Header Critique : FUNHOUSE, THE (MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME)

Critique du film et du DVD Zone 1
THE FUNHOUSE 1981

MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME 

13 Mars 1981 : Universal lançait un nouveau film d'horreur sur le marché américain : THE FUNHOUSE. Le tout premier enregistré en Dolby Stereo à être sorti par une major hollywoodienne. Une accroche singulière : « Payez pour entrer, priez pour en sortir », un film annonce accrocheur… et des résultats en demi-teinte. La sortie française, sous le titre MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME, afin de titiller le spectateur via le MASSACRE A LA TRONCONNEUSE du même réalisateur même pas encore sorti mais déjà culte (il sortira au cinéma près d'un an après en France), se fera le 13 juin 1981, pour y rencontrer là aussi un succès médiocre.

Le générique annonce la couleur : le film va osciller entre le grotesque et la peur. La musique démarre avec un carrousel de foire qui dévie vers une mélodie plus puissante et insidieuse. Les vignettes des créatures du train fantôme viennent appuyer le ton qui sera pris tout au long du film. Tobe Hooper, qui vient d'être remercié sur le tournage de THE DARK (repris au pied levé par John Bud Cardos), a deux métrages à son actif . Son fameux MASSACRE A LA TRONCONNEUSE et son CROCODILE DE LA MORT. THE FUNHOUSE représente le pied à l'étrier d'une major hollywoodienne comme pour beaucoup de réalisateurs de sa génération. Comment négocier un virage plus grand public alors que ses précédents films représentaient une indépendance de créativité et une certaine liberté ?

Cela passe d'abord par le chemin du clin d'œil. La première scène s'avère un hommage au HALLOWEEN de John Carpenter (qui lança la mode du slasher du fait de son succès), pour se poursuivre avec la scène de douche de PSYCHOSE, dont les violons stridents appuient le concept. Tout ceci n'aboutit qu'à un jeu macabre de Joey (Shawn Carson) tentant de terroriser sa sœur Amy (Elizabeth Berridge). Amy a d'ailleurs rendez-vous avec ses amis pour une soirée dans une foire ambulante. Une foire inquiétante qui a, par le passé, fait surgir des cadavres. Mais le petit groupe décide quand même d'y entrer, voire même d'y passer la nuit.

La structure du scénario reste bien ancrée dans une typologie très années 80 du film d'horreur. A savoir un groupe d'amis poursuivis par un tueur/monstre, la volonté de conclure une relation sexuelle, de fumer des joints, de braver l'interdit. Et si possible de ne pas tenir compte des avertissements que quelques personnages peuvent donner : Tout d'abord les parents d'Amy qui, tout en regardant LA FIANCEE DE FRANKENSTEIN, lui parlent des meurtres autour de la foire, puis la clocharde dans l'enceinte de la foire avec son « Dieu vous regarde ! » pendant qu'Amy et Liz discutent de la virginité de la première.

Le film devient beaucoup plus intéressant dans sa mise en image d'un scénario somme toute routinier. Tobe Hooper a choisi plusieurs éléments afin de créer une dimension cauchemardesque tout en essayent d'éviter le piège des personnages transparents. Tout d'abord, un choix visuel. Les scènes d'extérieur ont été tournées en lumière naturelle. Voir les scènes finales, au lever du jour, qui donnent une teinte blafarde, presque irréelle au décor de la foire. La foire en elle-même, ensuite : il s'agit de véritables manèges de province américaine, d'Akton, Ohio. Ils furent démontés et remontés dans le nord de la Floride pour les besoins du tournage. Aussi, le spectateur se prend curieusement à avoir pitié de l'enfant qui évolue du stade de monstre de foire au visage hideux en monstre quasi-mythologique, sorte de minotaure des temps modernes, traquant ses victimes dans le labyrinthe des couloirs du Train Fantôme. Hooper ne le décrit pas comme mauvais par nature, mais de par la culture qu'il reçoit. De l'humiliation, des coups, du refus de son statut de fils par son père. On l'entend péniblement murmurer « Père », mais celui-ci finit par lui faire rentrer dans la gorge ce mot qu'il ne peut/veut pas entendre. Jusqu'à ensuite se frapper sa propre tête dans un accès de démence. Hooper utilise son goût de la distorsion familiale (le berceau de MASSACRE A LA TRONCONNEUSE), du redneck du fin fond des états bouseux américains (voir LE CROCODILE DE LA MORT, mais aussi quelques réminiscences dans son décrié CROCODILE) pour créér son ambiance relationnelle pervertie, qui joint le mythe de FRANKENSTEIN auquel le monstre fait inévitablement penser. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard, tant tout d'abord la chambre de Joey possède une affiche avec Boris Karloff, les parents regardant la séquelle tournée par James Whale et le monstre portant un masque de la créature de Frankenstein afin de masquer son infirmité faciale. Curieux retournement de situation, d'ailleurs, de prendre le masque d'un monstre afin de ne pas dévoiler sa propre monstruosité. La notion de famille demeure extensible, aussi. Le père reprochant au fils de s'attaquer à « l'un des leurs » (ceux de la foire). Ce qui peut rappeler FREAKS, sans pour autant mettre chacun dans le même sac.

