Nous sommes en pleine mer et un bateau de plaisance brave courageusement la tempête. A son bord, quelques joueurs de cartes, un capitaine inquiet et une jeune demoiselle se caressant langoureusement. Cette dernière, accaparée par sa plaisante activité, ne remarque pas qu'au dessus d'elle, le danger rode. Un vicieux tentacule venu d'on-ne-sait-où va en effet la violer sans ménagement et ce jusqu'à ce que le navire, victime des courants, s'échoue sur une île non répertoriée... Bien loin de cela a lieu un véritable carnage. Un braquage aux enjeux si énormes que les deux truands n'hésiteront pas une seconde à liquider hommes, femmes et poupées en plastique. Aidés de leur complice plantureuse, ils vont se cacher sur la petite île devenue soudainement très populaire. L'île semble à première vue inhabitée mais, bien vite, naufragés et criminels se rendront compte qu'il n'en est rien. Une meute de démons aux dents longues, de zombies au déhanché subtil et de tentacules pervers hantent en effet les lieux, bien décidés à infliger de terribles souffrances aux visiteurs imprudents.
C'est en 1998 que Andreas Bethmann réalise DIE INSEL DER DAMONEN, un film indépendant nous comptant les exploits d'une horde de démons dont les motivations resteront désespérément floues. Manifestement satisfait de son œuvre, l'homme entreprend de lui donner une fausse suite, reprenant elle aussi le triptyque gagnant : Gore, Démons et Fesses. Le métrage s'intitulera DEMON TERROR et sortira en 2000 pour le plus grand "plaisir" des amateurs du genre…
Disons-le tout de suite, la vision de DEMON TERROR a de quoi laisser perplexe. Le film est bien entendu très amateur et laisse une impression d'approximatif assez prévisible. Cependant, ce ne sont ni les acteurs ridicules, ni les effets gores bâclés, ni les scènes d'érotisme poussées qui surprennent. Non, la surprise vient essentiellement du scénario, bien entendu filiforme, incompréhensible mais par-dessus tout… coupé en trois ! En effet, malgré les efforts évidents du filou Bethmann (qui œuvre ici sous le nom de André de Palma) pour mélanger l'ensemble, le spectateur avisé ne pourra s'empêcher de constater que tout cela n'a pas de sens et que certaines interactions n'ont jamais lieu. Alors qu'il avait choisi la solution efficace du film à sketches lorsqu'il avait produit UNHAPPY END, il opte ici pour une autre alternative, celle de mixer maladroitement trois oeuvrettes afin de créer ce qui semble être un melting-pot à vocation démoniaque. Le concept n'est bien évidement pas nouveau et ce type de production en use et en abuse assez souvent. Dans le cas de DEMON TERROR, deux des trois histoires auraient du reste très bien pu s'enchevêtrer sans provoquer la suspicion… Toutes deux contant en effet les mésaventures d'un petit groupe (naufragés ou braqueurs de banques) aux prises avec une pléiade de démons aux canines impressionnantes.
Malheureusement, la troisième histoire, plus cocasse, jure gravement avec l'ensemble. En effet, comment justifier dans le contexte précité les méfaits de vicieux tentacules cherchant à se reproduire en projetant quelques décilitres de semence sur la poitrine de leurs victimes ? La réponse est simple : Cela n'est pas possible. La thématique, l'unité de lieu, les agissements sont tellement antagoniques que malgré les efforts évidents du cinéaste, on ne peut s'empêcher de sourire devant l'arrivée inopinée des appendices violeurs. Ne nous y trompons pas toutefois, si l'ensemble du film n'est absolument pas homogène, cela n'a pas d'incidence sur son intérêt, toutefois très relatif…
Pour ce DEMON TERROR, Bethmann a eu recours à deux sources d'inspiration majeures. Tout d'abord la trilogie des morts-vivants de Romero pour ce qui est du massacre sur l'île. Les références sont évidentes, les démons mordent leurs victimes, dévorent leurs chairs, l'armée est impuissante et stupide, le fléau se transmet par le sang, etc. Nous noterons de plus l'ironie dont fait preuve le final (ou les finaux puisqu'il y a trois fins !), ramenant directement à la conclusion du LA NUIT DE MORTS VIVANTS original.
Dans cette portion, l'action prend le pas sur le caractère sexuel du film. Les gros plans anatomiques et velus rappelant Jesus Franco s'éclipseront bien vite dans l'esprit du spectateur à la vue de quelques scènes définitivement cultes. Citons par exemple celle du braquage à la KILLING ZOE qui nous offrira l'une des plus belles explosions faciales de l'histoire du cinéma. La mort d'une petite victime, un bébé sur son vélo de plastique, ne prête bien entendu pas au rire franc. Pourtant, Bethmann fait fort et provoque instantanément la crampe abdominale de son public en montrant sans complexe (cinq gros plans de deux secondes) une magnifique poupée de plastique rendre l'âme dans un geyser de sauce tomate. Le malheureux jouet rejoindra donc douloureusement ses ancêtres de celluloïd, laissant son public subjugué par le ridicule de la supercherie. A l'image de cette scène, bon nombre de trucages réalisés sans talent viendront anéantir tout espoir de savourer du gore à la Olaf Ittenbach. Nous aurons bien droit à quelques rares membres maladroitement tranchés ou quelques squelettes soigneusement lustrés mais soyons lucides car rien de tout cela ne saurait contenter l'amateur de tripaille artisanale exposée avec complaisance...
