Les Lutz visitent à Amityville, Long Island, une maison dont
ils tombent tout de suite amoureux. Malgré son coût élevé
pour leur modeste bourse, c'est une affaire. Ils sont tellement enthousiasmés
par le charme de la maison et par son environnement paisible, qu'ils
signent l'acte de vente sur le champ. Un mois plus tard, ils emménagent
avec les trois enfants, issus d'un premier mariage de Cathy. Tandis
qu'ils goûtent leur bonheur de posséder cette ravissante
maison et de voir que les enfants l'ont déjà adoptée
en courant le long de la rivière et poussant de grands cris de
joie, le Père Delaney arrive chez eux pour bénir la maison.
Ne trouvant personne, il monte à l'étage où il
croit distinguer des rires d'enfants. Il entre dans l'une des pièces,
il voit toute la petite famille dehors, et tente de les appeler, quand
soudain, une nuée de mouches venues de nulle part emplit la pièce
et le tétanisent d'effroi. Il suffoque, quand tout à coup,
il entend une voix menaçante qui lui intime l'ordre de partir.
AMITYVILLE part d'un fait divers tragique mais somme toute "banal", l'assassinat par un jeune homme de ses parents et de ses quatre frères et soeurs qui dormaient. L'imaginaire populaire, exacerbé par les questions restées sans réponses sur les motivations de l'assassin, ou plutôt son absence de motivation, a donné lieu à un fantasme collectif grandissant et toujours existant, quelques 25 ans plus tard. Des questions ressurgissant avec les mésaventures des Lutz qui ont acheté la maison après le drame. La maison d'Amityville gagna alors son statut de maison hantée. On connaît bien aujourd'hui ce phénomène qui consiste à colporter une rumeur qui s'amplifie en même temps qu'elle se déforme et qui a pour conséquences diverses des accès de paranoïa, de psychose... Si les médias de l'époque ne s'étaient pas emparés des évènements qui s'y déroulèrent, Amityville serait restée une petite ville perdue et ensommeillée, à quelques encablures de New-York. Mais l'atrocité des faits a attiré la presse qui après en avoir fait ses choux gras, a laissé la voie libre à quelques écrivains qui ont entrepris de relater l'histoire, de la romancer, pour ceux qui auraient raté le début.
Des tas d'histoires, toutes plus rocambolesques les unes que les autres, ont flotté autour des meurtres commis dans cette maison coquette située dans la petite bourgade d'Amityville et de nombreuses personnes se sont essayé à trouver des explications et fonder des hypothèses sur la maison et son caractère surnaturel. Il existe des hypothèses mettant en scène des indiens de tribus reculées voire disparues depuis belle lurette, des cimetières sous ou autour de la maison, avec des options quant à leur origine : l'un prétendument indien et barbare, suggère que les fous et les mourants étaient jetés dans ce lieu et soumis au soleil et à toutes les intempéries possibles, l'autre choix de cimetière étant d'un genre plus classique mais quand même. Je passerai sur le sorcier banni de Salem et venu se réfugier dans cette maison... Sans compter bien évidemment les nombreuses hypothèses de possession diabolique. Un véritable creuset pour toute l'industrie du cinéma horrifique. Bref, la maison est passée entre de nombreuses mains et tous les propriétaires qui l'ont achetée après les Lutz n'ont jamais signalé une quelconque manifestation anormale.
L'histoire de cette maison, soigneusement relatée par Jay Anson, dans le livre The Amityville Horror est, dès sa sortie, un best-seller. De quoi conforter de nombreuses personnes sur le fait que cette maison était effectivement hantée. C'est sur la fois des déclarations des Lutz eux-mêmes que l'écrivain s'est basé pour écrire son livre, témoignages qu'il a personnellement recueillis auprès de la famille persécutée par les mauvais esprits. Un best-seller et une période où le diable a le vent en poupe dans les salles obscures (Le succès de LA MALEDICTION suivant celui de L'EXORCISTE), il n'en faut pas plus pour que Samuel Arkoff s'intéresse au bouquin et en achète les droits pour une adaptation cinématographique.
Tout comme le livre, AMITYVILLE
est présenté comme un film relatant une histoire vraie,
utilisant une narration découpée en jours afin de bien
appuyer sur le fait qu'on relate des faits réels. L'effet sur
le spectateur est garanti : à chaque jour qui s'égrène,
il est tenu en haleine, s'attendant à ce que l'intrigue se dénoue.
