Header Critique : KOMETEN (LA COMETE)

Critique du film et du DVD Zone 0
KOMETEN 2002

LA COMETE 

Une fois n'est pas coutume, c'est un DVD venu du froid, de Suède plus précisément, qui est l'objet de notre critique. Autre particularité, ce disque contient deux films du même réalisateur, un court-métrage présenté en salles (et sélectionné en 2005 au Festival de Clermont-Ferrand) et un programme diffusé par la chaîne suédoise SVT en 2002.

KONSPIRATION 58 est en effet un reportage télévisé qui tente de percer le mystère qui entoure l'organisation de la coupe du monde de 1958 en Suède. Une association qui se nomme Konspiration 58 développe la thèse que la coupe du monde n'aurait pas eu lieu en Suède et qu'il s'agirait d'une vaste manipulation des services d'information américain visant à tester la crédulité des population et la possibilité de manipuler les masses. Entourée de secret, drapée dans sa réputation sulfureuse, cette association, dont les dérives terroristes inquiètent les dirigeants du football suédois, tente, au travers des prises de paroles et des écrits de son leader, Bror Jacques de Vaern, de convaincre les foules.

Le film renvoie le spectateur à l'interrogation qui devrait toujours être sa priorité : que me montre-t-on ? Quel crédit dois-je, en tant que spectateur, accorder aux images qu'on m'impose comme vraies. S'il devait rester une seule qualité à ce film, ce serait celle-là. Bien sûr, le court-métrage de Johan Löfstedt en possède d'autres, entre autres la persévérance à rechercher la réalité dans les méandres de cette affaire.

Le documentaire est complété par un bonus qui éclaire grandement le spectateur sur les tenants et aboutissants de cette affaire. Une réalité qui n'était qu'à l'état latent dans le film se fait jour dans le supplément, mais nous n'en disons pas plus pour ne pas déflorer la première vision du film. KSP58 – WHAT REALLY HAPPENED ! ? permet également de découvrir le climat particulier qui entourait la diffusion du film à la télé suédoise, avec les annonces faites par le présentateur avant la diffusion, ou la bande annonce du programme.

Dans LA COMETE, il est également question de réflexion autour des images. Cette fois-ci, le réalisateur prend le contre-pied de son film précédent et construit à partir d'images préexistantes une intrigue de science-fiction.

Oslo vit ses derniers jours : les médias l'ont annoncé, une comète gigantesque va s'écraser sur la terre, il ne reste que cinq jours à vivre. Les gens s'activent, boivent, oublient ou perdent la tête. L'homme qui filme a ressorti sa vieille caméra pour capturer les derniers instants de vie de la planète. Il pense à sa femme, qu'il a perdu récemment, tente de supporter le poids de sa propre fin, et filme tout ce qu'il voit.

Tombé par hasard sur une masse de films Super 8 appartenant à Bror Jacques de Vaern, Johan Löfstedt a visionné la totalité de ces bobines (297 au total) ; au fur et à mesure qu'il découvrait les archives filmées de cet homme, il composait l'intrigue de ce film qui met au premier plan la ville d'Oslo sur une dizaine d'années (de 1959 à 1971). Ce ne sont pas les monuments, les événements, qui sont choisis dans ces archives par le caméraman amateur, mais plutôt la vie quotidienne : le matériau est donc inespéré pour Johan Löfstedt qui brode l'intrigue simpliste, éculée, de la catastrophe venue de l'espace, le peu de temps qu'il reste à l'humanité (déjà présente, entre autres, dans les chansons de Bowie, voir 5 Days). Il y ajoute tout de même les états d'âme du caméraman, lui invente un personnage romantique, mélancolique et esseulé. Et d'une masse désordonnée, il sort un joyau cinématographique, presqu'aussi pur que LA JETEE (pour rester dans le genre de la science-fiction, et dans le court métrage !).

