Lors d’un jeu de cache cache, une jeune enfant se trouve précipitée depuis le haut d’un immeuble abandonné. Ses camarades décident de se taire et la laissent morte. Six années après, lors du bal de fin d’année du Lycée d’Hamilton High, une série d’assassinats ont lieu, visiblement liés à l’événement tragique.
Avec le succès surprise d’HALLOWEEN, LA NUIT DES MASQUES, beaucoup de producteurs et distributeurs nord-américains virent un nouvel eldorado de revenus à bas couts: le slasher (qui ne portait pas encore cette dénomination à l’époque). Paramount fut le premier à dégainer véritablement avec VENDREDI 13 mais de manière assez curieuse, ce sont surtout les canadiens qui firent leur trou avec le genre. En effet, un système d’abattement fiscal développé par le gouvernement canadien fit en sorte que beaucoup de tournages de films d’horreurs/d’épouvante eut lieu sur leur territoire. Par des cinéastes et acteurs locaux, mais avec la promesse d’attirer des têtes d’affiches américaines pour les distributions mondiales. Et donc, une tripotée de slashers virent le jour sous cet angle juteux de coûts minimes et de rentrées d’argent faciles.
PROM NIGHT, ou donc LE BAL DE L'HORREUR eut le fin nez de se trouver au début de cette vague courant 1980. Car elle se termina aussi rapidement qu’elle démarra, les insuccès répétés fin 1981 et début 1982 la diriger droit vers les sorties DTV - jusqu’à sa résurrection avec SCREAM en 1996. LE BAL DE L'HORREUR eut un succès très modéré, bien que rentable, lors de sa sortie US et canadienne sur à peine 195 copies. Mais il prouva néanmoins de la robustesse de ce type de produit - faible cout initial, compétitif dans un marché surchargé et au final, au revenu par copie supérieur à beaucoup de ses congénères. C’est en cela que le film reste une pierre blanche dans l’économie du slasher et sa longévité au début des années 80. Le slasher reste, ironiquement et en considérant aussi BLACK CHRISTMAS/UN NOEL TRAGIQUE, une tradition plus canadienne qu’américaine!
Son impact fut cependant très minime lors de son exploitation française avec à peine 78 647 entrées cumulées sur 5 ans. Le genre n’eut pas du tout la même trajectoire publique en France, ou hormis les amateurs de film d’horreur, le succès ne se transforma pas au-delà, aujourd’hui encore. Sa notoriété n’apparut que tardivement lors de sa sortie en VHS. il bénéficia même d’un douloureux remake en 2007 qui reste très probablement parmi les 10 plus mauvais films jamais réalisés ces 50 dernières années. Une honte totale.
Justice fut rendue à l’original par la sortie d’un Blu Ray US chez Synapse Films avec une solide édition. Et il s’agit désormais du tour de la France, avec Rimini Editions qui sort un triptyque Blu Ray/DVD/livret ce mois de septembre 2019.
Le distributeur américain eut l’idée de promouvoir le film sur un marché typiquement féminin. Appuyant énormément sa campagne de publicité sur l’aspect disco comme en témoigne aussi le premier logo du film, qui fut abandonné au profit de celui que nous connaissons désormais. Le Disco, une mode biodégradable qui marqua cependant les teenagers avec le succès inépendant surprise de (mais oui) ROLLER BOOGIE, entre autres. Mais qui rebuta par ailleurs les majors US qui n’achetèrent pas le film, préférant faire les deals canadiens sur des films plus axés violence comme MEURTRES A LA SAINT VALENTIN (Paramount) ou LE MONSTRE DU TRAIN (20th Century Fox), avec tous un certain malheur. Le distributeur français ne posséda pas cette finesse d’esprit, lançant LE BAL DE L'HORREUR comme un post-VENDREDI 13 (voir la première affiche, hache comprise), ce qui eut l’effet inverse. Maintenant, que reste-t-il du film, hormis son importance purement économique?
