En l'an 2000 (à l'époque du film, c'était le futur), le sport numéro 1 aux Etats-Unis est une course automobile hyper extrême. Non seulement les coureurs devront arriver premiers sur un circuit libre reliant New York et Los Angeles, mais ils devront aussi accumuler un certain nombre de points bonus pour finir vainqueur. Comment collecter ces précieux points ? Et bien tout simplement en écrasant au passage le maximum de piétons via un barème très précis (une femme vaut plus qu'un homme, sachant que l'enfant compte double et que le jackpot reste le p'tit vieux). Qui arrivera vainqueur ? L'énigmatique Frankenstein (David Carradine, plus du tout zen), le méchant Machine Gun Joe (un tout jeune Sylvester Stallone), Calamity Jane (Mary Woronov, ancienne égérie Warholienne), ou bien encore la féroce Mathilda The Hun.
Avec DEATH RACE 2000, datant de 1975, nous sommes en plein âge d'or de l'exploitation à tout petit budget de la boîte de production de Roger Corman (New World de son petit nom). Pour ceux qui viendraient d'arriver, les usines Corman ont lancé un nombre incroyable de grands noms dans son catalogue de B-movies allant de la SF psyché-gore en passant par des péloches d'action-fesse de prisons pour femmes. Jack Nicholson, Martin Scorsese, Robert De Niro, Joe Dante, Ron Howard (celui-là, on aurait dû le laisser dans HAPPY DAYS)… Bref, que du beau monde à l'image de James Cameron, qui débuta comme chef décorateur dans le fauché LA GALAXIE DE LA TERREUR en collant des boîtes de Big Mac argentées sur les murs, nous faisait ainsi croire à un intérieur de vaisseau spatial (méthode qu'il ne réutilisera pas pour TITANIC).
Si DEATH RACE 2000 est connu comme le meilleur cru de ce catalogue made in Roger, qu'en est-il du film aujourd'hui ? Il a vieilli, c'est sûr, mais plutôt bien. La principale raison vient de son pitch, qui de nos jours n'a pas trouvé d'équivalent dans la violence gratuitement cartoon saupoudrée d'humour noir. Quel régal de voir les différents coureurs chasser le badaud avec tous les ressorts narratifs que l'on peut imaginer : les supporters se dressent sur la route pour encourager leur favori, on bricole des pièges aux concurrents, Machine Gun Joe gratte même quelques points en écrasant son stand et ses techniciens une fois les révisions finies. La scène la plus célèbre de ce gros délire culte étant bien sûr le moment où un troupeau d'infirmières s'amuse à poster au milieu de la route tous les petits vieux de l'hospice afin que Frankenstein puisse faire un méga score. On n'en dira ici pas plus sur l'issue de cette scène !
Outre ses séquences trasho-fun de poursuites à la "Fous du Volant", DEATH RACE 2000 nous plonge dans un futur caricatural d'Amérique fascisante en lutte contre des hippies anarchiques. Un peu comme du Carpenter mais en plus gentillet quand même. Le mérite de ce sous-texte politico-anar revient bien entendu au réalisateur Paul Bartel, passé à la postérité culte grâce à ce film mais aussi avec les très déjantés EATING RAOUL (une comédie noire cannibale) et LUST IN THE DUST (un western fou avec le travesti obèse Divine, égérie de John Waters). La télévision en prend aussi pour son grade, avec son présentateur tout en paillettes prêt à tout pour gratifier l'audimat d'images ultra violentes (soit une peinture assez juste de ce que nous connaissons maintenant).
Bien sur, tout n'est pas génial dans ce DEATH RACE 2000. Le rythme du film est souvent patinant lorsque le scénario s'écarte de la course, et certaines scènes apparaissent maladroites suite à un manque de temps évident au tournage. Les effets spéciaux sont plutôt rustiques et l'on a bien du mal à se figurer le futurisme du film tant la course prend pour cadre les routes les plus rurales du pays. Enfin, exploitation oblige, le film verse dans un érotisme timide et mou de la fesse des plus dispensables. Mais, plus que des défauts, ce sont plutôt des maladresses de jeunesse qui ne parasitent pas plus que ça l'énergie conviviale de DEATH RACE 2000.
Sorti une première fois dans les salles françaises sous le titre LA COURSE A LA MORT EN L'AN 2000, lorsque Sylvester Stallone commença à devenir le champion du Box Office (en accumulant les Rocky et Rambo), un distributeur eut l'idée de ressortir le film. Au passage, on l'affubla du titre LES SEIGNEURS DE LA ROUTE qui accompagna le métrage lors des débuts de la vidéo.
On notera aussi que l'histoire originale est d'un certain Ib Melchior qui s'avère être un petit artisan de la science-fiction cinématographique, puisqu'on lui doit la réalisation de THE ANGRY RED PLANET ou une participation à l'écriture de pas mal de films du genre (LA PLANETE DES VAMPIRES, REPTILICUS...).
Dans le genre gros délire culte des seventies où les idées folles compensent les petits moyens, DEATH RACE 2000 se pose définitivement là. Ne serait-ce que pour retrouver un Stallone tout jeunot, admirer les débuts du chef-opérateur Tak Fujimoto (devenu entre temps le collaborateur attitré de Jonathan Demme ou M. Night Shyamalam), ou bien goûter au pitch fondateur du jeu vidéo moderne (l'influence la plus flagrante se trouvant dans la série de jeux "Carmageddon"), vous vous devez de voir (ou revoir) DEATH RACE 2000. Et dire que le passable Paul Anderson (responsable récemment d'un très bof RESIDENT EVIL) projette d'en faire un remake avec Tom Cruise en vedette. Aïe ! (Depuis, le film a bien été réalisé mais cet acteur)
D'un point de vue technique, le DVD est de bonne tenue sans faire trop d'étincelles. Le film est présenté plein cadre avec une image conservant son lot de petites poussières de pellicule. La vision n'en est pas vraiment perturbée dans la mesure où c'est de loin la meilleure image vidéo que l'on ait jamais vue pour ce film. Côté son, le mixage d'origine à été dépoussiéré pour un rendu très convenable. En guise de suppléments, nous avons droit à des filmos, une courte interview de Roger Corman par le critique Leonard Maltin (complice de Peter Jackson dans le formidable FORGOTTEN SILVER), ainsi que des bandes annonces des productions New Horizons dispos en DVD (EAT MY DUST, BIG BAD MAMA, THE BIG DOLL HOUSE, et GRAND THEFT AUTO). En ultime bonus est inséré un livret informatif de huit pages sur Corman et ses productions majeures.