Suite à d'étranges phénomènes, Chris Kelvin est envoyé sur la station en orbite de Solaris pour évaluer la pertinence d'une observation de cette planète, qui semble réagir comme si elle était vivante !
Alors que Stanislas Lem est en train de faire des études de médecine, la Pologne est envahie par l'Allemagne. Il se retrouve à travailler dans une usine mécanique et rejoint la résistance. Une fois la Seconde Guerre Mondiale terminée, il reprend ses études mais se mettra à écrire pour finalement embrasser la profession d'écrivain. Tout au long de sa carrière, on sera étonné de découvrir deux facettes à sa bibliographie. D'un côté des œuvres sérieuses parfois ardues et de l'autre une flopée de nouvelles au ton humoristique totalement délirantes (Les Aventures d'Ijon Tichy, Le Bréviaire des Robots…). Au début des années 60, Stanislas Lem termine l'écriture de Solaris, un roman assez touffu où l'homme se voit confronté à une entité avec laquelle il semble impossible d'établir un contact.
Après la réalisation d'ANDREI ROUBLEV, Andreï Tarkovski connaît de nombreux problèmes avec le régime politique en place et on lui refuse les divers projets de films qu'il propose. Plutôt que de baisser les bras, il voit dans le roman de Stanislas Lem un sujet qui l'intéresse alors que la science-fiction ne semble pas être une menace aux yeux du gouvernement. Pourtant, le cinéaste russe n'a que faire de la technologie qu'il voit d'un mauvais œil. La séquence de l'autoroute dans SOLARIS donne d'ailleurs une image assez pessimiste du développement de l'humanité et donc de sa technologie ! Finalement, le film connaîtra tout de même quelques soucis avec la censure politique. Ces tensions qui l'empêchent de travailler comme il l'entend, Andreï Tarkovski finira par s'en débarrasser en passant à l'Ouest, profitant du tournage de NOSTALGHIA réalisé une dizaine d'années plus tard.
Ce qui intéresse Andreï Tarkovski dans le livre de Stanislas Lem, c'est probablement cette idée de difficulté de communication mais aussi une façon de parler de la foi. Car s'il conserve une toute petite part scientifique dans son film, il épure grandement, pour se consacrer surtout aux personnages principaux. Toute la première partie du film, quasiment inexistante dans le livre original, nous montre ainsi le héros qui ne veut pas vraiment écouter l'avertissement d'un ancien astronaute, alors qu'il semble n'avoir jamais le temps de parler avec son père. Une quarantaine de minutes où l'on nous expose au travers d'une sorte de rapport, la situation étrange que pose l'observation de la planète Solaris. Kelvin et les spectateurs devront attendre tout ce temps avant le départ pour la station orbitale.
Histoire d'amour peu conventionnelle, le héros est rapidement rejoint sur la station par son ex-compagne décédée ! Solaris semble en effet envoyer des «visiteurs» aux occupants de la station, qui se retrouvent alors confrontés à une matérialisation de leurs erreurs du passé. Après une hésitation, Kelvin accepte la situation de ce retour pour reprendre une liaison sentimentale qui s'était terminée de façon abrupte. Ses collègues sont bien moins charmés par ces phénomènes, alors que le double de sa femme se pose elle-même des questions sur son existence. Tout le film tend finalement vers une simple question «Comment comprendre une entité extraterrestre lorsque l'on a déjà du mal à comprendre l'humanité ?». Ce qui suscite inévitablement d'autres interrogations à propos de l'être humain et de sa conscience.
Andreï Tarkovski détestait le cinéma commercial et il ne faut pas s'attendre dans ses films à être caressé dans le sens du poil, ce qui est déjà bien plus le cas de l'adaptation du SOLARIS réalisée par Steven Soderbergh. La version russe de SOLARIS est plutôt austère et très bavarde. Certains dialogues ont même tendance à alourdir le film et, dans le genre difficile à décrypter, on s'étonnera de passages qui passent de la couleur au noir et blanc. La vision du film de Tarkovski impose tout de même une ambiance efficace et de nombreux passages artistiquement très réussis, qui portent le spectateur sur toute la durée du film qui avoisine pourtant les trois heures.