Cela démarre par un reflet dans un morceau de vitre, se poursuit par un jeu de tueur caché pour se transforme en accident… meurtre déguisé? A contrario de beaucoup de ses successeurs, le film pose les bases d’un jeu sur les apparences. un secret à ne pas divulguer - mécanique scénaristique qui sera très souvent reprise, de THE HOUSE ON SORORITY ROW (et son remake SOEURS DE SANG) en passant par SOUVIENS TOI... L'ETE DERNIER. Un élément assez rare par ailleurs, puisque cela démarre par la mort d’un enfant. Généralement un gros tabou dans le cinéma US… mais nous sommes ici au Canada. Les règles se tordent quelque peu plus quant à la représentation de la mort.
Un montage assez expert sur la construction de l’articulation du suspense sur les premières vingt minutes. Musique de suspense, gros plans sur le crayon de papier d’un mystérieux personnage appelant les 4 jeunes ayant été à la base de la mort de la jeune fille. Là où il commence à digresser: le maniaque en liberté qui indique clairement que les auteurs changent leurs fusils d’épaule pour marcher sur les plates-bandes d’HALLOWEEN, LA NUIT DES MASQUES. Pas franchement la meilleure décision qui soit, mais cela ajoute aux fausses pistes sur lesquelles le suspense va se baser. Puis le sujet va puiser dans CARRIE AU BAL DU DIABLE sur les mauvaises blagues à jouer… et bien sûr LA FIEVRE DU SAMEDI SOIR pour le côté Disco très appuyé. Lynch ne manque d’ailleurs pas de métier, avec des travellings circulaires autour du couple vedette - Jamie Lee Curtis démontrant ses immanquables talents de danseuse hors pair. Il y avait suffisamment d’argent pour exploiter une dolly!
Là provient très probablement d’ailleurs un des grands malentendus du film - et qui déplut beaucoup à une certaine majorité d’amateurs de slashers. Le film a été construit et monté à destination d’abord d’un public féminin adolescent. Ce qu’avait parfaitement compris le distributeur Avco Embassy, qui avait malgré tout objecté au manque de sang. Fatalement, l’absence de gore, la direction très dance à la moitié du film et la lente description des préparatifs du bal pour chacun des protagonistes… celui qui n’a pas son quota de meurtres immédiat procède à un rejet du film. Exactement ce qu’il s’est passé, ce qui n’aura pas manqué de provoquer beaucoup de sévérité quant à la postérité du film pour les amateurs de films de genre. D’où aussi cette perception très candide de la sexualité bourgeonnante - où l’on retrouvera par ailleurs un désenchantement « post-coïtum, animal triste is » similaire via la scène avec Elizabeth Daily dans VALLEY GIRL 3 ans après. Une vision de la beauté souillée et trahie dans le teen movie du début des années 80, un élément qui n’aura quasiment jamais sa présence dans notre cinéma.
Paul Lynch et son scénariste optent pour une sexualisation plus précise de leurs sujets féminins. Jamie Lee Curtis révèle plus clairement son décolleté, tout comme ses comparses. A défaut d’être original, le réalisateur demeure inventif sur les points de vue de la caméra, les perspectives créant des points de fuite à l’écran. Grâce à une partition musicale aiguë, atmosphérique, une jolie ambiance d’oppression se dessine, sans céder aux sirènes des jump scares et autres objets surgissant de n’importe où - voire les habituels animaux. Ceci repose plus sur l’architecture du lieu, la notion d’enfermement - lié à l’événement du début du film. L’expulsion du corps de l’enfant de l’immeuble abandonné du film, d’où elle ne semble pouvoir s’échapper à l‘agressivité des autres se répond en miroir par la scène du bal. Où chacun est enfermé par le tueur qui sortira lui aussi expulsé par sa blessure via une héroïne combattive. Une certaine logique de mise en scène se dégage ainsi de l’ensemble. Une certaine idée du deuil qui se prolonge, à l’heure où les films représentant la mort à l’écran ne montraient guère d’impact sur les survivants après coup. Tout comme la destinée du tueur provoque in fine une forme d’empathie de la part du spectateur - ce que ne manquera pas de provoquer aussi quelques suiveurs du genre (genre Cropsy dans CARNAGE, par exemple).
