Charles Lee Ray, un serial killer notoire, est poursuivi par la police
et trouve refuge dans un magasin de jouets. Grièvement blessé, il transmet
son âme à une poupée, suivant un rituel vaudou qu'il a appris d'un Mandala
de ses amis. Le lendemain, un petit garçon, Larry, fête son anniversaire
et demande à sa mère une poupée Good Guy, la nouvelle coqueluche des
enfants. Sa mère, malgré ses maigres moyens, réussit à lui offrir la
poupée, qu'elle achète à un clochard.
JEU D'ENFANT marque les débuts d'une série de quatre films dont la poupée maléfique sera l'héroïne détestable, le dernier opus en date étant LA FIANCEE DE CHUCKY. C'est probablement, la première fois qu'un jouet est détourné de son usage pour devenir un instrument de mort au cinéma. Et quel instrument ! Le Good Guy, sensé être l'ami des enfants, prend tous les travers de l'assassin, sa vulgarité, sa méchanceté, mais aussi son désir de vengeance. Par ailleurs, Chucky est horriblement rancunier, et n'hésite pas tuer au moindre prétexte. Il le prouve dès les premières heures qu'il passe dans le corps de la poupée, en assassinant sauvagement une charmante jeune femme, seulement parce qu'elle a éteint le poste de télé !
Quel plaisir de voir un film
qui désacralise le jouet en le dotant d'une âme pourrie ! Le propos
du film est audacieux et le succès de ce premier film ne s'est pas démenti
depuis sa sortie. Le jouet est en effet conçu pour être
l'image en positif de la réalité et sert souvent de substitut à l'affection
et à l'attention des parents, notamment les peluches et les poupées.
Dans les magasins de jouets, ces dernières étaient jusqu'à
il n'y a pas si longtemps affligeantes de mièvrerie et surtout tristement
irréalistes. Depuis quelques années seulement, les designers
ont compris qu'il fallait être plus réalistes en termes
de conception. L'exemple le plus connu est Barbie, qui a fait la fortune
de Mattel. La perfection absolue, tant physique que sociale : elle a
plein d'amis, une vie merveilleusement organisée, une maison à l'avenant,
un cheval nacré, un chien parfaitement toiletté... Bref, c'est LA femme
idéale. Enfin... Disons qu'elle représente l'idéal de l'américaine moyenne,
sans vouloir critiquer nos amies d'outre-atlantique. Des comités
se sont même créés pour obliger la société
Mattel à faire de sa "poupée-manequin" (comme
on l'appelait dans mes jeunes années !) une "poupée-madame
tout-le-monde". La poupée Good Guy est tout le contraire de ce
bel exemple : d'abord, elle est horriblement fagotée, et puis elle est
vraiment hideuse, franchement ! Et puis cette coiffure ! Qui oserait
coiffer son petit garçon comme ça ? Ce qui est très fort, c'est qu'elle
est présentée comme " l'ami pour la vie " des enfants, par la publicité
et tout le marketing qu'on voit dans le film. Les enfants, d'ailleurs,
ne s'y trompent pas, puisqu'ils l'adorent. Peut-être parce qu'ils ne
sont pas dupes, ils sont séduits par cette poupée d'un
nouveau genre. Eux, il savent que la "vraie vie", ce n'est pas Barbie.
Ils ont compris que la vie est faite de gens de toutes les couleurs,
de toutes les formes, de beaux, mais aussi de moches, ou encore de ni
beaux ni moches, en tous cas, que la perfection, ça n'existe que dans
l'imagination des adultes.
L'humour du scénario, s'il est noir, n'en reste pas moins croustillant, délicieusement acéré, semblable à la lame de couteau que l'horrible poupée utilise dans la scène finale. Les adultes sont incrédules, seul l'enfant réalise que la poupée est coupable du premier meurtre. Les médecins n'hésitent pas à qualifier Larry de fou et à l'enfermer dans une chambre d'hôpital qui ferait pâlir une cellule d'Alcatraz. L'enfant, grâce à son imagination et surtout à la pureté de son esprit est capable de voir au delà de ce qu'on a défini comme étant des faits rationnels. Lui seul a encore cette belle naïveté qui fait de son univers un monde plein de possibilités, rationnelles ou pas. En grandissant, il réalisera que tout n'est pas si rose, tout en aquérant le sens des réalités. Dans JEU D'ENFANT, on constate qu'il faut parfois garder un peu de cette innocence qui nous permet de fuir notre ordinaire, de laisser un peu de place à notre imagination et surtout de ne pas vieillir trop vite.
Le DVD américain présentait le film en plein cadre alors que le disque français nous propose le format cinéma. La poupée tueuse ne sera pourtant pas récompensée cette fois-ci encore par un transfert parfait. Si l'image est bel et bien présentée dans son format d'origine (1.85), on a tout de même l'impression d'avoir entre les mains un vieux master. L'image est loin d'être sans reproche. Les contours sont donc peu précis et l'image assez terne. Dommage. Difficile de choisir entre les deux DVDs existants celui qui sera le plus satisfaisant.