Gordon Fleming, qui dirige une entreprise de nettoyage et de réhabilitation, parvient à décrocher un contrat en or : l'assainissement d'un gigantesque hôpital abandonné. Les lieux vont rapidement influer de façon étrange sur la petite équipe. Gordon, qui vient d'être papa pour la première fois et dont le couple bat de l'aile croit entendre des voix. Mike, un employé, trouve de vieilles bandes magnétiques contenant des sessions entre Mary, une patiente schizophrène, et un psy. Puis Hank disparaît…
Tourné entièrement dans le décor naturel d'un asile psychiatrique abandonné, SESSION 9 reprend habilement les «petits trucs» qui font un bon film d'épouvante : un lieu isolé aux proportions gigantesques, d'interminables couloirs sombres, un groupe de personnes réduit, des trouvailles étranges, une disparition… Ce qui au départ semble être une histoire fermement ancrée dans la réalité prend petit à petit une tournure plus fantastique grâce à une ambiance rendue oppressante par la astucieuse mise en image. Brad Anderson promène sa caméra dans l'hôpital tantôt pour simplement nous montrer l'action et à d'autres moments en nous plaçant derrière un mur ou au fond d'un couloir, rendant notre présence aussi menaçante que ce qui hante les lieux.
Mais est-ce vraiment une présence surnaturelle ou autre chose de bien plus inquiétant et terre à terre qui se cache dans l'hôpital ? A l'instar de THE MACHINIST, Anderson distille les indices avec parcimonie, ajoutant des inserts d'images dont l'étrangeté éveille notre curiosité quant à leur réelle signification. Ainsi, cet ancien fauteuil roulant renversé, des pièces d'argent tombant d'un trou dans le mur jouxtant la morgue ou encore ces photos épinglées sur les murs de ce que l'on suppose être une ancienne chambre. Et ces bruits que l'on entend, sont-ils réels ? Subrepticement, tous ces éléments vont s'additionner et jouer avec les nerfs des personnages tant et si bien qu'eux-mêmes ne sont plus sûrs de ce qui se passe ou qui ils sont.
Le plus atteint est sans doute Gordon, le chef de chantier (joué par Peter Mullan, vu dans TRAINSPOTTING ou MAUVAISE PASSE de Michel Blanc). L'accumulation de sérieux problèmes d'argent et de la fragilité de son couple l'ont rendu presque paranoïaque. Il réprime les souvenirs d'une mauvaise dispute avec sa femme en essayant de se convaincre que ce n'était pas grave. Il espionne les conversations de ses employés et imagine entendre des choses qui n'existent pas. Gordon est le véritable point central de l'histoire dont le comportement est mis en parallèle avec les bandes magnétiques que Mike écoute en secret dans une pièce perdue au sous-sol. Le montage alterne entre évènements inexpliqués (coupure de courant, bruit de pas) et les paroles éthérées, qui sortent du haut-parleur du magnétophone, ajoutent une dimension surnaturelle au film qui impose une tension de façon admirable. Ceci est particulièrement évident dans sa dernière partie où l'atmosphère devient étouffante à souhait, autant pour les personnages que pour le spectateur.
Cependant, le scénario aurait gagné à être un peu plus écrit car quelques répétitions se font sentir lors de scènes d'exposition. L'ennui n'a pas tout à fait le temps de s'installer mais l'on regrette par exemple que les relations entre les employés n'aient pas été davantage développés. Ils restent trop en retrait lors de moments importants ou révélateurs, une passivité qui dénote avec la tension sans cesse grandissante autour d'eux. Il aurait été intéressant, par exemple, de jouer un peu plus sur l'animosité qui définit les rapports entre Phil (David Caruso) et Hank (Josh Lucas). Ce dernier a piqué la petite amie de son collègue qui le méprise au point de vouloir l'évincer de l'équipe. Toutefois, seul Gordon émet quelques vagues soupçons à l'égard de Phil lorsque Hank disparaît. Si les autres ne disent rien, c'est sans doute parce qu'ils font confiance à Phil cependant, ils ne le montrent pas. Même si Phil fait un coupable trop évident, la logique le place parmi les suspect.
SESSION 9 a été tourné entièrement en HD avec un budget que l'on peut considérer comme restreint. Brad Anderson est un habitué du circuit indépendant puisqu'il officie en tant que réalisateur dans ce domaine depuis un peu plus de dix ans. On ne peut passer sous silence son formidable THE MACHINIST et notons également au passage le treizième épisode de la série SURFACE ou encore un segment de MASTERS OF HORROR, intitulé SOUNDS LIKE (quatrième épisode de la deuxième saison) et que l'on a hâte de découvrir prochainement.
Le métrage est présenté dans un format 2.35 qui exploite comme il se doit le décor décrépit mais magnifique, définissant à lui tout seul le mot «hanté». Au niveau de la qualité, il n'existe pas de différences notables avec l'édition canadienne que Emmanuel Denis avait déjà chroniqué.
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Pour le son, vous avez le choix entre le doublage français et la version originale sous-titrée. Les deux pistes sont présentées dans un Dolby Digital 5.1 drôlement efficace pour un film dont le but avoué est de vous filer une bonne frousse ! La musique d'ambiance est discrète, appuyée par des bruitages choc aux bons moments capables de faire sursauter et appréhender ce qui pourrait vous observer de derrière la porte entrouverte de votre salon…
Les suppléments sont l'unique déception de cette édition et nous nous permettons de dire qu'elle est de taille. Le seul bonus se rapportant au film est un projet d'affiches dont les images défilent automatiquement. Vous pouvez bien sûr appuyer sur la touche "Pause" pour les admirer plus longuement. Il y en a un peu plus de vingt et elles sont toutes fort jolies. Il va de soi qu'il vaut mieux porter un intérêt particulier aux arts graphiques pour pleinement apprécier les différences mais il est intéressant pour tout le monde de voir tous les stades de création et pouvoir comparer avec le résultat final.
La suite offre des bandes annonces, le catalogue Océan DVDs et les crédits DVD. Si nous les énumérons de cette façon, c'est que ce sont tout simplement les mêmes qui sont présents sur le disque de BASIC INSTINCT 2 chroniqué il y a peu ici même. Normal l'éditeur opère un copier-coller pour faire sa promotion. Mais ces suppléments laisse un goût amer dans la bouche d'autant plus qu'ils n'ont strictement rien à voir avec le film. Pour en savoir plus sur le métrage, nous ne pouvons alors que vous conseiller de vous reporter sur l'édition canadienne qui comporte une version française du film et un complément de bonus autrement plus intéressants. Néanmoins, le disque française propose un sous-titrage français et il est le seul dans ce cas mais aussi une piste 5.1 absente du disque canadien pour la version originale.
Au final, SESSION 9 est un film de terreur psychologique qu'il serait dommage de rater si vos goûts vont dans ce sens. Cette édition, bien que décevante au niveau des suppléments, reste un excellent choix pour les francophones désireux de frissonner devant l'architecture d'une bâtisse dont la majeure partie n'est plus. Comme le proclame la jaquette, «Un endroit où habite la peur…» Gageons que vous n'aurez aucune envie d'y emménager.