La suite de l'un des thrillers les plus sulfureux des années 1990 s'ouvre sur les images d'une voiture de sport traversant les rues de Londres à vive allure. Derrière le volant se trouve Catherine Tramell, son petit ami à moitié inconscient à ses côtés. Se servant de la main de l'homme pour se masturber, elle va perdre le contrôle de la voiture juste au moment de son climax, causant un crash spectaculaire dans le Tamise. L'enquête révèle que l'homme était peut-être mort peu avant l'accident, une substance illicite trouvée dans son sang venant confirmer cette thèse. Catherine Tramell se voit obligée de se soumettre à une évaluation psychiatrique qui va la conduire à un drôle de jeu de pouvoir avec le psychiatre appointé pour l'occasion, le Dr Glass.
A première vue, le concept ne semble pas très différent de celui qui compose BASIC INSTINCT premier du nom. Mais là où le film de Paul Verhoeven mettait plus en avant les fantasmes ou les actes sexuels de façon très crus, cette séquelle se voit dotée d'une ambiance un peu moins explicite et moins vulgaire. Nous évoluons bien dans une fiction où les sentiments sont portés à l'extrême, où la morale ne réprime personne, où les instinct les plus… basiques sont lâchés. Tout au long du métrage, les deux personnages principaux, Glass et Tramell, vont se tourner autour, tentant de se dominer l'un l'autre de toutes les façons possibles : Tramell par sa sensualité provocatrice et le docteur Glass par son statut de psychiatre. Même lorsque l'un se soumet aux ordres/désirs de l'autre, on sent que c'est pour mieux dominer et ce petit jeu de manipulation va se maintenir jusqu'à une fin tout aussi ambiguë que ce qui a précèdé. Exit donc l'érotisme cru, bestial et direct du premier volet qui laisse place à un métrage qui comporte bien plus de profondeur psychologique de par le développement de ses personnages, ce qui ne manquera pas de décevoir les fans du réalisateur hollandais très politiquement incorrect !
La possibilité de cette séquelle circulait à Hollywood depuis le milieu des années 1990 mais toutes sortes de problèmes ont contraint les producteurs à tout simplement attendre. Puis Michael Caton-Jones (SHOOTING DOGS, DOC HOLLYWOOD) se voit proposé le script et les choses se mettent enfin en place avec toutefois la grande question : Qui remplacera Michael Douglas face à la prédatrice sans scrupules que joue Sharon Stone ? Le choix se porte sur un acteur anglais de renom dans son pays, David Morrissey. Et force est de constater qu'il remplit honorablement son contrat, faisant passer de façon subtile ses émotions à travers des mimiques ou même juste des regards qui en disent long. L'alchimie entre Morrissey et Stone est évidente, les acteurs ont de toute évidence pris un grand plaisir à se mesurer l'un à l'autre ce qui donne un cachet plutôt naturel à des comportements autrement plus tordus.
L'actrice Charlotte Rampling joue le rôle d'une amie psy de Glass, Milena Gardosh, à l'instar de Jeanne Tripplehorn dans le premier volet. Mais cette fois, elle n'a aucun lien intime avec Glass et Tramell ne va pas la séduire physiquement. Rampling possède une classe innée et une grâce évidente avec laquelle Stone a du mal à rivaliser lors de leurs rares scènes ensemble. Milena est un peu en retrait durant le film ce qui est dommage en particulier lors du dénouement. Une scène révélatrice entre les deux femmes qui se retrouve dans les scènes coupées aurait mérité de rester dans le film car elle aurait constitué un plus lors d'une scène clé de la fin, d'autant plus que le passage sacrifié dure moins d'une minute.
La romancière Catherine Tramell est encore une fois campée par la seule que l'on imagine dans le rôle, Sharon Stone. L'actrice s'approche dangereusement de ses 50 ans et a sans doute vu là une dernière chance de se retrouver propulsée sur le devant de la scène, comme cela lui était arrivé à la sortie du premier volet. Mis à part le fait d'avoir écarté les jambes pour nous révéler sa blondeur naturelle, on ne peut pas dire qu'elle ait ébloui qui que ce soit de par ses talents d'actrice. On peut même fortement arguer que son rôle dans CASINO soit le meilleur de sa longue carrière (plus de 40 films sur son curiculum vitae), ayant dévoilé pour un bref instant une vraie comédienne capable de faire passer des émotions. Dans la reprise de son rôle de romancière décadente, comment dire ? En gros, elle ne fait rien de plus que du copier-coller avec juste une impressionnante garde-robe en plus. Il est d'ailleurs étonnant qu'elle ait même eu le temps de jouer une seule scène vu le temps d'habillage et de maquillage que cela ait dû entraîner…
Catherine Tramell est une mante religieuse, sexuellement arrogante et qui calcule ses moindres paroles et gestes jusqu'au bout de ses seins refaits. Stone se coule dans le personnage sans aucune difficulté apparente, le corps plus ferme qu'un bloc de béton, le visage lissé par un lifting de trop, son envie de paraître sensuelle beaucoup trop rentre-dedans pour être titillant. En clair, elle en fait des tonnes. Certes, on est dans un film mais au lieu de nous envoûter, elle devient rapidement insupportable et prend plus des allures de poupée gonflable vivante que de créature de rêve.