Concernant la partie tentaculaire du métrage, c'est plutôt du côté des Hentaï qu'il faudra se tourner et plus particulièrement vers les œuvres cultes que sont UROTSUKIDOJI et LA BLUE GIRL. A la manière d'un Takao Nakano, Bethmann met donc en scène des femmes nues soumises au plaisir pervers de quelques démons aux formes bien évidemment phalliques. L'une des scènes de pénétration forcée ne manquera d'ailleurs pas de rappeler la fameuse scène de viol végétale du EVIL DEAD de Sam Raimi. Cette portion, encore moins construite scénaristiquement, se contentera de nous montrer de manière plutôt prude un couple en pleine intimité. Puis vient le drame : Alors que la femme se douche, l'homme (qui préfère sentir la sueur) est assassiné par une perceuse agissant de manière autonome. Suite à cela, la femme maintenant propre sera violée par une tige pornophile dont la texture fait inévitablement penser à la sympathique créature qu'est ELMER, LE REMUE MENINGE. Le tout est bien entendu alterné frénétiquement avec d'autres plans de femmes, elles aussi violées jusqu'à ce que, miracle, l'une d'entre elles soit enfin fécondée… Inutile de dire que seul l'amateur de ce genre un peu particulier pourra adhérer à l'étrange spectacle qui se déroulera mollement sous ses yeux.
Mollement en effet car malgré les intentions du réalisateur et le propos sujet à tous les débordements, DEMON TERROR n'est pas un film très nerveux. La pornographie y est très retenue et le gore assez peu présent. Le tout est désespérément tiré vers le fond par le jeu exécrable des acteurs, tout simplement incapables de transmettre la moindre émotion de plaisir ou de douleur. Point de cri, point de hurlement... Qu'elles se fassent dissoudre le visage, étrangler par un tentacule ou tout simplement dévorer par un stock-shot de requin, les victimes restent calmes, à peine troublées. Certaines tentent bien de tirer la langue en signe de mécontentement mais malgré cela, les mises à mort se font calmement, gentiment et dans le respect des voisins. Difficile dans ces conditions d'entrer dans le film et d'y trouver une quelconque satisfaction. Les amateurs du combo sexe et sang privilégieront sans doute ROSSA VENEZIA, autre réalisation de Andreas Bethmann, elle aussi disponible chez l'éditeur Uncut Movies et bien plus généreuse dans ses excès.
Le film nous arrive donc en France via Uncut Movies, éditeur incontournable pour tout amoureux du mauvais goût assumé. Comme son nom l'indique, Uncut Movies se fait un devoir de ne proposer que des films dans leur version non censurée. Il est donc étonnant dans ces circonstances de constater que DEMON TERROR nous parvient aujourd'hui dans une version dont la durée (89 minutes) semble étrangement courte si nous la comparons à l'édition Allemande éditée par X Rated Cult DVD annoncée à 130 minutes…
Tout d'abord, il faut savoir que deux versions de DEMON TERROR sont sorties en Allemagne en 2000. La première, non coupée, atteignait une durée de 130 minutes alors que la seconde, largement élaguée n'affichait que 69 minutes au compteur. Ce genre de différence est assez courant dans les productions dites «extrêmes» mais ce qui l'est moins, c'est ce côté «Ridley Scott» dont souffre Andreas Bethmann et qui le pousse à créer de manière quasi systématique un Director's cut de ses films. Sachant que l'homme est producteur, réalisateur et scénariste de la plupart de ses métrages, il peut paraître étrange qu'il ne fasse pas son Director's cut dès le premier essai. Nous en déduirons donc que cette ultime version correspond en fait à la vision de la maturité, celle d'un réalisateur ayant su prendre le recul nécessaire vis-à-vis de son œuvre, aussi modeste soit-elle. Quoiqu'il en soit, cette version remise au goût du jour arrive, dans le cas de DEMON TERROR, en 2005 et sera montée sur base de la version Uncut. Les plans supprimés sont essentiellement verbeux et à la vue des quelques dialogues subsistants, force est de reconnaître qu'il est plaisant de savoir que l'on nous épargne 41 minutes de supplice supplémentaire…
L'éditeur Français de ce disque, fidèle à sa réputation, nous livre donc la vision définitive du réalisateur dans une version intégrale. Le film, présenté en 2.35 est toutefois encodé dans un format 4/3 certes relativement correct mais tout de même regrettable. Ainsi, les possesseurs de téléviseur 16/9 devront soit regarder le film en format timbre-poste, soit zoomer l'image mais dans ce cas, se passer des sous-titres positionnés bien trop bas… La piste sonore Allemande est quant à elle proposée dans un stéréo honnête nous permettant de profiter à loisir des quelques éclats de voix incohérents que propose le film.
En terme de bonus, l'éditeur nous propose une petite galerie d'images, les Trailers et Teasers de DEMON TERROR ainsi que les différentes bandes annonces des autres produits Uncut Movies.
DEMON TERROR est donc un film de l'on qualifiera de mineur qui ne saurait satisfaire pleinement les amateurs du cocktail «gore et fesse». L'amateurisme de l'entreprise pourra bien entendu expliquer certaines lacunes mais en aucun cas excuser les terribles incohérences, l'absence de vraies scènes trash et l'aspect ouvertement bâclé de la plupart des effets spéciaux. Le connaisseur préfèrera sans aucun doute se tourner vers d'autres titres du catalogue Uncut Movies comme le charnu FANTOM KILER 3 ou le saignant ANTROPOPHAGOUS 2000.