Trois jeunes complices de cambriolages décident de s'attaquer au magot d'un vétéran de la guerre d'Irak devenu aveugle. Leur destin va basculer le jour où ils s'introduisent par effraction dans la maison du vieil homme qui est bien décidé à ne pas se laisser importuner.

Detroit et sa gloire industrielle révolue semble inspirer les divers auteurs de films de genre. Après IT FOLLOWS, direction la plaie ouverte de la guerre d'Irak pour l'y accompagner. Alex, Money et Rocky sont trois amis qui tentent d'échapper à cette ville en déclin et son lot de fractures sociales, cela en commettant de petits cambriolages mais chacun pour des raisons différentes… mais pour au bout du compte changer de vie. Leur attention se porte sur la maison d'un vieil homme, ancien militaire devenu aveugle, lequel est censé cacher une très grosse somme d'argent. Ce qui permettrait à nos cambrioleurs en herbe de faire leur ultime et plus gros coup. Un argument relativement courant dans le film de genre. La chose paraît facile : ils ont les clés de la maison subtilisées au père d'Alex qui gère la société chargée de la surveillance de la maison. De plus le vieil aveugle vit dans un quartier délabré et abandonné de Détroit au milieu duquel sa grande et belle maison dépeint du reste du cadre. Enfin et le plus important : sa cécité, ce qui donne un avantage à notre équipe afin de réaliser leur coup vite fait bien fait. Or, ceci révèle une façade car la tâche ne va pas se révéler aussi aisée. Les difficultés s'accumulent pour entrer dans la maison, et une fois enfin rentrés le piège va se refermer littéralement sur eux. Celui que l'on pensait être la victime se révèle être un bourreau impitoyable, prêt à défendre coûte que coût son argent, sa vie, et son secret.

Si le teaser de DON'T BREATHE et le sous-titre Français trompeur «LA MAISON DES TENEBRES» laissaient présager une histoire basée sur le paranormal, vous pouvez passer votre chemin. Il s'agit d'un véritable thriller horrifique où le suspense et les retournements de situations vont crescendo. Bien évidemment, les connaisseurs penseront immédiatement aux nombreux thrillers impliquant des aveugles torturés par des voyants, de SEULE DANS LA NUIT en passant par TERREUR AVEUGLE.

Pour son second long métrage, Fede Alvarez quitte l'univers surnaturel et sanguinolent de sa version d'EVIL DEAD pour plonger dans un huit clos sous haute tension. Le choix est semble t-il délibéré car il avait été reproché au réalisateur de se focaliser uniquement sur les scènes d'horreur lors du remake du monument de Sam Raimi, que nous retrouvons ici en tant que producteur. Fede Alvarez s'entoure d'ailleurs de la même équipe que pour son précédent film, du co-scénariste Rodolfo Sayagues en passant par les producteurs Sam Raimi et Rob Tapert, ainsi que le compositeur Roque Banos.

Nous retrouvons également Jane Levy qui interprète ici le rôle de Rocky, la jeune cambrioleuse rebelle qui plus que quiconque a besoin de trouver l'argent afin de changer de vie. C'est d'ailleurs le personnage de Rocky et celui de Norman Nordstrom (le vieil aveugle) qui vont porter littéralement l'action du film. Les deux autres personnages secondaires du film Alex (Dylan Minnette) et Money (Daniel Zovatto) restent malheureusement très stéréotypés. On tombe facilement dans le cliché du méchant psychopathe qui en veut aux jeunes issus de conditions sociales difficiles. Le spectateur finit fatalement par vouloir que ces jeunes s'en sortent malgré leurs mauvaises intentions du départ.

Même si l'interprétation de Jane Levy alias Rocky demeure convaincante (enfin un rôle où une blonde ne passe pas son temps à hurler de terreur et à pleurer !), celui qui crève l'écran est Stephen Lang interprétant Norman Nordstrom. Loin du colonel Quaritch, le méchant très très méchant d'AVATAR (encore une fois un militaire), Stephen Lang campe ici un personnage très ambigu qui est à la fois violent, effrayant, imposant. Mais pour qui on éprouve finalement de la compassion car il révèle néanmoins des faiblesses, outre sa condition de non-voyant. Si on n'en connait pas la raison, la découverte de son secret justifie tous les efforts qu'il déploie pour faire de sa maison une vraie forteresse.

Cependant, ce qui fait la force de DON'T BREATHE reste sa mise en scène ultra soignée alliée à un solide scénario. Dès le début du film, on clairement ressent un malaise à la vue de ces maisons vides et délabrées de Détroit… jusqu'au moment où nos 3 cambrioleurs entrent dans la maison, s'y retrouvent enfermés alors qu'ils pensaient maîtriser la situation. On pense immédiatement au SOUS-SOL DE LA PEUR de Wes Craven, notamment lors de la découverte du sous-sol mais Fede Alvarez va emprunter un autre chemin. Le décor minimaliste, les lumières feutrées, ainsi que la caméra qui explore toutes les pièces dans les moindres recoins contribuent à augmenter ce malaise. Mais laissent également filtrer des détails au travers de plans subtilement placés. Les personnages évoluent ainsi dans la maison de manière très fluide, ce qui laisse au spectateur l'occasion de se projeter à l'intérieur. Cela renvoie à PANIC ROOM de David Fincher, auquel DON'T BREATHE est souvent comparé pour ses mouvements de caméra. La maison semble être un gigantesque labyrinthe où chaque porte dissimule un secret et où chaque mouvement se transforme en sursaut. Le tout agrémenté de la musique de Roque Banos qui intensifie les scènes de suspense, et renvoie à celle de… IT FOLLOWS.

Car le film est riche en rebondissements au fur et à mesure que la tension évolue. Norman Nordstrom bien que non-voyant reste avant tout un militaire doté d'une force surhumaine. Il connaît sa maison sur le bout des doigts, ce qui lui donne un avantage sur les intrus, alors que sa condition aurait dû favoriser ses adversaires. Fede Alvarez réussit d'ailleurs à nous ressentir à travers ce personnage les sens qu'il a réussit à décupler pour palier à sa cécité : il entend chaque bruit, possède un odorat développé, et bien entendu une intuition hors du commun. La scène du sous-sol est tout simplement époustouflante quand tous vont s'affronter à armes égales dans le noir, dans un dédale de couloirs et d'étagères.

Nonobstant certaines incohérences, le scénario sait ménager chaque rebondissement on se demande où tout cela va bien nous mener. Tout le monde se court après, s'évite et s'affronte dans cette immense maison… mais on ne sait pas si la courageuse Rocky va réussir à s'en sortir ou pas. Cela n'empêche pas le bon déroulement du film qui tient en haleine jusqu'au bout! Fede Alvarez avait déjà réussi à surprendre avec le remake d'EVIL DEAD et nous constatons maintenant qu'il est tout aussi à l'aise avec le thriller. DON'T BREATHE fait sursauter et grimper la tension, et même si les inévitables clichés continuent à être exploités, nous n'en tiendrons pas rigueur au réalisateur car le résultat vaut le détour. Cela change des films qui prennent le spectateur pour un benêt prêt à gober n'importe quelle idiotie cinématographique! Nous attendons la suite à présent, que Fede Alvarez continue à nous surprendre et à nous faire frissonner...

Rédacteur : Anne Barbier
22 critiques Film & Vidéo
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