Dawn vit avec sa mère, son beau père et son demi-frère. Si les relations avec ses parents sont plutôt bonnes, elle n'a que peu d'atomes crochus avec son demi-frère. Rien d'étonnant puisque ce dernier s'avère plutôt rebelle et libertaire alors que Dawn, de son côté, milite dans une association prônant l'abstinence avant le mariage. La jeune fille doit par ailleurs composer avec un autre souci qui pourraient bien mettre en péril ses éventuelles et futures relations sexuelles...
Fils de l'artiste peintre Roy Lichtenstein, Mitchell Lichtenstein débute dans le cinéma en devenant acteur. Il tournera ainsi pour Robert Altman (STREAMERS) ou Ang Lee (GARCON D'HONNEUR). Mais il a toujours écrit et il en vient à rédiger des scénarios qui resteront dans un placard. A l'exception de TEETH qu'il compte confier à une réalisatrice pensant que le sujet s'accordera mieux avec une sensibilité féminine. Toutefois, suite à une courte collaboration avec une cinéaste, il sera amené à réaliser lui-même un film dont le sujet a tout pour sombrer dans la pochade facile et les gags scabreux. Au centre du sujet, on trouve une jeune femme qui est pourvu d'un vagin équipé de dents acérées. Issu d'anciennes croyances, ce thème ne sera que peu souvent traité de façon explicite. On se souviendra ainsi de l'indonésien LADY TERMINATOR ou du bien plus récent KILLER PUSSY en provenance du Japon. Ouvertement Bis, ses deux films n'ont à vrai dire que peu de rapport avec TEETH en dehors de leurs héroïnes affublées d'organes génitaux castrateurs. Bien sûr, on pourrait être tenté de rapprocher le film de Mitchell Lichtenstein des comédies adolescentes américaines qui ont fleuries ces dernières années sur l'écran à l'instar des AMERICAN PIE. Pourtant, le film s'écarte de ses métrages humoristiques en adoptant un ton plus subtil le plaçant parfois du côté de la comédie dramatique et sociale.
Souvent noir, TEETH surprend en ne dressant pas un portrait manichéen et moral. Le film décrit ainsi une association d'abstinence composée de personnages un peu concons. Quelques scènes font plutôt mouche en décrivant l'absurdité de ses membres comme un moment où quatre amis doivent choisir un film devant le fronton d'un cinéma. De même, les réunions de cette association font bien vite penser à une secte qui lave les cerveaux de ses adeptes... Le personnage de Dawn en vient à culpabiliser de ses propres envies qu'elle réprime et cache pour éviter d'être frappé d'ostracisme. La gente masculine est aussi bien mise à mal puisque la plupart de ceux qui sont décrits ici souffrent de leurs pulsions et peinent à vivre leurs relations avec les femmes. C'est le cas de son petit ami mais aussi de son frère. A propos de ce personnage, le cinéaste évoque d'ailleurs, sans le dire ouvertement, ses pratiques sexuelles qui sont issus d'un mauvais souvenir du passé. En dehors de la figure paternelle, légèrement effacée, TEETH donne une image assez peu reluisante des hommes, allant jusqu'à nous montrer un pervers pépère aussi amusant que repoussant dans sa façon d'agir. Sujet de toutes les convoitises notre héroïne devient alors une sorte d'ange exterminateur qui utilise son sexe pour châtier ceux qui abusent d'elle. Le film pourrait à ce niveau délivrer un message gênant mais il n'en est rien puisque la jeune femme ne rechigne pas pour autant à des ébats sexuels satisfaisants et détendues.
En nous montrant une femme castratrice au sens littérale du terme, TEETH montre le résultat de sanglants découpages de pénis. Les séquences sont filmés sans cacher les restes du bout de viande mais on ne s'appesantit pas lourdement sur ses débordements gores. On pourrait d'ailleurs reprocher au cinéaste de ne pas avoir été plus loin et donc de faire preuve d'un manque d'audace. Néanmoins, c'est bel et bien grâce à cette retenue que TEETH arrive le plus souvent à rester en équilibre aux limites très scabreuses de son sujet. Et ce même lorsque les situations prennent des dimensions pour le moins «énormes» comme lors d'une visite chez un gynécologue qui est rapidement perçue comme une agression. En traitant ce sujet «mythologique», Mitchell Lichtenstein semble donc surtout vouloir décrire les appréhensions des adolescents face à la découverte de leur sexualité.
Plutôt bien vu dans la description et l'environnement de la plupart des personnages, TEETH manque tout de même par endroit d'une véritable maîtrise de la mise en scène. Ce premier film n'a donc rien d'un sans faute mais le traitement emporte définitivement l'adhésion surtout que TEETH est porté par l'interprétation extraordinaire de son actrice principale. Jess Weixler sera d'ailleurs récompensée d'un prix pour sa prestation lors du passage du film au Festival de Sundance. A ses côtés, on reconnaîtra John Hensley, l'un des acteurs récurrents de la série NIP/TUCK, qui s'avère lui aussi vraiment bon. Au final, TEETH est une bonne petite surprise dans un genre porté le plus souvent par un humour lourdingue. Malgré son sujet, le film de Mitchell Lichtenstein est au contraire plus digeste et s'avère même très attachant.
Pour sa sortie dans les salles de cinéma françaises, l'affiche de TEETH était accompagnée d'une accroche un peu énigmatique : «Chaque rose a ses épines». Changement d'orientation pour la sortie en DVD car TF1 Vidéo affuble le film d'une mention qui essaie de le placer dans le registre de la comédie balourde. Ainsi, on peut lire «Les dents de l'amour». Le visuel essaie, lui aussi, de se rattacher aux comédies adolescentes, délaissant le côté un peu plus classe de sa sortie cinéma. Sur le disque, le film est présenté dans un joli transfert 16/9 au format cinéma respecté. L'image conserve son côté cinéma, avec par endroit un petit peu de grain, et délivre un rendu sympathique. La sonorisation se fait au travers de pistes audio en Dolby Digital 5.1. Sans être spécialement extraordinaire, elles remplissent bien la zone d'écoute et sont plutôt de très bonne facture. Evidemment, les deux pistes audio du film sont dédiées à la version originale anglaise sous-titrée et au doublage français.
En ce qui concerne les suppléments, il est conseillé de terminer par le commentaire audio du réalisateur. Car il ne s'avère pas exceptionnel, Mitchell Lichtenstein donne l'impression de ramer pour donner des informations pertinentes. Alors bien sûr, on y trouve des éclaircissements, des anecdotes ou des précisions qui ne se trouvent pas le making-of. Mais l'écoute de ce commentaire audio est surtout, par endroit, un peu ennuyeuse. Le making-of d'un peu moins d'une demi-heure est, à ce titre, bien mieux agencé même si à l'arrivée, on peut rester sur sa faim. Il donne la parole aux acteurs, au réalisateur mais aussi à d'autres intervenants comme la décoratrice ou la costumière. Enfin, les scènes coupées sont assez étonnantes puisque certaines d'entre elles auraient très bien pu trouver leur place au sein du métrage terminé. La partie supplémentaire de ce DVD complète à l'arrivée plutôt bien le film. A noter que si la bande-annonce de TEETH n'apparaît pas sur le DVD, on peut voir celles d'autres films distribués par TF1 Vidéo, mais seulement à l'insertion du disque.