites : RETURN OF THE FLY et CURSE OF THE FLY. Entre la première adaptation cinématographique et LA MOUCHE, il va s'écouler un peu plus de vingt cinq ans. Le scénariste Charles Edward Pogue va réactualiser l'histoire et il n'y est plus question de laisser apparaître un personnage affublé d'une tête de mouche géante. Le scénariste s'oriente plutôt vers la fusion des corps et la lente dégradation de son personnage principal. Des éléments qui ne sont pas pour déplaire à David Cronenberg qui conservera ces idées pour la réécriture de son scénario. Les œuvres précédentes du cinéaste canadien sont d'ailleurs fortement imprégnées par la mutation des corps, la maladie et la mort. Cronenberg avait même déjà filmé une téléportation spirituelle entre deux corps dans SCANNERS. Mais, ici, le sujet n'est pas tant la téléportation que l'étrange maladie qui en est le résultat. Maladie et infection, le cinéaste a déjà traité le sujet au travers de FRISSONS ou RAGE ce qui fait de LA MOUCHE un film en totale continuité des travaux de David Cronenberg. Le traitement de l'histoire s'ancrant pleinement dans la réalité apparaît aussi comme un point commun évident avec les films précédents du cinéaste. Car, débarrassé de ses oripeaux de science-fiction, LA MOUCHE est en réalité une histoire tragique suivant le déclin de son personnage principal devant les yeux de la femme qui l'aime. Pleinement réinventé par Charles Edward Pogue et David Cronenberg, LA MOUCHE conserve quelques rares éléments de l'œuvre original tel que l'implication de la jeune femme amoureuse dans la mort de l'infortuné scientifique. Pour le reste, par rapport au film original, LA MOUCHE développe de façon beaucoup plus actuelle, et réussie, son intrigue ainsi que les diverses ramifications du sujet. Par exemple, l'éventualité d'un avortement, sujet grave en soit, amène au passage une réflexion sur ce qui peut être amené à nous survivre après la mort. Conscient de sa déliquescence et donc à l'approche de sa fin en tant qu'être humain, l'homme s'inquiète de la dernière lueur d'espoir de son être qui ne va pas disparaître (mourir). Très sombre et dépressif, LA MOUCHE se pare aussi d'une certaine forme d'humour noir. Rien d'hilarant pour autant, l'aspect grotesque de certaines séquences amène un ton curieusement plus léger alors que les images se font carrément dégoûtantes. Le repas de celui qui se nomme «Brundle-mouche» ou bien l'armoire de la salle de bains se métamorphosant en reliquaire mixent ainsi une horreur abominablement graphique avec un style décalé. A cet effet, l'excellente interprétation de Jeff Goldblum retranscrit à merveille la personnalité excentrique du scientifique, citant du Kafka, en pleine métamorphose. L'acteur n'était jusque là reconnu que pour des rôles dans des registres bien moins tragiques comme dans SERIE NOIRE POUR UNE NUIT BLANCHE de John Landis ou la série télévisée TIMIDE ET SANS COMPLEXE. Sa prestation donne tout de suite un rapprochement avec le spectateur décuplant l'horreur de sa situation. Grave et particulièrement maîtrisé, LA MOUCHE s'impose comme une grande réussite du cinéma d'horreur et de science-fiction des années 80.

Les qualités du film ne passeront pas inaperçus et il va recevoir le Grand Prix du Jury au Festival du Film Fantastique d'Avoriaz en 1987. LA MOUCHE va s'avérer très rentables et sera l'un des plus gros succès de David Cronenberg. L'appât du gain mènera au tournage d'une suite, LA MOUCHE 2, réalisée par Chris Walas qui assurera une nouvelle fois les effets spéciaux. L'histoire pourrait s'arrêter là mais David Cronenberg a souvent exprimé le fait qu'il voyait son film, LA MOUCHE, comme un opéra. Et, curieusement, en 2008, un véritable opéra est ainsi créé à partir du film. David Cronenberg supervise le projet et Howard Shore, compositeur de la bande originale du film, en assure la partition musicale. En plus de cette adaptation en musique dont les premières notes seront jouées en public durant l'été 2008, il serait aussi question d'une nouvelle version cinématographique de la nouvelle de George Langelaan, toujours produite par la Fox, qui aura beaucoup de mal à surpasser le film de David Cronenberg.

