Header Critique : VIERGES DE LA PLEINE LUNE, LES (IL PLENILUNIO DELLE VERGINI)

Critique du film et du DVD Zone 2
LES VIERGES DE LA PLEINE LUNE 1973

IL PLENILUNIO DELLE VERGINI 

Persuadé de dénicher l'anneau mythique des Nibelungen, l'archéologue Franz Schiller (Mark Damon) se rend dans la demeure de Dracula, dans un château au fin fond des Carpathes, Il y trouve en fait la comtesse Dolingen de Vries (Rosalba Neri), non sans avoir fait auparavant la connaissance des habitants du village, terrorisé par la légende des Vierges de la Pleine Lune, où de jeunes femmes seraient sacrifiées tous les 50 ans...

A la tête de ce projet néo-gothique 70's, un certain Paolo Solvay. Se cache derrière ce pseudo Luigi Batzella, acteur scénariste et réalisateur : un des nombreux faiseurs de bis tendance Z transalpin, responsable de redoutables oeuvres psychotoniques comme le ridicule nazisploitation LA BESTIA IN CALORE, ayant tripatouillé avec Dick Randall sur un mondo PROIBITO EROTICO ou encore le redoutable pseudo-décaméron erotico-comique CONFESSIONI SEGRETE D'UN CONVENTO DI CLAUSURA avec déjà Damon et Neri. Toute une époque. Il toucha à peu près à tous les genres, mais il semble pour une fois toucher le jackpot qualitatif avec ces VIERGES DE LA PLEINE LUNE. On parle de bis italien, il faut aussi donc raison garder.

Ecrit par le producteur Ralph Zucker, le scénario s'ingénie à brasser un monceau d'influences gothiques et fantastiques. Partant de l'anneau des Nibelungen, on y trouve une louche de vampirisme, du Dracula, voire de semi-remake de LA COMTESSE DRACULA. Et on y retrouve aussi une vague référence à une des créatures de Dracula, la Comtesse Dolingen de Gratz (Voir le film LES JEUX DE LA COMTESSE DOLINGEN DE GRATZ de Catherine Binet en 1981 avec Carol Kane). sauf que le nom de la Comtesse, jouée donc par Rosalba Neri, est écorché. en « Dolingen de Vries » Le tout saupoudré d'une amulette sacrée, d'Erszebet Bathory, du dieu « Pazuzu » (traduit en VF par « Pazuzi »!), de frères jumeaux, de diable et de sacrifices humains. Vaste programme! Et en fait, loin d'être inintéressant, car il donne un ton inhabituel au film de genre. Comme si (enfin) un auteur avait effectué un petit effort d'originalité plutôt que de simplement copier des recettes éculées. Certes, l'écriture reste infantile et primaire, mais la folie des idées collées à la n'importe quoi réussissent à sortir le film de l'ornière de la médiocrité. Le rythme imposé par la progression de l'histoire tient la route et l'ensemble s'équilibre le long des 85 minutes. Aucun ennui à suivre ces pérégrinations gothico-érotiques, et pour les amateurs de pellicules bis, un vrai bonheur.

Un grand atout du film : la photo d'Aristide Massacesi (donc Joe d'Amato), qui donne un cachet professionnel à un produit somme toute assez amateur sur le papier. Car il ne faut pas oublier que Solvay/Batzella articule son film principalement autour des cavalcades érotico-fumeuses de la comtesse Dolingen. Donc, inévitablement, le triumvirat sacré du film d'exploitation italien se met en branle. Sexe, sang et lesbianisme. Dans la grande mode des vampires féminines aux tendances saphiques, Rosalba Neri dévoile non seulement son talent, mais également ses charmes. Notamment dans une magnifique scène où elle surgit d'une tombe nimbée de brouillard et de sang : magnifique!

