Patrick (Robert Thompson) est un jeune homme tombé dans le coma alors qu'il venait juste de tuer sa mère et son amant de ses propres mains. Légume inerte depuis de nombreuses années, la clinique privée qui l'héberge le maintient pourtant soigneusement en vie suite aux mystérieux travaux du directeur. Lorsque débarque l'infirmière Kathy Jacquart (Susan Penhaligon), cette dernière est chargée en guise de bizutage de s'occuper du corps à priori sans vie cérébrale de Patrick. C'est alors qu'elle découvre que ce dernier est en fait parfaitement conscient, et qu'il nourrit secrètement une haine de l'espèce humaine qu'il concrétise via des pouvoirs télékinésiques dévastateurs.
Réalisé à la fin des années 70 et ayant sombré dans l'oubli, PATRICK est pourtant l'un des films fantastiques australiens les plus reconnus de son époque, et ce grâce à une distribution internationale ainsi que des passages très remarqués dans différents festivals (il décroche le grand prix du Festival d'Avoriaz en 1979). Le film enverra un appel d'air appréciable pour la production fantastique australienne du moment (HARLEQUIN, LE SURVIVANT D'UN MONDE PARALLELE, NEXT OF KIN...) et appellera même son réalisateur sur les belles terres hollywoodiennes afin d'entamer ce que l'on appelle "une carrière internationale". Si Richard Franklin, outre PATRICK, avait déjà à son actif d'autres réussites du genre (dont LINK avec un Terence Stamp en lutte avec un primate tueur), ce dernier s'abîmera aux USA dans les méandres de la filmographie douteuse où il signera PSYCHOSE 2 et le miteux F/X 2. Sa disparition dans les dédales de la production télévisuelle devait malheureusement coïncider avec la disparition en règle de ses œuvres de gloire qui restaient jusqu'à présent plutôt difficiles à trouver.
La vision de PATRICK risque donc d'être une découverte pour beaucoup de jeunes amateurs de fantastique. Bien que l'âge assez avancé du film se fasse de nos jours pas mal ressentir, ce dernier reste malgré tout un très bon moment. La première réussite du film vient de son scénario, ne succombant à aucune facilité malgré des emprunts évidents. Impossible en effet en regardant PATRICK de ne pas penser à THE MEDUSA TOUCH(alias LA GRANDE MENACE) réalisé à peu près en même temps où un Richard Burton dans le coma provoquait de multiples catastrophes via des pouvoirs télékinésiques. Si le "pitch" des deux films est presque identique, la direction qu'empruntent les métrages est par contre totalement opposée. THE MEDUSA TOUCH joue la carte de l'enquête policière avec un léger zeste de fantastique en forme de cliffhanger, tandis que PATRICK s'ancre totalement dans un univers de genre consolidé néanmoins par des personnages parfaitement dépeints dans le quotidien.
Cette volonté de réalisme dans PATRICK est à la fois une force et une faiblesse. Bien dosée, elle donne un cadre très adulte au film décuplant du même coup les (rares) manifestations télékinésiques du personnage. Cependant, il faut bien avouer que cette volonté de replacer chaque personnage à l'intérieur d'un contexte précis (avec ses propres enjeux) éparpille facilement le film et crée un patinage de l'intrigue un peu gênant. En effet, si le personnage de l'infirmière héroïne du film s'avère parfaitement creusé, on se serait néanmoins passé de l'intégralité de ses doutes conjugaux, volubilités qui entretiennent près de la moitié du film.
Passée cette réserve, PATRICK se montre souvent très brillant. Doté d'une ambiance lourde dès que le film se resserre sur l'hôpital, il devient même passionnant dès qu'il met en scène l'héroïne et le Patrick du titre. Très vite, une étrange communication va se créer entre les deux êtres, dans une variation fantastique de JOHNNY GOT HIS GUN de Dalton Trumbo. Ces moments sont de loin les plus réussis du film parce qu'ils nous donnent à percer lentement le secret du jeune homme. Bien entendu, les révélations exploseront dans un final ambigu et ultra tendu, malheureusement un poil gâché par un plan final absurde et pourtant tellement typique de son époque. A noter à ce propos que si le film reste artificiellement ouvert, il n'y aura évidemment pas de suite réalisée… excepté un piratage transalpin totalement illégitime, PATRICK VIVE ANCORA, dont la pénible existence ne doit qu'à une loi des plus discutables sur le copyright en Italie.
PATRICK est le premier DVD issu d'une collection d'anthologie de la série B distribuée en presse à petit prix. Si jusqu'ici les rayons de notre marchand de journaux s'encombraient jusqu'à plus soif de galettes numériques aussi diverses que (a)variées, cette collection fait office d'exception puisqu'elle est chapotée par l'équipe de Mad Movies et donc incluse avec ce magazine. Pour un tout à moins de dix euros, la collection nous propose donc de nous (re)pencher sur une bonne tranche de fantastique malencontreusement oubliée.
Compte tenu de sa commercialisation en kiosque et à tout petit prix, on ne s'attend pas à être exigeant en enfournant le DVD de PATRICK dans son lecteur. C'est pourtant une succession de bonnes surprises qui nous attend. Première bonne nouvelle, le film est au format. Si la copie du film se montre d'étonnante bonne qualité, on remarquera juste de légers fourmillements de compression dans les arrière plans. Rien de regrettable cependant. Deuxième bonne nouvelle, le film nous est proposé en version française et en version originale. Si les habitués du support ont depuis longtemps passé le stade de l'admiration béate de pouvoir voir un film en version originale ou en version française, il faut bien avouer que cette option est de moins en moins développée chez les petits prix. Le son est un mono de très bonne facture, quelle que soit la piste. A noter juste que le film sera différent selon la version que vous enclencherez (la version originale correspond à la version australienne intégrale, plus longue de quelques minutes de dialogues). Question bonus, juste la bande-annonce nous est proposée. On ne s'en sentira pourtant pas frustré dans la mesure où nous n'en attendions déjà pas tant d'une telle édition.
Classique du cinéma fantastique australien et série B adulte parfaitement rodée, c'est avec joie que nous retrouvons ce PATRICK oublié sur les bords de l'autoroute de la production fantastique. La surprise est d'autant plus grande que les retrouvailles se font par le truchement d'une édition à tout petit prix, mais qui se paye néanmoins le luxe d'être d'une qualité très honorable. L'adhésion est donc totale et c'est désormais avec impatience que nous attendrons les autres titres de la collection.