Il y a bien longtemps de cela, les leprechauns ont été sommés de garder l’or d’un roi. A sa mort, les créatures irlandaises ont été libérées de leur mission mais l’un d’eux, plus zélé, est resté fidèle au métal jaune. Des siècles plus tard, le Père Jacob trouve le trésor et ambitionne de créer une maison des jeunes dans un quartier défavorisé. Cette noblesse d’âme sera malheureusement contrariée par le lutin hargneux, et lors d’un ultime affrontement, Père Jacob succombera tandis que le Leprechaun sera aspiré dans les entrailles de la terre. L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais une année après ce triste évènement, quatre jeunes remettent la main sur l’or et avec lui, ce sont les problèmes qui ressurgissent…
Lorsqu’il voit le jour en 2000, LEPRECHAUN IN THE HOOD a été le théâtre de nombreuses hésitations. Nous l’avons vu, le petit monstre a bien failli investir la Maison Blanche, mais il s’en est également fallu de peu pour qu’il se dore la pépite sous le soleil californien. En effet, lorsqu’il prend la direction du projet, Rob Spera a dans sa besace deux idées : un cinquième opus à Venice Beach, la zone balnéaire de Los Angeles, et un sixième volet se déroulant sur une île, durant le Spring Break. De Venice Beach, on passera finalement à un ghetto pour un résultat plus économique, mais bien médiocre. Aussi quand la production explique à Rob Spera qu’il va également pouvoir oublier son idée de bikinis et de grosse fête au soleil, le bonhomme rend les clefs de la franchise sans mettre en boite le sixième film qui lui était destiné.
Il faut rappeler également qu’au début du nouveau millénaire, la Trimark Picture n’est pas au mieux de sa forme. Les franchises comme WARLOCK ou TURBULENCE peinent à convaincre, et si les faibles budgets permettent encore d’assurer un minimum de rentabilité, l’heure n’est pas aux débordements. La société fusionne donc avec Lions Gate Entertainement et le sixième volet de la saga LEPRECHAUN sera confié à Steven Ayromlooi, un homme qui n’a alors que quelques courts-métrages à son actif. Afin de faire ses preuves, il se plie aux contraintes budgétaires et propose donc de… ramener à nouveau la créature irlandaise en plein ghetto ! On se passera cependant des quelques rappeurs afin d’économiser là encore de précieux deniers, préférant investir sur de jeunes talents qui ne demandent alors qu’à s’exprimer. Et c’est ce qu’ils font. Ils s’expriment. Souvent mal, avec des lignes de dialogues malheureuses, des situations stupides, et une direction d’acteurs inexistante, mais ils s’expriment. Pour certains d’entre eux, LEPRECHAUN : BACK 2 THA HOOD sera même le début d’une carrière, un modeste pied à l’étrier. Citons par exemple Laz Alonso que l’on a pu voir bleu dans AVATAR, ou sans pouvoir dans la série à succès THE BOYS. Même constat pour Keesha Sharp dont le visage illumine aujourd’hui bon nombre de séries télé…
Mais revenons-en au lutin-titre qui sera une nouvelle fois, et pour la dernière, incarné par Warwick Davis. Doté d’un look un peu plus agressif mais toujours sympathique, ce Leprechaun nouveau est, à l’image de ses prédécesseurs, un adepte de l’humour et des rimes. Les punchlines ne relèvent pas du génie mais nous les accueillons toujours avec plaisir. Les plus attentifs des spectateurs remarqueront même que plusieurs d’entre elles sont issues des précédents opus, et recontextualisées ici. Une idée originale, amusante, qui semble récompenser les plus assidus (courageux ?) et dresser le bilan d’une saga. Sans surprise on retrouve donc tous les ingrédients de la franchise avec la quête des pièces d’or, et les morts ludiques qui en découlent. A l’image du volet précédent, la violence est au rendez-vous et le sang coule généreusement. Quelques effets sont douteux (la jambe arrachée) mais d’autres sont soignés (la mâchoire). L’ensemble est divertissant à défaut d’être inventif, et les quatre-vingt-dix minutes s’écoulent sans peine.
Malgré cela, le film sera accueilli assez fraichement à sa sortie. La recette semble ne plus fonctionner et surtout, cette version « Black-movie » dénuée de ses rappeurs / cautions, pose problème. Les clichés sur la communauté noire, l’usage de drogues, les gangs et le racket ne prêtent plus vraiment à rire. Ou du moins, cela passe mieux quand la communauté se joue elle-même des poncifs comme dans les SCARY MOVIE, ou les frasques cinématographiques de Snoop Dogg. Contrairement à LEPRECHAUN IN THE HOOD, cette suite manque donc sa cible et tend même à l’irriter, à juste titre. Avec le recul, tout cela semble assez inoffensif et maladroit, d’autant que la saga n’a jamais été d’une grande finesse. Le postulat de base en est déjà un bel indicateur : un roi de l’époque médiévale aurait régné aux Etats-Unis ? Et aurait confié son or à des Leprechauns irlandais ? Avant que cette terre ne devienne un ghetto de Los Angeles ? En toute logique, ces trois phrases à elles seules sont susceptibles de provoquer des infarctus, ou des fous-rires.
