Header Critique : OUTER TOUCH (SPACED OUT)

Critique du film
OUTER TOUCH 1979

SPACED OUT 

OUTER TOUCH nous présente quatre humains, trois hommes et une femme, qui se retrouvent accidentellement dans un vaisseau spatial. Celui-ci est dirigé par trois extraterrestres qui ne connaissent pas d'autre genre que le «féminin». Les prémices du film s’annoncent assez surprenantes voire provocatrices !

La BBFC, la censure britannique, devient plus tolérante concernant la nudité à l’écran dans un contexte artistique. Cet assouplissement qui survient à la fin des années 60 ouvre la voie à des films d’exploitation érotiques. Des comédies grivoises au cinéma d’horreur, le cinéma indépendant anglais s’encanaille. Spécialisée dans le cinéma d’horreur gothique, la Hammer Films tente avec difficulté de prendre le train en marche alors qu’elle se voit concurrencée par des cinéastes plus ancrés dans le réel et jouant avec l’érotisme. C’est l’émergence de cinéastes comme Pete Walker, Jose Ramon Larraz et Norman J. Warren.

Ce dernier travaille déjà sur les tournages en tant qu’assistant lorsque la censure baisse un peu sa garde. Le producteur Tony Tenser lui propose de faire un premier film en tant que réalisateur. Le producteur ne s’en cache pas, il sait que le nouveau réalisateur ne lui coûtera pas cher et qu’il sera fiable ! Norman J. Warren tourne HER PRIVATE HELL avec un tout petit budget et en noir et blanc. Le film est un drame dans lequel une jeune mannequin italienne tombe sous la coupe d’un photographe anglais. Les scènes dénudées lui valent d’être souvent considéré comme le premier film soft-core anglais à destination des salles de cinéma. Le nouveau réalisateur va ensuite réaliser LOVING FEELING. Le ton se montre plus léger et suit les mésaventures d’un DJ tiraillé entre deux femmes dans le Swinging London. Le cinéaste aurait pu alors s’engouffrer dans les comédies érotiques qui commencent à pulluler sur les écrans britanniques. A la place, il s’oriente vers le Fantastique et va réaliser L'ESCLAVE DE SATAN, LE ZOMBIE VENU D'AILLEURS et LA TERREUR DES MORTS-VIVANTS. Trois films à petit budget qui n’hésitent pas à dévêtir leurs actrices même si le cinéaste essaie de prendre ses distances avec le cinéma purement érotique. Dans un premier temps, il refuse de réaliser OUTER TOUCH, une comédie érotique de Science-Fiction.

Norman J. Warren est toutefois contraint d’accepter de réaliser ce film en raison de la situation économique du cinéma anglais. A l’époque, ce sont les comédies grivoises qui tiennent le haut du pavé et il faut bien tourner pour vivre. Le réalisateur se retrouve à la barre d’un film qui tente de surfer sur un thème très en vogue depuis les sorties de LA GUERRE DES ÉTOILES et RENCONTRES DU TROISIÈME TYPE. Ce dernier est clairement influencé. Cela se ressent au début du film avec un vaisseau spatial filmé à contre-jour et dont le sas envahit l’écran d’une lumière aveuglante. Les personnages font une rencontre avec des extra-terrestres qui auraient pu provenir de films antérieurs. Ces créatures d’un autre monde sont seulement de sexe féminin. L’idée n’est pas nouvelle et on compte une dizaine de films avec cette particularité, que ce soit les Américains QUEEN OF OUTER SPACE et NUDE ON THE MOON, les Mexicains LOS ASTRONAUTAS et EL PLANETA DE LAS MUJERES INVASORAS ou encore le Britannique FIRE MAIDENS FROM OUTER SPACE. Citons également ZETA ONE, venant aussi d’Angleterre, qui a la particularité d'y mêler un érotisme assumé, ce qui en fait une sorte de précurseur de OUTER TOUCH.

