Header Critique : ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE (INTERVIEW WITH THE VAMPIRE)

Critique du film
ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE 1994

INTERVIEW WITH THE VAMPIRE 

Le roman «Entretien avec un vampire» d'Anne Rice, mettant en scène les aventures du vampire Lestat, sort en 1976 et connaît progressivement un succès remarquable. Si bien que son autrice en rédigent diverses suites. Ces ouvrages proposent une vision renouvelée et alors innovante du vampire.

Il est rapidement envisagé d'adapter «Entretien avec un vampire» au cinéma. Mais le projet s'enlise et passe de mains en mains sans aboutir. Jusqu'à ce qu'il tombe dans l'escarcelle de David Geffen. Ce dernier a fait fortune dans l'industrie musicale américaine, en portant notamment les succès retentissants de groupes comme les Eagles ou Nirvana.

Dans les années quatre-vingts, il se lance en parallèle dans la production de films, générant des succès comme RISKY BUSINESS avec Tom Cruise, ou des comédies horrifiques mémorables comme la version musicales de LA PETITE BOUTIQUE DES HORREURS ou BEETLEJUICE de Tim Burton.

Le réalisateur Neil Jordan est remarqué en 1984 avec sa seconde réalisation, le remarquable LA COMPAGNIE DES LOUPS, à mi-chemin du conte de fées gothique et de la psychanalyse. Identifié au cinéma d'auteur des îles britanniques, il fait tout de même des tentatives hollywoodiennes, comme HIGH SPIRITS, comédie fantastique décevante interprétée par Peter O'Toole, ou NOUS NE SOMMES PAS DES ANGES avec Robert De Niro et Sean Penn.

Neil Jordan émerge toutefois vraiment aux USA grâce à THE CRYING GAME, mélange de drame et de suspense sur fond d'IRA. Ce métrage qu'il réalise et écrit lui vaut l'Oscar du meilleur scénario original en 1993. Dans la foulée de ce succès critique, il se voit proposer de réaliser ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE, d'après un scénario qu'Anne Rice écrit elle-même. Le film est donc produit par David Geffen et distribué par la Major Warner.

Neil Jordan retravaille alors le script, cherchant à le rendre plus fidèle au roman et à respecter au mieux ses éléments subversifs. Pour jouer Lestat le vampire, divers acteurs sont envisagés, en particulier Daniel Day-Lewis. Le rôle échoit en fait à Tom Cruise, choix qui surprend à l'époque. L'acteur est alors empêtré dans son image de minet écervelé, laquelle a fait son succès dans les années quatre-vingts au gré de titres comme RISKY BUSINESS, TOP GUN et autres JOURS DE TONNERRE.

Pourtant, tout au long de sa jeune carrière, il a déjà fait des écarts plus ambitieux, surprenant son monde en prenant les rôles principaux de LA COULEUR DE L'ARGENT, suspense de Martin Scorsese, ou NÉ UN 4 JUILLET d'Oliver Stone, drame réaliste consacré aux vétérans de la guerre du Vietnam.

A ses côtés, nous trouvons Brad Pitt dans le rôle de Louis. En pleine ascension, il est de plus en plus remarqué à l'époque, notamment grâce au film de Robert Redford ET AU MILIEU COULE UNE RIVIÈRE de 1992. Mais ce sont bien ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE, et le thriller SEVEN l'année suivante, qui en font une vedette.

Pour incarner la fillette-vampire Claudia, il est choisi l'actrice-enfant Kirsten Dunst, appelée à la célébrité pour sa participation aux films de Sofia Coppola comme VIRGIN SUICIDE ou MARIE-ANTOINETTE, ou bien sûr SPIDER-MAN de Sam Raimi en 2002 ! Le métrage réunit d'autres acteurs renommés de l'époque comme Christian Slater (LE NOM DE LA ROSE, TRUE ROMANCE), Antonio Banderas qui commence alors à faire des films aux USA, ou Stephen Rea, fidèle collaborateur de Neil Jordan, particulièrement remarqué dans THE CRYING GAME.

