CATEGORIE III : SEXE, SANG ET POLITIQUE A HONG KONG 2009
Rédigé depuis belle lurette et annoncé depuis plus de trois ans, l'ouvrage CATÉGORIE III, SEXE, SANG ET POLITIQUE A HONG KONG de Julien Sévéon est enfin disponible à la vente en ligne depuis février 2009. Un premier constat s'impose alors de lui-même : La bête est de taille et elle a été bien nourrie durant toutes ces années. En effet, contrairement aux autres ouvrages de l'éditeur Bazaar & Co, celui-ci s'offre une édition que nous qualifierons sans peine de «prestigieuse». Finis les couvertures molles et l'impression numérique d'entrée de gamme, CATÉGORIE III a fait l'objet d'un soin tout particulier et se pare d'une carapace rigide, d'un format imposant (proche du A4) et d'un papier de qualité. L'iconographie, riche et proposée intégralement en couleur, en sort bien évidemment grandie et la compulsion de l'ouvrage offre un plaisir indiscutable…
Mais penchons-nous maintenant davantage sur le contenu rédactionnel de cet imposant pavé de 336 pages. Julien Sévéon avait su dans son ouvrage précédent (LE CINÉMA ENRAGÉ AU JAPON, prévu à la réédition chez Bazaar & Co) nous faire profiter de sa bonne connaissance de l'Asie et de son cinéma. L'auteur récidive ici logiquement et nous offre donc une introduction replaçant le phénomène Cat.III dans son contexte sociopolitique flou et générateur de malaise. La démarche est d'autant plus pertinente que la situation particulière de la rétrocession de Hong-Kong à la Chine sera régulièrement évoquée et qu'elle se retrouvera au cœur de nombreuses œuvres estampillées Cat.III.
Suite à ce «cadrage» de rigueur, l'auteur décide de nous faire découvrir la face «obscure» du cinéma hongkongais grâce à un découpage par thématiques. Seront donc abordés au cours des différents chapitres les films traitant de la mafia, les métrages érotiques, les œuvres politiquement engagées, les pellicules à la violence désinhibée, etc... Tous les «genres» du Cat.III seront ainsi passés en revue avec, à la clef, une filmographie (non exhaustive) associée.
Certains chapitres seront par ailleurs complétés de biographies et d'interviews de réalisateurs ou acteurs clef du genre. L'intégration de ces entretiens au cœur du livre, et non en fin d'ouvrage comme c'était le cas dans LE CINÉMA ENRAGÉ AU JAPON, nous apparaît adéquate et permet en outre d'aérer la lecture en coupant court à toute éventuelle monotonie. Reste que dans certains cas, le positionnement de ces interviews laisse perplexe et semble défier l'organisation de l'ouvrage. Ainsi, Herman Yau et Simon Yam s'expriment à la suite d'un chapitre dédié à la magie noire, chose étrange puisqu'ils ne sont en aucun cas des spécialistes du genre... Dans le même ordre d'idée, cette magie noire est classée dans une partie intitulée «Peur sur la ville» traitant essentiellement des tueurs en série et des triades. Julien Sévéon s'en explique mais c'est malgré tout une légère impression de «chaos» qui se manifestera parfois… Fort heureusement, un index sera mis à notre disposition en fin d'ouvrage et permettra de retrouver acteurs, réalisateurs ou films sans trop d'encombres.
Comme dit précédemment, l'auteur sait nous livrer dans son ouvrage une analyse pertinente de chacun des genres abordés. Les interviews sont quant à elles inégales (certains individus n'ayant pas grand-chose à dire) mais leur lecture reste toujours agréable. Les références à d'autres ouvrages ou articles sont assez nombreuses et apportent de possibles pistes à qui voudrait s'investir plus avant. Les différentes filmographies offriront par ailleurs elles aussi leur lot d'informations pertinentes. Chaque film répertorié fera ainsi l'objet d'un texte critique permettant de jauger rapidement de l'aspect «immanquable» ou pas de l'œuvre. Bien évidemment, ces brefs avis sont suggestifs et ne doivent en aucun être pris pour argent comptant (comme toute critique du reste). La prise de positions de l'auteur a cependant son intérêt même s'il arrive qu'elle occupe une place un peu trop importante. Ce sera par exemple le cas du chapitre dédié au très controversé MAN BEHIND THE SUN dans lequel Julien Sévéon tente d'imposer son point de vu en allant jusqu'à placer le film de Tun-Fei Mou aux côtés de SHOAH et NUITS ET BROUILLARDS. Discutable…
Pour le reste, l'auteur possède un style rédactionnel très fluide et abordable. L'ensemble est bien écrit même si l'on peut noter (encore une fois chez Bazaar & Co) quelques grosses fautes d'orthographe ou coquilles. Nous regretterons que toutes les images ne fassent pas l'objet d'une légende (pour certaines, impossible d'identifier le film concerné) mais quand c'est le cas, celles-ci sont généralement bien vues. Le pinailleur pourra peut être aussi discuter l'accent mis sur les starlettes charnues au détriment de certains acteurs clefs comme par exemple l'incontournable Kent Cheung qui méritaient sans aucun doute sa page biographique. Reste que ce ne sont là que de menus détails qui ne ternissent guère la qualité générale de l'ouvrage.
Au final et malgré une organisation parfois décousue, ce CATEGORIE III, SEXE, SANG ET POLITIQUE A HONG KONG s'avère donc être un bel ouvrage au contenu digne d'intérêt. On ressort de sa lecture repu et chargé d'une forte envie de se replonger dans quelques DVD (ou plutôt VCD) oubliés. Il convient cependant de rappeler que l'information et une belle iconographie sont des choses qui se payent. Il vous faudra donc débourser 55 euros pour faire l'acquisition de ce pavé francophone au propos peu commun. La couverture arborant l'arrière-train de Yau Chingmy pourrait être un argument de décision mais le prix (trop élevé à notre sens) restera malheureusement un obstacle de taille pour beaucoup d'entre nous…