Une guerre sino-russe provoque une épidémie qui décime la population mondiale et laisse les survivants mourir à petit feu, atteints d'une photophobie et d'une dégénérescence des tissus. Le colonel Robert Neville, biologiste de l'armée a été épargné grâce au vaccin expérimental qu'il s'est inoculé. Il arpente les rues de Los Angeles, vivant le jour en pillant les magasins abandonnés et se barricadant la nuit dans sa maison transformée en forteresse où de puissants projecteurs tiennent éloignés les malades noctambules.
Ceux-ci se sont regroupés en une Famille sous l'égide de Matthias, ancien présentateur télévisé, reconverti en gourou d'une secte qui entend purifier le monde de la technologie, cause du mal. Neville va rencontrer Lisa et un groupe de jeunes chez qui le virus a très inégalement progressé. L'espoir renaît de pouvoir vacciner les survivants à partir du sang de Neville mais c'est sans compter sur la folie inquisitoriale de Matthias.
LE SURVIVANT est le deuxième long métrage adapté du roman «Je suis une légende» de Richard Matheson. Le premier était THE LAST MAN ON EARTH (1961) avec Vincent Price dans le rôle titre, luttant contre des vampires avec des pieux de bois. Richard Matheson n'a jamais vraiment reconnu son livre dans cette version de 1971. Il est vrai que les victimes de «Je suis une légende» étaient devenues des vampires. En les remplaçant par des albinos habillés en moines médiévaux, les scénaristes ont sans doute voulu ancrer un peu plus l'histoire dans un contexte où la mort du héros et la technophobie dont fait preuve la Famille sont révélateurs de l'époque.
Le film, tourné au début des années 70 (en pleine crise du Vietnam et de la contestation hippie) s'inscrit dans la mouvance des films d'anticipation de cette décennie qui stigmatisaient des peurs concernant la surpopulation (SOLEIL VERT), le progrés technoloqique (MONDWEST...), l'épuisement des ressources naturelles (SOLEIL VERT, toujours...), l'écologie (SILENT RUNNING, NEW YORK NE REPOND PLUS...), le danger atomique et épidémiologique (APOCALYPSE 2024, LE SURVIVANT...) ou encore le vieillissement de la population (L'AGE DE CRISTAL, ZARDOZ...). Il est étonnant d'ailleurs de remarquer qu'aujourd'hui la plupart de ces questions sont toujours d'actualité.
LE SURVIVANT participe au pessimisme ambiant de cette époque en présentant un monde détruit par les exactions de l'homme, un monde divisé en deux : d'un coté, l'humanité avec son arrogance progressiste personnifiée par Charlton Heston, de l'autre, une communauté de survivants réduits à vivre dans l'obscurité et l'obscurantisme (la Famille arbore les apparats d'un dogme religieux pratiquant l'autodafé et éliminant systématiquement tout ce qui est rattaché à l'humanité) chacune des deux parties trouvant sa raison d'être en combattant l'autre.
La vision mémorable de Los Angeles dévastée tandis que Heston conduit dans les rues jonchées d'épaves et de cadavres a beaucoup contribué au succès du film qui est rapidement devenu film culte et classique du film de science-fiction post-apocalyptique. Même si sa thématique et son esthétique restent très marquées (la coiffure très "Jackson Five" de Lisa) LE SURVIVANT a eu le mérite de présenter d'une manière assez réaliste et rarement égalée la menace du fléau bactériologique qui reste encore aujourd'hui une crainte très présente dans nos esprits.
Trois ans après LA PLANETE DES SINGES et deux ans avant SOLEIL VERT, Charlton Heston incarne la figure virile du héros évoluant dans un monde apocalyptique. Dans LE SURVIVANT son rôle est néanmoins ambigu car il est à la fois le dernier symbole de l'humanité destructrice et celui par qui la rédemption est possible. Cette ambiguïté est parfaitement illustrée par le fait que le héros est surarmé (on connaît les convictions de Charlton Heston en ce qui concerne les armes) et à la fois nostalgique d'une époque révolue où régnait l'innocence : la scène dans le cinéma qui projette WOODSTOCK est à elle seule tout un symbole.
Pendant longtemps il a été question de faire un remake du film avec les noms d'Arnold Schwarzenegger et de Ridley Scott au générique. Un budget trop élevé par rapport à ce que voulaient mettre les studios semble avoir mis le projet en stand-by. Aux dernières nouvelles, Rob Bowman, réalisateur de X-FILES le film ainsi que de l'excellent REGNE DU FEU, aurait émis le souhait de diriger le film. L'avancée technologique des effets spéciaux ainsi qu'une mise à jour du roman original pourrait donner un résultat au-delà de toute espérance. Patience donc...
Rarement projeté à la télévision et n'existant en VHS qu'en version Pan & Scan LE SURVIVANT a bénéficié d'un superbe transfert 2.35 (l'image scope est pour beaucoup dans l'impact visuel du film) en 16/9eme avec une superbe colorimétrie et une gestion des contrastes un peu faible (surtout pour les scènes nocturnes). Cerise sur le gâteau : la version originale sous titrée en français est accompagnée d'une version française.
Pour les suppléments (non sous titrés) il faudra se contenter d'une featurette d'époque (9mn50) ainsi que d'une présentation du film (4mn) par les seconds rôles (Paul Koslo et Eric Laneuville) et la scénariste Joyce Hooper Corrington qui ne nous apprendront pas grand chose. La bande annonce ainsi que les filmos sont aussi présentes dans les bonus.
Enfin, il est à noter que ce DVD est codé pour être lu sur des lecteurs des Zone 1, 2, 3 et 4. Cela sous-entend qu'il peut fonctionner sans problème sur les lecteurs français à condition que votre téléviseur soit capable d'afficher du NTSC.
30 ans aprés sa sortie dans les salles LE SURVIVANT reste un fleuron du film d'anticipation. Un mélange réussi de la culture pop de l'époque (prise de conscience des problèmes environnementaux et son corollaire le flower-power, la blaxploitation) mais aussi une interrogation sur la folie de l'homme et ses limites.