Un trio de scientifiques vient de mettre la main, en plein cœur de la forêt amazonienne, sur un parasite jusqu'à présent inconnu. La vermine, vicieuse, profitera d'un instant de confusion pour aller se loger dans l'intimité de la demoiselle du groupe… Quelques jours plus tard, cinq jeunes touristes en vadrouille tombent en panne. Ils décident alors de poursuivre leur route à pied et découvrent bien vite une maisonnette moins vide qu'il n'y parait. C'est en effet ici que s'abrite celle qui est désormais possédée par son intrus pervers, accessoirement croqueur de phallus…
C'est au début des années 80 que le japonais Takao Nakano commence sa carrière et se fait un nom en tournant de nombreux spots publicitaires. Bien vite, l'homme prend goût au maniement de la caméra et décide d'immortaliser ses fantasmes sur pellicule. Les dits fantasmes étant d'une nature particulière, il est évident que ce n'est pas au cinéma qu'il va percer mais plutôt dans le domaine du film underground destiné au marché vidéo, très prolifique au Japon. Dès lors, les obsessions du monsieur deviennent très claires et ses réalisations oscilleront entre l'érotisme gentillet et le porno mosaïqué (mode de censure de l'archipel). Takao Nakano voue un culte au corps féminin, aux poitrines opulentes, aux petites culottes mais aussi aux monstres tentaculaires bricolés avec un rouleau de scotch et trois tuyaux d'aspirateurs. Le mélange hérité de l'univers manga donnera lieu à une série de films plutôt hallucinants parmi lesquels la tétralogie URATSUKI-DÔJI (EXORSISTER chez nous), vision non officielle de la mythique saga UROTSUKIDÔJI orchestrée par Hideki Takayama.
Autre obsession de Nakano : Les cat-fights, ces fameux combats de femmes qui, vêtues de sous-vêtements minimalistes généralement peu solides, se crêpent le chignon et se roulent dans la boue. Fervent admirateur de ce "sport", le réalisateur n'hésite jamais à ponctuer ses métrages d'altercations entre demoiselles dénudées. Les formes généreuses ainsi exhibées permettent généralement d'oublier quelques instants l'amateurisme navrant des œuvres du bonhomme. Faute de budget et, sans doute aussi, d'un réel talent, Nakano ne se distingue à dire vrai des autres réalisateurs Z que grâce à sa folle inventivité et son humour plus que graveleux.
KILLER PUSSY n'échappe bien entendu pas à la règle et nous propose un petit éventail des étranges divagations du monsieur. Le métrage débute donc sur une saynète que nous pourrions vaguement rapprocher de l'introduction du BRAINDEAD de Peter Jackson (elle-même lorgnant déjà du côté des AVENTURIERS DE L'ARCHE PERDUE) puisqu'elle confronte une petite équipe d'aventuriers avec un improbable indigène. Ce dernier s'oppose farouchement à l'enlèvement du fameux parasite et c'est bien entendu lors de cette discorde que le drame se produit… La comparaison avec l'œuvre culte de Jackson s'arrêtera là puisqu'en termes de cinéma, Nakano n'a ni les moyens, ni les intentions de rivaliser avec le papa génial de la trilogie de l'Anneau. Quoiqu'il en soit, cette courte introduction s'avère particulièrement enrichissante et ce n'est qu'en une poignée de minutes seulement que le réalisateur parviendra à nous faire profiter de son mauvais goût, de son casting douteux, de son humour stupide et de sa créature aussi ridicule qu'amusante… Un véritable trait de génie !
L'homme poursuivra bien évidemment sur cette lancée une heure durant en nous confrontant aux quelques touristes/héros de l'aventure. Un héros chez Nakano n'a pas trente-six solutions : il est soit de sexe masculin, soit de sexe féminin. S'il appartient à la première catégorie, il s'agit d'un imbécile doublé d'un obsédé sexuel, perdant généralement son temps à compulser des revues pornographiques ou à tenter une approche auprès du sexe dit faible via de terrifiants traits d'humour… Les héroïnes ne sont pas mieux lotis et n'aurons d'autre choix que de errer en sous-vêtements en attendant que leurs formes généreuses servent à combler quelqu'un ou quelque chose… Cet instant ne tardera bien entendu pas et ce n'est qu'alors que notre bien-aimé parasite pourra enfin refaire surface.