Mais une fiction n'étant pas tenue de suivre des règles ni aucune crédibilité, le docteur Glass se découvre petit à petit une véritable obsession pour le fantasme ambulant qu'est Tramell, et qui se révèle brusquement durant une scène de sexe avec sa petite amie. Ils sont au lit dans la position classique du missionnaire lorsque le regard du bon docteur tombe par hasard sur la photo de Tramell ornant un livre qu'il vient d'acheter dans le seul but de la connaître un peu mieux, bien sûr. Un regard et le changement s'opère. Il retourne prestement sa partenaire, attrape ses cheveux et la besogne comme une bête ! Face à Tramell, cependant, il ne laissera rien entrevoir de ses sentiments jusqu'à la fin mais n'étant pas née de la dernière pluie, elle a vite fait de deviner et de le mener par le bout de sa quéquette (la scène de l'orgie dans le bordel de Soho, par exemple).
Les scènes de sexe ne jonchent pas le film comme cela pouvait être le cas pour le métrage de Verhoeven et elles ont le mérite de faire partie intégrante de l'histoire. Alors, cinéaste plus classique oblige, l'on n'a pas droit à des scènes saphiques ni à voir trop de parties intimes mais les acteurs ne sont pas frileux non plus. Evidemment, la question se pose : Est-ce qu'on voit la Sharon à poil ? Oui, enfin presque… A un moment, elle se promène devant Glass, nue sous un peignoir qui va s'ouvrir pour dévoiler son corps dans l'ombre. Peu après, elle se glisse dans un jacuzzi, le buste hors de l'eau, révélant ses jolis flotteurs… pardon, sa poitrine. Il y a également une référence au fameux plan du premier film sauf que Caton-Jones s'auto-référence par la même occasion. Dans la scène, Tramell est assise à califourchon sur une chaise face à Glass, sa robe relevée, son intimité cachée derrière le dossier. Sa pose évoque l'affiche de SCANDAL du même réalisateur où l'actrice Joanne Whalley-Kilmer est nue sur sa chaise, une image fixe qui véhicule un érotisme absent des manières de Stone.
Pour pimenter le tout, les morts vont rapidement s'enchaîner, les victimes étant toutes des proches de l'entourage du docteur Glass. Le psy se retrouve alors pris dans une spirale infernale, surveillé de près par un inspecteur imperturbable et tenace mais camouflant de sombres secrets (excellent David Thewlis). Les deux hommes vont s'adonner à une étrange relation faite tour à tour de méfiance et de confiance à cause de révélations extérieures dont on ne sait pas toujours si elles sont vraies ou pas. Et c'est une constante chez tous les personnages du film, personne n'est vraiment sympathique, tous se révèlent être des monstres d'égoïsme ayant chacun une raison pour détruire quelqu'un. Et ce subtil jeu de pouvoir et de manipulation se tient jusqu'au bout où l'on se rend compte que la perception qu'a chaque personnage du déroulement des faits est plausible. La fin reste ainsi ouverte à l'interprétation personnelle du spectateur sans pour autant le flouer ou le laisser avec une impression de facilité.
Le film est présenté dans un transfert 16/9 respectant le format cinéma d'origine. La qualité est irréprochable et la même chose s'applique au travail incroyable du directeur de la photo, Gyula Pados. La palette de couleur restreinte se concentre sur les tons sombres : bleu, noir et gris. Les différentes scènes sont illuminées de façon à accentuer les sentiments présents et cela fonctionne à merveille car cela reste subtil. A noter également le choix surprenant de présenter un Londres presque méconnaissable de par cette architecture moderne et froide contrastant vivement avec les bus rouges, les bobbys ou les bâtiments anciens que nous connaissons si bien. L'immeuble où se trouve le bureau de Glass est sans doute le plus surprenant de tous, sa forme décidément phallique ne laissant aucun doute quant à sa symbolique ! Petit détail amusant, cet immeuble se retrouve sous la forme d'un briquet appartenant à Tramell.
