Dans le cadre de ses études, Mark Rosman débute comme assistant de Brian de Palma sur la comédie HOME MOVIES, titre assez obscur de la filmographie du metteur en scène. Puis Rosman se lance dans la production et la réalisation d'un petit film d'épouvante tourné hors du cadre des syndicats professionnels : THE HOUSE ON SORORITY ROW. Surfant sur la vague vivace du Slasher, le long métrage se tourne dans l'État du Maryland, et plus particulièrement à Baltimore, la ville de John Waters ! La distribution se voit recrutée chez les comédiens de théâtre et autres acteurs débutants trouvés dans des castings. Parmi les sept résidentes de la maison titre, la plupart ne poursuivront pas plus avant leur carrière. Mais certaines seront tout de même des visages habituels de la télévision, avec une mention spéciale à Eileen Davidson appelée à devenir un pilier de la série AMOUR, GLOIRE ET BEAUTE !
Après une dure année d'étude, les sept étudiantes occupant une maison de campus envisagent d'organiser une grande fête. Mais elles se heurtent à la mauvaise volonté de leur logeuse, madame Slater, une enquiquineuse rabat-joie. Menée par la garce Vicki, les filles décident de lui jouer un tour cruel. Elles ignorent que son passé de femme cache un lourd secret...
Quand THE HOUSE ON SORORITY ROW débarque sur les écrans américains en 1983, la mode des Slashers s'avère plus qu'entamée. Les sagas HALLOWEEN et VENDREDI 13 en sont à leurs troisièmes volumes. Cette vague localisée à la fin des années soixante-dix et au début des années quatre-vingts a déjà fourni la plupart de ses classiques, comme LE BAL DE L'HORREUR, MEURTRES A LA SAINT-VALENTIN et autres MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME...
Plaçant ses billes sur une formule éprouvée, THE HOUSE OF SORORITY ROW reprend sans vergogne certains poncifs antérieurement exploités. Un psychiatre se change en chasseur de psychopathes (LA NUIT DES MASQUES), le tueur utilise une arme fétiche peu commune (ici une canne), une fraternité étudiante sert de cadre à ces crimes (BLACK CHRISTMAS)... L'unité de temps d'une journée environ, juste précédée par un préambule se déroulant plusieurs années auparavant, évoque aussi le film de John Carpenter. Saupoudrons tout cela d'un bal de fin d'années, d'une farce qui tourne mal, de vengeance, et la recette semble toute prête à être servie...
THE HOUSE OF SORORITY ROW se distingue pourtant en plusieurs aspects. L'installation de l'intrigue dans une communauté complètement féminine lui donne un cachet subtilement différent, permettant de glisser un brin d'érotisme plaisant. De plus, le récit repose sur une histoire policière, avec recherche et dissimulation à répétition d'un cadavre, apportant un rehaut de suspens bienvenu.
Si le fond de l'œuvre ne se distingue guère par sa nouveauté, sa forme se signale quant à elle par un soin technique réel. La mise en scène et la photographie frappent par une élaboration étonnante dans le cadre d'un Slasher, en particulier pour un métrage tourné hors d'un cadre professionnel classique. Travellings et montage élaborés apportent un vrai sceau de qualité cinématographique, compensant largement des moyens par ailleurs réduits. Les séquences de meurtres et de tension s'avèrent mises en scène avec diversité et dextérité, sans chercher à dépasser toutes les limites du Gore.
THE HOUSE ON SORORITY ROW séduit aussi par la subtilité de son atmosphère. L'ambiance de cette maison ancienne fonctionne à plein régime, avec sa piscine nauséabonde et abandonnée, sa cave à la peinture décrépie, ses chambres aux boiseries centenaires, et surtout cet inquiétant grenier tapissé de figures de clowns rétro, peuplé de jouets antiques trop propres pour ne pas être suspects...
Enfin, THE HOUSE ON SORORITY ROW se distingue par une superbe musique signée Richard Band, magnifique composition orchestrale appelée à rester longtemps dans la mémoire du spectateur. Subtilement orchestrée, variée, elle fait indéniablement «riche» et apporte une singularité très positive.