Tourné en extérieur au château de Balsorano, que les amateurs de bis auront facilement reconnu car ayant déjà accueilli en son sein les tournages de THE LICKERISH QUARTET de Radley Metzger ou encore le « fameux » RITI, MAGIE NERE E ORGIE DEL TRECENTO de Renatio Polselli. Filmé de manière adéquate, il ajoute immanquablement au revival gothique que le film souhaite imprimer dans l'inconscient du spectateur. Cela compense quelque peu la manque de moyens général qui se ressent. Mais même si l'on sent que le budget est très bas, ce que confirme Rosalba Neri dans l'un des bonus du DVD français, on s'étonne du soin mis sur celluloïd. Certains effets spéciaux sont parfaitement ridicules comme les gros plans sur la chauve-souris « géante », mais d'autres effets mécaniques donnent un véritable impression de fantastique, de mystère. Et le tout pointant vers un final plutôt réussi, énigmatique et quelque peu excessif. La patine Vintage aide grandement à la vision des VIERGES DE LA PLEINE LUNE plus de 40 ans après son tournage. Ceci fera oublier nombre de grossièretés dans la mise en scène, les anachronismes, ou que les Appenins ne peuvent décidément pas passer pour la Roumanie. Voire qu'en supposée Roumanie, le nom de la taverne est écrit... en russe!

Mark Damon incarne ici un double rôle mais après un détour chez Corman dans les années 60, il filait droit vers une fin de carrière avec des métrages de plus en plus minables. Rosalba Neri, sublime, forcément, tient le haut du pavé dans un rôle qui lui permet de tirer vers le haut une oeuvrette qui aurait été bien plus insignifiante sans sa présence. Les bonus du film reviennent ainsi bien plus en profondeur sur la carrière de ces deux têtes d'affiche. Les cinéphiles les plus fins auront noté qu'aux décors apparait le nom de Carlo Gentili. Un artiste protéïforme qui oeuvra dans les costumes, décors mais aussi en qualité d'inspecteur de police dans les deux Gialli de Luciano Ercoli (NUITS D'AMOUR ET D'EPOUVANTE & LA MORT CARESSE A MINUIT) ou une apparition dans le giallo-bas de plafond CARESSES A DOMICILE de Demofilo Fidani. Il opère ici le rôle du tavernier. Une autre « gueule » du cinéma bis italien, c'est Gengher Gatti, promenant sa carrure inquiétante dans LE MASSACRE DES MORTS-VIVANTS et l'EXORCISME TRAGIQUE de Romano Scavolini.

Le temps des films d'horreur gothiques réussis reste quand même bien loin. On se trouve à des années lumière de la qualité plastique de LA VIERGE DE NUREMBERG ou des accents mortifères du MASQUE DU DEMON. LES VIERGES DE LA PLEINE LUNE ne dérange pas vraiment et le trouillomètre reste désespérément plat. Batzella filme l'ensemble de manière assez adroite et c'est à se demander si d'autres mains n'ont pas mis la main à la pâte? Dans une interview sur le DVD italien, le producteur Franco Gaudenzi précise en ce sens que l'apport de Masaccesi à la photographie (et en seconde équipe) fut primordial. Le métrage demeure fidèle aux préoccupations des distributeurs et producteurs des années 70. Une fabrication artisanale, beaucoup de scènes déshabillées, une violence qui pointe le bout de son nez, des têtes d'affiches reconnaissables et allant dans le sens du vent. On se retrouve en pleine mouvance de films mineurs comme IL SESSO DELLA STREGHA d'Elo Pannaccio ou encore L'AMANTE DEL DEMONIO, encore avec Rosalba Neri. Sauf qu'ici, l'étrange alchimie des talents, les sublimes éclairages et du n'importe quoi batzellesque donne une oeuvre indéniablement au-dessus du lot. Il faut juste avoir pleinement conscience de mettre les pieds dans un univers où toute logique et bon goût n'oint pas droit de citer. Ceci dit, lorsqu'on choisit de voir un film qui s'appelle LES VIERGES DE LA PLEINE LUNE, il ne faut pas s'attendre à du Bergman!

Un belle surprise que la copie proposée par Artus Films pour cette édition DVD française. Un format original 1.77:1 et 16/9e, d'une netteté et dotée de contrastes agréables. Il faut pour cela passer le édénique de ébut perclus de poussières noires qui font craindre le pire. En effet, le film contenant nombre de séquences en pleine nuit et dans des intérieurs sombres, il fallait vraiment que la lisibilité des scènes soit au rendez-vous. C'est le cas ici et le côté anecdotique des plans de jours contrastent avec ceux adéquats d'intérieurs et de nuit. Les couleurs jaillissent avec notamment un rouge puissant pour les scènes sanglantes. La propreté de la copie fait honneur au produit et il semble qu'il s'agisse d'un version complète, ici de 78mn37. En effet, certaines copies circulant dans certains pays manquent le plan final de la main surgissant de terre, voire de certains plans sanguinolents.