Pour sa matérialisation en Blu-ray, LA MOUCHE se pare d'un transfert haute définition 1080p/24. Présentée dans son format cinéma d'origine (1.85), l'image du film est assez douce et le contraste n'est pas des plus appuyé. En soit, ce transfert délivre une image plutôt bien détaillée, si on la compare à un simple DVD, mais il ne présente pas pour autant un résultat spectaculaire. Mais ne cherchons pas trop la petite bête, cela reste une image plutôt solide avec des couleurs retranscrites sans heurt et une stabilité à toute épreuve. Les écrans d'ordinateurs du film bénéficient grandement de la haute résolution en reproduisant des lettrages aux contours biens définis.

La sonorisation se fait grâce à trois pistes sonores. Mettons tout de suite de côté le doublage allemand qui n'intéressera pas un public francophone. La piste audio française donne l'occasion de découvrir le film avec du DTS. Pas de quoi s'enthousiasmer outre mesure, le mixage n'est pas d'un grand naturel et ne donne pas non plus l'occasion de nous offrir un rendu particulièrement spectaculaire. La piste DTS HD Master Audio de la version originale anglaise ne risque pas non plus de devenir une référence même si le résultat est de qualité. Enregistré à l'origine en stéréo surround, le film ne donne pas de nombreuses occasions de se lâcher sur le son. Hormis les passages mettant en scène les téléporteurs, le reste fait un peu office de passages intimistes. Le résultat est donc très probant compte tenu de l'âge du film.

Lorsque LA MOUCHE sort pour la première fois en DVD dans nos contrées, c'est au travers d'une édition relativement minimaliste à laquelle on donne seulement du matériel d'époque tel que la Featurette promotionnelle. Des suppléments qui n'étaient d'ailleurs pas présents sur les éditions américaines. En 2005, LA MOUCHE a connu un traitement beaucoup plus fourni avec la sortie d'une édition double DVD particulièrement riche. Pour l'interactivité de ce Blu-ray, l'éditeur reprend tous les suppléments de cette édition. Cette fois, tout tient sur un seul disque puisque l'intégralité des suppléments sont présentés en simple définition (standard DVD). On retrouve donc le commentaire audio de David Cronenberg qui, tout au long du film, partage ses vues concernant l'histoire et les personnages sans oublier de livrer diverses informations supplémentaires. Il évoque ainsi rapidement sa passion pour les sports tels que la boxe ou les courses automobiles sur lesquelles il a d'ailleurs réalisé un film (FAST COMPANY). Plutôt rare, ce commentaire audio est véritablement complémentaire du reste de l'interactivité. D'ailleurs, parmi les suppléments réalisés en 2005, le cinéaste n'apparaît que dans cette piste audio.

Absent du documentaire, David Cronenberg laisse donc la parole à de nombreux autres intervenants que ce soit scénariste, producteur ou acteurs. Un documentaire qui a la particularité de s'étirer sur plus de deux heures et quart. Et, comme si la durée était trop courte, il est possible de le visionner avec une option permettant de déclencher des vidéos supplémentaires. Ces petits ajouts apportent leurs lots d'anecdotes et précisions aussi intéressantes les unes que les autres comme l'évocation de l'équipe fidèle formée autour de David Cronenberg, la présence du cinéaste et Jeff Goldblum dans le jury du festival de Cannes ou encore une amusante anecdote à propos de JURASSIC PARK. Le documentaire retrace minutieusement l'histoire du film sans oublier d'évoquer le premier réalisateur évincé pour raison personnelle. D'ailleurs, Robert Bierman s'exprime ici à propos de sa version de LA MOUCHE qu'il n'a donc pas pu tourner. Certains passages de ce long documentaire et de ses ajouts satellites sont parfois assez surprenants à l'instar de l'évocation des érections du babouin. Enfin, les intervenants parlent franchement et sans langue de bois ce qui mène, par exemple, l'acteur John Getz a jugé plutôt médiocre LA MOUCHE 2 alors qu'il est, ce qui est plutôt amusant, le seul acteur du film original à s'y être compromis. «Fear of the Flesh : The Making of the Fly» s'avère extrêmement complet !

Passés ces deux imposants suppléments, le reste du contenu sera au mieux sympathique et au pire très anecdotique. Ainsi, le commentaire textuel affiche tout au long du film des cadres apportant diverses informations. Néanmoins, il n'y a rien à apprendre de plus sur le film que tout ce qui a pu être dit sur le commentaire audio ou le documentaire. Toutefois, c'est en s'éloignant du film et en abordant des sujets parallèles que ce petit supplément devient relativement intéressant. Plus intéressant, «Le Musée Brundle d'Histoire Naturelle» nous permet d'aller rendre visite au collectionneur Bob Burns en compagnie de Chris Walas. Là, il est possible de découvrir maquettes et autres objets de maquillage conservés avec celles d'autres films comme ALIENS. Parmi tous ces objets, on peut ainsi découvrir le travail de conception de la créature dans LA MOUCHE au travers de sculptures non retenues et autres ébauches de ce que l'on trouvera finalement dans le film.