Avec LEPRECHAUN : BACK 2 THA HOOD, il est clair que la franchise ne relève pas le niveau. Cet opus est même souvent considéré comme le plus faible de la saga, mais en réalité, il ne nous semble pas pire qu’un autre ! Aucun des six volets « historiques » ne saurait être qualifié de bon. Le spectateur sera simplement séduit pas certains gags, quelques situations, ou gardera en mémoire de belles mises à morts. Sur ces aspects, le film ne démérite pas vraiment, sans pour autant se démarquer du lot. Nous noterons tout de même la petite introduction animée, assez sommaire mais agréable et originale. Reste que le constat global s’avère quelque peu malheureux puisque nous tournons là une page et qu’il faudra attendre plus de dix ans avant que Lions Gate ne réactive la saga, sur une voie toute différente et sans son acteur phare…
Tout comme les précédents films que nous avons chroniqués, celui-ci est contenu dans le superbe et indispensable (?) coffret Blu-ray édité par Lions Gate aux Etats-Unis. Précisons toutefois que le film est sorti en France en DVD en 2007, sous la bannière Sony. La qualité d’image était alors très bonne, mais celle du Blu-Ray traité ici se situe un net cran au-dessus ! Propre, lumineuse, dénuée de scratch, elle fait parfaitement ressortir la nature fauchée du métrage, ses décors vides et son éclairage minimaliste. Nous sommes toujours ici avec un ratio 1.77 d’origine, via un encodage 1080p irréprochable.
Sur le plan sonore, nous aurons droit à une version originale anglaise cristalline en DTS-HD Master Audio 2.0, secondée par des sous-titres anglais pour malentendants, ou espagnols. Pas de souci ici, l’ensemble est sans bavure et permet une découverte du métrage dans d’excellentes conditions.
Attaquons-nous maintenant aux bonus pour lesquels nous remercions tout particulièrement Lions Gate et le réalisateur Steven Ayromlooi. L’homme n’avait pas fait grand-chose avant LEPRECHAUN BACK 2 THE HOOD et sans grande surprise, il n’a pas fait grand-chose d’autre après. Sans doute rongé par l’ennui et nostalgique de ce tournage béni, Ayromlooi ne se fend pas d’un commentaire audio, mais de trois ! Dans le premier, notre homme est seul et montre régulièrement les limites de l’exercice. A savoir qu’il décrit ce qui se passe à l’écran et n’apporte finalement que peu d’information. On est plus dans le souvenir nostalgique que dans le propos instructif. Dans le second commentaire audio, le bonhomme est accompagné de Warwick Davis qui, disons-le, relève le niveau. Toujours très enjoué et fier de son personnage, l’acteur ne manque pas une occasion de souligner un bon mot, ou une séquence ayant nécessité davantage de travail. L’homme est également très compréhensif vis-à-vis du reste du casting et reste dans une posture extrêmement modeste malgré son expérience plus impressionnante que celle de tous les autres acteurs réunis ! Bien qu’agréable, ce commentaire reste tout de même avare en véritables anecdotes. Pour le troisième commentaire audio, Steven Ayromlooi est accompagné de son directeur de la photographie David Daniel. Et quand on voit la photographie de LEPRECHAUN BACK 2 THE HOOD, il y a quand même de quoi se poser des questions ! Mais le bonhomme a parcouru un peu de chemin depuis, passant d’une imagerie insipide ici, à une patte extrêmement marquée dans les années qui ont suivi. David Daniel fut en effet caméraman pour Rob Zombie dès le superbe THE DEVIL'S REJECTS, avant de passer directeur de la photographie pour 31 et 3 FROM HELL. Un grand écart, même si l’on reste dans de modestes budgets. L’homme nous livre donc un regard actuel sur son travail d’avant. Sans se montrer trop dur avec lui-même (ce qu’il aurait pu faire selon nous), on sent que la fierté n’est pas au rendez-vous et que là encore, les anecdotes pertinentes viennent à manquer… Bref, trois commentaires audios qui auraient pu sans peine n’en faire qu’un !
Outre la saga classique, ce disque est également l’occasion de clôturer la série de documentaires déjà évoqués lors de nos précédentes chroniques. Ce sixième volet d’une durée d’environ quinze minutes donne encore une fois la parole à Warwick Davis qui ne peut éviter la redite d’éléments donnés dans le commentaire audio. L’acteur est toujours très enjoué et nostalgique, ce que l’on peut comprendre lorsqu’il s’agit de quitter un personnage interprété dix années durant et à six reprises…
Six ? Oui six. Mais nous ne pouvions boucler ce cycle sans évoquer un autre film, complètement décorrélé de la saga et pour lequel Davis a incarné un tout autre Leprechaun, mielleux à souhait ! Si vous cherchiez un film vraiment honteux de médiocrité, A VERY UNLUCKY LEPRECHAUN de Brian Kelly, sorti en 1997, supplante sans problème l’ensemble des films du lutin démoniaque ! Ce navet connaitra même une suite intitulée THE WHITE PONY, en 1999. Warwick Davis y reprend à nouveau un rôle de Leprechaun gentillet, avec davantage de succès toutefois. Forts de ces informations cruciales, vous voilà, chers lecteurs, incollables sur la saga que nous qualifierons peut-être abusivement de « classique »…