Le DVD de SOLARIS est issu du Russian Cinema Council. Il s'agit de disques produits en vue d'une commercialisation dans le monde entier. Pendant un temps, Film Office distribuait en France, donc les disques édités par Ruscico. Mais suite à l'abandon de la tâche de distributeur de Film Office devenu par la suite H2F, SOLARIS a disparu des rayonnages français seulement quelques mois après sa sortie. Mais ce DVD reste toujours accessible en furetant du côté des autres pays européens comme l'Angleterre.
Le film a été divisé en deux parties et placé sur deux DVD. Un choix surprenant puisqu'il aurait été possible de diffuser le film sur un seul disque. Mais ce parti pris permet de bénéficier de la meilleure qualité possible pour l'image, et cela se ressent à la vision du transfert 16/9 en format cinéma respecté (2.35) de SOLARIS. La définition est d'une grande précision et les quelques petits défauts de compression assez difficiles à déceler.
Le disque a été localisé en plusieurs langues et l'on retrouve donc des menus entièrement traduits en français (ce qui est aussi le cas de la plupart des suppléments tels que les biographies), un doublage français remixé en Dolby Digital 5.1 et la possibilité de regarder le film en version originale russe sous-titrée. La traduction des sous-titrages semble parfois approximative alors que le doublage français s'arrête quelques minutes avant la fin du film pour être remplacé par la version russe. Hormis ces détails, les remix sont de bonne qualité et, tout en restant sobre, ajoutent ici ou là quelques effets intéressants (la scène de l'autoroute…).
SOLARIS séparé sur deux disques, Ruscico aura tout de même comblé les DVD avec quelques suppléments dont une très courte interview de la sœur d'Andreï Tarkovski qui parle de sa façon d'éviter la censure politique. Une autre interview récente nous permet de retrouver l'actrice Natalya Bondarchuk qui se remémore le tournage en dispensant quelques anecdotes. Et dans un autre genre, on pourra visionner un petit portrait de Donatas Banionis qui n'est autre qu'une Featurette à propos de l'acteur où l'on ressent un côté propagandiste. Ces trois suppléments en vidéo sont tous sous-titrés en français !
Stanislas Lem n'aura pas suscité un attrait cinématographique seulement pour son livre "Solaris". Le DVD contient un extrait d'un film polonais réalisé en 1979 d'après un autre de ses livres. Ce passage nous est présenté en version originale sans aucun sous-titrage mais permet d'obtenir un aperçu d'un film de science-fiction comportant des effets spéciaux plutôt réussis qui donnent envie d'en découvrir un peu plus à propos de L'INTERROGATOIRE DU PILOTE PEARKS.
Les deux disques contiennent aussi une galerie de photos chacun, comportant des clichés en couleur sur le premier disque et en noir et blanc sur le second. On retrouve aussi de nombreuses filmographies sur les deux DVD où, si l'on cherche bien, l'on trouvera quelques bandes-annonces de films sortis ou à sortir chez Ruscico. Par contre, aucune trace de la bande-annonce de SOLARIS. L'interview de l'actrice principale est elle aussi camouflée sur sa filmographie. Il faut dire que la navigation sur les menus des suppléments est parfois déconcertante et nécessite de tous les fouiller. Enfin, le premier DVD contient en plus des biographies pour Stanislas Lem et Andreï Tarkovski.
Comme tous les films d'Andreï Tarkovski, les thèmes philosophiques et le rythme languissant imposés par SOLARIS pourra rebuter certains spectateurs qui dès lors, trouveront plus chaussure à leur pied avec la version largement plus accessible de Steven Soderbergh. Toutefois, les deux films prennent chacun des directions différentes qui n'empêchent en rien la vision des deux versions…