Il est encore possible de consulter la nouvelle originale qui a inspiré LA MOUCHE NOIRE puis LA MOUCHE. De même, il est possible de consulter le scénario écrit par Charles Edward Pogue puis la version remaniée par David Cronenberg. Riche idée que de proposer les divers traitements de l'histoire mais cela n'intéressera que les anglophones puisque tout cela est présenté en langue anglaise. Il en va de même en ce qui concerne l'une des scènes coupées qui est présentée au travers de son story-board dont les annotations anglaises ne sont pas traduites. Les autres scènes coupées sont, quant à elles, bien sous-titrées en français. Parmi celles-ci, on trouvera donc l'intégralité de la fameuse séquence du singe-chat. A côté, deux séquences proposent de découvrir le montage original intégral avant que des bouts de dialogues ne soient évacués pour en arriver à la version finale. Une section «Essais» permet encore de découvrir les divers tests pour l'introduction du film après l'apparition du titre ou bien des bouts de pelloches concernant les effets spéciaux. Dans l'optique des suppléments vidéos, la partie «promo» donne l'opportunité de retrouver le Making-Of d'époque, déjà présent sur la première édition DVD, ou encore un portrait de David Cronenberg dressé par l'équipe du film. En soit anecdotiques, ces suppléments ont au moins l'avantage d'apporter une touche complète à cette édition qui a encore pas mal de choses en réserves.

Ainsi, les affiches de plusieurs pays sont consultables tout comme une très grande galerie de photos. Les spots TV et bandes-annonces du film sont aussi disponibles. Des bandes-annonces, on en trouve d'autres en cherchant bien au sein de l'interactivité du disque. On peut par exemple voir les bandes annonces de ALIENS et LES AVENTURES DE JACK BURTON, deux films sortis durant le même été (1986) que LA MOUCHE. Nous avons trouvé un second supplément caché où Jeff Goldblum raconte une anecdote d'enfance où il fut amené à jouer un personnage sous un imposant costume. Largement plus inutile, un jeu interactif vous permet de chasser les mouches de votre écran mais le résultat est plutôt décevant ! Heureusement, le bilan global de ce Blu-ray est, lui, extrêmement positif !

Rédacteur : Antoine Rigaud
2025 ans
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635 critiques Film & Vidéo
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L'un des meilleurs films de David Cronenberg
Des suppléments fournis et complémentaires
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L'édition vidéo
THE FLY Blu-ray Zone B (France)
Editeur
Support
Blu-Ray (Double couche)
Origine
France (Zone B)
Date de Sortie
Durée
1h36
Image
1.85 (16/9)
Audio
English DTS Master Audio 5.1
Francais DTS 5.1
German DTS 5.1
Sous-titrage
  • Anglais
  • Français
  • Supplements
    • Commentaire audio de David Cronenberg
    • Commentaire écrit
    • Documentaire (136mn)
    • Le Musée Brundle d'Histoire naturelle (11mn52)
      • Scènes coupées
      • Deuxième interview (1mn45)
      • Le Singe-Chat (7mn)
      • Brundle-mouche contre la clocharde (Story-board)
      • Le papillon (2mn28)
      • Scènes intégrales
      • Réconciliation (2mn01)
      • La poésie du steak (3mn42)
      • Essais du film
      • Le générique d'ouverture (3mn55)
      • Eclairage du téléporteur et trucages
      • Le maquillage de Brundle-mouche (2mn15)
      • Explosion d'insecte spatial (0mn53)
      • Cronenberg-la mouche (0mn52)
      • Bandes-annonces
      • La Mouche
      • Les Aventures de Jack Burton
      • Aliens
    • Spots TV
      • Documents écrits (en anglais)
      • Nouvelle originale
      • Scénario original de Charles Edward Pogue
      • Réécriture de David Cronenberg
      • Article de magazines (en anglais)
      • Cinefex "The Fly Papers"
      • American Cinematographer "New Buzz on an old Theme"
      • American Cinematographer "More about the Fly"
      • Featurettes 1986
      • Making Of (6mn59)
      • Portrait de David Cronenberg (4mn22)
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