Elizabeth se rend en train à l'exploitation vinicole où
travaille son fiancé. Lors d'un arrêt, l'un des travailleurs
de cette exploitation monte à bord. Affligé d'un mal étrange,
il assassine la jeune femme qui accompagne Elizabeth avant de s'en prendre
à elle. Effrayée, elle tire le signal d'alarme et profite
de l'immobilisation du train pour s'enfuir dans la campagne
Lorsque Jean Rollin nous avait présenté son film, lors d'une nuit qui lui était consacrée, il y expliqua en gros sa genèse. Après quelques films, il se voit proposer un budget conséquent par le producteur Claude Guedj pour réaliser ce que l'on appelle communément un film de commande. En gros, ce nouveau film se devait d'exploiter les filons en vogue du moment. Les morts-vivants cartonnent auprès d'un public avide de sensations fortes et les films catastrophe remplissent les salles. On donne donc la directive à Jean Rollin de mettre en boîte un film catastrophe peuplé de morts-vivants. Jusque-là, rien de bien étonnant puisque l'histoire du cinéma est peuplée de producteurs surfant sur les divers succès du moment. Par contre lorsque Jean Rollin vous annonce en pleine nuit que LES RAISINS DE LA MORT est un remake de L'AVENTURE DU POSEIDON, il y a de quoi vous laisser perplexe. Il n'y a pas de paquebot dans le film de Jean Rollin et il se déroule en plein milieu des Cévennes. L'affirmation du réalisateur pourrait donc être prise pour un gag, surtout que celui-ci ne développera pas plus en laissant les spectateurs à la seule vision d'un film après un "Enfin bon, vous verrez !". Et pourtant, son affirmation s'avère exacte si l'on ne garde que la moëlle la plus mince du récit. A savoir quelques personnages qui, pour survivre, sont obligés d'aller d'un point A vers un point B. Le chemin étant, vous vous en doutez, semé d'embûches. Le point de vue peut donc se défendre !
En plus de cette histoire à propos des films catastrophes, les morts-vivants des RAISINS DE LA MORT sont plutôt atypiques dans le sens où ils ne sont que vivants et pas encore morts. Ils ne sortent pas de leur tombe. Ils ne contaminent pas leurs semblables. Les seuls éléments gardés par Jean Rollin et Jean-Pierre Bouyxou sont l'agressivité, la décomposition et l'effet de groupe. Sans oublier les liens affectifs que l'on peut avoir avec ceux qui sont passés de l'autre côté. Ce dernier thème étant souvent repris depuis LA NUIT DES MORTS VIVANTS. Ainsi, on peut assister à une scène où l'un des personnages ne peut se résoudre à ce que l'on tue l'être aimé, même si celui-ci n'est plus tout à fait comme avant. Plus original, LES RAISINS DE LA MORT nous offre aussi l'effet inverse. A savoir une déclaration d'amour à en perdre la tête de l'une des personnes affectées envers une aveugle terrorisée ! Le film se trouve alors en équilibre entre le comique et le touchant. Equilibre fragile qui semble mener le film de bout en bout. Ensuite, en fonction des spectateurs, l'un ou l'autre l'emportera. Les uns y verront un ratage amusant (mais on a vu bien pire dans le genre avec LE MANOIR DE LA TERREUR) alors que les autres pourront se prendre au jeu de l'ambiance du terroir plutôt attendrissante. A moins de ne se laisser porter de l'un à l'autre en fonction des séquences
Un gros budget pour Jean Rollin n'est, il faut le dire, qu'un petit budget. Le réalisateur ne change pas grand chose à sa façon de travailler. On notera simplement la présence de trois ou quatre acteurs que l'on qualifiera de professionnels, dont l'actrice principale (Marie-Georges Pascal). L'intégralité de l'équipe travaille de toutes façons devant et derrière la caméra en fonction des besoins. Ainsi, on notera la présence à l'écran du fils de Jean Rollin ou de Jean-Pierre Bouyxou, scénariste du film, dont nous vous avons parlé à propos du DVD de CRIMES AU MUSEE DES HORREURS. Au passage, Jean Rollin y fait aussi une apparition comme dans la plupart de ses films. Pas pour faire un clin d'il mais plutôt par souci d'économie. Au rayon des acteurs, on retrouve aussi Brigitte Lahaie dans un petit rôle. LES RAISINS DE LA MORT étant d'ailleurs la première collaboration de l'actrice, jusqu'alors cantonné dans le cinéma pornographique, avec Jean Rollin. Par la suite, elle tournera dans la plupart des autres films du réalisateur.
