Des éruptions volcaniques menacent de créer d’énormes catastrophes. Gamera y met un terme. Dans le même temps, les travaux de construction d’une autoroute sont interrompus en raison d’un événement étrange. La zone est bouclée mais la curiosité d’un journaliste précipite le réveil d’une créature ancienne nommée Gyaos. Dans ce troisième film de la saga Gamera, la tortue atomique s’opposera à l’affreux monstre pour sauver l’humanité.

GAMERA CONTRE BARUGON, le second opus, n’obtient pas le même succès que GAMERA. La Daiei produit tout de même un troisième film. Le budget est revu à la baisse et on demande à Noriaki Yuasa, réalisateur du premier film, de prendre la barre de GAMERA CONTRE GYAOS. On constatera qu’une nouvelle fois, le ton change par rapport à son prédécesseur. L’intrigue prend une dimension surprenante avec un affrontement entre des propriétaires terriens et les ouvriers d’un chantier. Le film démarre dans un contexte de conflit social local qui n’est finalement pas sans rappeler les ZAD en France. Mais ce que l’on pourrait prendre comme une défense du territoire est en réalité une petite machination des propriétaires locaux. Le blocage des travaux leur donne l’occasion de faire monter les enchères pour la vente de leurs terrains. Malheureusement, leur machination sera mise à mal par l’apparition d’un monstre géant.

En dehors de ce drame social, le film nous ramène un groupe de scientifiques, experts et militaires qui vont essayer de contrer l’énorme menace. Surtout que Gyaos a tendance à apprécier le sang humain. En contrepoint de tous ces angles de vue adulte, on trouve de nouveau la vision d’un enfant. Le film ne donne d’ailleurs pas une image très glorieuse des adultes. Ils sont, soit d’une grande cupidité, soit bien peu malins. C’est probablement le gros défaut de GAMERA CONTRE GYAOS. L’enfant se montre très souvent plus intelligent que les scientifiques, jusqu’à leur donner les solutions à leurs problèmes. Evidemment, cela flatte le jeune public mais cela donne surtout un côté assez infantile à l’ensemble. Soyons sympas, l’enfant présente ici une innocence naïve qui s’écarte des malversations adultes.

Notons qu’une nouvelle fois, comme dans le premier GAMERA, les monstres ont des attitudes ambivalentes. Gyaos va ainsi sauver l’enfant alors qu’on nous dira clairement qu’il a tendance à s’abreuver de sang humain. Pendant un court instant, on se demande s’il compte le garder comme en-cas pour plus tard. L’enfant finit sur le dos de Gamera. Cela donnera une scène de vol assez surprenante, du type L'HISTOIRE SANS FIN pendant laquelle l’enfant exalté «chevauchera» la tortue durant quelques minutes. La technique de vol de la tortue change pour éviter que son passager ne soit éjecté et ne meure, démontrant une bienveillance inhabituelle de la part de Gamera. Cela pose un problème de cohérence puisque jusqu’ici Gamera tournoyait sur elle-même à grande vitesse pour se déplacer dans les airs, comme le savent ceux qui ont vu les films précédents.

Le nouveau monstre se cache au début dans une grotte nimbée d’une lueur verte. Nous ne saurons jamais pourquoi. Ce sera l’occasion de visiter rapidement l’endroit grâce au survol d’une chauve-souris farceuse. On trouve une séquence similaire dans le second opus. Comme les monstres de cette série jusqu’alors, Gyaos est une créature qui n’est pas le fruit des expériences des hommes et donc du nucléaire. Elle ressemble à une sorte de chauve-souris rigide. Ses mouvements raides et disgracieux surprennent un peu. Le spectacle est tout de même assuré par son redoutable rayon. Il découpe avions, trains et voitures, donnant lieu à de sympathiques séquences de destruction. Mais lorsque le rayon atteint la chair de Gamera, cela provoque des flots sanguinolents. On retrouve ici cette propension à faire saigner les monstres, ce qui est assez étonnant dans l’optique d’un film pour enfant. Avec son avidité pour le sang et sa faiblesse face à la lumière diurne, Gyaos est clairement affilié au mythe des vampires. Rien de surprenant puisque le monstre se serait appelé Vampyra lors de la production, avant d’adopter le patronyme de Gyaos.

