Au cours des années 80, Stephen King est un nom magique, garant de ventes de livres énormes et de profits juteux en cas de transposition cinématographique ! Néanmoins, après les succès initiaux de CARRIE, DEAD ZONE ou SHINING, la réserve de textes transposables à l'écran s'amaigrit. Incapable de lâcher un bon filon, les compagnies de production s'acharnent pourtant à adapter des romans déjà transposés à l'écran auparavant (SHINING donne lieu à une mini-série en 1997), à étirer de très courtes nouvelles en des longs métrages (LA CREATURE DU CIMETIERE) ou à produire des suites pas forcément indispensables (LES ENFANTS DE SALEM, SIMETIERRE 2...) Le cas le plus extrême reste la "saga" "Children of the Corn", dont le premier film HORROR KID, adaptation de la nouvelle "Les enfants du maïs", connaîtra de six suites jusqu'à 2001 !
TRUCKS relève d'une telle démarche. Il s'agit en effet de la seconde adaptation de "Poids lourds", nouvelle issue du recueil "Danse macabre" dont Stephen King avait lui-même écrit et réalisé une adaptation en 1986 : MAXIMUM OVERDRIVE. Toutefois, si ce dernier avait été créé sous les généreux auspices de Dino De Laurentiis, TRUCKS s'avère une oeuvre plus pingre, tournée au Canada à destination de la télévision câblée par le metteur en scène Chris Thomson, néo-zélandais en exil dont la carrière américaine se limite essentiellement à des séries télévisées et à des téléfilms...
Aux alentours d'une station-service, des évènements étranges se multiplient. Une vieille camionnette s'anime et écrase son propriétaire. Un homme se retrouve bizarrement enfermé dans la remorque de son camion réfrigérant... Finalement, comme les véhicules sans pilote s'avèrent de plus en plus nombreux et de plus en plus agressifs, plusieurs personnes se réfugient dans un Truckstop. Ils se retrouvent assiégés par des camions furieux...
Déjà, dans MAXIMUM OVERDRIVE, Stephen King rajoutait au texte de sa nouvelle un contexte de science-fiction assez insolite, nous apprenant que les machines se révoltaient contre les humains car elles se trouvaient sous l'emprise d'une puissance extraterrestre... Ici, TRUCKS pousse le bouchon plus loin en s'appuyant fortement sur la mode "conspirationniste" qui fit suite au triomphe de la série télévisée AUX FRONTIERES DU REEL. Personnages mystérieux se baladant dans un camion équipé d'un étrange matériel, agent de la sécurité nationale de passage, nombreuses allusions à la mythique "Zone 51" où le gouvernement est supposé avoir effectué des travaux secrets liés à d'éventuels extraterrestres... Rien ne manque ici à la panoplie de la science-fiction paranoïaque ! A tel point que, comparé à MAXIMUM OVERDRIVE, TRUCKS semble s'éloigner doucement de l'épouvante pour proposer un film plus sérieux, plus tourner vers l'anticipation...
Destiné à la télévision, cette petite production lorgne bien moins vers le gore que son prédécesseur, quand bien même elle offre quelques scènes croustillantes. A l'instar de cette attaque d'un facteur par un impitoyable camion miniature téléguidée ! Il faut le reconnaître, en tous points TRUCKS donne l'impression d'avoir été conçu soigneusement. L'interprétation est de bonne qualité, les décors sont plutôt soignés, voire mettent bien en valeur l'action pour ce qui concerne les extérieurs déserts et inquiétants. La mise en scène tient bien la route, quand bien même il est évident que Chris Thomson n'a pas bénéficié de moyens aussi importants que ceux d'un MAXIMUM OVERDRIVE, avec ses armées de spectaculaires poids lourds !
Car, en effet, TRUCKS s'avère bien moins spectaculaire que son prédécesseur et, s'il se distingue en ne sombrant pas dans la comédie, il n'évite pas un écueil sur lequel avait aussi trébuché le King : à savoir un certain manque de péripéties, un statisme un peu lourd qui tend à laisser s'enliser l'action, provoquant, ici, un réel ennui. Face à cette mollesse narrative, le spectateur peut s'avérer déçu, en dépit de quelques trouvailles amusantes, telles les manoeuvres des camions pour enfumer des humains coincés dans un conduit d'évacuation, par exemple. En fin de compte, TRUCKS paraît un produit fade, sans réel intérêt...
Titre anecdotique, ne parvenant pas à renouer avec les délires destructeurs de MAXIMUM OVERDRIVE ni à construire une situation de siège ou des personnages réellement intéressants, TRUCKS s'est vu distribué en France en vidéo, avant d'arriver en DVD par le biais d'une édition publiée par Videodis en 2000, que nous allons tester ici.
Première déception : si l'image du film est proposée dans un cadrage 1.85 panoramique qui semble être d'origine (on ne repère aucun accident évoquant un transfert 1.33 trafiqué), nous ne trouvons qu'un télécinéma 4/3. Pas de 16/9 donc, pour une copie aux couleurs un peu fades et dont la définition manque de subtilité. Néanmoins, la fixité et la propreté de l'image restent plaisantes...
En ce qui concerne la bande-son, les déceptions se poursuivent... Nous trouvons bien la version française en stéréo d'origine, ainsi que la version originale anglaise dans un mixage semblable. Mais, sur cette seconde piste, les voies droite et gauche sont inversées ! Des acrobaties seront donc nécessaires pour pouvoir en profiter sur son ampli numérique (emploi des sorties analogiques, inversion de prises droite et gauche). Bref, que du bonheur ! Ensuite, les sous-titres français annoncés sur la jaquette sont en fait absents. Seul un sous-titrage néerlandais est offert...
Enfin, en guise de suppléments, il n'y a que la bande annonce de TRUCKS. Bref, voici une édition qui, techniquement, cumule tout de même plusieurs handicaps. A priori, le spectateur amateur de version originale aura tout intérêt à se tourner vers le disque américain publié par Trimark, qui remet les deux canaux dans l'ordre correct et propose un sous-titrage français !
