Header Critique : HORROR CANNIBAL : LAND OF DEATH (NELLA TERRA DEI CANNIBALI)

Critique du film et du DVD Zone 2
HORROR CANNIBAL : LAND OF DEATH 2003

NELLA TERRA DEI CANNIBALI 

La fille d'un sénateur américain a disparu en pleine jungle amazonienne. Après qu'une première équipe de sauvetage ait elle aussi disparu, un second commando est dépêché dans la brousse pour retrouver la donzelle et les traces de leurs précédents camarades. Accompagné d'un guide et de quelques «locaux», l'équipe de soldats est vite confrontée à des hordes de cannibales hystériques !

Bruno Mattei est mort le 21 mai 2007 d'une tumeur au cerveau à (presque) 76 ans. A cet âge respectable, on aurait pu croire le réalisateur italien rangé des voitures, coulant une paisible retraite à la campagne grâce au culte mondial voué à une carrière jalonnée de nanars de (très) haut vol. Et bien pas du tout ! Comme tout «grand» du cinéma, Mattei aura tourné des films, «ses films», jusqu'au bout. Certes, le temps de la paire magique qu'il formait avec le gougnafié Claudio Fragasso est révolu. Une collaboration qui avait permis au monde de voire naître dans les années 80 les (anti) chefs d'œuvres HELL OF THE LIVING DEAD (VIRUS CANNIBALE), RATS (LES RATS DE MANHATTAN), ROBOWAR ou encore STRIKE COMMANDO. Heureusement (ou bien ?), Mattei fait dans les années 2000 la connaissance du producteur Gianni Paolucci qui donnera un nouveau souffle à la carrière du maître. De cette association de malfaiteurs nous arrive en 2003 ce LAND OF DEATH, retitré HORROR CANNIBAL chez nous ou encore CANNIBAL FEROX 3 en Angleterre et au Japon (rappelons que c'est PRISONNIERES DANS LA VALLE DES DINOSAURES qui usurpait le titre de CANNIBAL FEROX 2).

Direction donc toujours les Philippines, que la forêt locale va tenter de nous faire passer pour la jungle d'Amazonie. Budget rachitique oblige, Bruno Mattei passe au numérique en tournant son film entièrement en vidéo. Et pour être certain que le voyage soit rentable, Mattei et son producteur tournent dans la foulée de LAND OF DEATH une autre roublardise, CANNIBAL WORLD (alias HORROR CANNIBAL 2 chez nous, MONDO CANNIBALE ou encore CANNIBAL HOLOCAUST 2 en fonction des pays et des lois sur le copyright). Que ses fans se rassurent, si Mattei prend de l'âge, la sagesse n'a décidemment aucune emprise sur le bonhomme. LAND OF DEATH est une odieuse purge qui n'a peur de rien et ose tout, comme au bon vieux temps. Le scénario n'est qu'une suite d'improvisations imbriquant au chausse pied des séquences entières plagiées sur PREDATOR (que Mattei connaît bien pour l'avoir déjà pompé scène par scène avec le grotesque ROBOWAR en 88), sur CANNIBAL HOLOCAUST ou encore ALIENS. Des cadavres découverts écorchés vifs dans la jungle ? Une indigène violée avec une pierre phallique au bord d'une rivière ? Une femme soldat mexicaine répondant au nom de Vasquez qui, attention spoiler, finit par s'auto exploser à la grenade pour ralentir la progression de l'ennemi cannibale ? Un scorpion empalé au couteau sur l'épaule du copain ?... C'est à un véritable puzzle de citations auquel nous invite ce LAND OF DEATH. Pour nous donner quelques indices, Mattei s'amuse d'ailleurs avec les noms de ses personnages : le guide s'appelle Romero, un trouffion Cameron et un autre Kruger…

Bien évidemment, LAND OF DEATH est une arnaque ! Mais une arnaque tellement grossière et impétueuse qu'elle verse continuellement dans le surréalisme comique. Mattei nous a déjà prouvé par le passé qu'il n'avait pas son pareil pour dénicher les comédiens les plus inaptes du marché, ce qu'il nous démontre là encore avec brio. L'interprétation sonne comme une parodie des pires séquences d'un Zulawski, mention spéciale au chef du commando (sur)interprété par un sosie de Phil Anselmo, le chanteur de (feu) Pantera. Les figurants indigènes (peinturlurés jusque sur les fesses) ne sont guère mieux lotis, cabotinant leurs rôles de sauvages dans une hystérie qui les ferait passer pour une troupe de groupies au démarrage d'un concert de Tokio Hotel. Comme toujours avec Mattei, les situations et les dialogues sont à la hauteur du talent de nos amis. «C'était Michel», dit le guide devant un squelette ensanglanté, «je le reconnais à ses dents» ! «Je le vengerais» s'écrit Vasquez : «je t'en fais la promesse sur la lune du ciel» ! «Attention, tu te bouffes les cheveux !», dit à nouveau notre guide face à un sauvage surexcité en pleine dégustation de chair fraîche. Mais c'est finalement Phil Anselmo, derrière ses maigres points de Q.I., qui a peut-être la meilleure vision de l'histoire : «je sais bien que cette jungle est un piège à con !»…

