Leon est un photographe qui essaie de capter la véritable essence de la vie urbaine. Au contact d'un agent artistique, il comprend qu'il lui faut attraper les moments les plus glauques pour que son travail prenne de la valeur. En déambulant la nuit avec son appareil, son attention va être attirée par un étrange personnage qui travaille dans un abattoir…
A la parution des «Livre de Sang» dans le courant des années 80, Clive Barker se forge une petite réputation qu'il n'aura cesse d'accroître avec ses ouvrages suivants (Le Jeu de la Damnation, Cabale, Secret Show, Imajica, etc…). Mais c'est aussi un peu à cette période qu'il va entamer ses conflictuelles relations cinématographiques. Il reniera ainsi les métrages s'inspirant de ses écrits que sont TRANSMUTATIONS ainsi que RAWHEAD REX. Ce dernier étant d'ailleurs l'adaptation d'une nouvelle de l'un des «Livre de Sang». L'écrivain prendra les devants en réalisant lui-même HELLRAISER, l'apprenti cinéaste s'étant déjà essayé à la mise en scène durant les années 70 avec d'obscures pelloches "arty". Toutefois, si HELLRAISER va générer une franchise qui sera assez vite pervertie, les adaptations réussies de Clive Barker au cinéma reste plutôt rares. Pour deux raisons, la première, c'est que les films réalisés par Clive Barker ne rencontreront pas le succès mettant un frein aux ambitions de l'écrivain. C'est le cas des pourtant excellents CABAL et LE MAITRE DES ILLUSIONS. Si le premier est l'adaptation du livre éponyme, son auteur nous offrant une variation sur l'ouvrage original, le second est, une nouvelle fois, la transposition au cinéma d'une nouvelle de l'un des «Livre de Sang». C'est encore l'une de ses nouvelles qui donnera naissance à CANDYMAN qui, à l'instar des HELLRAISER perdra de sa substance au fil des suites… Les meilleures adaptations de Clive Barker se réduisent donc aux quatre films dont l'écrivain et cinéaste s'est occupé étroitement.
Depuis, l'auteur a monté Midnight Picture Show en vue de produire, en partenariat, des films basés, entre autres, sur ses écrits. De là naît l'idée de produire des «Films of Blood» («Films de Sang») en adaptant les nouvelles publiées dans les «Livre de Sang». Le tournage de MIDNIGHT MEAT TRAIN est ainsi annoncé dès 2005… Un choix pour le moins étrange puisque la nouvelle choisie paraît difficilement adaptable de manière directe à l'écran ! Il faudra en tout cas trois ans avant que le film ne se concrétise réellement et l'éviction de Patrick Tatopoulos qui aurait dû, à l'origine, mettre en scène MIDNIGHT MEAT TRAIN. Quoi qu'il en soit les déboires de Clive Barker face au monde du cinéma ne semblent pas vouloir s'arrêter puisque Lions Gate n'a donné qu'une sortie très marginale dans un parc restreint de salles, le minimum contractuel, à MIDNIGHT MEAT TRAIN. Et ce pour mettre plutôt en avant un autre film horrifique. Un souci de plus qui vient donc s'ajouter aux ennuis rencontrés par l'écrivain dès lors qu'il touche au cinéma avec en point d'orgue le remontage sauvage du MAITRE DES ILLUSIONS.
