Header Critique : FRITT VILT (COLD PREY)

Critique du film
FRITT VILT 2006

COLD PREY 

Ici, on aime bien les fractures ouvertes en gros plan. Ca tombe bien, car l'un des cinq amis partis faire du snowboard dans les montagnes norvégiennes s'en paye une belle lors d'une gamelle particulièrement douloureuse. Se réfugier dans un hôtel abandonné pour éviter de mourir de froid n'est, en tout cas, pas la bonne solution puisque un mystérieux tueur se met à les dézinguer !

Tourné en Super 16 puis gonflé en 35mm, cette modeste production norvégienne arrivera néanmoins à devenir un énorme succès dans son pays d'origine, jusqu'à engendrer une séquelle. FRITT VILT demeure pourtant un slasher assez conventionnel, tentant d'adopter le schéma d'un VENDREDI 13 ou d'un HALLOWEEN aux couleurs norvégiennes. A savoir une intrigue lovée dans le grand froid, au sein d'une demeure isolée de tout et ce même si des films comme THE SHINING ou D-TOX sont déjà passés par là.

Le film collectionne ansi les clichés inhérents au genre. La bande de jeunes branchés : on va se faire un week end d'enfer loin de tout, on est cool, on rigole, on va faire du hors piste. Puis un problème survient, ici un accident de ski, et direction un endroit isolé (un hôtel) où l'on ne nous épargne pas l'inévitable scène de téléphone portable qui ne capte pas. On est à nouveau cool, on entre dans l'hôtel, on y boit, on y rit , on y mange et hop... le tueur débarque et commence le massacre avec un brin de MASSACRES A LA SAINT VALENTIN car le tueur aime le piolet.

En résumé, la formule gagnante : exposition des personnages-action-accident-début du massacre-combat avec le méchant. Si bien que FRITT VILT devient interchangeable avec n'importe quel slasher. Le film ne cherche pas à se démarquer de son modèle de par son sujet (un peu comme ROVDYR, en fait) mais plutôt par l'environnement et le traitement. Ce qui reste par ailleurs sa force majeure. Quelques points de détails viennent légèrement contrecarrer le modèle américain. Entre autres - oserait-on y voir une parabole sexuelle ?-, c'est parce que la jolie blonde virginale refuse de coucher avec son petit ami qu'elle y passe en se prenant un bon coup de pioche dans le dos. Alors qu'aux Etats-Unis, c'est généralement parce qu'on couche qu'on y passe !

Le scénario vient aussi à ne pas choisir l'évidence pour l‘ordre des meurtres. Morten (Rolf Kristian Larsen, de loin l'acteur et le rôle le plus intéressant du métrage) semble remporter les suffrages de par sa condition physique et de fait de sa non appartenance à une structure de couple. Mais la première victime sera tout autre alors que la narration ne semblait pas envisager pour le spectateur d'autre possibilité. Ces points de détails ne doivent cependant pas faire oublier le côté téléphoné de la progression narrative, de par son attachement à l'illustration d'un genre et de ne pas en départir.

Ce slasher contrebalance la faiblesse de son originalité par un visuel extrêmement léché. Une photographie lumineuse et froide couplé à un cadre Scope remarquablement utilisé afin de magnifier les splendides paysages montagneux et enneigés de Jotunheimen. L'aspect monstrueux du méchant en question est d'ailleurs au diapason du lieu où il se terre : Jotunheimen voulant dire littéralement «la maison [ou] les montagnes des géants». Car sa stature est énorme comparée aux pauvres victimes qui subissent ses assauts : elle lui donne un caractère quasi-mythologique, tant cet endroit du centre de la Norvège (juste au dessus de Lillehammer) est propice aux légendes des géants qui y auraient vécu. On sent d'ailleurs la velléité du scénariste/réalisateur Roar Uthaug de mythifier son méchant. Le choix de n'en montrer qu'une ombre au début, puis de révéler sa nature violente, sans concession sans céder à la facilité de l'identification. Seule la stature demeure : massive, impressionnante, tout comme les attaques qu'il fait subir à ses victimes. Son identité ne viendra qu'en fin de métrage, en relation évidemment avec la scène pré-générique, accentuant ainsi le côté cyclique et référentiel de FRITT VILT. L'explication en vaut bien une autre et trouvera d'ailleurs son prolongement dans la suite réalisée deux ans plus tard.

On pourra aussi souligner un dernier quart tendu et une fin originale dans sa mise en scène de l'urgence et son sens de la chute. Si la direction d'acteurs ne laisse pas une impression marquante, on a l'heureuse surprise de ne pas se retrouver dans la médiocrité ambiante des productions américaines tournées à la chaïne. L'héroïne (Jannicke) est jouée de manière très convaincante par Ingrid Bolsø Berdal. Qui est devenue après coup une valeur sure du cinéma norvégien. Elle apporte une épaisseur inattendue à son personnage et une hargne qui fait plaisir à voir, donnant au final une bonne intensité.

FRITT VILT demeure ainsi un produit attendu mais relativement efficace dans son déroulement et la mise en scène des meurtres. Des personnages aux motivations dont on se contrefiche –on est dans un slasher, aussi, hein- mais qui ne sombrent pas dans le ridicule. Curieusement, la séquelle s'avèrera plus intéressante et resserrée même si tout aussi peu originale dans son point de départ. Pour peu qu'on se prête au jeu, on y passe un moment agréable, avec la sensation d'assister à un spectacle peu surprenant mais très divertissant.

NB : petite pensée pour les spectateurs de FRITT VILT lors de a séance de minuit du Festival de Gérardmer 2009, où nous avons eu droit à une qualité de projection assez médiocre (décadrages, flou…), comme pendant hélas une bonne partie du festival à l'espace Lac.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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