Qu'il soit en images de synthèse, en papier journal mastiqué ou interprété par une main enfilé dans une chaussette, le parasite ne peut laisser indifférent. Bien que grotesque, ce sympathique ver dentu n'en demeure pas moins vorace et n'aura de cesse d'émasculer les pauvres imbéciles séduits par l'idée d'un dépucelage à la va-vite. Tour à tour sexy, pitoyable et follement gore, KILLER PUSSY n'ennuie pas même s'il est loin d'être le film le plus ludique et barré de son réalisateur.
Nous retrouverons donc le classique monstre phallique (bestialité de l'homme pénétrant la femme de force), les inévitables combats entres demoiselles plantureuses mais aussi les fameux plans en contre-plongée qu'affectionne tant Nakano. Systématiques et récurrents, ces prises de vues nous offrent de nombreuses et insistantes images d'entres jambes féminins couverts d'une simple culotte de coton blanche… Monsieur aime le luxe et la fantaisie ! Reste qu'il s'agit là de la « griffe Nakano » et de la seule véritable "trouvaille" artistique qu'il se permettra, le reste de la mise en scène étant en effet terriblement plat et amateur… La maladresse de certaines séquences ira même jusqu'à laisser pantois et les rares images de synthèse dépasseront sans mal les limites de l'acceptable avec notamment quelques plaies numériques se « déplaçant » sur les corps meurtris…
Au-delà de ça, KILLER PUSSY pèche essentiellement par son rythme. Assez chaotique, le film peine au démarrage et se plante carrément lors des séquences – très soft – à caractère sexuel. Il ne trouvera finalement sa cadence de croisière qu'avec la seconde demi-heure durant laquelle la créature croquera à pleines dents. Riche en gore miteux, en érotisme au rabais et en plans décalés, cette deuxième portion contentera sans mal l'amateur de Zèderies amusantes. Et après tout, n'est-ce pas là ce que nous sommes en droit d'attendre d'un film nommé KILLER PUSSY ? Sans aucun doute et à vrai dire, c'est une chance car nous n'aurons rien d'autres. Scénario minimaliste, acteurs navrants et décors fauchés sont de rigueur, plombant quelque peu ce qui aurait pu être, pourquoi pas, un film intéressant à l'image du FRISSONS de Cronenberg. Au lieu de cela, le spectateur curieux devra se contenter, sourire aux lèvres, de quelques plans d'une vision intra-vaginale, d'une énucléation à la gouge et d'une mise en condition façon RAMBO III.
Allez savoir pourquoi, les films de Nakano ne sont pas si simples à trouver en DVD. Quelques éditeurs de goût avaient bien tenté l'expérience en vidéo sur le sol français avec les différents opus de PLAYGIRLS et EXORSISTER mais l'idée de passer au DVD n'a pour l'instant séduit personne. Il faudra donc se tourner vers l'import pour ne trouver en réalité qu'une poignée de titres. Parmi ceux-ci, le disque chroniqué ici, d'origine chinoise. L'image nous y est sans surprise présentée en 1.33 encodé 4/3 d'origine. Malgré la nature "bricolée" du métrage, la copie est assez propre, la compression quasi-invisible et les couleurs plutôt justes. Reste que le DVD propose une image légèrement sombre, rendant malheureusement illisible certaines actions de manière très ponctuelle. Mais peut être n'est-ce là qu'un subterfuge du réalisateur pour masquer l'horreur de certains trucages ?
Du côté de l'accompagnement sonore, le constat s'avère moins réjouissant pour l'occidental lambda. En effet, si la piste japonaise d'origine répond bien présente dans un stéréo de qualité honnête, il est regrettable de constater qu'elle est seule. Pire encore, le spectateur n'aura pour l'accompagner qu'un sous-titrage... chinois ! Nous sommes donc là en présence d'une barrière linguistique qui en rebutera plus d'un. Reste que le film ne comporte en réalité que peu de dialogues et que son "intérêt" ne réside aucunement dans ceux-ci. Au DVDPhile de se prononcer, sachant qu'il ne trouvera sur le disque aucun bonus et qu'il ne sera accueilli que par une unique page fixe. Le prix, dérisoire, pourrait en revanche faire chavirer la balance...
Bien que mineur dans la filmographie de Nakano, KILLER PUSSY est une bonne entrée en matière, une manière agréable de se familiariser avec l'étrange univers du monsieur. Monstres vicieux, jeunes filles impudiques, héros débiles et gore caoutchouteux sont donc de la partie, dans des proportions toutefois limités. Les amateurs les plus gourmands devront donc errer chez les soldeurs de cassettes vidéo pour y dégotter les EXORSISTER, bien plus généreux et ce dans tous domaines.