Faire du stop n'est plus une activité très sûre de nos jours. Janette en fera la triste expérience puisqu'elle sera violée par un individu qui, une fois contenté, cachera de la drogue dans l'intimité de la demoiselle ! La justice, toujours bienveillante, condamne alors Janette à plusieurs années de prison dans un établissement de haute sécurité nommé «Prison Island». Malheureusement, la mère maquerelle… heu, excusez… la directrice des lieux, Mademoiselle Steel, est une femme d'une incroyable perversion qui fait subir à ses prisonnières les pires dégradations. Janette et l'équipe de commandos venue la délivrer en feront bien entendu les frais…
Andreas Bethmann débute la réalisation de longs métrages érotico-gores en 1996 avec son métrage TANZ DER KURBISKOPFE (que l'on pourrait traduire par «La danse des têtes de citrouille» !). Deux ans plus tard, il nous offre un film au titre européen plus évocateur (ANGEL OF DEATH : FUCK OR DIE) dont la traduction semble cette fois superflue. Avec un rythme quasi-constant d'un (très) long métrage par an, l'homme affiche donc une filmographie d'une dizaine de titres en 2007 lorsqu'il décide de donner une fausse suite à son second métrage. Le titre de cette nouvelle oeuvre sera ANGEL OF DEATH 2 : THE PRISON ISLAND MASSACRE bien qu'il soit aussi possible de la croiser sous le nom plus étrange de WOMEN BEHIND BARS 4 (si c'est une réference au titre anglais de DES DIAMANTS POUR L'ENFER de Jess Franco cela n'explique pas comment on passe de 1 à 4 directement ?).
Durant cette décennie, Bethmann a eu grandement le temps de perfectionner son «style» et tente, avec des moyens bien à lui, de repousser les limites du mauvais goût. Ainsi, si ses films se contentaient d'être «méchants» en début de carrière, ils ont carrément viré au gore par la suite. De même, nous passons avec les années d'une tendance érotique (parfois poussée) à du porno pur et simple. Et là encore, l'homme tente de se dépasser. Les préférences du monsieur commencent du reste à se dessiner très clairement et la fesse glauque prend largement le pas sur les effusions de sang. EXITUS INTERRUPTUS abordait donc en 2006 les thèmes du viol, de la soumission et de la nécrophilie avec plus de conviction encore que les précédents métrages du monsieur. THE PRISON ISLAND MASSACRE défonce encore plus le clou et passe clairement à la vitesse supérieure. Ainsi, dès l'introduction, le ton est donné. Bethmann reprend son concept FUCK OR DIE et impose à son actrice principale un choix cornélien : «Une pipe ou la mort». Une offre tout de même bien moins sympathique que le classique «Trick or treat» («une friandise ou un gage») de Halloween à laquelle la demoiselle va bien vite répondre. Mais la belle est futée ! Car en même temps qu'elle accomplit sa triste besogne, elle envoie un SMS déclarant «Je suis à 10km du centre ville». Initiative intelligente puisque la police arrivera moins de 10 secondes plus tard pour l'envoyer en taule ! Cette «introduction» résume parfaitement l'esprit du film et, plus que cela, la tournure fainéante que prend la carrière du réalisateur allemand…
En effet, là où certains réalisateurs «modestes» s'évertuent à tenter de progresser, Bethmann choisit la voie de la simplicité en réduisant au maximum les séquences à effets spéciaux (gore, maquillages, etc.) et en augmentant considérablement les scènes pornographiques de tous poils, fussent-elles grotesques et laides. C'est ainsi que, très chers amateurs de Z mal foutu, vous pourrez profiter en toute quiétude des désormais classiques attouchements entre demoiselles plus ou moins consentantes. Fidèle à lui-même, l'homme zoome sur l'intimité de ses actrices jusqu'aux limites (et même au-delà) de son objectif le temps de quelques plans à valeur bien plus anatomique que stimulante. Car oui, après avoir été un amateur d'érotisme vilain, Bethmann est désormais un spécialiste du porno laid. Ses actrices, même mignonnes sont toutes filmées sans grâce, sans la moindre intelligence et bien entendu, sans le moindre souci esthétique… Visuellement, nous sommes donc très proches du porno amateur, respect des «acteurs» en moins.
