Dans un futur proche, Batman, Spiderman et consorts sont visiblement trop vieux pour combattre le crime. La justice est-elle définitivement en danger ? C'est sans compter sur la milliardaire Miss Lulu Wong alias Silver Hawk, la super héroïne toute de chrome vêtue. Lorsqu'un despote s'empare d'une nouvelle technologie de téléphonie mobile afin de la détourner pour contrôler les esprits, Silver Hawk vole à la rescousse non sans faire équipe malgré elle avec un chef de police qui a juré de la démasquer.
SILVER HAWK est le deuxième film co-produit par Mythical Films, la société de Michelle Yeoh, après le calamiteux (et très coûteux) LE TALISMAN. Pour mémoire, rappelons que Yeoh fonda Mythical Films dans l'espoir d'exploiter sa nouvelle notoriété due au succès de TIGRE ET DRAGON, et de se tailler ainsi des rôles sur-mesures pour des films calibrés pour le marché international. La reconnaissance unanime du savoir-faire made in Hong Kong, qui est alors systématiquement cité dans les blockbusters Hollywoodiens du moment, crédibilise pour un temps la volonté de Yeoh et de ses associés de donner aux intervenants locaux les moyens des productions américaines pour des spectacles de hauts niveaux (et dans la foulée, d'imposer Yeoh comme une star asiatique planétaire sur le modèle de Jackie Chan). Mais l'échec public et artistique du TALISMAN viendra malheureusement faire retomber le soufflé en moins de deux.
Si LE TALISMAN était immédiatement conçu pour l'exportation (tourné en anglais, des occidentaux en tête de casting), SILVER HAWK s'oriente quant à lui un peu plus sur le marché local avec un film tourné en cantonnais et donnant la vedette à des comédiens chinois. Pour favoriser sa diffusion à l'étranger, des acteurs américains se sont néanmoins glissé dans la distribution pour incarner principalement les méchants (ce qui n'aura finalement échappé à personne). On reconnaîtra ainsi le musculeux Michael Jai White en homme de main (vu dans SPAWN, pas vu dans KILL BILL pour cause de scène coupée au montage), ou encore Luke Goss dans la peau du tyran de service (révélé par BLADE 2, on se souviendra de l'homme pour avoir été le co-leader du boys band Bros, en tête du Top 50 du milieu des années 80).
SILVER HAWK à beau être en premier lieu destiné au public chinois, il n'en reste pas moins marqué par l'influence des grosses productions américaines. Surfant sur la vague des adaptations de super héros plébiscitées par le public mondial, Yeoh et sa bande s'engouffrent dans ce créneau prometteur pour dépeindre une héroïne originale qui doit cependant beaucoup à Batman. Milliardaire (et donc n'ayant visiblement rien d'autre à faire ?!), Lulu Wong endosse la panoplie de Silver Hawk comme Bruce Wayne endosse celle de l'homme chauve-souris. Les gadgets sont bien entendus au rendez-vous, l'héroïne chinoise n'ayant rien à envier au psycho-maniaco-dépressif de Gotham City sur ce point (comme cette moto qui va chercher toute seule une place pour se garer après trajet, un rêve pour beaucoup de citadins).
Soyons franc, SILVER HAWK n'a rien du spectacle fédérateur et haut de gamme qu'il revendique. Le scénario est bêta, les ficelles usées jusqu'à la corde (la nièce de l'héroïne va être kidnappée !), les personnages caricaturaux (avec notamment le sidekick du sidekick de Silver Hawk), et l'action paraît parfois bien incongrue (comme cette bagarre rangée avec des sbires joueurs de rink hockey). La retranscription du futur, bien qu'artistiquement cohérente, n'est finalement pas bien ambitieuse suite à un budget que l'on imagine revu bien à la baisse après la douche froide du TALISMAN. Et comble pour un film de ce genre, l'héroïne Silver Hawk n'apporte rien de nouveau au mythe du super héros.
Le spectateur qui s'aventurera devant SILVER HAWK dans l'espoir d'y dénicher le traitement adulte des dernières adaptations de comics en date, ou encore la folie d'un HEROÏC TRIO, risque donc de tomber de très haut et ce dès la première scène. On y voit Silver Hawk prendre d'assaut un camion bardé d'hommes armés. A grand coup de pirouettes supra-cablées et de ralentis / accélérés frénétiques (la «marque» du réalisateur Jingle Ma depuis un certain TOKYO RAIDERS), notre héroïne va maîtriser tout ce beau monde dans la bonne humeur (et en veillant à ce que personne ne soit non plus réellement blessé). Au terme du combat, ce sont les méchants eux-mêmes qui jettent l'éponge tellement ces derniers sont fatigués. Silver Hawk n'en cache d'ailleurs pas sa peine, elle qui commençait justement à s'amuser ! Elle va alors vérifier la cargaison du camion pour découvrir que ce dernier transporte clandestinement un bébé panda. Idéal pour faire quelques risettes face caméra avec ce vrai petit nounours !
Vous l'aurez compris, SILVER HAWK s'éloigne radicalement de l'ambiance actuelle du héros réaliste et / ou tourmenté pour composer un vrai spectacle à destination des enfants. Une fois que cette volonté est intégrée dans l'esprit du spectateur, SILVER HAWK devient un divertissement honnête et parfois même plutôt bien fichu. Michelle Yeoh tente de toute évidence de s'adresser aux petites filles, souvent délaissé par ces histoires de supers héros. La réalisation de Jingle Ma se fait moins toc passée la scène d'ouverture très typée «MATRIX du pauvre», et le film réserve même quelques scènes de bravoures à l'image de cette séquence opposant Silver Hawk à des soldats harnachés d'élastiques à sauter (un combat qui semble remaker la scène de lutte dans le dôme de MAD MAX 3 de Georges Miller). Le savoir-faire Hong-Kongais est toujours là, ce qui sauve le film de l'échec. On regrettera juste que Michelle Yeoh et ses associés aient décidé de ratisser toujours plus large, condamnant SILVER HAWK à une exploitation trop ciblée pour les moins de douze ans.
SILVER HAWK est disponible dans une édition chinoise très soignée. L'image, au format et 16/9, ne souffre d'aucun défaut d'aucune sorte. Le disque propose les pistes originales cantonaises en Dolby Digital 5.1 ou en DTS, cette dernière étant à préférer si vous voulez profiter au mieux de la puissance du travail sonore effectué sur le film (passons sur le doublage en mandarin qui ne risque pas d'intéresser beaucoup d'entre vous).
L'édition propose même une section bonus plutôt fournie, dont la compréhension ne sera réservée qu'aux initiés puisqu'on y parle cantonnais sous-titré chinois. Un making of d'allure promotionnelle, où les intervenants s'expriment largement, nous passe donc sous le nez. Reste de nombreuses images de tournage. Plus accessible, une galerie très réussie de dessins de productions nous donne à imaginer un film qui aurait pu avoir un bien meilleur impact si son orientation avait été différente. Outre les bonus inutiles typiques des éditions chinoises (comme le résumé de la jaquette repris sur une page texte), nous trouvons des bandes-annonces, une galerie photo, des filmographies et même des mini interviews cachées au détour d'un menu (malheureusement toujours non traduites en anglais).
Avec SILVER HAWK, Michelle Yeoh tente d'élargir encore plus son public en convoitant directement les enfants. Un plan de carrière qui semble marcher sur les traces de Jackie Chan et de ses dernières productions américaines, toujours plus familiales. Une attitude qui froissera sans aucun doute les fans de la première heure, même si dans l'absolu SILVER HAWK ne constitue pas un spectacle désagréable.