Pour l'occasion, les producteurs avaient fait venir un spécialiste italien pour réaliser des effets gores. Malchance puisque le tournage se déroula dans des endroits totalement isolés où il régnait un froid particulièrement saisissant. Certains effets spéciaux étaient alors inopérants au moment du tournage en raison de la température trop basse. De ce fait, quelques plans sanguinolents seront mis à l'écart du film. En plus du spécialiste italien, l'équipe comportait un maquilleur français (Raphael Maronjiu), en théorie moins doué, mais proposant des effets plus simplistes et parfois bien plus réalistes visuellement (la fameuse fourche par exemple ). Parfois, il est préférable de ne pas aller chercher bien loin ce que l'on a sous la main
Dans la lignée des
incursions du producteur dans la réalisation du film, il paraît
que c'est à la demande expresse du producteur que les deux personnages
masculins ont gagné une séquence de dialogue incongrue
mais qui fait toujours mouche. D'après le producteur, il fallait
combler le manque de tension entre les deux hommes, histoire de donner
un peu plus de piment au film. Résultat, tout d'un coup, les
deux hommes se lancent dans quelques tirades politico-écologiques
du plus bel effet. Un très grand moment !
Fort d'un tout nouveau transfert réalisé pour Canal+, ce DVD allemand propose une image de belle facture. Il reste bien quelques défauts de pellicules (essentiellement des tâches) ou des plans plutôt granuleux mais cela n'a rien de bien gênant. Tout comme la compression, elle n'est pas à 100% parfaite et laisse apparaître de petits problèmes (cela fourmille un peu dans les arrière-plans). Rien de bien grave pour autant sur ce joli transfert anamorphique (16/9) !
Le disque contient deux bandes sonores : la version française d'origine et le doublage en allemand. Une grande partie de la version française du film a été post-synchronisée par la suite. Cela se voit par moment lors des divers dialogues. A ce niveau, on notera l'une des anecdotes amusantes révélées dans le documentaire. Brigitte Lahaie se promène à un moment avant de se dénuder lors d'une scène nocturne. Au moment où elle devait déclamer son texte, aucun mot ne put sortir de sa bouche en raison du froid. Pour en revenir à la bande-son française, si l'on peut noter la post-synchronisation évidente, le résultat est plutôt honorable pour du simple mono. L'ensemble est clair et parfois un peu criard (normal, ça crie souvent, me direz-vous !).
Le documentaire "Bloody Lips & Iron Roses" est un entretien avec Jean Rollin d'une durée d'environ trente-cinq minutes. Il ne se fixe pas sur LES RAISINS DE LA MORT mais permet d'avoir un rapide aperçu de la carrière de ce réalisateur atypique dans le paysage français. On peut donc y voir des extraits du VIOL DU VAMPIRE ou de LA VAMPIRE NUE. Le réalisateur parle aussi de ses actrices ou de sa nécessité d'ajouter des séquences érotiques dans ses films. Bien que français, ses interventions ont été réalisées en anglais, alors que la voix-off qui les relie est en allemand. Il est possible d'afficher un sous-titrage anglais mais il vous permettra seulement d'obtenir la transcription des passages en allemand. Pour le reste, à vous de déchiffrer l'anglais de Jean Rollin. Cela s'avère assez facile de suivre ce qu'il raconte dans le cas où vous auriez un niveau d'anglais moyen. En effet, grâce à son accent prononcé et à l'apparition de mot français au détour de quelques phrases, il n'y a pas vraiment de problème !
La Griffe d'Horus
Le court métrage nommé
LA GRIFFE D'HORUS,
réalisé au début des années 90, dépasse
à peine les deux minutes et il s'agit en fait de ce qui aurait
pu devenir une série télévisée : LES
NOUVELLES AVENTURES DE HARRY DICKSON. Il faut croire que cet essai
n'a convaincu personne puisqu'il n'y a jamais eu de suite
Pour
le reste, ce sont les bandes annonces française et allemande
ainsi que deux galeries de photos. L'une des galeries est consacrée
à Jean
Rollin et l'autre au film lui-même où l'on peut découvrir
les photos d'exploitation françaises d'époque.
A noter l'erreur plutôt amusante sur le dos de la jaquette visible
à l'intérieur du boîtier où l'on peut lire
"LES RAISONS DE LA MORT". La même erreur se retrouve
dans la mini-interview du livret.
LES RAISINS DE LA MORT, comme tout bon film de commande, ne restitue pas toute l'essence des films de son réalisateur. Jean Rollin y aura tout de même inséré un peu de lui-même ce que l'on pourra noter ici ou là (le plan des gouttes de sang sur le visage de l'héroïne à la fin, Brigitte Lahaie se promenant toute de blanc vêtue dans la nuit avec deux chiens ). Cela reste toutefois un film plutôt ludique même s'il peut être jugé bien trop lent ou alors trop amateur. Mais c'est justement en cela qu'il se libère de la comparaison avec les films de morts-vivants transalpins qui pourrait être jugée évidente. LES RAISINS DE LA MORT peut se voir comme un film plutôt rigolo ou comme la tentative de réaliser un film de morts-vivants aux forts relents agricoles. C'est selon...