Sans rien révolutionner, THE HOUSE ON SORORITY ROW se distingue donc positivement par des qualités cinématographiques tout à fait satisfaisantes, une ambiance bien à lui, parfois onirique et inquiétante. Bien que tardif, il mérite de figurer parmi les bonnes réussites d'un genre pourtant ingrat, aux côtés de titres comme LE MONSTRE DU TRAIN, LE BAL DE L'HORREUR ou MEURTRES A LA SAINT-VALENTIN.
A sa sortie, THE HOUSE ON SORORITY ROW ne connaît qu'un retentissement discret, débarquant tardivement en France à la fin des années quatre-vingts, directement en vidéo et sous son titre anglo-saxon. Il n'a jamais été édité dans notre pays en DVD, mais a connu une meilleure fortune aux États Unis où déjà trois éditions se sont succédées.
La première est sortie chez Elite en 2000, proposant le film accompagné de sa seule bande annonce. En 2009 sort l'obligatoire remake baptisé en France SOEURS DE SANG (à ne pas confondre avec le film de De Palma !), qui donne l'occasion à Liberation Entertainment, petit éditeur américain, de publier une édition «25ème anniversaire» la même année. C'est ce disque que nous allons ici chroniquer.
Ce DVD de 2009 propose d'emblée une copie acceptable en 16/9 au format 1.85, mais trahissant tout de même des limites évidentes : la résolution n'est pas toujours optimale, la compression peut se faire sentir (avec deux cas très nets de pixellisations), quelques rayures évidentes se repèrent. Il ne faut pas s'attendre à du matériel de démonstration : ni la copie d'origine, ni le travail numérique ne se montrent irréprochables. Cela dit, les défauts les plus saillants restent ponctuels et THE HOUSE ON SORORITY ROW se suit tout de même agréablement sur ce disque.
Originellement, ce film a été proposé avec un mixage mono. Liberation Entertainment s'est senti obligé de bidouiller des remix (en 5.1 et en stéréo) moyennement convaincants. Les dialogues ne sont pas toujours bien audibles, parfois noyés dans un bruit de fond envahissant, tandis que les effets arrières peuvent être artificiels, assortis d'échos déplaisants. Cela se supporte, mais nous aurions apprécié de bénéficier du mixage d'origine. Là où cette seconde édition se distingue, c'est en étant la seule à proposer une option francophone, à savoir un doublage français remixé lui aussi en stéréo, qui permet aux rétifs à la langue de Sean Cunningham de profiter de ce film en DVD !
En terme de suppléments, ce disque apporte un vrai plus par rapport au disque Elite. Ainsi, il contient un commentaire audio enregistré par Mark Rosman et deux de ses actrices, à savoir Kathryn McNeil et Eileen Davidson. Un commentaire dans la bonne humeur, au cours duquel Mark Rosman se montre volubile quant à ses souvenirs sur la création et le tournage de son film. La piste tend à s'essouffler en fin de métrage, mais reste raisonnablement informative.
Nous trouvons aussi une sympathique petite galerie de photos de plateau et de tournage défilant durant deux minutes. Une comparaison story-board/scène filmée sur trois séquences peut aussi être consultée (quatre minutes pour les trois).
Un court bonus présenté comme une «fin alternative» est en fait une photo de tournage commentée par Mark Rosman, décrivant une scène finale retirée par les distributeurs l'ayant jugé trop sombre. Le métrage se termine maintenant sur un plan ambiguë, loin d'être une fin joyeuse néanmoins. Nous disposons enfin d'un bande annonce d'époque en 16/9 pour clore le tout.
Diverses autres bandes annonces de titres distribués par le même éditeur sont aussi proposées, comme TOKYO !, JUST BURIED et ONE-EYED MONSTER pour les titres liés au fantastique, le documentaire SECOND SKIN sur les accros aux jeux de rôles en ligne multijoueurs, ou encore SHOTGUN STORIES de Jeff Nichols.
En janvier 2012, c'est Scorpion qui a sorti une troisième édition DVD américaine, avec un nouveau télécinéma, de nouveaux suppléments et la piste originale anglaise mono. L'édition Libération Entertainment peut sembler un brin caduque, mais la présence de la version française absente des autres disques en fait tout de même un disque susceptible d'intéresser les fantasticophiles français.