Pour éliminer Gyaos, un plan très étrange est mis sur pied. On ne peut que noter la similitude avec GAMERA. Dans les deux films, l’un des enjeux est d’amener un monstre sur une plateforme de manière à le piéger. Ici, il n’est pas question d’envoyer Gyaos dans l’espace mais de lui imposer une rotation extrême qui lui donnera le tournis (?) et l’empêchera de retourner à temps dans sa grotte pour se mettre à l’abri des rayons du soleil levant. Le stratagème est assez bizarre mais on nous raconte une histoire avec des monstres géants et, après tout, cela fait aussi le charme de cette série de films. Avec ce troisième opus, Gamera se pose en défenseur de notre planète. Le film se clôt d’ailleurs sur une chanson entraînante à la gloire de Gamera ! Il impose clairement la recette des films qui vont suivre. Ainsi, dès l’épisode suivant et dans la séquence d’ouverture, Gamera affronte un vaisseau extraterrestre belliqueux qui s’approche un peu trop près de notre planète, tout cela avant de s’intéresser à un camp de scouts empli d’enfants. Mais ça, c’est une autre histoire, celle de GAMERA VS VIRAS.
GAMERA CONTRE GYAOS sort en France au sein d’une boîte intitulée «Gamera – Les années Showa – Partie 1». Elle contient les trois premiers films de la saga : GAMERA, GAMERA CONTRE BARUGON et donc GAMERA CONTRE GYAOS. L’éditeur, Roboto Films, propose deux éditions distinctes : une en Blu-ray et l’autre en UHD 4K. L’éditeur nous a fait parvenir les trois disques UHD 4K dont celui que nous évoquons ici. En toute transparence, nous n’avons pas eu entre les mains le packaging. Il ne nous est donc pas possible de parler du livret de 60 pages qui est commercialisé avec les trois disques.

Les films de cette boîte ont été restaurés en 4K à l’occasion du 60ème anniversaire de GAMERA. Et il faut bien reconnaître que le boulot est bluffant. Particulièrement si on fait la comparaison directe avec les Blu-ray sortis il y a quelques années en Grande Bretagne chez Arrow Films. En repartant des négatifs originaux, la restauration donne une image magnifique qui fait la part belle aux couleurs d’époque. Le voile granuleux ainsi que les défauts de pellicule du disque anglais de GAMERA CONTRE GYAOS se sont envolés. Pour le son, il n’y a qu’une piste sonore en japonais sous-titrée en français. Malgré un mono d’origine, cette piste limite le son souvent criard des films anciens.

En bonus, on ne retrouve donc pas les suppléments de l’édition britannique. En lieu et place, l’éditeur a produit des vidéos d’introduction avec la participation de Fabien Mauro, l’auteur du très joli livre «Kaiju, Envahisseurs & Apocalypse : l’Age d’Or de la Science-fiction japonaise». On trouve aussi une petite discussion entre Shinji Higuchi et Shunichi Ogura qui ont supervisé les restaurations. Ils abordent les difficultés de ce type de travail. Ils s’amusent également d’une ligne de dialogue qui les a laissés perplexes en qualifiant de verts les rayons de Gyaos. En réalité, les rayons sont jaunes mais on imagine bien les questions que cela peut soulever au moment de restaurer le film. Enfin, l’éditeur propose une sélection de bandes-annonces et a le bon goût de ne pas avoir mis les mêmes vidéos sur chacun des disques : ROARING FIRE, «Daiei Kaidan», CRIME HUNTER et SAMURAI REINCARNATION.