Et Paul Lynch d’appuyer de manière quasi permanente sur la notion de renvoi de l’image. Miroirs obsédants, habits qui se correspondent, obsession de la perfection à renvoyer à l’autre comme image de soi. D’ailleurs, les plus perspicaces auront tôt fait de deviner l’identité du tueur dès les 5 premières minutes, le costumier ne laissant guère de doute! La brillante traque aux 3/4 du film à travers les classes vides, où toutes les pièces se trouvent aspergées de rouge. Qu’il s’agisse de la robe de l’héroïne et de sa Nemesis (qui appelle le sang à verser), ou le décor du garage. Tout transpire ce double du miroir qui se rebelle. Une mise en scène plus fine - laissant en léger fond sonore la bande-son disco de la fête qui se déroule, une chanson très ironique « Love me til i die »! Aucune musique de suspense, quelque chose de plus brut se dégage. En fait, malgré ses personnages qui disparaissent sans crier gare (entre autres Leslie Nielsen, dont l’image de suspect a été finalement expurgée), ses emprunts grossiers à d’autres films et de pomper allègrement HALLOWEEN sous certains aspects, ses fausses pistes mal raccrochées… LE BAL DE L'HORREUR s’avère bien moins anodin que suspecté - et largement mieux mis en image que ses congénères. De manière assez surprenante si l’on sait prendre du recul.
Rimini a concocté pour cette sortie un boitier-fourreau révélant un triptyque contenant le Blu ray, le DVD et un soufflet avec le livret de 24 pages. Le film est présenté au format 1.78:1 (format d’origine 1.85:1), sur un BD 50, en 1080p / MPEG4-AVC (et un DVD 9 pour le second disque présent).
Contrairement à ce qu’indique la jaquette verso, le film dure 93mn05 sur le Blu Ray - en enlevant le prégénérique FilmRise qui détient actuellement les droits, le long-métrage fait une durée complète de 92mn56 (et 89mn12 pour le DVD). Un menu animé ouvre les hostilités, permettant un choix du film, de la version sonore, des sous-titres (non forcés), les chapitres (en 10 morceaux distincts, on aime) et les suppléments. Le petit plus: la sélection des pistes sonores peut s'effectuer depuis la télécommande - en effet, on voit assez souvent hélas une impossibilité de changer de piste, avec obligation de repasser par le menu principal. Pas le cas ici, heureusement. Un seul petit regret : impossible d'actionner la fonction "pop up". Donc retour à la case menu pour changer de navigation dans les supplements, par exemple.
Visuellement, la copie délivrée repsecte le travail photographique plutôt lumineux et naturel dans la première partie, choisie par le réalisateur et son directeur photo Robert New (EXTRA-SANGSUES) - qui change radicalement avec les couleurs très disco de la seconde. On a droit à de très belles couleurs qui ne saturent pas, un équilibre entre les couleurs complémentaires (les verts de la tenue d'Anne-Marie Martin et les rouges de Jamie Lee Curtis et Antoinette Bower ou encore des casiers des lycéens). Une certaine vivacité dans les néons multicolores et une précision des détails complètent l'ensemble qui sait globalement respecter le grain initial et les couleurs de peaux restant naturelles elles aussi. Du beau travail.
Concernant le son, on dénombre trois pistes audio: française DTS HD MA 2.0 et anglaise non compressée avec deux mixages également DTS HD MA 2.0 et un 5.1, bien que le film fut enregistré en mono d’origine. Le tout avec des sous-titres français optionnels.
Une VF plus étouffée que ses consoeurs anglophones qui plaira aux francophiles et amateurs de doublage. Avec des effets sonores bien moins proéminents, certains absents du doublage français. Avec un léger souffle persistant. Rien de bien gênant en soi, mais comparée à la qualité de la piste originale anglaise, il n’y a pas photo pour l’audiophile convaincu.
La piste 5.1 a été remixée pour donner plus d’ampleur à la bande sonore. Une collection de chansons Disco composées ad hoc (et un Vynil sorti à la hâte!), tout comme la très belle et atmosphérique co-composition du grand Paul Zaza. Un musicien pas suffisamment célébré par ailleurs, et pourtant essentiel aux genres que nous apprécions. La piste 5.1 spatialise de manière parfois curieuse les éléments. Les dialogues apparaissent plutôt sur le canal central et la musique/effets redirigés vers les canaux droit/gauche et arrière. Le caisson de basse ne semble pas trop sollicité cependant, hormis lors des scènes de danse. La piste 2.0, elle, semble certes plus brute mais proche de l'enregistrement initial (même si monaural à la base). les dialogues sont eux bien sur les canaux gauche et droit de manière unilatérale. Ce mixage fait plus que le job. Clair, sans souffle, précis dans les dialogues, des éléments d’atmosphères et bruitages qui ne prennent pas le pas sur le langage. Pas de distorsion notable: une belle réussite. Ce que les puristes préféreront à un mixage 5.1 certes alerte, mais moins percutant.