Car KOMETEN, tout en étant une histoire de science-fiction imparable, fraie sur les rives de la poésie, d'une poésie intérieure, lyrique, mais aussi d'une poésie de la ville, des situations prises sur le vif, filmées parfois dans un ralenti qui suspend les personnages dans un temps indéterminé. La musique de Leif Jordansson accompagne les derniers instants de cet homme, et comme seul environnement sonore, rajoute à la tension intérieure qu'il est en train de vivre. Les images récurrentes du début sont reçues comme un souvenir de la fin du monde, une photo de femme, cornée, au pied d'un immeuble dont seule la première fenêtre est ouverte : quelqu'un semble nous regarder de la fenêtre, encore un témoin de la catastrophe, effacé. Car KOMETEN, réflexion sur l'image par son matériau même est aussi une réflexion du regard, de celui qui regarde, et qui finit par se filmer lui-même dans le miroir, essayant, par l'acte de fixer son image, de survivre à la catastrophe ; «Je pense que tous ceux que je filme seront préservés d'une manière ou d'une autre» fait dire Johan Löfstedt à son personnage, alors qu'un homme est emporté en ambulance. Mise en abîme de la création, quand ce propos peut être soit entendu dans le texte de la fiction soit dans la réalité filmé par Bror Jacques de Vaern.

Regroupant ces deux films à égalité de traitement, l'éditeur Folkets Bio a consacré à chacun une face du boitier. Pour chacun des films de même, il y a en complément un documentaire très explicite qui enrichit la vision des deux films d'une compréhension nouvelle (et c'est peu dire quant à KONSPIRATION 58). Dans le supplément consacré à KOMETEN, on peut voir des images supplémentaires tirées des pellicules de Bror Jacques de Vaern. Le processus de création est abordé par Löfstedt qui s'entretient avec l'auteur des images ; les deux évoquent les raisons qui les ont amenés l'un à filmer, l'autre à utiliser ces images.

Les deux films sont présentés en plein écran, leur format d'origine ; l'image et le son sont rendus parfaitement. Le film KONSPIRATION 58 bénéficie de sous-titres anglais et français, mais ces derniers souffrent d'un problème de police (les apostrophes et les points-virgules sont intervertis, ce qui gène passablement la compréhension). Mieux vaut donc, si vous êtes anglophones, suivre le film avec les sous-titres anglais. Surtout qu'après ce bon entraînement, vous pourrez accéder sans problème au supplément qui lui, n'est sous-titré qu'en anglais (bien que le choix de sous-titres suédois ou français apparaît dans le menu).

Pour ce qui est de KOMETEN, pas de problème de cet ordre puisque le film est "muet" : les cartons sont proposés soit en suédois, soit en anglais, soit en français. Le supplément est sous-titré en anglais. En revanche, les deux commentaires accompagnant le film sont en suédois, ce qui empêchera la plupart d'entre nous d'en comprendre un traître mot.

C'est en tout cas un DVD quasi-parfait, tant au niveau de l'image que du choix éditorial ; la présence de copieux suppléments pour des courts métrages est assez rare pour être soulignée.

Le disque n'est malheureusement pas distribué en France, mais il est possible (et même recommandé !) de le commander par internet à l'adresse du producteur (http://www.stavro.nu). Le disque y est vendu pour 25€ port compris.

Rédacteur : Jérôme Peyrel
32 critiques Film & Vidéo
On aime
Un produit abouti : pour des courts métrages, le soin est rare.
Deux films passionnants
On n'aime pas
Les commentaires non sous-titrés…
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L'édition vidéo
KOMETEN DVD Zone 0 (Suede)
Editeur
Folkets Bio
Support
DVD (Double couche)
Origine
Suede (Zone 0)
Date de Sortie
Durée
28 mn
Image
1.33 (4/3)
Audio
Swedish Dolby Digital Stéréo
Sous-titrage
  • Anglais
  • Français
  • Supplements
      • KOMETEN
      • Commentaire audio de Bror Jacques de Waern
      • Commentaire audio de Leif Jordansson
      • Interview de Bror Jacques de Waern
      • KONSPIRATION 58
      • KSP58 - What really happened (Documentaire)
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