Le seigneur des ténèbres envoie son plus horrible gobelin
pour tuer les licornes. Ceci fait, le monde sera plongé dans
une nuit perpétuelle. Pour approcher les licornes, faut-il encore
avoir un cur pur
Ridley Scott pensait déjà réaliser un conte de fées depuis longtemps lorsqu'il s'engagea sur LEGEND. Pour être exact, il avait déjà cette envie avant de réaliser son tout premier film, LES DUELLISTES. Cela ne se fait pas et le réalisateur met en boîte un film en costumes se déroulant en France. Après le succès de ALIEN, il essaie de se lancer dans une histoire de chevalerie. Peine perdue et il embraye sur BLADE RUNNER. Mais ce ne sera pas sans démarrer l'écriture de LEGEND qui se déroulera tout au long de la réalisation de BLADE RUNNER. Ce film n'est donc ni un caprice, ni un film de commande et encore moins l'envie de surfer sur une quelconque vague. Pourtant, Ridley Scott devra compter avec ses producteurs et les fameuses projections tests. Le film est jugé trop lent à se mettre en place, qu'à cela ne tienne, vingt minutes du film disparaissent et, à notre connaissance, elles ne sont jamais réapparues jusqu'à maintenant. Plus fort, le film sera exploité en différentes versions. Le public américain découvrira une version différente de celle des européens. Le montage change quelque peu entre les deux versions mais surtout la musique n'est pas la même. Les producteurs préfèrent remplacer la composition de Jerry Goldsmith par des musiques de Tangerine Dream. Rien à voir ! Deux versions différentes du film dont la version européenne sera considérée comme la plus approchante de l'esprit de la version voulue par Ridley Scott. Le DVD édité par la FOX en France, et un peu partout en Europe, est heureusement la version vue en salle dans nos contrées avec la musique de Jerry Goldsmith.
LEGEND n'est pas un film d'heroïc-fantasy. Ou alors ce qui l'approcherait de ce genre (le héros en armure ? les combats ?) est plutôt ténu pour être retenu en tant que tel. Il s'agit bel et bien d'un conte de fées dans le sens où l'héroïsme ne prime pas vraiment dans LEGEND. De plus, on retrouve tous les ingrédients des contes de notre enfance : une princesse, qui sera d'ailleurs réveillée par un baiser, des ogres dans leur cuisine, une sorte de fée, une sorcière, etc. C'était d'ailleurs le vu de Ridley Scott, c'est ainsi qu'il a tout fait pour l'orienter vers un film tout public. Pas question d'y intégrer des séquences trop horribles ou de décrire un univers dépressif. Le cinéaste ayant déjà largement exploré le terrain du film pour adulte dans ses précédentes réalisation, il voulait réellement se tourner vers un sujet plus léger.
A la première vision de LEGEND, ce qui frappe, ce sont les magnifiques paysages du film. On se laisse bercer par les images d'une grande beauté alors que tout a été réalisé entièrement en studio. En effet, pour les besoins du film, il aurait été inconcevable d'emmener toute une équipe de tournage dans une forêt à laquelle il aurait fallu faire des agencements inévitables. D'où l'idée d'investir tous les plateaux, ou presque, des studios Pinewood faisant partie des plus grands au monde. C'est dans ces studios anglais qu'ont été reconstitués la forêt, les cours d'eaux et tous les décors nécessaires (la maisonnette, les cuisines des ogres, le hall du seigneur des ténèbres ). Paradoxalement, en évitant les décors naturels, le film prend une aura magique. La forêt enchantée existe sans exister tout comme dans notre inconscient où l'on garde le souvenir de lieux féeriques. Un véritable tour de force magnifié par une mise en images ne lésinant par sur des dizaines d'artifices insufflant la vie aux décors (les papillons, les lucioles, les pétales virevoltant...). Dans le repaire du seigneur des ténèbres, les décors sont tout aussi travaillés. D'ailleurs certains éléments du mobilier nous rappellent LA BELLE ET LA BETE, autre conte de fées porté sur grand écran avec une grande inventivité visuelle. Il paraît d'ailleurs que lors de la préparation du film, Ridley Scott aurait montré LA BELLE ET LA BETE à différents membres de son équipe technique.