Suppléments: : LE BAL DE L'HORREUR était sorti en 2014 aux USA chez Synapse et bardé de très bons suppléments. Rimini a décidé d’en prendre une grosse partie pour les spectateurs français. Il est à noter que le DVD ne contient que trois bonus (making of, interview et film annonce), alors que le Blu Ray reprend quasiment tous les suppléments qui étaient déjà présents sur l’édition américaine. Je dis presque, car manque à l’appel les spots radios ainsi que le commentaire audio de Paul Lynch ainsi que du scénariste, pourtant très informatif. Avec un ajout cependant bienvenu de l'interview du scénariste, nommé DEATH AT THE DISCO, un joli morceau.
HORRORS OF HAMILTON HIGH est le making of : un documentaire d’une quarantaine de minute retrace l’histoire du film, de sa naissance, son tournage, les finesses pétomanes de Leslie Nielsen et sa transformation au gré des 24 jours de tournage. Un exercice assez précieux, fun, jamais ironique, toujours respectueux du travail effectué. Mais lucide et faisant intervenir les principaux intéressés, derrière et devant la caméra.
Suivent les scènes rajoutées/enlevées pour la version TV du film. Le monteur de cette version, Michael McLaverty, explique les finesses avec lesquelles il a du jouer. Enlever certaines scènes (les douches, entre autres) et "rallonger la sauce" avec des scènes qui avaient été coupées au montage final pour obtenir une durée acceptable pour non seulement le distributeur mais également les stations TV. 6 scènes de dialogue en Vostf - détail à gauche de la critique, dans la partie "bonus"
Un étonnant moment avec les images du tournage sur un peu plus de 23 minutes - un précis l'obtention de l'effet désiré - du tournage jusqu'aux effets ajooutés en post production. (HD, muette avec musique du film en fond). Ensuite, une galerie de photos et éléments marketing, avec une piste sonore stéréophonique de chansons disco en fond (Dolby Digital 2.0 et HD). Puis de spots TV au format 1.33:1 et non remastérisés. Enfin, il reste à se mettre sous la dent le film annonce qui possède un élément plus qu'intéressant: les deux logos du film. le premier, clairement pensé pour cibler la population féminine branchée "disco", puis le second qui sera retenu pour son exploitation globale (1.78:1, HD bien meileure que sur l'édition américiane, mais en VO non sous-titrée) - ainsi qu'une démonstration de l'impact de la remastérisation : sur un même écran, l'expérience du matériel HD source à gauche et à droite, la copie finale retravaillée.
Le tout s’agrémente d’un livret de 24 pages écrit par Marc Toullec. Agréable à lire, mais plus informatif qu’autre chose, avec beaucoup de citations reprises de revues/livres existants (et cités comme source), il y a cependant quelques inexactitudes. Entre autres, indiquant le succès d'Avco/Embassy pour LE FAISEUR D'EPOUVANTE aux USA : qui fut très loin d’en être un, à peine 3.3 millions de $ de recettes. Tout comme la réception du film de Paul Lynch qui ne généra pas 15 millions de $ en recettes sur le continent nord-américain, mais seulement 6. Ceci dut à la mauvaise capacité du distributeur Avco-Embassy dans le timing de la sortie, où il envoya le film au casse-pipe dans un marché déjà bien encombré de produits destinés aux mêmes teenagers et amateurs de sensations fortes.
Après le bel effort sur la sortie de HAPPY BIRTHDAY : SOUHAITEZ NE JAMAIS ETRE INVITE, la réussite franche pour LE CONTINENT OUBLIE, Rimini poursuit sur de plus solides bases encore et offre avec LE BAL DE L'HORREUR un stade supérieur dans leur offre éditoriale. Il s'agit d'une nette amélioration par rapport à l'édition Synapse, que nous avons comparée pour l'occasion. On recommande fortement cette version Rimini!