Une fois ceci accepté et couplé à la volonté évidente qu'a Bethmann d'en montrer toujours plus, nous accepterons sans trop de mal ce qui va suivre. Aux nombreuses scènes de soumission succèdent donc quelques attouchements malheureux et même une sodomie ainsi qu'une fellation homosexuelle. Toujours aussi élégant, Bethmann zoome et zoome encore pour bien nous montrer qu'il ne bluffe pas : oui, l'homme peut filmer une véritable (et bien molle) sodomie ! Si la scène et l'idée même de cette séquence sont parfaitement puériles et stupide, ce n'est en revanche rien comparé à la justification de l'acte en lui-même. Il s'agit en effet là d'un passage obligatoire, sorte de bizutage étrange, qui va permettre à un nouveau gardien de se faire accepter parmi les siens ! Bouleversante crétinerie…
Puisqu'il occupe 75% du métrage, poursuivons sur le cuissot pour évoquer maintenant cette chère Lina Romay. Véritable muse (et épouse) de Jess Franco sur plus de cent films, cette agréable nymphette à la moue engageante a aujourd'hui bien vieilli. Le lot de tous certes, mais tous ne continuent pas de s'exhiber fièrement pour se faire fouetter dans une scène parfaitement ridicule. Lina étant fouettée de dos et le bruit de l'instrument de flagellation étant post-synchronisé, l'actrice ne sait plus quand hurler. Elle hurle donc n'importe quand et, de préférence, lorsque le fouet n'est pas supposé la toucher ! Passons outre ce détail pour évoquer encore une fois les gros plans qui sont fait sur sa personne. Plans que n'aurait pas reniés son très cher époux tant il en a lui aussi abusé par le passé… Franco est du reste à l'honneur (et quel honneur !) dans le métrage du bricoleur allemand avec quelques clins d'œil comme un panneau CELLBLOCK 9 (du nom d'un film de prison du monsieur) et même une apparition en homme de ménage attardé…
Triste caméo auquel nous préfèrerons celui de Andreas Schnaas, lui aussi réalisateur allemand de films furieusement gores (la tétralogie des VIOLENT SHIT, ANTROPOPHAGOUS 2000, etc.). L'homme incarne ici un tortionnaire zélé tentant de faire parler un prisonnier. La séquence, de part sa gratuité et sa violence, n'est pas sans évoquer le HOSTEL d'Eli Roth dont la pudeur frustrante est ici totalement oubliée. Car oui, THE PRISON ISLAND MASSACRE contient du gore, et quel gore ! Si l'unique (ou presque) séquence horrifique tarde à se manifester (à un quart d'heure de la fin), force est de reconnaître qu'elle est particulièrement efficace. Avec des effets spéciaux réalisés par l'un des maîtres du genre (Olaf Ittenbach, encore un autre réalisateur allemand spécialiste du gore), l'arrachage de dents à la pince et le découpage de scalp qui s'en suit sont des instants que nous n'hésiterons pas à qualifier d'éprouvant. Encore une fois, Ittenbach fait mouche et nous livre cinq minutes qui, si elles ne suffisent pas à remonter l'intérêt inexistant du film, méritent clairement d'être visionnées. L'homme oeuvrera par ailleurs sur une scène de tranchage de main, elle aussi très convaincante, et la confection d'un squelette furtif de très bonne facture.
