Header Critique : UNE NUIT EN ENFER (FROM DUSK TILL DAWN)

Critique du film
UNE NUIT EN ENFER 1996

FROM DUSK TILL DAWN 

Quentin Tarantino se fait remarquer avec sa première réalisation : le Film Noir RESERVOIR DOGS de 1992, dans lequel des malfaiteurs règlent leurs comptes après un braquage. Il impose ainsi son cinéma violent et nourri de références cinéphiles étalées sans complexe, lesquelles ratissent aussi bien le polar de Hong Kong que des classiques américains comme LES PIRATES DU MÉTRO. Il transforme le bon accueil de RESERVOIR DOGS deux ans plus tard, avec PULP FICTION, gros succès public et critique.

A la même époque, des métrages basés sur des scénarios écrits par Quentin Tarantino auparavant sortent en salles, eux aussi dans une veine Noire : TRUE ROMANCE de Tony Scott puis TUEURS-NÉS d'Oliver Stone. Mais il reste encore à transposer un autre scénario sur lequel il a travaillé : UNE NUIT EN ENFER.

Il s'agit à la base d'un projet porté par Robert Kurtzman, un des trois fondateurs du collectif KNB, maquilleurs spécialisés dans les effets spéciaux. Avec UNE NUIT EN ENFER, il compte produire un métrage horrifique permettant d'étaler tout le savoir-faire de KNB en la matière. Il rédige une histoire que Quentin Tarantino développe ensuite en un scénario complet. Le projet ne trouve pas preneur au début des années quatre-vingt-dix. Mais avec le succès de PULP FICTION, la roue tourne et tout projet portant la signature de Quentin Tarantino attire l'intérêt.

UNE NUIT EN ENFER repart donc, bien que Quentin Tarantino ne souhaite pas le réaliser, affirmant ne pas se sentir à l'aise avec l'ambiance latine du métrage, ou avec l'idée de réaliser un film d'horreur. Il confie la réalisation d'UNE NUIT EN ENFER à Robert Rodriguez, jeune réalisateur ayant émergé à la même période que lui et de façon assez similaire : d'abord avec le Film Noir à petit budget EL MARIACHI en 1992 ; puis avec DESPERADO, au sujet très proche, mais tourné dans un cadre hollywoodien plus professionnel.

Si Quentin Tarantino ne réalise pas UNE NUIT EN ENFER, il joue néanmoins de façon très convaincante le rôle de Richard Gecko, psychopathe notoire. A ses côtés, pour incarner son frère Seth Gecko, nous trouvons George Clooney, alors très populaire pour son rôle dans la série TV «URGENCES». UNE NUIT EN ENFER est une de ses premières tentatives pour transformer cette célébrité sur le grand écran du cinéma. Cette mue en Star du grand écran se concrétisera quelques années plus tard, au tournant des années 2000, avec des succès comme le film-catastrophe EN PLEINE TEMPÊTE ou le thriller OCEAN'S ELEVEN.

Nous remarquons aussi la présence de Harvey Keitel. Il a connu une remontée de sa popularité à cette période, dans des rôles de durs au sein de Films Noirs tels que BAD LIEUTENANT et RESERVOIR DOGS. Il est ici utilisé à contre-emploi (en pasteur pacifiste!), et il se montre toujours aussi brillant. Le rôle de Sex Machine est tenu par Tom Savini, maquilleur célèbre du cinéma Gore (ZOMBIE, VENDREDI 13), prédécesseur marquant de l'équipe KNB.

Les frères Gecko, deux gangsters en cavale, fuient vers le Mexique. Ils prennent en otage un pasteur et ses deux enfants. Après avoir passé la frontière, ces malfaiteurs se rendent dans une boîte de nuit où leur a été donné rendez-vous...

UNE NUIT EN ENFER commence comme un authentique film de gangster à la Tarantino, avec des dialogues soignés, des malfaiteurs névropathes et des acteurs bien dirigés. Le trio Clooney-Tarantino-Keitel fonctionne à merveille. Cette première partie est vraiment réussie, avec un bon suspense et un récit rigoureux et bien écrit. Elle est celle sur laquelle Quentin Tarantino s'est le plus investi, laissant les coudées franches à Robert Rodriguez pour la suite du métrage.

A partir du moment où les personnages arrivent au Mexique, UNE NUIT EN ENFER change en effet de ton. Nous passons dans un univers de BD beaucoup plus proche de DESPERADO que des films de Tarantino. Le personnage joué par le réalisateur perd de son importance à ce moment.

Nous arrivons dans un bordel mexicain, au décor baroque couvert de néons, qui n'est pas sans rappeler l'antre du sorcier des AVENTURES DE JACK BURTON DANS LES GRIFFES DU MANDARIN, version tex-mex ! Nous avons même le droit à un brin d'érotisme. UNE NUIT EN ENFER marche sur les traces des grands moments du cinéma gore que sont ZOMBIE ou BRAINDEAD  - ce dernier film ayant d'ailleurs été visionné par Robert Rodriguez avant le tournage d'UNE NUIT EN ENFER, sur la recommandation de Robert Kurtzman. Néanmoins, UNE NUIT EN ENFER n'est pas un films de zombies comme les deux titres précités, mais bien un film de vampires, genre revenu en grâce avec les succès alors récents de BRAM STOKER'S DRACULA et d'ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE.

Dans UNE NUIT EN ENFER, on décapite et on empale à tour de bras. Malheureusement, la quantité a été préférée à la qualité. Les maquillages sont moyens et l'utilisation abondante de morphings aujourd'hui démodés parait discutable. La mise en scène sombre dans le foutoir et l'attention du spectateur se relâche.

Évidemment, comme dans tous les films marqués par Tarantino, les références à d'autres réalisateurs abondent (John Carpenter, George Romero, Terence Fisher, Kathryn Bigelow). Les morceaux de rock sélectionnés sont excellents (The Mavericks, ZZ Top).

Malgré une fin confuse, UNE NUIT EN ENFER se laisse regarder sans déplaisir, et tout le début est vraiment excellent. On ne s'y ennuie pas une seconde, et les acteurs sont vraiment bons.

UNE NUIT EN ENFER connaît un succès très honorable et va engendrer deux suites sympathiques : UNE NUIT EN ENFER 2 : LE PRIX DU SANG de Scott Spiegel, toujours à mi-chemin du polar et de l'horreur ; et UNE NUIT EN ENFER 3 : LA FILLE DU BOURREAU de P.J. Pesce, qui mêle épouvante et western. Ces deux titres à petit budget sont produits pour le seul marché de la vidéo. Le film sera aussi adapté pour le petit écran sous la forme d'une série télévisée en 2014.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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