Nous sommes au plein cœur d'une banlieue londonienne, avec ce qu'elle contient de petits dealers, de jeunes un peu paumés et... d'aliens ! Car oui, alors qu'ils viennent de braquer une jeune femme, quelques adolescents assistent à la chute d'un météorite qui s'avère être une très étrange créature. Bien qu'agressive, la bestiole cèdera rapidement sous les coups de couteau de l'un des gosses. La joyeuse bande parade alors dans les rues, exhibant fièrement ce trophée venu de l'espace. Mais bien vite, l'euphorie cède place à l'inquiétude, alors que les météorites se mettent à pleuvoir sur la Cité, libérant des monstres bien plus hargneux...
«Par les producteurs de SHAUN OF THE DEAD» nous scandait l'affiche française lors de la sortie du film en salles fin 2011. Un argument marketing à double tranchant puisqu'il évoque l'une des plus belles surprises de l'année 2004 mais suggère également que nous avons là une nouvelle comédie britannique... Recadrons donc les choses en début de chronique. Bien qu'il puisse faire sourire par instants, ATTACK THE BLOCK n'est pas une comédie et ne partage rien avec le film d'Edgar Wright, au-delà de ses origines et d'une partie de son équipe. Les producteurs Nira Park, Tessa Ross et Edgar Wright sont en effet de la partie alors que nous retrouvons également dans un second rôle l'acteur Nick Frost et son agréable bonhommie. Plus étonnant, ceux qui ont eu la curiosité de regarder les suppléments de SHAUN OF THE DEAD, depuis les premières éditions DVD, auront peut-être remarqué l'apparition d'un acteur/zombie non crédité au générique. Ce bonhomme, c'était Joe Cornish. Un personnage lié à l'univers télévisuel britannique, notamment pour son THE ADAM AND JOE SHOW, une mini-série d'une vingtaine d'épisodes dans lesquels il partageait la vedette avec l'un de ses amis d'école, Adam Buxton. Egalement scénaristes du show, les compères se lanceront ensuite dans une version animée, puis une ultime saison titrée ADAM AND JOE GO TO TOKYO. Au cinéma, après SHAUN OF THE DEAD, Joe Cornish sera de nouveau au générique de métrages liés à Nick Frost et Edgar Wright. Ainsi, il aura un rôle plus important dans HOT FUZZ et obtiendra des remerciements pour SCOTT PILGRIM et PAUL.
Joe Cornish aura donc modestement mais sûrement glissé de la télévision au cinéma, pour en arriver au ATTACK THE BLOCK dont il est question ici. Là encore, il assure le script et passe de surcroit à la réalisation. De toutes évidences, Cornish n'a pas fait que se balader aux côtés de ses pairs et semble également avoir bien appris d'eux. Plutôt soigné, son métrage se montre en effet fort bien rythmé et habilement pensé. De son aveu, le metteur en scène sera parti du SIGNES de M. Night Shyamalan pour se demander à quoi ressemblerait une invasion extra-terrestre dans la banlieue sud de Londres. Au final, les deux métrages sont (heureusement) assez éloignés l'un de l'autre et Cornish nous livre un métrage lorgnant davantage sur les séries B à base de bestioles. On pensera par exemple à CRITTERS et ses boules de poils dentues tombées du ciel. Point de petite bourgade ici cependant, mais un «Block» de béton, peuplé bien évidemment de petites frappes.
A ce niveau, nous évoquerons plutôt les ASSAUT et NEW YORK 1997 d'un Carpenter ou LES GUERRIERS DE LA NUIT d'un Walter Hill, toutes proportions gardées bien sûr. En effet, ATTACK THE BLOCK mise clairement sur une poignée d'anti-héros. Cinq petits zonards prêts à braquer une jeune femme une fois la nuit tombée. Des loubards qui ne suscitent pas la moindre compassion... Et pourtant... Assez rapidement, les masques tombent. Ces jeunes ne sont finalement rien d'autre que des ados, évoluant dans un univers sombre face auquel ils n'ont d'autre choix que de s'adapter, roulant des mécaniques et délimitant tant bien que mal leur «territoire». Fort bien amené, ce regard sur les banlieues se veut donc aux antipodes de ce qu'on aura pu voir dans les imbéciles BANLIEUE 13, LA HORDE ou SHEITAN... Au-delà des apparences, nos cinq jeunes cherchent ici la survie et livreront peu à peu leur personnalité par le biais de quelques dialogues ou élégantes révélations (la chambre de Moses). Plutôt intelligent donc, ATTACK THE BLOCK ne triche pas et met du reste en scène de jeunes acteurs crédibles, eux-mêmes issus des quartiers. Langage, attitude, gestuelle, tout est là sans que l'on souffre pour autant des «Syndromes Besson» que sont la caricature et la non-performance d'acteur...
Mais au-delà du jeune gang qu'il dépeint avec une élégance inattendue, ATTACK THE BLOCK est avant tout et comme nous l'avons dit un efficace film de bestioles. Dans ce registre, le métrage fait encore une fois des étincelles en offrant un spectacle généreux, dévoilant aussi bien ses monstres que leurs méfaits. Convaincantes, les créatures bougent vite et bien. Leurs mouvements sont particulièrement crédibles et si leur design très contrasté peut surprendre, il n'en reste pas moins mémorable. Leurs attaques sont en outre assez violentes et n'épargneront personne. Les amateurs de gore auront donc quelques effets à se mettre sous la dent et les allergiques aux caméras virevoltantes pourront souffler. ATTACK THE BLOCK opte en effet pour une approche assez «classique», offrant malgré tout une séquence de plusieurs secondes au ralenti, là encore très maîtrisée...