Le dernier Bethmann est donc sorti en DVD zone 2 français sous la bannière de l'éditeur Uncut Movie, lequel semble ne vouloir manquer aucun des films récents du réalisateur. Quelques semaines plus tôt, le film avait déjà fait l'objet d'une édition allemande contenant quatre DVD ! Une édition bien classieuse donc pour un film qui ne l'est pas. Ce coffret proposait en fait le film en trois versions différentes. La première, d'une durée de 105 minutes, est le Director's Cut que nous retrouvons sur l'édition française. La seconde version est un montage dédié à la location de 88 minutes (quand on loue seulement, on a moins de fesse) et la dernière, d'une durée de 124 minutes n'est qu'une version intégrale que l'on imagine fort laborieuse…
La Director's Cut qui nous est donc proposée sur le disque français avec, on suppose, le respect du format d'origine, à savoir une image ratio légérement supérieur à du 1.85. L'éditeur s'obstine cependant à ne pas offrir l'option 16/9ème sur ses disques. Il en résulte une définition bien en deçà de ce que nous sommes en droit d'espérer, rendant difficile le décompte des poils pubiens de Lina Romay (activité toutefois marginale, nous en conviendrons). L'image, juste honnête, vire par conséquent au laid sur les téléviseurs 16/9ème usant de la fonction «zoom». L'unique piste sonore du disque se trouve être, fort logiquement, la piste allemande d'origine d'une qualité plutôt convenable. Des sous-titres français clairs (quoique douteux par instants) viendront nous éclairer quant aux différentes subtilités scénaristiques. Ceux-ci seront aussi présents sur les différents bonus, repris de l'édition allemande du film.
Nous aurons donc droit à une interview de Lina Romay dont l'intérêt est tel qu'une pression sur la touche «avance rapide» semble bien vite s'imposer. La dame, s'exprimant en français, semble vouloir nous dire que le travail de Bethmann n'est pas des plus inspirés sans réellement prononcer les mots. Elle se contentera donc de pointer du doigt la durée généralement trop longue des métrages du monsieur ainsi que la «bonne volonté» mise en œuvre (ce dont nous doutons)… Olaf Ittenbach sera pour sa part plus direct en déclarant tout simplement qu'il n'est pas un amoureux du cocktail porno-gore. L'homme mettra donc très vite de côté le travail de Bethmann pour se concentrer sur le sien, plus intéressant, en évoquant son amour du métier et les différents problèmes qu'il rencontre. Puisque nous en sommes à parler de Olaf Ittenbach, abordons le bonus suivant qui nous permettra de découvrir le maître à l'oeuvre. Plus de 29 minutes d'un Making-Of muet mais bougrement efficace (quoique filmé par un alcoolique fini) durant lequel Ittenbach réalise, pratiquement en temps réel, les quelques effets gores du métrage. Les outils sont artisanaux mais le talent et le résultat sont là. Impressionnant. Nous terminerons le tour de cette galette au contenu éditorial fort honnête avec le teaser et les deux trailers ainsi que les bandes annonces de l'éditeur, toutes proposées en version originale sous-titrée...
Est-il possible de croire encore en la sincérité d'un réalisateur qui se «soulage» sexuellement sur le visage de ses actrices lors de séquences de viols ? Si la question pouvait déjà se poser à la vision de EXITUS INTERRUPTUS, elle devient ici inévitable. En effet, Bethmann ne semble plus motivé ici que par son seul plaisir exhibitionniste et l'exposition d'une surenchère sexuelle complaisante et puérile. L'ensemble pourrait peut être convaincre si le talent était de la partie. Malheureusement, la régression par rapport à son film précédent est notable : La direction d'acteur est inexistante, les dialogues sont de plus en plus creux et le film est aussi stupide que les godemichés qui ornent le bureau de la directrice Madame Steel (nouvelle gamme Ikéa ?). Seuls les trop rares effets visuels de Olaf Ittenbach donnent un intérêt à la chose, nous menant directement à l'interrogation suivante : Ne serait-il pas plus pertinent d'éditer l'œuvre travaillée d'un Ittenbach au talent grandissant plutôt que celle, je-m'en-foutiste, d'un Bethmann qui n'apprend rien depuis plus de dix ans ?