Quatre jeunes femmes partent en voiture dans la forêt canadienne pour un week-end de camping sauvage. Monumentale erreur ! Elles vont rencontrer en chemin deux bouseux particulièrement tarés qui vont les prendre en chasse.
Dans les allées du Marché du Film à Cannes 2010, nous nous sommes vus remettre le flyer de BREAK des mains d'une jolie hôtesse. L'affiche, représentant une paire de jambes sectionnées et pendues au bout d'une corde, était estampillée : «peut-être le film le plus controversé de la Croisette en 2010». Une annonce aussi choc qu'autoproclamée, néanmoins nuancée par un timide et mignon «peut-être» en début de phrase. Qu'importe le procédé marketing grossier, nous étions dans la salle pour découvrir la bête le soir même. On nous a promis du gore extrême et un métrage dérangeant. Le film commence et la promesse d'un spectacle traumatique s'efface peu à peu derrière un survival d'action aussi fun que gore. Est-ce que l'on a perdu au change ? Pas sûr !
Malgré l'emploi de la langue anglaise, BREAK est un film allemand réalisé par le débutant Matthias Olof Eich. C'est un tout petit budget qui a, dans un premier temps, l'ambition de dépasser ses origines pour s'adresser à un public international. A ce niveau, BREAK est une très étonnante surprise. On se croirait devant un indépendant américain et jamais devant un film semi-pro tourné par nos voisins d'outre-Rhin en Allemagne. Le modèle américain (ou anglophone) est cité jusqu'au bout dans les deux influences majeures de BREAK qui tente de mixer le classique DELIVRANCE à la sauce hardcore tout en empruntant le concept d'un casting entièrement féminin à THE DESCENT. Le groupe d'héroïnes rappelle immédiatement le film de Neil Marshall, notamment lorsqu'elles décident de se prendre en photo, inconscientes alors du drame qui les attend.
La première partie de BREAK, qui nous sert d'exposition, est clairement la plus faible du métrage. Le scénario meuble autour de la psychologie de comptoir de nos jeunes femmes et révèle vite ses limites d'écriture narrative. Heureusement, les quatre comédiennes ont suffisamment de pep's pour rendre attachants leurs personnages pourtant dessinés au crayon ultra gras. Passée cette longue intro, permettant sans aucun doute au film d'atteindre la durée réglementaire de 90 minutes, les choses sérieuses commencent lorsque les filles croisent la route d'un campagnard particulièrement hostile. Voyez plutôt : l'homme est grand, gros, cradingue, chauve, borgne, affublé d'une balafre lui parcourant le visage, la dentition de travers et la bouche baveuse. D'ici à ce que le spectateur se dise que ça va être lui le méchant de l'histoire, il n'y a qu'un pas ! La caricature est trop énorme pour être vraie, et pourtant, cet homme et un acolyte (au look quand même moins chargé) seront bel et bien les némesis de nos héroïnes.
Non seulement, on s'aperçoit vite que BREAK ne va pas chercher à contourner les clichés du survival, mais qu'il va en plus sauter à pieds joints dedans avec le sourire du gamin fier de sa bêtise. Et contrairement à toute rationalisation, ça marche ! Aussi généreux que doucement crétin, BREAK enchaîne les péripéties outrées toutes plus amusantes les unes des autres. Comme lorsqu'une jeune fille meurt la tête percée par une flèche en prenant une photo, la flèche traversant l'objectif jusqu'à la boite crânienne de la fille pour fixer l'appareil sur le visage. Ca charcle dur dans BREAK, l'efficacité ayant priorité absolue sur la moindre cohérence. Le fin du fin étant lorsque l'une des survivantes décharge deux coups de fusil à pompe à bout portant dans le ventre de l'un des méchants. Ce dernier ne va quand même pas se relever ? Et bien si ! Et en pleine forme en plus, l'occasion pour le film d'enchaîner à toute vitesse sur une course de voitures effrénée sur les routes forestières.
Même si BREAK est particulièrement généreux en terme de gore et de sévices, le film n'est pour autant pas dérangeant. Oubliez vite la tagline sur le flyer de Cannes, ou bien n'extrapolez pas sur les origines allemandes du film dont certains «cinéastes» locaux sont les superstars underground de l'horreur ultra extrême. BREAK contient des séquences aussi sanguinolentes qu'inoffensives par leur outrance. Seule une séquence dérangeante émerge du film, lorsque l'un des personnages féminins (Marina Anna Eich) se fait violer par un redneck. Nue et couverte de sang, la comédienne subit une séquence, certes suggestive, mais diablement longue et insistante. La scène du viol est clairement la séquence choc de BREAK. Une scène qui n'a rien de traumatisante ni de révolutionnaire mais qui a le mérite d'annihiler la convivialité du film durant ces quelques minutes.
On pourrait traiter BREAK de film idiot et absurde, nous l'avons trouvé pour notre part extrêmement sympa et amusant. BREAK est un survival branquignol et qui ne doute de rien. Le métrage n'ennuie pas malgré la rigidité des codes du survival que nous connaissons tous déjà par coeur. Ce n'était par exemple pas le cas du norvégien MANHUNT (ROVDYR) de Patrik Syversen, un exercice de style aussi soigné qu'immensément ennuyeux. BREAK est un pur film de festival, à découvrir dans la convivialité d'une salle réactive. Le film a notamment été présenté avec succès à Sitges en 2009 lors d'une séance menée par un public aussi chaud que rigolard.