Malheureusement, le film de Norman J. Warren n’a pas les moyens de ses ambitions. Si tant est qu’il y ait eu des ambitions ! L’humour n’est pas très fin, voire même assez bas de plafond. Le film s’inscrit clairement dans le registre des nombreuses comédies érotiques anglaises. La qualité n’est donc pas nécessairement le but recherché. Les situations «humoristiques» et l’érotisme sont avant tout une manière d’attirer un public populaire en maximisant la rentabilité. OUTER TOUCH ne déroge pas à la règle. On peut tout de même repérer des liens avec les œuvres antérieures de Norman J. Warren et particulièrement LE ZOMBIE VENU D'AILLEURS. L’action est ici resserrée dans un lieu clos, le vaisseau spatial. On y trouve des extraterrestres confrontés à la sexualité terrienne. L’un des rôles principaux y est d’ailleurs interprété par Barry Stokes qui joue aussi dans OUTER TOUCH. Le comédien s'est précédemment retrouvé à l’affiche de comédies érotiques comme THE UPS AND DOWNS OF A HANDYMAN où il croisait déjà Ava Cadell. Glory Annen était aussi à l’affiche du ZOMBIE VENU D'AILLEURS. L'actrice s'est également fait connaître pour ses rôles dans CRUELLE PASSION et surtout FELICITY, deux autres métrages érotiques anglais. De même, le film donne un rôle à Lynne Ross qui avait tourné auparavant SECRETAIRE A TOUT FAIRE. Tout ce petit monde est clairement implanté dans l’industrie du cinéma anglais.

L’érotisme a été cité à de nombreuses reprises jusqu’ici mais qu’en est-il vraiment ?  Soyons honnêtes, le film de Norman J. Warren nous présente de la fesse triste sur un scénario à l’humour niais. En résumé, le film est franchement bête et peu aguicheur ! Les moyens sont aussi clairement au ras des pâquerettes. Le film nous propose ainsi une intelligence artificielle psychologue représentée sous la forme d’un jukebox Wurlitzer, figure emblématique des années 50. Les effets spéciaux reprennent directement des images des séries de Gerry Anderson. Lorsque le vaisseau spatial se pose, on peut reconnaitre brièvement des images de l’astronef de l’épisode «Le dernier adversaire» de COSMOS 1999. Le vaisseau de nos extraterrestres change littéralement de forme pour les plans dans l’espace. Cette fois, les images proviennent de THE DAY AFTER TOMORROW. Les auteurs de OUTER TOUCH n’ont aucune honte concernant les faux raccords. La planète Terre prend ainsi des teintes très différentes en fonction des plans. Tout simplement parce que les images du film d’origine n’évoquent jamais la planète bleue !

Comme dans la plupart des comédies britanniques, on suit des personnages masculins frustrés. Nos trois héros sont ainsi : un homme timide qui n’ose pas s’affirmer, un macho peu intelligent et un jeune adulte boutonneux encore vierge. Ils sont accompagnés par une terrienne qui n’a pas l’intention de consommer avant le mariage, son attitude se montre même plutôt castratrice. En face d’eux, nous trouvons trois spécimens extraterrestres pas plus intelligents que les Terriens. Nos humains vont leur faire découvrir les joies du sexe. L’occasion de voir de la fesse masculine et féminine et de la poitrine à géométrie variable. Difficile de déterminer si OUTER TOUCH tente de parodier les relations humaines tant ici la bêtise est élevée. On notera tout de même quelques passages extrêmement étonnants, comme l’humiliation fortuite du macho s’apparentant à du comique paillard et grotesque. Enfin, la fin du film laisse perplexe mais a au moins le mérite d’être inattendue et vient appuyer la stupidité de tous les personnages ! 

Lors de sa distribution aux Etats-Unis par Miramax, le film est légèrement modifié. Ainsi, les voix des ordinateurs sont redoublées par Bob Saget. C’est aussi à ce moment-là que OUTER TOUCH prend le titre de SPACED OUT ! En France, le film ne sera jamais distribué dans les salles de cinéma.

En 1981, Norman J. Warren trouvera un sujet plus valorisant avec son film suivant, INSEMINOID, qui reste dans la Science-Fiction spatiale et lorgne plutôt du côté de ALIEN tout en lui donnant un aspect sexuel explicite. Le film n’a plus rien à voir avec une comédie et les moyens mis en œuvre sont plus conséquents. Il s’agit probablement du meilleur film de Norman J. Warren. L’année suivante, un revirement moral, orchestré par le gouvernement de Margaret Thatcher, sonne la fin du cinéma érotique anglais débridé et de ses comédies.

Rédacteur : Christophe Lemonnier
Photo Christophe Lemonnier
Ancien journaliste professionnel dans le domaine de la presse spécialisée où il a oeuvré durant plus de 15 ans sous le pseudonyme "Arioch", il est cofondateur de DeVilDead, site d'information monté en l’an 2000. Faute de temps, en 2014, il a été obligé de s'éloigner du site pour n'y collaborer, à présent, que de manière très sporadique. Et, incognito, il a signé de nombreuses chroniques sous le pseudonyme de Antoine Rigaud ici-même.
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