Au XVIIIème siècle, en Louisiane, le vampire Lestat décide de faire de Louis, un jeune veuf, son compagnon d'immortalité. Mais Louis refuse de s'alimenter avec du sang humain...

Nous sommes d'abord étonnés par les moyens mis en œuvre dans ce film. Il bénéficie d'un budget très substantiel pour l'époque de 60 millions de dollars - contre par exemple les 40 millions de dollars de BRAM STOKER'S DRACULA un an avant. La réalisation est hollywoodienne dans le bon sens du terme. Nous pensons à des grandes fresques historiques classiques comme AUTANT EN EMPORTE LE VENT de Victor Fleming, autre métrage ayant pour cadre le Sud des États-Unis. Évidemment, l'ambiance est beaucoup plus décadente dans ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE !

Ce n'est donc pas tous les jours que le cinéma d'épouvante se voit traité avec autant d'égards par les grandes compagnies américaines : acteurs célèbres, reconstitution d'époque soignée, costumes superbes, vastes décors, tournages à Paris, Londres, San Francisco... Rien ne manque à ce superbe spectacle, que Neil Jordan imprègne d'un parfum à la fois féerique et décrépi.

N'oublions pas de signaler la magnifique photographie de Philippe Rousselot (DIVA de Jean-Jacques Beinex, entre autres). Tout cela fait aussi penser aux films d'épouvante anglais de la Hammer, notamment lors des scènes parisiennes. La musique d'Elliot Goldenthal est aussi très réussie, à la fois angoissante et sombre, sans jamais devenir bruyante ou envahissante.

ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE n'adoucit pas le propos du livre : mépris des vampires pour le prix de la vie humaine, violence graphique, érotisme, homosexualité d'Armand... Tout ces détails sont scrupuleusement portés à l'écran. La noirceur et l'immoralité du travail d'Anne Rice, en particulier ce qui tourne autour du personnage de Lestat, n'ont pas été affadies.

ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE bénéficie aussi d'un remarquable scénario. L'évolution des personnages est rendue avec beaucoup de subtilité. Chaque vampire a une personnalité très fouillée. De même, l'univers des créatures de la nuit est décrit avec beaucoup de détails.

Les interprètes sont remarquables, notamment Brad Pitt et la jeune Kirsten Dunst Nous sommes plus réservés sur la performance de Tom Cruise, globalement impressionnante - mais par moments, il en fait un peu beaucoup ! De même, l'histoire s'enlise légèrement en milieu de film.

Néanmoins, les qualités d'ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE sont indiscutables. Film racé et singulier, il s'agit bien d'un des meilleurs films d'horreur des années quatre-vingt-dix, un vrai classique du film de vampires. Il rencontre un grand succès critique et commercial, renouvelant vraiment l'image de Tom Cruise auprès du public.

Neil Jordan commence à travailler rapidement sur une suite, mais elle ne se fera finalement pas. Une suite arrivera bien, en 2002, avec LA REINE DES DAMNÉS. Mais il s'agira d'un film moins ambitieux, produit à l'économie.

La mode du film de vampires, lancée par les succès BRAM STOKER'S DRACULA et ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE, touche alors à sa fin, au gré de films au rabais et passables comme DRACULA 2001 peu avant. LA REINE DES DAMNÉS, passable lui aussi, sort donc dans l'indifférence.

En 2022, en pleine frénésie de production télévisuelle consécutive au COVID et à la guerre des services de streaming, nous voyons arriver une série TV «INTERVIEW WITH THE VAMPIRE» sur le réseau AMC, adaptant de nouveau le roman d'Anne Rice. Noyée dans l'offre pléthorique de séries du moment, elle n'est pas vraiment remarquée. L'adaptation cinéma de Neil Jordan reste donc à ce jour la version de référence du roman d'Anne Rice.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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