Jill, la veuve du tueur Jigsaw, reçoit en héritage une boîte mystérieuse dont le contenu lui est soutiré par l'agent Hoffman. Ce policier, qui a repris les activités du tueur au puzzle, met en place une nouvelle série de pièges en suivant ses indications. Il s'agit de mettre à l'épreuve un assureur peu scrupuleux...
Comme tous les ans depuis 2005, l'automne voit venir le SAW de l'année. Il est cette fois-ci mis en scène par le monteur Kevin Greuter, complice de Darren Lynn Bousman sur les second, troisième et quatrième volets de la saga, ainsi que sur REPO! THE GENETIC OPERA. Le studio Twisted Pictures assure toujours la production tandis que Lions Gate distribue le métrage, conformément à la routine en place depuis le début de la saga.
Comme dans les précédents épisodes de ce que nous appellerons la «trilogie Hoffman» (regroupant SAW IV, SAW V et SAW VI), nous retrouvons en vedette Costas Mandylor dans le rôle de ce policier, ainsi que Betsy Russel dans celui de Jill. Tobin Bell a droit à son lot de flash-back nous révélant de nouveaux éléments sur le passé de Jigsaw. Les amateurs apprécieront le retour assez en avant de quelques comédiens de la saga laissés de côté, tels Shawnee Smith (Amanda) ou Athena Karkaris (l'Agent Perez)...
La saga SAW est certainement la réussite la plus populaire des années 2000 dans le domaine de l'horreur. Son personnage principal, Jigsaw s'est affirmé comme un méchant machiavélique dont le grand public raffole, quand bien même il décède durant le troisième volet (à moins que ce ne soit le quatrième ?). Il a ainsi rejoint le clan très select des grands génies du mal, à l'instar des Fu Manchu, Fantomas et autres Zarroff. Alors que le sixième volet de séries comme les Freddy ou Vendredi 13 tendaient à partir dans les facilités de la parodie, SAW reste une saga sérieuse. La seule évolution réelle étant que Jigsaw passe de moins en moins pour un psychopathe, et de plus en plus pour un justicier de l'atroce ! Même sa femme qui condamnait ses actions se montre désormais compréhensive. Un point de vue toutefois nuancé par une séquence du début du métrage...
SAW V, le plus faible de la saga à ce jour, nous montrait le martyr de victimes sans grand rapport avec Jigsaw lui-même. Ce qui tendait à éloigner le récit de son personnage central. SAW VI a l'intelligence de supplicier une équipe réellement impliquée dans la tragédie de John, comme le docteur Gordon au temps du premier épisode. Nous suivons ainsi les mésaventures punitives d'un assureur médical plaçant le profit au-dessus de toute considération humaniste, fourvoyant le principe de solidarité mutualiste sous le prétexte trop facile d'un «business» dénué de toute morale. Il est intéressant de remarquer que ce SAW VI très politisé sort en France la semaine durant laquelle le Congrès des États Unis d'Amérique vote le principe révolutionnaire (pour cette nation !) d'une sécurité sociale universelle régie par les autorités publiques !
Comparé au cinquième SAW, nous apprécions aussi une réalisation plus tonique, un récit se déployant plus rapidement. Les fans - que nous sommes - apprécient que la marionnette Gédéon ait le droit à une scène dont il est la vedette et au terme de laquelle résonne son ricanement si caractéristique ! Sans retrouver la folie gore des volets réalisés par Darren Lynn Bousman, SAW VI fait preuve d'un entrain réel dans l'horreur. Alors que le cinquième film nous livrait des mises à mort parfois soft (électrocution peu spectaculaire, explosion hors champs), Kevin Greuter étale dès son prologue des supplices tranchants et explicites ! Le final est en ce sens exemplaire, nous renvoyant aux dénouements très efficaces des trois premiers volets. Enfin, nous apprécions un renouvellement dans les pièges, en particulier un supplice du tourniquet en tous points mémorable !
Évidemment, nous ne pouvons pas nier certaines faiblesses inhérentes à la saga depuis SAW IV. L'écriture paraît toujours plus tiré par les cheveux (ce qui a son charme et rejoint le caractère excessif inhérent à la saga), l'agréable familiarité cède parfois la place à une impression de répétition et de déjà-vu. Qui plus est, si Kevin Greuter effectue de louables efforts, sa mise en scène n'a ni la virtuosité inventive d'un James Wan, ni l'énergie brutale d'un Bousman.
Cela n'empêche pas ce SAW VI de s'avérer une agréable surprise, un retour en forme pour la série indépendante la plus rentable des années 2000. Nous ne nous ferons donc pas prier pour attendre de pied ferme la sortie de SAW VII en 2010, prochain rendez-vous avec Jigsaw, héros maléfique transformant les salles de cinéma parfois trop aseptisées en émules sanguinolentes des trains fantômes ou du théâtre Grand Guignol !