Header Critique : HEMOGLOBINE (BLEEDERS)

Critique du film et du DVD Zone 2
HEMOGLOBINE 1996

BLEEDERS 

John Strauss, un orphelin élevé en Europe, se rend, avec sa compagne, sur la petite île de Nouvelle-Angleterre où il est censé être né. Il compte y élucider le mystère de ses origines. Pendant ce temps-là, des insulaires disparaissent mystérieusement...

HÉMOGLOBINE est d'abord un scénario rédigé par Dan O'Bannon et Ronald Shusett, qui avaient déjà collaboré sur des scripts comme ALIEN ou TOTAL RECALL. O'Bannon est par ailleurs le réalisateur du RETOUR DES MORTS-VIVANTS d'une part, et de THE RESURRECTED, une adaptation de "L'affaire Charles Dexter Ward" de Lovecraft, d'autre part. Or, HÉMOGLOBINE est justement basé sur un texte de ce maître de l'épouvante : "La peur qui rôde" (une aventure horrifique rédigée en 1922, publiée en quatre chapitres dans la revue "Home brew" en 1923, puis dans "Weird tales" en 1928). Après avoir traîné durant une dizaine d'années sans trouver preneur, ce script est acquis par Julie Allan et Pieter Kroonenburg, qui choisissent, pour le tourner, le réalisateur canadien Peter Svatek. La carrière de ce dernier oscille entre le film familial (LA POURSUITE MYSTERIEUSE, le téléfilm L'APPEL DE LA FORET en vidéo) et le fantastique (POSSESSION ou CONTAGION 2009 sortis en vidéo en France)... Le scénario est réécrit sans la participation de O'Bannon et Shusett, et le générique ne fait aucune référence à Lovecraft et à son texte. Le tournage se déroule sur l'archipel atlantique de Grand Manan, appartenant à la province canadienne du Nouveau-Brunswick. Svatek retrouve Rutger Hauer, qu'il avait déjà dirigé dans L'APPEL DE LA FORET, accompagné ici par l'acteur Québécois Roy Dupuis (PLANETE HURLANTE).

John Strauss est un orphelin, qui a été élevé à Paris grâce à des fonds d'origine mystérieuse. Atteint par une grave maladie sanguine qui menace de le tuer prématurément, il décide de partir à la recherche de ses origines. Le seul indice qu'il détient est son acte de naissance, indiquant qu'il est venu au monde sur une île de l'état du Maine. Il s'y rend avec sa compagne Kathleen, et commence à mener son enquête. Ils font rapidement la connaissance du docteur Marlowe, qui leur indique quelques pistes à suivre. Il leur apprend que l'île a longtemps été marquée par l'influence de la famille Van Daam, des émigrants hollandais au style de vie si étrange que les villageois, excédés, ont fait périr les derniers descendants de cette lignée dans l'incendie de leur demeure. Pendant ce temps-là, des évènements insolites ont lieu. Tandis que le cimetière est en plein déménagement, les cercueils déplacés sont fracturés par des inconnus. Enfin, des personnes commencent à disparaître mystérieusement...

HÉMOGLOBINE est donc une adaptation officieuse de "La peur qui rôde" de Lovecraft, déjà porté à l'écran, peu de temps auparavant, avec LURKING FEAR, réalisé par C. Courtney Joyner pour Full Moon. Dans ce texte, un passionné de mystère et de surnaturel se rend dans une région campagnarde reculée, où a eu lieu un étrange massacre. Il y découvre que ce pays est truffé de sous-terrains, liés à la maison Martense, une demeure abandonnée depuis un siècle et réputée hantée. Enfin, il rencontre une entitée monstrueuse, responsable de la mort des villageois.

Dans HÉMOGLOBINE, certains thèmes de la nouvelle sont repris assez fidèlement : les monstres cannibales vivant sous terre, ou la dégénérescence d'une famille incestueuse, par exemple. Toutefois, à travers le personnage de John Strauss, descendant d'une lignée monstrueuse découvrant ses origines, l'œuvre aborde un élément venant d'autres textes de Lovecraft (utilisé par exemple dans "Le cauchemar d'Innsmouth", et repris dans son adaptation cinématographique DAGON). De plus, en situant l'intrigue sur une île, Svatek imprègne son oeuvre d'une ambiance maritime typique de célèbres nouvelles du maître de Providence, comme "L'appel de Cthulhu", "Dagon", ou "Le cauchemar d'Innsmouth". HÉMOGLOBINE rejoint ainsi la lignée des adaptations lovecraftiennes se déroulant dans des villes côtières, quand bien même le texte original ne se situe pas dans un tel contexte géographique (THE DUNWICH HORROR, LA MALÉDICTION DES WHATELEY...).