En plus d'être un spectacle visuel de tous les instants, LEGEND
n'oublie pas de raconter une histoire. Un peu simpliste, il est vrai
et ne comportant que bien peu de rebondissements. On pourrait la résumer
par un affrontement déjà vu et revu entre le bien et le
mal. Néanmoins, tout comme pour ses décors, les différents
personnages et créatures peuplant LEGEND sont parfaits.
Tom Cruise y campe
un jeune héros fragile juste avant de connaître le succès
planétaire de TOP GUN, réalisé par Tony
Scott (le frère de Ridley). Tout aussi excellente, Mia
Sara joue une princesse tentée par le mal. Sans forcer, simplement
Enfin, il y a le seigneur des ténèbres, le mal tentateur,
interprété par un Tim
Curry impérial et méconnaissable. Chacune des ses
apparitions est un grand moment en soi ! N'oublions pas non plus les
nombreux personnages gravitant autour de ce trio de Gump jusqu'à
Meg, l'espèce de sorcière du marais, ils sont tous crédibles
! C'est aussi en grande partie grâce aux maquillages de Rob
Bottin sans qui l'univers de LEGEND n'aurait pas été
aussi bigarré et magique.
En dehors de la bande-annonce, vous ne trouverez rien d'autre sur ce DVD. Une bande-annonce qui ne comporte même pas un sous-titrage. Puisqu'on en parle, les sous-titres français ont un léger défaut. Je passerai sur le fait que les gobelins ont été traduits par kobolds. Le véritable problème, si on peut l'appeler ainsi, vient du fait que les "ù" accentués apparaissent sous la forme d'un tiret ("_"). Au départ, cela surprend Ensuite, on fait avec ! A propos de la bande-annonce, il s'agit d'une version américaine. Le logo Universal ainsi que la mention de Tangerine Dream viennent en attester.
Soyons clairs, l'image n'est pas parfaite. Notre grief se porte sur une définition qui s'avère imparfaite. Nous avons vu pire, il y a toujours pire, mais un tel film aurait mérité une image claire et nette. Le spectacle et donc le plaisir aurait été total. Y'a t'il de quoi bouder notre plaisir ? Tout dépendra de votre matériel, de la taille de votre écran et de votre tolérance... De notre côté, nous avons tout de même pris un grand plaisir à revoir LEGEND sur un écran des plus conséquents.
La jaquette indique une bande sonore en simple stéréo. Pourtant, la bande-son anglaise est bel et bien en stéréo surround et peut être décodée grâce à un ampli ProLogic. Le rendu sonore gagne en profondeur et en ampleur même s'il faut bien avouer que nous sommes très loin du multicanaux type Dolby Digital 5.1. En plus de la musique et des ambiances générales, quelques effets directionnels se font sentir. Mais encore une fois, rien d'aussi saisissant qu'une bande sonore codée sur cinq canaux
Pour revenir sur les bonus, il est à noter que Universal prévoit de sortir LEGEND depuis très longtemps en DVD aux Etats-Unis dans une édition collector. Elle comporterait deux disques, contiendrait plusieurs montages du film dont le Director's Cut et un remix en Dolby Digital 5.1. Annoncé puis annulé Puis annoncé de nouveau, elle fait figure d'Arlésienne. Il semblerait qu'il y ait un problème concernant les droits de la musique de Jerry Goldsmith aux Etats-Unis. Ce problème semble réglé puisque cette édition américaine serait à présent prévue pour les mois à venir (deuxième semestre 2002).
Malgré une débauche
visuelle exceptionnelle, LEGEND ne fait jamais de l'esbroufe.
Il n'est jamais "too much". Non, c'est un conte de fées
juste comme on les a rêvés dans nos lectures de jeunesse.
Paradoxalement et ce malgré l'envie du réalisateur, LEGEND
est un film "merveilleux" qui s'adresse essentiellement aux
adultes rêveurs plutôt qu'aux enfants.