Quatrième adaptation d'une nouvelle des «Livre de Sang», MIDNIGHT MEAT TRAIN part plutôt mal puisque l'histoire originale suit une trame extrêmement linéaire. Le film reprend d'ailleurs cette partie dans la dernière portion du métrage en lui ajoutant quelques ajustements de manière à coller avec les deux tiers du film qui s'avèrent totalement nouveaux. Car pour adapter la nouvelle, il faut l'étirer et la triturer pour lui donner assez de substance. Ce n'est pas Clive Barker qui va faire le travail mais Jeff Buhler. Le scénariste va donc être obligé de développer le personnage principal de façon à le présenter plus longuement et à lui donner une raison moins fortuite d'être le passager de la rame de métro. Après un préambule nous exposant donc la vie sentimentale et professionnelle d'un artiste photographe, notre «héros» va s'embringuer dans une enquête le menant à suivre les traces d'un tueur en série sévissant la nuit dans le métro. Mais rapidement un décalage s'instaure entre la partie «thriller» et l'aspect très «horrifiques» de l'histoire. Les filatures du héros ainsi que ses relations avec le milieu artistique ne paraissent que bien peu enthousiasmantes avant que ne tombent les coups de marteaux furibards du tueur. Des meurtres brutaux et sanglants qui ponctuent de manière assez régulière le film à l'image des séquences de cul d'un porno. A l'évidence, la recette fonctionne puisque l'on en vient à attendre gentiment la prochaine apparition de Vinnie Jones, tueur monolithique, et de son attirail fracassant. L'étude de mœurs, la critique de notre société et de son hypocrisie fait un peu office de bouche trou assez mal agencé. C'est d'ailleurs relativement flagrant lorsque certaines scènes incongrues pointent le bout de leur nez pour bien nous faire comprendre que le héros est sous l'emprise machiavélique d'une force supérieure. Tombant littéralement comme un cheveu sur la viande saignante, cela ne développe en rien l'univers ou les motivations du personnage principal mais a de quoi surtout susciter des interrogations sans réponse. Et il ne faudra pas chercher des réponses dans l'œuvre littéraire puisqu'ils n'y sont en rien présents. On en vient finalement à regretter que Clive Barker ne se soit pas occupé lui-même d'adapter son récit pour lui donner une vraie consistance plutôt que nous offrir un rafistolage narratif pas toujours adroit. Car, il faut tout de même préciser, une nouvelle fois, que l'idée n'était pas forcément mauvaise, pas plus que les thèmes injectés dans le récit, mais le résultat manque étrangement de maturité. Le film porte d'ailleurs très clairement son titre car hormis quelques passages plutôt bien vus, MIDNIGHT MEAT TRAIN éveille surtout l'intérêt dès lors que l'action prend place dans la rame du métro ! Pour bien apprécier le film, il faudra donc faire preuve d'un peu d'indulgence et se concentrer sur l'aspect purement jouissif et direct des horribles exactions perpétrées dans l'abattoir roulant ! Le tout nous menant, sans grande surprise, à une conclusion directement héritée de la nouvelle originale proposant une révélation très inattendue pour qui ne l'a jamais lu.
Pour mettre en scène le film, les producteurs de MIDNIGHT MEAT TRAIN font un énième choix surprenant puisque le tournage va être confié à Ryuhei Kitamura. A savoir un cinéaste qui avait suscité de grands espoirs avec l'ébouriffant VERSUS avant d'accumuler les déceptions. Cinéaste du clinquant et du vide, l'homme avait même réussi à viander le dernier métrage consacré à Godzilla. Du coup, la surprise est grande de découvrir que le cinéaste japonais fait profil bas pour la mise en image de MIDNIGHT MEAT TRAIN. Un peu comme si l'artiste s'était fait très timide pour sa première réalisation américaine. Il subsiste quelques idées visuelles intéressantes, celles-ci ne venant pas s'accumuler les unes sur les autres comme Ryuhei Kitamura a pu nous l'infliger par le passé. Au terminus, le film s'avère quelque part assez honnête car on ne va pas voir un film portant le titre MIDNIGHT MEAT TRAIN pour y suivre les errements sentimentaux d'un couple d'adolescents. D'un autre côté, avec le nom de Clive Barker au générique, on s'attendait quand même à une œuvre moins banale en dehors de son épilogue venu d'un autre monde. Toutefois, le film s'avère plutôt plaisant et ce en grand partie pour ses passages gores plus «amusants» que véritablement dérangeants ou envoûtant… Un comble pour du Clive Barker !