Les effets du spéciaux du film, à commencer par le masque du monstre, ont été effectués par le maître, Rick Baker (avec l'aide de Craig Reardon). Le grand challenge étant bien sûr de créer un visage monstrueux, crédible et inspirant une sorte de pitié surréaliste. Couplée à l'interprétation parfois dérangeante du mime qui incarne le monstre (Wayne Doba Enfin, dernier élément, cette fête foraine inquiétante qui vire au cauchemar. Des éclairages travaillés à chaque plan, parsemés de couleurs gothiques allant du rouge saturé au vert glauque. Un emploi généreux du format Scope, avec un sens du détail qui étonne tant le train fantôme est sujet aux recoins gorgés de créatures, de semi ténèbres et de bruits étranges.

Comme annoncé, le film balance entre le grotesque et le macabre. Par exemple la scène du magicien (24ème minute), pathétique numéro au maquillage tiré pour magicien fatigué. Hooper installe un jeu permanent, faisant du spectateur du film et des acteurs des complices de ce qui se passe sur la scène/sur l'écran. Chacun sait le fondement surréaliste de la scène, mais chacun y assiste, de gré, à la fois pour en rire et (peut être) en avoir peur au final – peur que chacun espère au fond de lui. De cela, Tobe Hooper en tire un conte de terreur moderne, sachant escalader les frissons jusqu'au pic final.

Les personnages ressemblent à la multitude de teenagers en voie de boucherie terminale qui ont pullulé sur les écrans américains ces années-là. Quelques scènes donnent la singulière impression d'un petit plus. Quand Buzz (Cooper Huckabee) est présenté comme le beau gosse sans cerveau, Tobe Hooper le montre à plusieurs reprises comme étant moins brut de décoffrage qu'il n'y parait. La conversation entre lui et Amy dans sa voiture, juste avant d'entrer dans la foire en est un exemple. Il attire plus la sympathie que le simple fait de le voir se faire dévisser la tête ce que très peu de slashers ont offerts pendant une bonne décade. Ou encore Madame Zena (Sylvia Miles, qui passe de MACADAM COWBOY à HEAT jusqu'à Tobe Hooper !), une voyante au faux accent transylvanien, un peu prostituée, un peu trop fardée mais avec un pouvoir inattendu… le plan de la boule de cristal lui revenant dans les mains glisse le film du simple film d'horreur vers le fantastique… D'autre part, Amy offre un peu plus là aussi qu'une énième Jamie Lee Curtis. Son odyssée semble beaucoup plus s'apparenter à sa perte de virginité, du rite de passage à l'age à adulte, à son évolution au statut de femme. Lutter contre ses propres démons, ses propres monstruosités ? Pourquoi pas. Elisabeth Berridge se fond en tous les cas à merveille dans ce personnage de femme-enfant, pantin désarticulé aux hurlements qui restent coincés dans sa gorge.

En ce sens, la dernière partie du film offre des morceaux de choix tel que la superbe scène de cauchemar éveillé où l'héroïne sombre dans les tréfonds du train fantôme – et de sa propre peur. La narration suit de ce fait un chemin logique de descente aux enfers. A la fois d'un point de vue géographique et imagé. Il s'agit d'un aboutissement logique de la progression du scénario : latérale des personnages vers le train fantôme puis verticale au sein même de l'endroit clé. Pour terminer tout en bas de l'échelle à la fois sociale et de l'évolution, dans les profondeurs d'une âme noircie par la violence. Le coeur du train fantôme, ce qui génère l'effroi. Le morceau de musique composé par John Beal pour l'occasion se nomme justement « Chained Melody ». En référence aux chaînes du mécanisme qui défilent sous nos yeux pendant le final. Un final qui demeure toujours aussi tonitruant, décuplé dans son intensité grâce à une partition puissante, toute en violons et percussions déchaînés. Et c'est également au final que la coloration du film change. Finis les rouges saturés et autres teintes gothiques de circonstance, la photographie vire au bleu et au sombre. Sorte de bleu électrique fascinatoire, en écho à la garde-robe d'Amy. Là aussi, une logique de mise en scène est respectée puisque l'attraction foraine fait place à un duel tendu, violent, curieusement dépassionné. Voir la scène où Amy regarde, hagarde, le monstre suspendu à une chaîne, transporté par une mécanique en voie de devenir folle.