Nous noterons enfin le soin apporté à la bande-originale, usant essentiellement de rythmes Rap et R'n'B, mais évoquant également et de manière régulière des partitions d'un autre âge. Nous retrouverons ainsi quelques airs renouant avec l'aura de «mystère» qui se dégageait des bandes musicales de métrages dédiés aux invasions extra-terrestres, notamment dans les années 50. Une idée curieuse, mais finalement appréciable qui cohabite avec quelques titres comme «Sound of da Police» de KRS-One, rendu célèbre chez nous grâce au sample entendu dans LA HAINE.
Affichant donc assez clairement un statut de Série B léchée, cette première péloche de Joe Cornish est une petite réussite du genre. Sans doute mal vendu ou peut-être décalé à une époque où ce type de film ne trouve guère plus sa place en salles, ATTACK THE BLOCK n'en mérite pas moins une (re)découverte à domicile. De part son approche plutôt maline, sa mise en scène soignée et son dynamisme certain, le film nous semble avoir tous les ingrédients pour rester dans les mémoires des fantasticophiles et amateurs de monstres croqueurs !
En février 2012, ATTACK THE BLOCK aura trouvé le chemin des linéaires sous la bannière de StudioCanal. L'arrivée se fera par la petite porte, assez discrètement et à prix modeste. Mieux encore, l'édition en haute définition sera aussitôt proposée par de nombreuses enseignes au sein d'offres type «3 Blu-Ray pour 30 euros». Une véritable aubaine qui nous permettra de profiter d'un disque de qualité, qui plus est gorgé de suppléments. On notera que le Blu-ray de SHAUN OF THE DEAD connaîtra le même parcours en sortant à la même date !
Mais commençons tout d'abord par le transfert en 1080p/24, respectant le ratio 2.35 d'origine. Les contrastes proposés sont puissants et en parfaite adéquation avec la photographie du film. La compression est invisible et les défauts de pellicule totalement absents. En bref, nous avons là une copie qui ne saurait souffrir le moindre reproche ! Il en sera de même en ce qui concerne les pistes sonores, très dynamiques et relativement bien spatialisées. L'ensemble n'est pas toujours d'une grande subtilité mais le rendu global est de très bonne tenue, parfaitement clair. Le doublage français se montre sans surprise moins convaincant que la version originale mais reproduisant assez correctement le jargon des rues.
Sur le plan éditorial, difficile de trouver à redire tant la galette s'avère généreuse. Commençons donc par le gros morceau avec un journal de tournage dont la durée avoisine l'heure. Difficile de nier qu'il n'y a pas quelques longueurs par instants mais la bonne humeur générale nous mène au bout sans trop de peine. L'ensemble est assez bien rythmé, et chaque acteur / personnage se voit évoqué sans sentiment de redondance ou de lourdeur. Entre deux, on assiste au tournage d'un bon nombre de séquences clefs qui sont autant d'occasions de découvrir les coulisses, les trucages et la mise en place des décors. Les intervenants sont donc relativement nombreux et le documentaire confirme le sentiment qui se dégage à la vision du métrage. A savoir que nous avons là un travail humble et détendu, mais également respectueux et assez réfléchi. En fait, nous sommes en totale opposition avec ce que nous pouvions voir par exemple sur le documentaire de VINYAN !
Fort de ses vingt minutes consacrées aux bestioles, «A la découverte des créatures» mérite également le détour. On sera tout d'abord surpris de constater que les monstres noirs, malgré leurs mouvements incroyablement fluides et crédibles, sont d'origines humaine et animatronique ! L'américain Terry Notary, chorégraphe habitué aux grosses productions (AVATAR, LES AVENTURES DE TINTIN, BILBO LE HOBBIT etc.), est donc l'homme derrière la bête, vêtu d'un costume velu et munie de prothèses aux avant-bras. On prend dès lors la mesure du travail fourni, notamment en termes de gestuelle et de «démarche». En sueur mais le sourire aux lèvres, l'homme se glisse dans la peau de son «personnage» et nous en livre tous les secrets avant de céder la main aux artistes numériques. Ces derniers évoquent alors les retouches qui sont de leur fait, notamment au niveau des dentitions et de la colorimétrie des poils. Vous l'aurez compris, nous tenons là un supplément particulièrement instructif et surprenant...
«Rencontre avec le gang» l'est déjà beaucoup moins. Quatre minutes durant, les jeunes héros interviennent et nous présentent leurs personnages, leurs caractères, et la manière dont ils les appréhendent. Le document n'apportera pas grand-chose au spectateur qui, bien évidemment, s'est déjà forgé son opinion lors du visionnage du film. Guère plus convaincant, «Un rap et Clap! (de fin)» compile sur plus de deux minutes quelques images de nos jeunes acteurs en off, s'adonnant assez maladroitement à l'exercice du Rap. On pourra y voir un supplément amusant mais la plupart des images sont déjà présentes au sein du journal de tournage, et ne méritaient pas d'être regroupées en sus.
Le documentaire «Ce qu'on n'a pas tourné» avoisine pour sa part les cinq minutes et aborde deux séquences storyboardées qui n'ont pu être tournées, pour des raisons assez logiques de budget. Joe Cornish s'en explique et avoue avoir mis de côté à contrecœur les dix à quinze pages de script qui formaient la première séquence. Encore une fois, l'homme est pertinent dans son propos et, alors qu'il parle, les croquis défilent à l'écran. Quelques voix-off s'invitent ensuite et nous font «vivre» cette séquence que l'on ne verra jamais. Il en sera de même pour la seconde séquence, amenée cette fois-ci par l'un des jeunes acteurs qui devait la jouer. L'interactivité du disque s'achève enfin par le biais de la bande-annonce, assez dynamique et bourrée de «punch-line».