La tension monte au fil des jours, chez les Lutz, mais aussi chez le
spectateur qui attend un final grandiloquent. Le succès de AMITYVILLE
était déjà assuré grâce au carton
qu'avait fait le livre dont il était tiré, il suffisait,
pour convaincre les plus récalcitrants, de leur signaler qu'ils
auraient aussi peur qu'en voyant L'EXORCISTE
ou ROSEMARY'S
BABY, à la différence que cette histoire était,
elle, totalement vraie. Le livre avait rajouté une épaisse
et généreuse couche d'inventions et d'élucubrations,
le film a suivi le mouvement et Stuart
Rosenberg accompagné de son scénariste ont pris quelques
libertés d'interprétation, eux aussi. L'auteur, vu ses
procédés, pouvait difficilement leur en tenir rigueur...Pour
ne citer qu'un exemple, le prêtre, interprété par
Rod Steiger, prend
une très large place dans le récit, tandis qu'il se contentait
de bénir la maison dans le livre.
Stuart Rosenberg et Sandor Stern n'hésitent pas à brouiller les pistes. Intentionnel ou pas, cela fonctionne. George Lutz perd la boule et la population le confond avec l'assassin originel. Hallucination collective ? Réalité ? Ne comptez pas sur le film pour vous donner la réponse sur cette question où l'on entrevoit un thème très similaire à celui de SHINING (la hache y compris !) réalisé un peu plus tard. On brouille les pistes et on en profite pour multiplier les dangers : le père, toujours, les mouches, les objets en mouvement Fait pas bon s'éterniser dans cette bicoque. Y compris pour le spectateur qui se laisse berner à un ou deux moments. S'en tirant avec une bonne sueur froide. Sur la fin, on fonce tête baissée dans l'exagération, entre autre un cochon à la fenêtre, mais trop tard, on est dedans et on suit l'intrigue. Pas mal pour un film qui accuse ses vingt ans. Deux raisons évidentes à cela. La première, ce fameux postulat de l'histoire vraie. Mais surtout le fait que le sujet de la maison hantée est proche de nous. Dans le noir et la pénombre d'un placard, d'une cave ou d'un grenier, on ressent toujours cette appréhension et cette peur de l'inconnu. En confiance dans une grande maison, il suffit d'un craquement suspect au milieu de la nuit pour commencer à se poser des questions.
Lalo Schifrin avait composé une partition pour L'EXORCISTE. Rejetée par William Friedkin, il ressort de ses cartons pour AMITYVILLE la pièce musicale quelques années plus tard et après quelques petits ajustements. Voilà un recyclage heureux tant la musique s'intègre harmonieusement à la narration.
La ville d'Amityville n'a jamais vu d'un très bon oeil tout le tapage qui a été fait autour de ces meurtres et de cette "maudite" (pour le coup) maison. La municipalité a d'ailleurs refusé à l'équipe de AMYTIVILLE de tourner sur les lieux mêmes, en l'occurrence la maison et ses environs. La ville coule aujourd'hui des jours paisibles, très loin de cette mauvaise publicité. Cela n'empêche pas le mythe de perdurer sans compter les nombreuses suites données au film (AMITYVILLE 2 : LE POSSEDE, AMITYVILLE 3-D ).
On ne sait pas si la maison d'AMITYVILLE est hantée ou possédée ! On se demande par contre si la branche européenne de la MGM n'aurait pas quelques problèmes avec des esprits frappeurs ou un cas de possession maléfique au sein de sa chaîne de production. Une fois de plus, le sous-titrage français disparaît. On pensait cette époque révolue (voir ROLLERBALL) mais avec LA PART DES TENEBRES à paraître en même temps que AMITYVILLE, il y a de quoi se poser des questions ! On constate encore une fois que les sous-titrages français sont déjà présents sur le disque américain édité par le même éditeur. Ca fait peur ! Et puisque nous y sommes à propos des griefs, on se demande pourquoi on doit en plus, avoir une coupure lors du changement de couche alors qu'en dehors du film, il n'y a pas grand chose sur le disque. Un simple couche aurait gommé ce problème.
En dehors de ces gros problèmes, le disque de AMITYVILLE n'est pas laid à regarder. L'image et le son s'en tirent assez bien. Les bandes sonores restent en Mono d'origine et on notera une mention sur la jaquette expliquant que l'une d'elles (on suppose) a été restaurée pour obtenir le meilleur rendu. Comme ça, on penche pour la version originale en anglais qui sonne plus clairement et surtout de manière plus réaliste. Seul problème, on y revient, sans sous-titrage, bien peu de personnes en France en bénéficieront ! Il faudra donc se tourner vers la version doublée bien moins riche en détails et surtout beaucoup plus plate.
Le strict minimum est appliqué à cette édition. AMITYVILLE est un classique de l'horreur. Pas un "classique" tout court ni même un blockbuster. Pas la peine d'attendre une quelconque édition spéciale sur trente DVD avec un remix high-tech et un nombre de bonus à se perdre dans les menus. Faire le tour du disque de AMITYVILLE ne prend que quelques secondes sans compter les deux minutes nécessaires pour mater la bande-annonce.