Les pistes sonores sont au nombre de deux, le doublage français ou la version anglaise aux sous-titres français amovibles. Les deux sont en 5.1 et fortement réussies, en particulier lors des passages habillés par des reprises de la très belle composition de Jerry Goldsmith pour le premier volet. Pour le reste, John Murphy a développé un score un peu plus moderne mais le mélange des deux fonctionne très bien.
Le département des suppléments nous propose plusieurs choses, certaines plus intéressantes que d'autres. Nous commençons par le commentaire audio sous-titré de Michael Caton-Jones qui se révèle presque être un vrai guide pratique pour réalisateur débutant ! Il évoque la genèse du film, la découverte du script sans titre qui lui avait instantanément plu et ses choix conscients lors de l'élaboration d'une séquelle qu'il voulait proche de l'original tout en proposant quelque chose de différent. Les quelques problèmes de continuité sont pointés du doigt avec humour, il fait le tour de ses acteurs, des motivations des personnages et insiste sur le fait qu'un film est un travail d'équipe ou encore que le montage est une étape évidemment décisive. Le tout est livré avec un accent "so British" des plus charmants et le commentaire en entier est un très agréable complément au film. Surtout que l'on se rend compte que ses intentions étaient de n'en faire qu'un pur divertissement dans un univers hors du réel.
Le Making Of, d'une dizaine de minutes, donnent la parole aux différents participants du métrage, les mini interviews étant entrecoupées d'images du film ou de tournage, en particulier l'impressionnante scène d'introduction. Le segment se révèle un véritable Making Of et non juste une bande promotionnelle. Bien que l'on survole l'entière création du film et que l'on ne s'ennuie pas une seconde, on aurait aimé un peu plus de matière à se mettre sous la dent.
Les scènes coupées se comptent au nombre de dix et, à celles-là, s'ajoute la fin alternative, en réalité la fin originale décrite dans le script mais qui fonctionne moins bien dû à l'absence d'ambiguïté. Toutes les scènes sont sous-titrées et l'on peut également choisir d'écouter le commentaire du réalisateur ou pas. Chaque scène est numérotée et la durée est indiquée entre parenthèse, le seul bémol étant de ne pas pouvoir les regarder toutes en continu donc de devoir revenir sur le menu à chaque fois. Il va de soi qu'il est plus intéressant de les regarder avec le commentaire audio et même si le tout se révèle un peu répétitif, Caton-Jones se prête volontiers à l'exercice. Nous n'apprenons rien d'autre que ce qui semble évident : Si les scènes ont été coupées ou raccourcies, c'est pour une raison de longueur ou de dialogue inutile. Le réalisateur aurait bien voulu en garder une ou deux mais malheureusement, d'autres personnes ont eu le dernier mot.
Le supplément suivant au titre évocateur de "Sharon Stone à Paris" n'est malheureusement pas une folle virée nocturne dans la capitale en compagnie d'une actrice se présentant volontiers comme délurée. Non, ce n'est rien d'autre que la fameuse conférence de presse à la sortie du film où l'actrice apparaît comme une célébrité fort contente d'être le centre d'attention, tirée à quatre épingles et possédant si peu de naturel à ne rien projeter d'immédiatement aimable. Stone répond aux questions comme si les journalistes devraient se sentir chanceux d'avoir été convoqués et ses propos ne sont pas toujours captivants. On se demandera d'ailleurs toujours ce qui lui a pris d'évoquer le CPE… Le seul moment où elle montre un peu d'émotion sincère, c'est lorsqu'elle parle du manque de vie privée qu'occasionne une vie sous les spotlights. Cependant, elle ne semble pas complètement regretter son choix de vie…
Les «Bio/filmographies» sont composées de textes à faire défiler à l'aide de la télécommande et le même principe s'applique aux notes de production. Ce dernier se divise en plusieurs segments ayant un rapport au tournage, le problème c'est que la majeure partie est une redite de ce que l'on trouve sur le commentaire audio et dans le Making Of. La présence de ce bonus ne présente pas un très grand intérêt car nous n'apprenons strictement rien de plus.
Ce DVD se conclut par cinq bandes annonces dont la première est celle de BASIC INSTINCT 2, au choix en version originale ou avec son doublage français. Les autres bandes-annonces sont uniquement en version française. Enfin, nous avons le catalogue DVD des titres Océan étalé sur six pages à laquelle s'ajoute une page de crédits.
A défaut de s'imposer comme un mètre étalon du genre, BASIC INSTINCT 2 s'avère une agréable surprise. Un thriller classique à la réalisation solide et efficace, bien rythmé, sans réelle surprise mais très plaisant à regarder.