Alors que d'horribles assassinats surviennent dans un quartier de Londres, la famille Bonting propose une chambre à louer. Un soir, un homme dénommé Slade se présente à leur porte pour devenir leur nouveau locataire.
A la fin du XIXème siècle, une vague de meurtres survient dans le quartier de Whitechapel, à Londres. Plusieurs prostituées sont assassinées de manière sanglante et, assez vite, une lettre à la provenance incertaine impute ces assassinats à un dénommé Jack. La presse à scandale s'empare de cette histoire et va instaurer la popularité de «Jack l'éventreur». Mais, en réalité, l'identité du tueur reste encore aujourd'hui un mystère même si des théories plus ou moins crédibles ont été avancées. Evidemment, cette abominable histoire va inspirer de nombreux auteurs et le personnage va ainsi apparaître sous diverses formes dans la littérature puis sur les écrans. Au cinéma, les adaptations sont nombreuses. Une partie d'entre elles tentent de donner une réponse aux meurtres de Whitechapel alors que d'autres exploitent l'aspect sulfureux de l'histoire. Le personnage va même susciter des d'étranges variations, comme le DOCTEUR JEKYLL & MISTER HYDE de Roy Ward Baker, le voyage temporel dans C'ETAIT DEMAIN et même la résolution du mystère à l'autre bout de l'univers dans l'épisode «Le loup dans la bergerie» de STAR TREK.
En ce qui concerne JACK L'EVENTREUR, le film de John Brahm, il ne puise pas directement sa source dans l'histoire du tristement célèbre tueur en série. En effet, il s'agit de l'adaptation d'un livre de Marie Belloc Lowndes qui a déjà été adapté à plusieurs reprises au cinéma. Lors d'un dîner, l'auteur est interpellé par les propos d'une autre convive qui loue une chambre à un homme qu'elle pense être Jack l'éventreur. Il n'en faut pas plus pour que Marie Belloc Lowndes se lance dans l'écriture de The Lodger. Si le livre s'inspire bel et bien des meurtres de Whitechapel, le tueur n'est jamais nommé explicitement Jack l'éventreur et les faits sont entièrement fictionnels. Cela explique les divergences entre les faits réels et ce qui est décrit dans les différentes adaptations cinématographiques du livre. Les deux premiers films, LES CHEVEUX D'OR d'Alfred Hitchcock et MEURTRES de Maurice Elvey, conservent l'ambiguïté même si personne n'est réellement dupe. Pour sa troisième adaptation, réalisée par John Brahm, THE LODGER prend le titre de JACK L'EVENTREUR en France et le tueur est nommé "The Ripper" alors que l'on peut voir "Jack" à la une d'un journal ! Toutefois, il faut réellement garder à l'esprit que l'histoire originale du livre prend d'énormes libertés... Ainsi, dans le film de John Brahm, le tueur ne s'attaque pas à des prostituées mais à des femmes artistes de music-hall ou musiciennes. Assez vite, l'intrigue ne laisse planer que peu de doute sur l'identité du tueur. Le film de John Brahm se focalise plutôt sur ce locataire étrange et ses relations avec son entourage. Cela instaure une ambiance inquiétante dans une maisonnée calme où la présence d'un tueur semble inconcevable. Ainsi, les propriétaires sont tour à tour suspicieux ou dans le déni face aux curieux comportements de leur locataire. Pour le spectateur, cela provoque des moments de tension psychologique plutôt réussis. D'autant plus que JACK L'EVENTREUR est une production de la Fox plutôt riche en terme de décors et costumes. Le tout étant mis en image dans un classieux noir et blanc aux éclairages très soignés. Seul petit bémol, les passages musicaux, type french cancan, ne sont pas du meilleur goût mais ont l'avantage de renforcer la haine du tueur pour les danseuses...
Réalisateur sous contrat avec la Fox, John Brahm se voit proposer de mettre en scène JACK L'EVENTREUR qui sera son sixième film pour le studio. Et parmi ses oeuvres précédentes à la Fox, une seule tenait du registre fantastique avec le modeste THE UNDYING MONSTER. Lorsqu'il arrive sur le projet, l'acteur principal, Laird Cregar, a déjà été choisi et Barré Lyndon en a déjà écrit le scénario. Il ne reste plus qu'à tourner le film avec, en plus, Merle Oberon et George Sanders, ce dernier ayant d'ailleurs refusé de jouer dans THE UNDYING MONSTER quelques années auparavant. Parmi les seconds-rôles, on trouve aussi Cedric Hardwicke, le comédien étant bien connu des férus de cinéma fantastique puisqu'il apparaissait déjà dans des rôles principaux sur LE SPECTRE DE FRANKENSTEIN, QUASIMODO ou encore LE RETOUR DE L'HOMME INVISIBLE. Enfin, il est bon de citer le nom de Darryl F. Zanuck, dirigeant de la Fox qui, bien qu'il ne soit pas crédité au générique, a largement influé sur la genèse du film jusqu'à son accomplissement final. Par exemple, c'est lui qui impose de placer une séquence de meurtres en ouverture du film alors que cette dernière avait été tournée à l'origine pour apparaître bien plus tard dans l'histoire avec une victime différente. C'est également Darryl F. Zanuck qui réunira une nouvelle fois l'équipe de JACK L'EVENTREUR pour un autre thriller psychologique mettant en scène un tueur, HANGOVER SQUARE.
Comme dit précédemment, JACK L'EVENTREUR est la troisième adaptation du livre de Marie Belloc Lowndes. Mais après LES CHEVEUX D'OR (1926), MEURTRES (1932) et ce JACK L'EVENTREUR (1944), le livre a de nouveau été porté à l'écran en 1953 avec L'ETRANGE MR. SLADE (sorti en DVD sous le titre JACK L'EVENTREUR) de Hugo Fregonese (1953) et en 2009 avec THE LODGER de David Ondaatje, une version modernisée mettant en scène le MENTALIST, Simon Baker, dans le rôle du locataire.
JACK L'EVENTREUR était sorti en DVD aux Etats-Unis dans une boîte réunissant les trois films à tendances horrifiques réalisées par John Brahm pour le compte de la Fox : THE UNDYING MONSTER et HANGOVER SQUARE étant les deux autres métrages. En France, le film était resté inédit en DVD jusqu'à aujourd'hui. Mais Rimini Editions ne se contente pas de sortir le film en DVD puisque l'éditeur propose aussi de retrouver JACK L'EVENTREUR en Blu-ray. L'opportunité de revoir le film avec une image en haute définition de belle tenue. Côté son, l'éditeur propose une piste audio en version originale anglaise sous-titrée en français. A l'instar de l'image, la piste sonore fait son office de manière agréable. En complément, l'éditeur français a produit un supplément qui donne la parole au critique Justin Kwedi qui évoque le film ainsi que les divers intervenants. Le boîtier du Blu-ray recèle un autre supplément passionnant, un livret de 32 pages entièrement dédié à John Brahm, retraçant sa carrière avec force détails et anecdotes, le tout illustré de photos.