Finalement MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME (banni en Norvège jusqu'en 2003, quand même) allait inspirer nombre de rejetons plus ou moins médiocres sur le même canevas, entre DARK RIDE ou THE PARK pour les plus récents. Hormis cette patine 80's sur le scénario-formule fourre-tout, il se dégage une sorte de mythe rural qui prolonge la marque de fabrique de Tobe Hooper créée dans ses premiers films (on mettra pour se faire la mini-série LES VAMPIRES DE SALEM de côté). On pourra pardonner quelques hasards de scénario, notamment le personnage de Joey laissé en carafe au deux tiers du film pour conserver ce que le film a de mieux : une atmosphère prenante, un sens du macabre, un humour noir et un montage qui ne cédait pas à l'hystérie pour laisser voir le vrai soin apporté à l'ensemble. Un Massacre qui vit dans l'ombre de la Tronçonneuse et qui mérite bien mieux que le rang de second de la classe qu'on lui donne. C'est devenu un classique, un vrai !

Après des éditions VHS atrocement recadrées, qui firent perdre au film son visuel délirant. Ce n'est que via le Laserdisc NTSC sortit en 1992 par MCA /Universal puis une première édition DVD que des éditions au format Panavision 2.35:1 d'origine purent enfin être visionnées dans une copie digne de ce nom. Certes, ceci ne remplacera jamais l'expérience du grand écran pour ceux qui ont pu la vivre mais il était grand temps de rendre hommage à cette petite perle d'épouvante, bien plus ingénieuse qu'il n'y parait.

La piste sonore en Dolby 2.0 de langue anglaise offre un surround venant directement de l'enregistrement Dolby Stereo d'origine. La plupart des dialogues étant sur la voie centrale, on remarque une répartition assez brute des effets sonores. Ils gardent cependant un impact non négligeable dans les scènes d'effroi, axés sur la brutalité de leur irruption dans le champ sonore. Un son relativement clair, peu étouffé et agréable à entendre. Par chance, des sous-titres français amovibles sont présents. Pour information, la bande-son mono fut à l'origine retravaillée en Dolby Stereo, Le générique de fin indiquant d'ailleurs « Re-recorded in Dolby Stereo ». Cela reste cependant toujours mieux que l'édition britannique, offrant un Dolby 2.0 avec seulement des sous-titrages anglais.

Déjà paru aux Etats-Unis le 19 octobre 1999 chez Good Times Video, MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME offrait un traitement pauvre en DVD. A l'instar d'autres titres de son catalogue, tel que JAWS : THE REVENGE, Good Times se limitait au minimum lors des débuts du DVD : pas de 16/9 et pas vraiment de bonus. Au moins, elle offrait le film dans son format Widescreen 2.35:1 mais le transfert 4/3 était plutôt médiocre comparé à ce qui a été fait depuis. Mais les couleurs (même saturées) ressortaient de manière agréable dans les scènes intérieures du train fantôme. On observe quelques griffures blanches ça et là (dès le logo Universal du début, par exemple, ou encore dans les scènes extérieures finales). Tout comme le contraste est peu amène, la plupart des scènes se déroulant dans la pénombre sont trop sombres. Depuis, les droits de MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME ont réintégré Universal qui a donc ressorti une édition DVD en 2004. Cette fois, le transfert est 16/9 et offre une image bien plus stable sur laquelle la plupart des soucis de l'édition précédentes ont disparus. De plus, l'éditeur a ajouté la bande-annonce à la place des quelques notes écrites du disque Good Times Video. Cela reste un traitement de fond de catalogue mais ce nouveau DVD s'avère bien plus probant pour découvrir MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME avec, toujours, des sous-titres français.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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L'édition vidéo
THE FUNHOUSE DVD Zone 1 (USA)
Editeur
Support
DVD (Simple couche)
Origine
USA (Zone 1)
Date de Sortie
Durée
1h35
Image
2.35 (16/9)
Audio
English Dolby Digital Stéréo Surround
Sous-titrage
  • Anglais
  • Français
  • Espagnol
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