LAND OF DEATH est un film important dans la filmographie de son auteur car il permet à ce dernier de perfectionner encore un peu plus sa maestria de l'utilisation du «stock-shot», le plan tiré d'un autre film et inséré aux forceps dans celui en cours. Un habile (?) subterfuge qui permet d'intégrer au film ce que le budget ne permet pas de se payer. C'était grâce à l'art du montage de stock-shots que les héros de HELL OF THE LIVING DEAD pouvaient contempler depuis la campagne espagnole un kangourou d'Australie en tournant la tête à gauche, et une grue de Mésopotamie en tournant la tête à droite. LAND OF DEATH va encore plus loin dans l'usage éhonté du procédé. Car si le film est entièrement tourné en vidéo, la collection de stock-shots de Mattei est quant à elle toujours en pellicule ! «C'est un détail», nous répond Mattei, puisqu'il se permet d'orchestrer des scènes entières alternant, dans un montage rythmé, plans granuleux en vieux 16 mm (contenant ce qui coûte cher : des hélicoptères, un jaguar, des explosions) et vidéo DV (contenant ce qui coûte pas cher : des gros plans de nos mauvais acteurs). Un malheur n'arrivant jamais seul, les stock-shots évoluent à la tombée de la nuit alors que les plans originaux sont en plein soleil ! La science du raccord de PLAN 9 FROM OUTER SPACE de Ed Wood n'est pas loin d'être égalée…

Il est impératif bien entendu de visionner la chose avec une forte dose de mauvais esprit et d'humour, tant la nullité de LAND OF DEATH est abyssale. Passons sur le rythme de l'ensemble, particulièrement mollasson (prévoyez quand même un peu de café entre deux séquences marrantes, ou un bon copain). Passons sur les effets gores qui, outre quelques prothèses improvisées avec on-ne-sait-quelle-matière (mon dieu, la séquence d'amputation de la «jambe»), se contentent de faire mâchonner à ces figurants de la bidoche. Passons sur la qualité fadasse de l'image vidéo (qu'aucun étalonnage ou effet de post-production ne prendra la peine d'améliorer). Passons sur la paresse technique de l'ensemble qui interdit une seconde prise, même quand la pluie vient maculer l'objectif de nombreuses gouttes. Passons sur la bande originale, de la «musicomètre» de films d'entreprise à côté de la plaque (quand Mattei ne repique pas purement et simplement de la musique d'autres films, comme le thème de LA FORET D'EMERAUDE sur le générique de début). Passons sur la fin, qui n'existe même pas ! Mattei lâche son film alors que le climax n'est même pas achevé, ultime délire de l'artiste décidément très concerné par son œuvre… Vraiment, LAND OF DEATH est un must de non cinéma à conseiller aux gourmets de l'exploitation dégénérée et old school, au point de se rendre coupable de quelques furtifs plans de snuff animalier. Un pratique odieuse, courante à l'époque du cinéma italien des années 80, mais depuis massivement interdite dans le cinéma international. Mais Bruno Mattei fait-il seulement du cinéma ?...

LAND OF DEATH est édité en France en double programme avec son frère jumeau, CANNIBAL WORLD, tourné dans la foulée. Pour donner une impression de cohérence, les films sont retitrés HORROR CANNIBAL 1 & 2. L'éditeur est du coup le premier à s'y perdre, puisqu'il inverse le résumé et la fiche technique des deux films au dos de sa jaquette. Anamorphosée pour le 16/9, l'image est globalement propre malgré une compression pas toujours finaude. Pour seule piste sonore, nous trouvons le doublage français en stéréo. Un choix que l'on ne critiquera pas dans la mesure où un bon Mattei ne se déguste qu'en version doublée ! La bande-annonce nous est proposée comme seul bonus. A noter que le double pack essai de séduire le fouineur de fond de bac à soldes avec un tout petit prix. Le prix de la qualité !

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
48 ans
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287 critiques Film & Vidéo
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Mattei ose tout !
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A réserver exclusivement aux habitués du maître
Quelques plans intolérables de snuff animalier
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L'édition vidéo
NELLA TERRA DEI CANNIBALI DVD Zone 2 (France)
Editeur
Fravidis
Support
2 DVD
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h33
Image
1.78 (16/9)
Audio
Francais Dolby Digital Stéréo
Sous-titrage
  • Aucun
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