Le Toxic Avenger, le justicier radioactif de Tromaville est trop performant. Depuis le premier épisode, toute la criminalité a été éradiquée, réduisant notre super héros au chômage technique. Encouragé par son psychiatre, Melvin alias Toxie s'en va pour le Japon à la recherche du père qu'il n'a jamais connu. Profitant de l'absence de notre héros, la multinationale polluante Apocalypse Inc. exécute une OPA sur Tromaville.
THE TOXIC AVENGER premier du nom est sans conteste le film le plus important du catalogue Troma. Non seulement c'est l'un des plus gros succès de la boîte, mais le personnage du justicier radioactif est devenu depuis l'égérie de la firme. Il faudra pourtant cinq ans à Lloyd Kaufman et son associé Michael Herz pour entamer les premières suites à leur chef-d'œuvre maison, soit le temps de parfaire la réputation internationale de leur premier opus, via le circuit de la vidéo. Pour réduire les coûts, ce n'est pas une mais deux séquelles que les duettistes mettront en boîte simultanément (un peu comme MATRIX quoi !) : THE TOXIC AVENGER 2 et THE TOXIC AVENGER 3 : THE LAST TEMPTATION OF TOXIE (en hommage à Scorsese).
Avec TOXIC 2, Troma abandonne le temps d'un film sa panoplie de firme décomplexée produisant à la chaîne les séries Z franchement barrées. Car contrairement aux autres produits maisons, TOXIC 2 est un film attendu et donc doté d'un fort potentiel commercial (toutes proportions gardée, cela va de soi). Conscients des possibilités financières de sa créature, Kaufman et Herz vont troquer pour l'occasion leurs casquettes d'hurluberlus pour celles plus respectables de "biznessman". Avec deux suites donc, mais aussi une série animée à destination des enfants (avec tout le merchandising que cela sous-entend), Troma capitalise tous azimuts sur son vengeur toxique, quitte à dérouter le fan de base.
Mais revenons à ce qui nous intéresse ici, le fameux TOXIC 2. Doté d'un renflouement budgétaire inattendu en provenance du Japon (ceci expliquant la délocalisation du scénario), le film gomme enfin le côté bricolé inhérent aux films Troma. Sans rouler sur l'or, TOXIC 2 propose un rendu franchement plus professionnel que d'habitude, s'autorisant même quelques coquetteries de luxe (comme l'œil tombant de Toxic, maintenant piloté par un servomoteur). Malheureusement, ce que TOXIC 2 gagne de ce côté, il le perd en personnalité. Le film paraît ainsi bien édulcoré par rapport au premier opus, jusqu'à estomper totalement les débordements qui ont fait la renommée de la firme.
Si l'on peut donc facilement pardonner à Troma les budgets ridicules de ses productions, on a en revanche du mal à passer l'éponge sur le manque d'audace ou d'imagination. TOXIC 2 a beau se montrer malin quant à son scénario (le chômage technique du super héros étant bien vu), on reste dubitatif quant à l'exploitation quasi grand public de sa franchise. Le gore est ici quasi-absent (d'autant plus que le film à été joyeusement coupé des quelques rares giclettes parsemant le métrage), et surtout, l'esprit iconoclaste a été soigneusement laissé aux vestiaires. Troma ratisse large, et très honnêtement, ça ne lui va pas.
Le voyage au Japon laisse également sur sa faim, notre héros jouant plus les touristes qu'autre chose. Pas désagréables pour autant, ses déambulations manquent considérablement d'énergie ou de ressorts comiques. Seule une séquence sort du lot : un combat en pleine rue avec une bande de ninjas bigarrés, monté en alternance avec une interview télévisée tendant à démontrer les bienfaits aphrodisiaques du tskudani séché ! Ca ne semble pas avoir beaucoup de sens dit comme ça, mais le film se montre à ce moment suffisamment drôle et divertissant pour emporter l'adhésion.
THE TOXIC AVENGER 2 n'est pas une réussite malgré la sympathie que l'on éprouve pour le personnage. Ce n'est d'ailleurs un secret pour personne, puisque Kaufman lui-même avoue avoir raté les deux premières suites consacrées à la star maison. L'honneur est sauf puisqu'il signa récemment un retour digne de ce nom avec le rouleau compresseur CITIZEN TOXIE, authentique maelström trash et irrévérencieux. De quoi rattraper la timidité de ce deuxième opus dont on ne retiendra pas grand-chose malgré les moyens engagés : de grands décors, de l'exotisme, des poursuites spectaculaires en voiture, un voyage en planche à voile, de nombreux figurants (pour Troma)… Rien n'y fait, le cœur n'y étant visiblement pas.
L'édition de TOXIC 2 est similaire techniquement aux autres titres de la série. L'image plein cadre est d'origine, et se montre même de bien meilleure qualité que ses homologues. Malheureusement, la copie présentée ici est censurée de quelques plans gores. Le son est toujours un stéréo de base mais efficace, d'où il est possible de choisir une piste en français. Cette option n'est néanmoins à conseiller qu'aux téméraires, la voix française de Toxie étant celle de Michael J. Fox ! Deux petits bonus pour cette fois : un «15 ans après» qui nous invite dans l'intimité de Toxie afin de discuter de sa carrière (déjà disponible sur le disque du premier opus), ainsi qu'un «Toxie au Japon» qui est en fait une copie de source VHS d'une émission japonaise relatant le tournage avec la jeune comédienne du film (ce qui nous donne l'occasion de quelques plans Making Of dans les rues de Tokyo). Comme de bien entendu, aucun des bonus n'est sous-titré, il faudra donc maîtriser l'anglais et le japonais pour une bonne compréhension de l'ensemble. Et pour ceux qui cherchent encore la section photo avec des Tromettes promise sur la jaquette, sachez qu'elle n'existe tout simplement pas (dans l'absolu, on s'en moque un peu mais c'est pour le principe).
Avec son esprit branque et irrévérencieux, Troma aligne les réussites comme les joyeux nanars. Malheureusement, THE TOXIC AVENGER 2 appartient à cette deuxième catégorie. Bien que l'ensemble se laisse regarder non sans déplaisir, on est très loin d'atteindre le niveau des meilleurs films de la maison. L'éditeur français ne s'y trompe d'ailleurs pas puisqu'il omet dans son planning le troisième épisode de la série, tourné dans la foulée du deuxième et encore plus médiocre que ce dernier. A moins d'être un inconditionnel, on conseille de passer directement à CITIZEN TOXIE, le quatrième et généralissime opus de la série.