A noter que le menu, à la forme aisément reconnaissable pour un dvd Artus, toujours basé sur le même principe de présentation et accès en 8 chapitres, offre à entendre le thème principal crapahutant de Vassili Kojucharov en stéréo. Peut-être une idée à reprendre pour les amateurs complétistes, à savoir d'offrir sur une piste séparée, la musique originale du film? Deux pistes audio au choix. Les amateurs d'expérience 70's se dirigeront vers la VF d'époque, pour se rendre compte qu'en 1973, les doubleurs prenaient grand soin de leur métier, même pour un Batzella. Les puristes se tourneront vers la version doublée en italien. Des sous-titres français optionnels complètent le tout. Le version italienne possède la particularité de certains effets de style audio : comme la voix off de Mark Damon vers 3mn 20, dotée d'un écho volontaire. ce qui est absent de la version française. Les deux pistes possèdent un petit souffle lors des scènes de dialogues, mais qui n'est en rien gênant. Le piste française semble légèrement saturer au début, mais fait jeu presqu'égal avec la version originale - tout en paraissant plus brute dans son rendu final.

Un entretien amusant avec Rosalba Neri permet de constater le fossé qui existe entre un film cher au coeur de certains cinéphiles et le souvenir que l'actrice principale peut en avoir. Ici, Rosalba n'a pratiquement aucun souvenir du film (elle en oublie d'avoir tourné avec Mark Damon), si ce n'est qu'il était « horrible »! Elle semble toute surprise que certains puissent encore s''intéresser aux VIERGES DE LA PLEINE LUNE, et surtout qu'il soit encore possible de le visionner de nos jours. Entre un souvenir agréable d'Aristide Massaccesi « qui prenait beaucoup de décisions », donc a « peut-être » tourné certaines scènes, elle valide le très peu de moyens dont bénéficiât du film. Et ne se souvient pas du tout comment elle y finit! Ce qui reste curieux avec ces quelques 12 minutes passées en sa compagnie, c'est que le bonus ne parait pas porter sur le film même. Mais semble focalisé sur sa vie d'aujourd'hui, comme faisant partie d'une interview beaucoup plus longue? En tous cas, il reste le souvenir d'une femme positive, souriante, regardant sa jeunesse de manière assez lointaine - et surtout ne préférant pas se souvenir du type de films qu'elle a tourné. Les fans en seront pour leurs frais!

L'autre bonus offre une nouvelle tribune au spécialiste Alain Petit qui va décortiquer les participants au générique du film et leur diverses implications. S'y ajoute un diaporama d'affiches et photos d'exploitation italiennes, le générique italien et les films annonce de la collection « Gothique » de l'éditeur.

A noter aussi que le film est sorti en 2012 dans la collection CineKult chez Cecchi Gori en Italie. Seulement pour les italianophiles, aucun sous-titre français, mais un entretien avec Rosalba Neri «Nuda per Dracula», mais également avec Joe d'Amato et le producteur Franco Gaudenzi.

Un bel appel du pied aux fanas de films italiens d'exploitation que cette sortie française des VIERGES DE LA PLEINE LUNE. Mais que les autres ne soient pas en reste pour découvrir cette perle gothique autre. Grâce à la qualité des bonus, le choix des versions et une jolie copie, on recommande ainsi cette édition, tout autant que de se précipiter dans les bras de Rosalba (enfin, en rêve, bien sûr).

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
56 ans
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Rosalba Neri
une vraie réussite du cinéma Bis italien
une très belle photographie
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L'édition vidéo
IL PLENILUNIO DELLE VERGINI DVD Zone 2 (France)
Editeur
Artus
Support
DVD (Double couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h18
Image
1.78 (16/9)
Audio
Italian Dolby Digital Mono
Francais Dolby Digital Mono
Sous-titrage
  • Français
  • Supplements
    • La comtesse rouge par Alain Petit (33mn25)
    • La Comtesse Rosalba : entretien avec Rosalba Neri (13mn06)
    • Diaporama (0mn59)
    • Générique italien (3mn05)
      • Bandes annonces
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