C'est justement à LA MALÉDICTION DES WHATELEY de David Greene que HÉMOGLOBINE ressemble le plus dans sa première partie, notamment grâce à un point de départ assez semblable : un couple de citadins arrive dans une région reculée, afin de renouer avec les origines de l'un d'eux ; ils vont aller de mauvaise surprise en mauvaise surprise. Toutefois, contrairement au film de Greene, qui évacuait, en fin de compte, toute forme de fantastique, HÉMOGLOBINE est bel et bien un véritable film d'épouvante, contenant des plans assez sanglants, comme, notamment, une répugnante autopsie de mutant. Svatek avouait d'ailleurs avoir retourné des scènes horrifiques à la demande de la production, qui n'avait pas trouvé son premier montage suffisamment gore. Pourtant, ce réalisateur semble tenter avant tout de jouer sur la destinée tragique de son personnage principal, en quête d'identité, qui va se retrouver tiraillé entre ses natures humaine et monstrueuse. L'atmosphère mélancolique du village, ainsi que les superbes décors naturels, sont habilement utilisés afin d'alourdir l'ambiance de ce mélodrame fantastique.

Hélas, si les intentions sont intéressantes, l'exécution laisse beaucoup à désirer. Réalisé très platement, à la manière d'un téléfilm, souffrant d'une progression lente et terriblement bavarde, HÉMOGLOBINE s'avère rapidement ennuyeux. Les maquillages des monstres sont assez ratés, et leur difficulté à se mouvoir en fait des ennemis a priori peu menaçants. Les scènes d'affrontements entre ces mutants et les humains sont, ainsi, souvent assez cocasses, voire ridicules (l'assaut du phare, par exemple...).

En fin de compte, HÉMOGLOBINE s'avère une relative déception, Svatek n'ayant pas vraiment su tirer la quintessence des atouts placés entre ses mains. La carrière internationale de ce titre se limitera essentiellement au domaine de la vidéo, que ce soit en France, en Angleterre (sous le titre HEMOGLOBIN) ou aux USA (sous le titre BLEEDERS).

En DVD, il est déjà sorti aux Etats-Unis (épuisé, semble-t-il) et en Grande-Bretagne (dans une collection économique). Dans les deux cas, le master utilisé proposerait le film en 1.33, mais, très peu d'informations circulant sur ce titre, il est difficile de savoir s'il s'agit de pan et scan ou de versions sans les caches du format panoramique... En tout cas, le DVD français propose le film en version 1.85, mais sans option 16/9. Certes, tout n'est pas parfait : on remarque, à plusieurs endroits, des petites saletés ; la définition paraît un peu émoussée ; les scènes sombres sont bruitées et mettent en avant de petits problèmes sur les contrastes. Néanmoins, le résultat est tout de même plus que correct pour un DVD proposé en série économique.

On ne trouve, hélas, que la bande-son française, assez propre, mais mixée sans aucune subtilité. Comme pour la très grande majorité des films sortant directement en vidéo dans notre pays, le doublage est d'une nullité effarante, souvent involontairement comique, et à peine digne d'une série télévisée du style LES FEUX DE L'AMOUR. Cela donne une impression de bâclage, encore renforcée par l'absence totale de toute forme de véritable bonus, ainsi que par une jaquette donnant des informations erronées (format annoncé : 1.33, par exemple).

On a donc affaire à l'édition décevante d'un film décevant, bien qu'assez ambitieux. Les passionnés de Lovecraft pourront s'intéresser à ce titre, mais l'absence de version originale encouragera les anglophones à s'orienter vers le DVD anglais (zone 2, PAL), proposé, comme le français, à un prix dérisoire. Malheureusement, il n'est pas exclu qu'il propose une copie recadrée.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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L'édition vidéo
BLEEDERS DVD Zone 2 (France)
Editeur
Antartic
Support
DVD (Simple couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h25
Image
1.85 (4/3)
Audio
Francais Dolby Digital Stéréo
Sous-titrage
  • Aucun
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