Jean-Pierre Jeunet commence en tandem avec Marc Caro à la fin des années soixante-dix. Ces deux réalisateurs livrent notamment LE BUNKER DE LA DERNIÈRE RAFALE de 1981, un moyen-métrage au style visuel affirmé, se plaçant dans la veine d'une science-fiction punk digne de «Métal Hurlant». Ce beau succès d'estime ne leur suffit cependant pas pour passer tout de suite à un long-métrage.
Ils atteignent cette étape en 1991 avec DELICATESSEN. Mélange insolite de fantastique, de poésie et de bande dessinée, ce métrage connaît un grand succès en France et est déjà remarqué à l'étranger. Avec un budget supérieur, LA CITÉ DES ENFANTS PERDUS achève d'asseoir la popularité de ces duettistes dans les pays anglo-saxons.
ALIEN 3 de 1993 a connu une gestation compliquée et un accueil controversé. Mais il a tout de même rencontré un succès commercial honorable. Les films de monstres et d'effets spéciaux sont alors à la mode suite à des succès comme JURASSIC PARK ou INDEPENDENCE DAY. Le studio 20th Century Fox décide rapidement de remettre le couvert pour un quatrième volet de la saga ALIEN.
Il confie son écriture à Joss Whedon, jeune scénariste ayant déjà contribué au long-métrage BUFFY, TUEUSE DE VAMPIRES et au premier long-métrage Pixar TOY STORY. Les séries télévisées fantastiques sont alors en vogue, avec le succès d' «AUX FRONTIÈRES DU RÉEL». Joss Whedon met alors en route le feuilleton «BUFFY CONTRE LES VAMPIRES», inspiré de BUFFY, TUEUSE DE VAMPIRES, qui commence à être diffusé en 1997 et qui va être très populaire.
La réalisation d'ALIEN, LA RÉSURRECTION passe quant à elle entre plusieurs mains, en particulier dans celles de l'anglais Danny Boyle, très remarqué avec son second métrage TRAINSPOTTING. Mais il est finalement écarté, ce qui repousse le tournage.
Finalement, Jean-Pierre Jeunet, sans Marc Caro, accepte de réaliser ALIEN, LA RÉSURRECTION. Sigourney Weaver, la star d'ALIEN : LE HUITIÈME PASSAGER, avait accepté de tourner dans ALIEN 3 à la condition que son personnage Ripley y meurt. Mais elle revient quand même pour ce quatrième métrage, où elle se voit entourée d'acteurs chers à Jean-Pierre Jeunet. Comme le français Dominique Pinon ou Ron Perlman, tous deux présents dans LA CITÉ DES ENFANTS PERDUS. Nous rencontrons aussi des acteurs alors populaires comme Winona Ryder (BEETLEJUICE, BRAM STOKER'S DRACULA), Michael Wincott (THE CROW) ou Brad Dourif (DUNE, JEU D'ENFANT).
Après la mort de Ripley, une goutte de son sang, contaminé par un xénomorphe, est récupérée. À partir de cet échantillon, des scientifiques créent un clone de Ripley ainsi que des Aliens. Des mercenaires apportent des corps d'hommes cryogénisés à ces savants pour poursuivre leurs expériences inhumaines...
Pour ALIEN, LA RÉSURRECTION, Jeunet adapte le script soigneusement et sans faire d'histoire. Nous retrouvons les qualités plastiques de ses films précédents. La photographie de Darius Khondji (DELICATESSEN, SEVEN) est magnifique. Les décors, les costumes et les effets spéciaux sont très soignés. Les Aliens n'ont jamais été aussi beaux.
Sigourney Weaver est comme toujours irréprochable. Elle interprète son personnage mi-alien mi-femme avec une étonnante élégance reptilienne. Les meilleurs moments du film exploitent cette dualité et son attachement aux deux espèces antagonistes.
Malheureusement, ALIEN, LA RÉSURRECTION n'exploite pas suffisamment cette veine. La plupart du métrage suit un scénario incertain, ponctué de scènes d'actions bruyantes et vaines. Certains seconds rôles sont tenus par des acteurs médiocres tandis que nous subissons une musique fatigante. Des éléments devenus des clichés de la série nous sont resservis : l'androïde, l'accouchement par le thorax... Alors que leurs présences n'apportent rien à l'intrigue. L'accumulation de fusillades et le manque de rythme du récit nous lassent.
Surfant sur la mode alors vivace des progrès de la génétique, ALIEN, LA RÉSURRECTION ne justifie son existence qu'à partir d'arguments tirés par les cheveux (le clonage de Ripley ; ainsi que le monstre final, inutile et évoquant une surenchère gratuite). Ce quatrième volet frappe donc par son inutilité et sa superficialité. Il manque de personnalité et se contente d'inscrire la saga dans le flux des blockbusters d'action des années quatre-vingt-dix. Jean-Pierre Jeunet s'est contenté d'apporter son talent d'illustrateur sans chercher à faire bifurquer l'histoire vers une direction plus intéressante.
Comme ALIEN 3, ALIEN, LA RÉSURRECTION connaît un accueil critique mitigé. Si le film connaît un beau succès public en France, il n'en est pas de même aux USA où ses recettes s'avèrent trop justes. Bien que sa fin soit ouverte, annonçant même l'arrivée des Aliens sur Terre, la suite ainsi annoncée ne sera jamais tournée. A ce jour, ALIEN, LA RÉSURRECTION est le dernier métrage de la série interprété par Sigourney Weaver.
La saga se met donc en sommeil pour quelques années, avant de bifurquer avec ALIEN VS PREDATOR, métrage de Paul W.S. Anderson mélangeant de façon hasardeuse, mais néanmoins divertissante, les monstres d'ALIEN et de PREDATOR.