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Critique du film
LE LAC DES MORTS VIVANTS 1980

 

Pendant la seconde guerre mondiale, dans un petit village français, des soldats allemands sont tués par des résistants et leurs corps jetés dans un lac. Dix ans plus tard, ils ressurgissent sous forme de morts-vivants et sèment la terreur.

Après les succès internationaux de ZOMBIE par l'américain George A. Romero et de L'ENFER DES ZOMBIES par l'italien Lucio Fulci, les producteurs transalpins lancent de nombreux petit films de zombies réalisés par des spécialistes du cinéma populaire : LA NUIT FANTASTIQUE DES MORTS-VIVANTS de Joe D'Amato et L'AVION DE L'APOCALYPSE d'Umberto Lenzi par exemple, tous deux de 1980.

En France, ces succès donnent des idées à une petite compagnie indépendante et familiale : Eurociné, société franco-espagnole fondée en 1957 par Marius Lesoeur, qui s'est mise à produire, entre autres, des films fantastiques après le bon succès en 1962 de son L'HORRIBLE DR ORLOF réalisé par l'espagnol Jesus Franco.

C'est ce même Jesus Franco, spécialiste de l'épouvante chez Eurociné durant les années soixante et soixante-dix, qui doit réaliser LE LAC DES MORTS-VIVANTS à l'orée des années quatre-vingts. Mais, il ne se présente pas sur le plateau le jour du commencement du tournage. Il aurait été retenu sur un autre film, ce qui ne surprend guère quand on sait qu'il tourne entre cinq et dix films par an à ce moment de sa carrière !

Eurociné appelle à l'aide le réalisateur français Jean Rollin, qui alterne alors œuvres fantastiques surréalistes sous son vrai nom (FASCINATION en 1979) et pornos alimentaires sous divers pseudonymes.

Rollin s'est déjà illustré peu avant en tournant un film de zombies viticole, l'intéressant LES RAISINS DE LA MORT. Il accepte de reprendre le tournage du LAC DES MORTS-VIVANTS à la volée, sans lire le scénario. Scénario qu'il ne verra de toute manière jamais. Chaque matin, Marius Lesoeur lui explique ce qui va être tourné dans la journée sans qu'il puisse avoir une idée d'ensemble du film.

Les acteurs sont essentiellement des étudiants et des amateurs, à l'exception de Howard Vernon (officier allemand francophile dans LE SILENCE DE LA MER de Jean-Pierre Melville, mais aussi pilier de la galaxie Eurociné-Franco depuis L'HORRIBLE DR ORLOF). Anouchka, alors âgée de dix ans, n'est autre que la petite-fille de Marius Lesoeur.

L'idée de soldats nazis revenant à la vie sous forme de zombies à tendance aquatique n'est pas une nouveauté. Elle a déjà servi dans LE COMMANDO DES MORTS-VIVANTS de Ken Wiederhorn, ennuyeux film anglais de 1975 avec Peter Cushing.

Le plus frappant dans LE LAC DES MORTS-VIVANTS reste sa nonchalance technique. Cela est plus dû à la modestie du budget et au chaos de la production qu'à Jean Rollin, qui fait ce qu'il peut avec ce qu'il a. La caméra utilisée est en panne et filme parfois trop lentement. Les acteurs jouent alors au ralenti afin d'obtenir un résultat normal à la projection !

Les essais de gros plan sur une blessure béante, avec volonté d'obtenir un effet gore dans le style des films de Fulci, tournent au fiasco. Les maquillages sont si bâclés que ces tentatives tombent systématiquement à plat. Et il faut encore subir une narration chaotique et épuisante, parfois incompréhensible, souvent ennuyeuse.

Pour faire plus riche, quelques petits extraits de vieux films de guerre Eurociné sont insérés. Le montage est si maladroit que le procédé ne trompe même pas le spectateur le plus naïf.

Comme de nombreux films fantastiques Eurociné de la décennie précédente, les séquences érotiques et les nudités féminines sont nombreuses et bien souvent gratuites. Tel cette équipe féminine de basket (qu'on verra jouer... au volley !) qui se met à nu avec entrain pour prendre un bain dans le lac des zombies.

Pourtant... En dépit de sa nonchalance, LE LAC DES MORTS-VIVANTS a un certain charme. Ce film part si loin du bon goût ou d'une forme quelconque d'académisme et de professionnalisme qu'il en devient sympathique et singulier. Certains éléments créent une poésie envoûtante. Ainsi, la musique de Daniel White impose son orgue mélancolique et maladif, rappelant l'ambiance de CARNIVAL OF SOULS. Howard Vernon, avec sa diction douce et précise, interprète son rôle avec compétence et même avec une certaine conviction.

La romance entre le soldat allemand et la Française apporte une douceur bienvenue dans cette œuvre appartenant au genre musclé du film de zombies. Les paysages campagnards, la forêt verdoyante, le lac, les rues du village, le moulin, la maison néo-gothique du maire... créent une atmosphère belle et française, ne manquant ni de charme ni de singularité.

Mais bon, LE LAC DES MORTS-VIVANTS reste un assez mauvais film, notamment à cause d'une histoire particulièrement tordue et inégale. Rollin n'en est pas fier et le signe sous pseudonyme (J.A. Laser). Néanmoins, cette œuvre remporte un petit succès commercial, notamment à l'exportation. Eurociné produit donc rapidement un autre film du même genre : L'ABÎME DES MORTS-VIVANTS de Jesus Franco, pour le pire plutôt que pour le meilleur !

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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